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Présentation de la plateforme et de ses objectifs : Dire la complexité d’une jeunesse

CHAPITRE III : MÉTHODOLOGIE ET CONTEXTE DE L’ÉTUDE

4.1. AMALGAME [2016-2018]

4.1.1. Présentation de la plateforme et de ses objectifs : Dire la complexité d’une jeunesse

Amalgame, dont le site principal n’est aujourd’hui plus en fonction, est une plateforme numérique créée en aout 2016. Cette plateforme indépendante est plus particulièrement un blogue qui a pour but de mettre de l’avant des perspectives de jeunes Québécoises et Québécois issus des minorités ethnoculturelles au Québec. À travers une variété de textes, les éditrices et éditeurs y expriment leurs perspectives sur différents enjeux qui traversent leurs vies et leur société. La plateforme est née de la volonté de Francia Balthazar, une jeune Québécoise d’ascendance haïtienne, d’offrir un lieu aux jeunesses québécoises issues de l’immigration, souvent nommées dans les médias, mais peu représentées au sein de ces derniers. En effet, c’est suite au constat du manque de représentativité de ces personnes au sein des médias « mainstream », qualificatif employé par celle-ci pour désigner les médias traditionnels et majoritaires, ainsi que de l’homogénéisation des figures des personnes racialisées au sein de ces médias que la jeune femme décide de créer Amalgame, un blogue visant à remédier à ce vide médiatique. La mission

(Francia Baltazard, pour Ton petit look, 2016). Elle s’inspire pour ce faire des blogues québécois existants et notamment du blogue féminin Ton petit Look ; un blogue francophone qui s’attèle à déconstruire certains mythes liés à la féminité en offrant la parole à de jeunes Québécoises non spécialistes des questions féministes, mais désireuses de s’exprimer sur ces sujets. À noter enfin que la jeune femme n’est pas novice en matière de gestion de contenu médiatique et de blogue, puisque celle-ci avait créé antérieurement à Amalgame, un autre blogue féminin intitulé « Pure Balance » — blogue qui comme Ton petit Look, s’attelait à déconstruire les enjeux les mythes liés à féminité des femmes et dans leur cas des femmes non blanches — qu’elle cessera de produire au profit d’Amalgame, mais qui lui permettra de recruter ses premières éditorialistes pour Amalgame (Ketura, Amalgame, 2017). Voici enfin comment le projet se présente sur la plateforme ;

Amalgame est une plateforme web qui met de l’avant l’opinion des minorités ethniques du Québec. Les textes sur la plateforme sont écrits par des jeunes « intellos » de la génération Y et Z qui ont à cœur l’avancement et une meilleure reconnaissance de l’apport des minorités visibles dans la société québécoise. Le nom Amalgame fait référence à cette identité assez particulière des gens d’ici qui ont des parents issus de l’immigration. En effet, ceux-ci sont un amalgame entre l’héritage culturel québécois et celui de leur origine. Ni haïtien ni québécois, ni marocain-ni québécois, ni vietnamien-ni québécois. Qu’est-ce qu’ils sont ? C’est ce que nous essayerons de définir à travers des textes anecdotiques, des textes d’opinion sur l’actualité et des textes sur des enjeux sociaux et culturels. (Amalgame, 2017)

La volonté de reconquête discursive par cette jeunesse s’affiche donc comme mission principale du site. Puisqu’Amalgame se veut être une plateforme de mise en récit des perspectives de cette jeunesse dont l’appartenance à la société québécoise est admise, mais semblerait-il encore mal comprise. Cette mission est réitérée par l’énoncé des multiples appartenances ethniques des jeunes dont la plateforme souhaite se faire le miroir. Mais Amalgame ne se présente pas uniquement comme une plateforme par et pour les minorités du Québec ; c’est aussi et avant tout une plateforme à destination des jeunes de ces dites minorités. Ainsi, il apparait important, afin de bien saisir l’objet de la plateforme, de souligner sa dimension générationnelle, puisque les éditrices et éditeurs sont présentés comme des « jeunes de la génération Y et Z » et des « intellos » de cette génération. Une jeunesse donc, dont la pertinence de la parole et des perspectives sont doublement justifiées à la fois par leur savoir expérientiel, du fait de leur statut de québécois. e. s descendant. e. s d’immigrant. e. s, mais aussi par leurs capacités à produire

une information de qualité puisque « intellos » et donc disposant d’un savoir « éducationnel ». Amalgame se présente donc comme une plateforme produite par une jeunesse cultivée et porteuse d’un savoir sur elle-même et sur sa société. L’usage de ces attributs générationnels, sociaux (intello) et ethniques permet enfin une reprise du discours concernant ces populations, soient les jeunes et les minorités. Et permet de ce fait un renversement des pouvoirs discursifs sur cette jeunesse. Puisque, ici ce sont ces jeunes qui disent et qui racontent leurs réalités, décident des sujets à discuter et émettent un regard sur les valeurs désirées au sein de leur société.

On remarque cependant que dans ces premières lignes aucune référence directe n’est faite aux problématiques exclusivement féminines bien que la forte majorité des chroniqueuses soient des femmes — 21 femmes sur 22 collaborateurs —. Car la plateforme se veut résolument mixte et lorsqu’on interroge un membre de ce collectif sur la composition féminine de la plateforme, celle- ci indique que ce sont des candidatures volontaires qui expliquent cela et non un critère émis par la fondatrice. La jeune femme explique ensuite que de nombreuses chroniqueuses consommaient du contenu sur la plateforme antérieure « Pure Balance », une plateforme féminine, ce qui expliquerait selon elle cette prépondérance féminine (Kétura, Amalgame, 2017). Notons enfin que si la plateforme n’a pas choisi sa composition exclusivement féminine, elle s’affirme résolument comme féministe ; perspective qui est réitérée à de nombreuses reprises dans les publications, mais également dans le cadre des évènements et des thématiques soutenues par la plateforme.