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Les potentiels des énergies décarbonées et leur insertion économique

7. L’énergie

7.2. Les choix dans le secteur de l’énergie

7.2.3. Les potentiels des énergies décarbonées et leur insertion économique

Les énergies décarbonées dont le développement peut devenir significatif à l’échelle des besoins dans la période considérée sont connues pour l’essentiel :

• la récupération de chaleur sous toutes ses formes ;

• l'énergie solaire « passive » ;

• l’énergie éolienne ;

• l’énergie solaire photovoltaïque ;

• la biomasse (le cas étant traité au 8.1. ci-dessous).

Le développement des autres énergies décarbonées, quel que soit leur intérêt restera dans des volumes modestes dans la période : les sites hydrauliques français sont, pour l’essentiel, équipés130, l’énergie marine devra surmonter des difficultés techniques non négligeables, le gisement géothermique haute température est limité, et les autres sources envisageables restent marginales à l’échelle du problème.

Une question liminaire est celle de la substitution de ces énergies à d’autres sources.

On trouve une littérature abondante envisageant la substitution progressive des énergies décarbonées à d’autres formes (fossiles ou nucléaires, notamment). Rien ne

128 Conjoncturellement, ces variations posent de graves problèmes aux exploitants. En ce moment, le prix élevé du gaz dans les contrats à long terme indexés sur le prix du pétrole donne un avantage économique au charbon, nettement plus polluant. Ce sera peut-être l’inverse dans quelques années ou quelques mois... Malheureusement, on ne construit pas une centrale seulement pour quelques années ou quelques mois !

129 Nous négligeons l’impact du contenu en CO2 de la centrale en cycle de vie, nettement inférieur à celui de l’incertitude sur sa durée de vie.

130 Bien que leur production reste limitée, leur contribution à la gestion de la puissance dans le temps peut probablement progresser. La mission n’a pas approfondi ce point.

Rapport n°008378-01 Le facteur 4 en France : la division par 4 des émissions de gaz à effet de serre

à l'horizon 2050

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permet de penser cependant que la mise en service d’une éolienne, par exemple, s’accompagne automatiquement de la disparition ailleurs d’une capacité de production équivalente. L’offre supplémentaire se répartit probablement, toutes choses égales par ailleurs, entre une diminution d’une autre source et une augmentation de la consommation. Sur un marché non contingenté, la consommation présente inévitablement une élasticité à l’offre. La mission n’a pas trouvé de documentation quantifiant ce phénomène, pourtant capital pour la prévision.

26. Développer la recherche sur les élasticités de la consommation d’énergie à l’offre, à court et à long terme, par secteur, etc.

7.2.3.1. La récupération de chaleur

Une part importante des émissions de CO2 est due à la production de chaleur, alors que des sources de chaleur naturelle (géothermie basse ou haute température) ou industrielle (chaleur fatale des processus industriels) ou encore agricoles ne sont pas exploitées ou sont sous-exploitées.

L'exploitation de l'inertie thermique du bâtiment et de ses équipements, la récupération de chaleur de l'air, du sol ou de l'eau grâce aux pompes à chaleur, les différentes formes de géothermie, la cogénération, les réseaux de chaleur, la géothermie haute température, l'exploitation énergétique des déchets et d'autres techniques offrent des possibilités à encourager, mais dont il est difficile de juger aujourd’hui du potentiel global.

7.2.3.2. Le « solaire passif »

L'utilisation « passive » de l'énergie solaire recouvre une gamme étendue de procédés, depuis le chauffe-eau solaire jusqu’à la bonne conception architecturale des édifices du point de vue de l'exposition et de la gestion des flux de chaleur solaire.

Ce domaine est trop hétérogène pour qu'on puisse s'avancer dans des quantifications, bien qu'il représente un champ substantiel d'économies de GES.

7.2.3.3. Le solaire photovoltaïque

Dans les conditions actuelles, le solaire photovoltaïque est de peu d’avantage du point de vue des GES. En effet, le raffinage du silicium utilise beaucoup d’électricité et la grande majorité des panneaux est fabriquée dans des pays (la Chine, l’Allemagne) où le contenu en CO2 de l’électricité est élevé.

