• Aucun résultat trouvé

Porosification ou électropolissage du carbure de silicium

LISTE DES SIGLES

1.4 État des connaissances sur la fabrication et les propriétés du carbure de silicium poreuxpropriétés du carbure de silicium poreux

1.4.1 Porosification ou électropolissage du carbure de silicium

Seuls les polytypes 4H et 6H existent sous forme de substrats mono-cristallins. Nous verrons par la suite que le 4H et le 6H se comportent de façon similaire lors de la gravure électrochimique. Dans les polytypes 4H/6H, la famille de plans cristallographiques {0001} est dite polaire, c’est à dire que la face (0001) est terminée par des atomes de silicium et la face (000¯1) par du carbone [240]. Donc pour des substrats orientés selon les plans {0001}, une des faces est terminée par des atomes de silicium et l’autre par du carbone (voir figure 1.8b). Nous verrons que cela peut avoir un effet important sur la gravure, de même que le dopage (type p ou n). Par contre la gravure se comporte de façon similaire sur les polytypes 4H et 6H, aussi bien pour le dopage de type-n [239] que type-p [129].

6H/4H dopage type-n

Le tableau 1.3 résume les paramètres importants des principaux travaux concernant la gravure du SiC de type-n.

Shor et al. mettent en évidence l’existence d’une couche poreuse sur SiC suite à la gravure électrochimique [242], et leurs images TEM (microscope électronique à transmission)¸montrent des pores qui se propagent latéralement avec une influence de la structure cristalline. Suite à cela Konstantinov et al. ont montré que le SiC peut être porosifié sous éclairage UV et dans le noir, mais les morphologies résultantes sont différentes. Ils ne disent pas non plus sur quelle face ils ont travaillé [136].

Zangooie et al. ont publié une série de papiers, et ont été les premiers à publier des images MEB de bonne qualité du carbure de silicium poreux [288–290]. À travers leurs trois articles, ils ont étudié plusieurs conditions de dopage, polytype, et courant, mais ils obtiennent le même type de morphologie : en surface ils obtiennent des couches peu poreuses, semblables à la morphologie « chevron », et qui évoluent avec la profondeur en devenant plus poreux et moins influencé par la structure cristalline, et qui tend vers la structure dite « dendritique ». Ils ont également observé le dessus de la couche au MEB et ont observé qu’en dessous de la couche peu poreuse en surface, il y avait des pores en forme de « rosette », se propageant latéralement et de façon isotrope (dans le plan d’observation).

Les travaux de Mynbaeva et al. montrent l’existence de deux morphologies, la « microporeuse » dominante à faible courant, et la « macroporeuse » dominante à courant élevé [182, 185], et entre les deux extrêmes les deux morphologies peuvent coexister dans une même couche poreuse. L’explication proposée par les auteurs est que les macropores sont formés par coalescence lors de la gravure, au front entre la zone poreuse et le substrat, et ensuite diffusent jusqu’à la surface

Tableau 1.3 Résumé des principaux paramètres de gravure dans la littérature sur l’anodisation du SiC type-n. « éth » = éthanol. Les concentrations des électrolytes sont écrites telles que dans l’article, donc toute imprécision vient de l’article original.

Auteurs

principaux Substrat Face Dopage N(cm−3) oud

résistivité ρ (Ω.cm)

J

(mA/cm2) Électrolyte Éclairage

Shor, Kurtz [242] 6H Cree Si Nd : 3×10 18 10-30 HF 2.5% UV Konstantinov [136] 6H ? Nd : 1-3×10 18 2-5 2.5M NH4F UV et noir Zangooie [289] 4H Cree Si Nd: 9.5×10 18 ≈25 HF-eau-éth (1.6:2.4:6)vol UV Zangooie [290] 6H Cree Si Nd: 4.3×10 18 25-100 Mélange HF-eau-éth UV Zangooie [288] 4H Cree Si Nd: 9.5×10 18 25 HF-eau-éth (1.6:2.4:6)vol UV Mynbaeva [182, 185] 6H ? ρ : 0.05-0.1 1-120 HF 3%vol UV et noir Shishkin [238] 4H Cree (1¯100),Si, C, (1¯210) Nd : 5-7×1018 1-5 HF 5% + éth (1:1)m UV

