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5. Exposé des résultats

5.1 Position des parents quant aux devoirs à domicile

Ce sous-chapitre présente la position des parents, de manière générale, sur les devoirs à domicile. Il est fait à partir de cinq questions. Ces questions proposent avant tout une prise de contact, une entrée dans le sujet des devoirs.

5.1.1 Avis général sur les devoirs à domicile

La première question de l’entretien entre au cœur du sujet : les devoirs. Elle demande quel est l’avis des parents sur les devoirs (annexe 10, tableau 2). Les réponses données montrent en effet que les avis divergent. Cinq mamans ont exprimé un avis plutôt favorable et six un avis plus mitigé, voire négatif. Pour deux mamans sur onze, les devoirs sont utiles,alors que, une autre, se pose la question de l’utilité des devoirs.

Les mots lourds, compliqués et calvaire sont des exemples de ce que trois mamans ressentent face aux devoirs. Une maman dit même « qu’on vivait mieux sans devoirs », lorsque ses enfants n’en n’avaient pas encore. Cette maman trouve que le temps passé à l’école par les enfants est suffisant. Deux autres mamans expriment à peu près la même idée en disant que c’est « beaucoup d’investissement de la part de l’enfant après l’école » (Hélène) ou que lorsque « l’enfant sort de l’école c’est le calvaire pour qu’il s’y remette » (Jacqueline). Ces deux dernières opinions expriment cette idée « d’école après l’école » (Cattani, 2004). Une fois sortis des classes, les enfants doivent à nouveau s’investir dans du travail scolaire, à la

maison. Bien que ces mamans, nous le verrons plus tard, ne soient pas « contre » les devoirs, elles exposent tout de même que ceux-ci rendent le quotidien parfois difficile.

Toujours à propos de cette question, deux mamans expriment leur étonnement face au saut qui existe entre la 2ème et la 3ème primaire. De surcroît, d’une manière plus informelle, en fin d’entretien, quelques mamans m’ont confié leur surprise de voir leurs enfants avoir autant de devoirs en 3P. On peut imaginer que ce problème est souvent lié au fait que le cycle élémentaire privilégie la lecture comme objectif d’apprentissage, ce qui a pour effet de voir son enfant venir à la maison avec une lecture à effectuer, mais aucune « fiche » ou aucun autre type de travail. Se retrouvant en 3P, les élèves qui savent lire ont des devoirs plus conséquents et souvent de type “papier-crayon’’. C’est de ce décalage que les mamans me font part.

D’autre part, une maman, n’écrivant pas bien la langue française explique que, pour elle, les devoirs sont compliqués, dans l’esprit où elle ne parvient pas à corriger les fautes d’orthographes ou de grammaire de sa fille, sauf lorsque celle-ci a un modèle, telle que la dictée. Toutefois, cela ne l’empêche en rien d’être très présente lors des devoirs avec sa fille.

Aussi, d’un point de vue plus positif, une maman énonce le fait que les devoirs « permettent de revoir à la maison des notions apprises à l’école et de les intégrer » (Catherine). Ces propos font écho à la définition de Longhi (2009) au sujet des devoirs à domicile présentée dans le cadre théorique. Cependant, il s’agit bien de la représentation que s’en fait cette maman.

Valeria va dans ce sens en pensant que « les devoirs sont un bon moment d’apprentissage à la maison, tranquille, seul face à son travail ».

Ludivine pour sa part s’exprime de manière plus générale en pensant aux autres enfants. Elle trouve que « l’école devrait proposer des moyens aux enfants qui ne pourraient pas faire leurs devoirs chez eux ». Sur ce denier point, la directive « études surveillées » de la DGEP (direction générale de l’enseignement primaire) énonce que « tous les établissements doivent offrir des études surveillées au moins une fois par semaine ». Cela dit, si les établissements proposent tous des études surveillées, il est vrai qu’une heure par semaine pour permettre aux élèves de faire leurs devoirs, n’est pas suffisant. Pour des enfants n’ayant pas un environnement calme et favorable à la concentration que demandent certaines tâches, il est indispensable d’avoir une offre horaire supérieure. Baur (2004) soulève à ce propos que « loin d’être généralisés, la mise sur pied des devoirs surveillés dépend essentiellement des énergies,

pour ne pas dire de l’obstination, de parents demandeurs ». Ludivine n’est donc pas la seule à être inquiète face au besoin pour les élèves d’avoir un environnement favorable pour pouvoir faire ses devoirs.

En se rapportant à la directive « devoirs », la durée des devoirs en 6P est de trois heures.

Certains élèves, en une heure, ne peuvent en aucun cas faire la quantité de devoirs demandée.

C’est pourquoi il faudrait augmenter le nombre d’heures d’études surveillées. La question est donc posée, s’il est difficile voir impossible pour les parents d’encadrer les devoirs, que fait l’école lorsqu’elle estime que ceux-ci sont indispensables ?