Illustrons d’un exemple d’analyse en cycle de vie sur lequel le lecteur pourra là aussi faire jouer les paramètres.

Les besoins en électricité pour fabriquer des panneaux photovoltaïques SI-cristallin sont de l’ordre de 2 kWh/Wc dont l’essentiel pour le raffinage du silicium. Le contenu en carbone du kWh allemand est de 450 g131 ce qui évalue le CO2 « gris » du panneau de1 kWc à 0,9 t.

131 Source : AIE. Le chiffre serait de 750 g si le panneau était d'origine chinoise.

Il produit environ 1200 kWh/ an (sud de la France) pendant 30 ans, soit 36 000 kWh durant sa vie, et, pour un surcoût de 0,15 € / kWh132 pendant 15 ans, soit 2700 €, économise :

• 36 000 × 0,000089 – 0,9 = 2,3 t CO2 s’il se substitue à de l’électricité au mix énergétique français ;

• 36 000 × 0,00065 – 0,9 = 22,5 kg CO2 s’il se substitue à de l’électricité d’origine

« fossile ».

Le coût de la t CO2 abattue est alors :

de 1 172 € s’il se substitue à de l’électricité au mix énergétique français ;

de 120 € s’il se substitue à de l’électricité d’origine « fossile ».

à comparer aux valeurs données par le rapport Quinet de 30 à 50 €...

Cependant, le prix des panneaux photovoltaïques diminue rapidement et on peut penser que cette diminution continuera pendant un certain nombre d’années.

Toutefois, les coûts d’installation et de raccordement ne connaîtront pas le même type de décroissance. Seuls de substantiels progrès dans le rendement des panneaux (ce qui suppose des sauts technologiques) peuvent donc leur permettre d’atteindre la

« parité réseau ». Il y aurait donc lieu pour les pouvoirs publics de soutenir la recherche en vue des futures générations de panneaux à haut rendement, plutôt que d’investir dans les générations technologiques actuelles.

7.2.3.4. L’énergie éolienne

Le cas des éoliennes est différent :

Le même calcul (cf. annexe 12.) appliqué à ce type d’appareil donne des coûts d’abattement

de 248 € s’il se substitue à de l’électricité au mix énergétique français ;

de 29 € s’il se substitue à de l’électricité d’origine « fossile ».

à comparer aux valeurs données par le rapport Quinet de 30 à 50 €, évoluant vers 100

€/t CO2 en 2030.

La substitution d’énergie éolienne à l’énergie fossile, hors gestion de l’intermittence (traitée au 7.2.4. ci-dessous) est manifestement « dans le marché » aux prix tutélaires envisagés pour le CO2133.

132 Nous avons estimé le coût du kWh photovoltaïque au tarif de rachat moyen en 2012 (0,20 €/ kWh) pendant 15 ans, et celui du kWh de substitution au prix de gros actuel de l’électricité (0,05 €/kWh), le coût du kWh photovoltaïque revenant à ce prix de gros dès la 16e année.

133 Ces résultats sont très sensibles au cours des énergies fossiles (difficilement prévisible, mais probablement à la hausse) et au coût de revient des éoliennes, probablement relativement stable à moyen et long terme.

Rapport n°008378-01 Le facteur 4 en France : la division par 4 des émissions de gaz à effet de serre

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Le coût du kWh éolien étant du même ordre de grandeur que celui du kWh nucléaire de nouvelle génération, et le CO2 gris d’une centrale ayant un « temps de retour » comparable, l'éolien peut sans doute être considéré en première approximation comme substituable au nucléaire134.

Le frein au développement de l'énergie éolienne est ailleurs. Il est de l’ordre de l’acceptation par la société de la présence d’éoliennes en grand nombre dans la campagne française. Des mouvements « anti-éoliens » se sont formés, qui ont leur utilité pour veiller à ne pas implanter des appareils là où ils nuiraient à un intérêt supérieur. Il serait grave que cette vigilance dérivât en opposition systématique à grande échelle.

27. Entreprendre une action pédagogique étendue, à la fois d’écoute et d’explication sur l’énergie éolienne terrestre.

7.2.4. Les incertitudes sur la maturation des techniques nouvelles,