Wang [275] 6H ? 10×1018 60 HF-eau (1:3)vol Sans

Tanaka [259] 6H Si C ρ: 0.02-0.04 10-20 20-30 HF-eau-éth(8:2:30)vol UV Omiya, Tanaka [207] SiCrystal6H Si ρ : 0.06-0.1 10-100 HF 10 Naderi [186] 6H SiCrystal Si ρ : 0.06-0.1 10-20

pulsé HF, ethylene glycol,H2O2 (2:1:1)vol

UV Gautier [84] 4H TB Si et C ρ: 0.037 25.5, 63.3 HF50% :acide acétique :eau (4.6:2.1:1.5)vol Ambiant Gautier [82] 4H TB Si ρ: 0.037 12.7 pulsé

et direct HF, concentration etadditifs variables Noir

Wang [276] 6H Si et C Nd : 5×1017 50 Différentes

concentrations. HF +

éth. ou H2O2

pour former des couches entièrement macroporeuses [185]. Cependant les auteurs travaillent à courant continu (et non pulsé), alors leurs observations pourraient être interprétées dans le cadre de l’appauvrissement de l’électrolyte généralement constaté dans la porosification du silicium [21, 262]. Les auteurs ont fait des essais de porosification sous éclairage UV et dans le noir, et constatent que cela n’affecte pas les morphologies résultantes [185].

Shishkin a mené une étude approfondie sur un régime de porosification à faible courant [238]. Ce régime mène à une morphologie avec des pores triangulaires, qui est très intéressante pour l’étude des mécanismes de porosification, mais qui a peu d’utilité pratique car les vitesses de gravure sont faibles. Notons qu’ici encore, une couche peu poreuse en surface est observée, et la lumière UV est nécessaire pour mener à bien la gravure.

Ke et al. ont testé de nombreux paramètres [124–126, 128] (trop nombreux pour être résumés dans le tableau 1.3), dans le but d’obtenir des morphologies colonnaires uniformes et épaisses. Ils observent deux morphologies distinctes. Une première nano-colonnaire, qui s’obtient sur la face C et également sur la famille de plans {11¯20}, mais pas sur la face Si. Ils ont ainsi pu obtenir des couches formées de pores nano-colonnaires sur 200 µm, mais toujours avec une couche non-uniforme sur les premiers µm en partant de la surface. À plus fort voltage (80V) ils obtiennent des pores plus larges, sous forme macrocolonnaire. Celle-ci peut être obtenue aussi bien sur la face C que Si.

Ke et al. ont également publié une étude consacrée aux liens entre l’état de surface du SiC [127]. Sur la face Si ils ont fait des tests de gravure sans illumination. Sur l’échantillon avec le meilleur état de surface, la nucléation des pores en surface était non-uniforme, ce qui a mené à des couches non-continues. Au contraire, pour le SiC où il restait de nombreuses traces du polissage, la nucléation était plus uniforme, puisque les pores se forment de façon préférentielle au niveau des défauts de polissage, ce qui a également été constaté par d’autres auteurs [240]. Cela signifie qu’il y a une bonne uniformité latérale, mais les auteurs ne donnent aucune information sur l’uniformité en profondeur. Sur la face C, sous éclairage, ils montrent que la morphologie change brusquement, d’une morphologie nanocolonnaire vers une morphologie macroporeuse, et que plus l’état de surface est bon, plus le changement se fait tôt.

Les travaux de Wang et al. sont intéressants principalement parce qu’ils font la porosification sans éclairage UV, mais leurs images MEB ne permettent pas d’identifier une quelconque morphologie [275].

Tanaka et Omiya [207, 259] ont cherché à developper une technique permettant d’enlever la couche peu-poreuse en surface, soit en coupant l’illumination UV à la fin de la gravure [259], soit un utilisant un pulse à courant élevé [207]. Dans les deux cas, le dégagement gazeux

plus élevé cause un gonflement de la surface qui se décolle. Cette technique n’est pas vraiment efficace puisque 40 à 100 µm de la couche poreuse est décollée par cette technique [207]. Naderi et al. gravent le SiC avec un électrolyte composé de HF, éthylène glycol, et péroxide, et obtiennent des morphologies semblables à celles de Zangooie et al. [288–290]. Aussi, ils travaillent en gravure pulsée, mais avec une période très courte de 18 ms.