5.1.2 Attentes des parents et utilité des devoirs

À la question, attendez-vous quelque chose des devoirs ? Cinq mamans ont exprimé ne pas avoir d’attentes quant aux devoirs. Parmi celles-ci, Celina explique que « pour un enfant qui va bien à l’école les devoirs lui permettraient de faire de l’entraînement, alors que pour un enfant qui a des difficultés, c’est une surcharge de travail ». Pour sa part, Jacqueline doute que son fils aîné fasse des progrès grâce aux devoirs. Pour certaines de ces mamans, ce « non » représente essentiellement un manque d’information. En effet, lorsqu’il leur a été demandé en toute fin d’entretien quel serait leur idéal quant aux devoirs, celles-ci proposaient beaucoup d’éléments, essentiellement en lien avec ce qui est prescrit dans la directive. Il est donc probable, qu’ici, ce « non » n’est pas totalement représentatif de la pensée des mamans interrogées, car bien évidemment, elles attendent quelque chose des devoirs. Même s’il s’agissait de les voir supprimés, il y aurait là tout de même une attente.

Dans un autre registre, certaines mamans ont émis des attentes face aux devoirs. En lien avec ces attentes, la question de l’utilité des devoirs à été posée afin de connaître l’opinion des mamans à ce sujet. Afin de simplifier la lecture, le tableau ci-dessous rend compte des propos de quelques mamans en essayant de faire ressortir quelques mots-clés, qui seront ensuite mis en évidence.

Tableau 2 : Attentes des mamans

Prénoms Attentes Utilité

Carole

Attend des devoirs que son enfant puisse apprendre des éléments non appris en classe par manque de temps.

Permettre à chaque enfant d’avancer à son rythme, de manière individuelle.

Marina Attend des devoirs qu’ils complètent ce qui est fait en classe.

Compléter ce qui est fait en classe.

Catherine structure dans la journée et une rigueur dans le travail ».

Méthode de travail pour apprendre à travailler.

Karène

Exprime que les devoirs « peuvent apprendre à s’organiser dans la semaine ».

Exprime de côté stressant des devoirs.

Ludivine

Trouve que les devoirs « préparent pour plus tard » et qu’ils permettent « d’aider les enfants à s’entraîner ».

Les devoirs créent un lien avec les parents, ils permettent de les responsabiliser.

Stefania

Exprime la volonté d’apprendre elle-même quelque chose. Ayant fait ses études au Portugal au niveau primaire et affirmant qu’elle n’arrive pas à lire en français, espère par le biais des devoirs de sa fille apprendre de nouvelles choses.

Relève l’importance des études.

Au regard des propos émis par ces mères, l’on peut voir que les attentes sont toutes très différentes, mais que certaines reprennent des points forts explicités dans la directive. Des idées comme s’organiser - qui fait écho à la directive qui mentionne que « les devoirs visent à rendre l’élève responsable de la gestion de son travail » - ainsi que les mots réviser ou entraînement, sont autant de points que l’on devrait voir dans les devoirs, sans que cela fasse l’objet d’une “attente’’. D’autres expriment plutôt l’idée de complément de ce qui n’a pas pu être réalisé en classe, se plaçant dans une optique bien loin des principes énoncés de la directive.

Ces propos rejoignent ceux qui sont énoncés à la question « quelle est l’utilité des devoirs ? ».

Bien que le discours des mamans sur l’utilité des devoirs aille dans la même direction qu’à la question précédente, très peu de mamans ont répété leurs propos. Elles ont plutôt émis des opinions différentes aux deux questions, mais ces avis se retrouvent presque mot pour mot chez d’autres mamans. En effet, cinq mères sur onze ont associé les devoirs à un moyen de révision. Ce qui rejoint les propos de Catherine à la question précédente. Celina, qui n’avait pas exprimé d’attentes envers les devoirs, a expliqué à la question de leur l’utilité que pour elle, les devoirs devraient être facultatifs : pour les enfants qui ont de la facilité, ce serait quelque chose de bénéfique, alors que pour les élèves en difficulté scolaire, elle ne voit pas les devoirs comme quelque chose de positif.

De plus, Ludivine et Jacqueline pensent qu’ils permettent de créer un lien entre ce qui est fait en classe et les familles. Ce lien est donc évoqué pour la première fois par un parent, qui identifie les devoirs comme messager entre le travail fait en classe et celui qui arrive au sein de la famille. En effet, Ludivine tient ces propos : « par le biais des devoirs, [les parents] sont obligés de s’impliquer et de regarder ce qui se fait. Les devoirs créent un lien entre les parents et l’école qui ne se ferait pas automatiquement s’il n’y avait pas de devoirs » (annexe 10, tableau 2). Ce lien entre la famille et l’école à travers les devoirs a été repris à la question suivante.

5.1.3 Les devoirs comme moyen d’information

C’est unanimement que les mamans interrogées répondent par l’affirmative à cette question.

Pour elles, les devoirs à domicile constituent un bon moyen de liaison entre l’école et les familles. En effet, Celina utilise même le terme de « rapport » pour parler de ce qui se fait en classe. À l’instar d’un rapport de situation, les devoirs constituent un bon moyen pour les mamans de savoir où en sont leurs enfants. Elles peuvent ainsi découvrir le programme et avoir un aperçu de l’évolution dans la planification annuelle.

D’autre part, les enfants racontent souvent ce qu’ils vivent à l’école. Mais cela plutôt sur le plan affectif et moins sur le plan scolaire. Cinq mamans expriment en effet que c’est grâce aux devoirs qu’elles voient où en sont leurs enfants, car ces derniers ne racontent pas ce qu’ils font à l’école.

5.1.4 Les devoirs à domicile : pour ou contre ?

À cette question, sept mamans donnent un « pour » clair. Deux sont partagées, et deux sont totalement contre.

Les mamans « pour » expriment la nécessité de réviser la matière apprise à l’école à la maison. Deux mamans voient le côté “occupationnel’’ des devoirs, manifestant le fait qu’il vaut mieux que les enfants soient occupés avec du travail scolaire plutôt qu’avec d’autres choses. Des mamans enfin soulignent également que les devoirs permettent aux enfants d’avoir leur propre rythme d’apprentissage.

Du côté des mamans mitigées, une maman se dit « pour » les devoirs s’il s’agit de bons élèves, mais « contre » pour des élèves ayant de la difficulté. Jacqueline, qui avait soulevé en début d’entretien « qu’elle pensait que les devoirs étaient “sympas’’ jusqu’à ce que son enfant en ait, car en sortant de l’école, c’est le calvaire pour qu’il s’y mette », exprime qu’elle aurait envie de dire qu’elle est « contre », à cause de ces faits, mais qu’elle est tout de même

« pour » les devoirs, car ils constituent un bon lien famille-école et elle trouve « qu’il est important que l’enfant ramène quelque chose de l’école ».

Enfin, les mamans qui disent être « contre » les devoirs le sont car elles estiment que l’enfant

« emmagasine » déjà suffisamment d’informations en classe, sans devoir lui demander de continuer à la maison. Hélène va même jusqu’à dire « qu’elle n’est pas sûre que ce soit bénéfique pour son apprentissage ». Il y aurait donc pour elle un contre-objectif des devoirs.

Alors que ceux-ci seraient en principe envisagés pour apporter quelque chose de supplémentaire à l’élève, Hélène a plutôt le sentiment que son enfant en pâtirait.

5.1.5 Synthèse

Au vu des éléments présentés dans cette partie reflétant la position des mamans interrogées sur les devoirs à domicile, les quelques éléments d’analyse et de synthèse qui ressortent sont les suivants.

De manière générale, les avis sont assez partagés. Toutefois, j’ai pu relever qu’il n’y a que très peu d’avis totalement défavorables aux devoirs. Seules deux mamans mettent en avant

des journées scolaires suffisamment chargées, et préféraient pouvoir faire d’autres activités que les devoirs en début de soirée ou en week end. Une de ces mamans a d’ailleurs mis en avant que les activités périscolaires exercées par son enfant prennent beaucoup de temps et demandent une organisation supplémentaire à mettre en place. Dans sa journée, l’écolier doit prendre en compte l’école, bien sûr, mais aussi les activités qu’il exerce en dehors. Ces dernières sont, importantes pour lui, lui permettant de connaître d’autres choses, de découvrir, de se former, de s’évader, de se socialiser, de décompresser. Ces activités, qu’elles soient musicales, sportives ou créatrices, sont nécessaires au bien être, au développement et à l’équilibre de l’enfant qui souhaite les faire. Pour certaines familles, dont l’enfant exerce beaucoup de ces activités périscolaires, les devoirs sont un élément en plus à “caser’’ dans le programme de la soirée.

Quant aux autres mamans, bien que certaines se plaignent de la difficulté qu’elles ont à mettre leurs enfants à la tâche, elles donnent tout de même un avis favorable aux devoirs, car elles trouvent qu’il est important que les enfants passent par cette étape afin de réviser les savoirs acquis en classe. Certaines pensent également qu’il est important que les enfants soient préparés « à l’après » école primaire, c’et-à-dire au cycle d’orientation et au post-obligatoire.

Là, le débat ne se pose même pas, il y a des devoirs. Et l’on ne remet pas vraiment en doute leur utilité ou leur nécessité. C’est pourquoi certaines mamans trouvent important que les enfants, dès le primaire, soient prêts à affronter cette réalité.

Plusieurs mamans ont également, dès ces questions préliminaires, soulevé la problématique du lien famille-école, trouvant que les devoirs à domicile sont un bon moyen de le favoriser.

Les devoirs permettraient aux familles de savoir ce qui se fait à l’école. En effet, et pour reprendre ce qui a été dit par Montandon (1991) « plus qu’un moyen d’information, les devoirs constituent un véritable lien entre l’école et les parents ». À ce sujet, une maman m’a révélé qu’en regardant les devoirs de son enfant elle était souvent surprise de découvrir ce qu’il était capable de faire, de pouvoir constater ses progrès. Quelques mamans ont le soucis de n’obtenir que très peu d’informations sur ce qui est fait à l’école de par leurs enfants, c’est pourquoi elles considèrent les devoirs comme un système de communication entre les apprentissages faits en classe et les familles.