Wang et al. ont effectué de nombreux essais de gravure, mais les paramètres de gravure ne sont pas toujours très clairs dans leur article. Toutefois, ils confirment des morpohlogies constatées dans d’autres papiers [129, 289].

Finalement Gautier et al. ont publié deux études sur la porosification du SiC [82, 84]. Dans la première ils étudient les faces Si et C, et constatent dans les deux cas que la porosité en surface est faible, et évolue avec la profondeur. De plus, ils effectuent la gravure sous éclairage ambiant. Dans leur deuxième papier, ils mènent une étude plus systématique sur la face Si. Ils ont étudié l’effet de différents additifs dans l’électrolyte, et concluent que l’acide acétique, suivi du Triton, sont ceux qui favorisent le plus l’uniformité de leurs couches. L’éthanol, qui est communément utilisé comme additif pour la porosification, n’a pas été testé par cette équipe. Ils comparent aussi la gravure pulsée et continue. La gravure continue mène à un front de gravure non-uniforme, ce qui est résolu par la gravure pulsée. Avec ces conditions optimisées, ils obtiennent une morphologie dont la forme n’évolue pas avec la profondeur, mais la porosité augmente légèrement. La porosité obtenue ainsi est faible, et ils atteignent des épaisseurs de 13 µm.

En résumé, de nombreuses morphologies ont été obtenues sur les deux faces. Aucun article ne présente des couches qui soient à la fois uniformes en profondeur, et épaisses (dépassant les 20 µm). De plus, la majorité des articles constate la présence d’une couche en surface fine, mais très peu poreuse. La face Si, étant plus résistante à la gravure, favorise la gravure latérale, ce qui conduit à des morphologies plus ramifiées, alors que sur la face C on observe des formes plus colonnaires. De plus, la vitesse de gravure est plus élevée sur la face C [84, 238]. On remarque également que la nécessité de l’éclairage n’est pas certaine, puisque certains auteurs l’utilisent, et d’autres non.

6H/4H dopage type-p

Le SiC de type-p a été moins étudié, ce qui est probablement dû en partie à sa moins bonne disponibilité commerciale et son prix très élevé. D’ailleurs au début de ce projet, les principaux fabricants de substrats de SiC (Cree, SiCrystal, Tankeblue) n’en vendaient pas. Le tableau 1.4 résume les paramètres importants des principaux travaux concernant la gravure du SiC de type-p.

Tableau 1.4 Résumé des principaux paramètres de gravure dans la littérature sur l’anodisation du SiC type-p. « éth » = éthanol. Les concentrations des électrolytes sont écrites telles que dans l’article, donc toute imprécision vient de l’article original. Auteurs

principaux Substrat Face Dopage N(cm−3) a (mA/cmJ 2) Électrolyte Shor, Kurtz [241] 6H Cree ? 2-5×10 18 5-150 HF aqueux dilué MacMillan, Kurtz [163] 6H Cree C 2×10 18 5-30 HF aqueux dilué

Zangooie [289] 6H Cree ? 8.8×1018 ≈25 HF-eau-éth (1.6:2.4:6)vol

Shishkin, Ke, Devaty, Choyke [240] 6H Cree 6H Cree SiC 2×10 18 ? 0.5-60? HF 10% + éth (2:1)1-20% HF* m Chang [46] 6H Cree C 2×1018 50-150 1-8% HF Ke, Devaty,

Choyke [129] 4H Cree4H Cree SiC 2.7-7.7×10

18

>2×1018

10-150

2-70 0.5-5%1%mmHF + 5%, >5%m*m éth. * Les conditions ne sont pas claires pour ces tests.

Le premier article sur la porosification du SiC type-p a été publié par Shor et al. [241]. Leurs images MEB sont de faible qualité, mais ils distinguent une structure spongieuse, sans ordre apparent, avec une taille de nanostructure moyenne de 6 nm. Ils ne précisent pas sur quelle face ils ont travaillé, mais des travaux ultérieurs de la même équipe dans des conditions semblables ont été réalisés en travaillant sur la face C [163]. D’ailleurs dans ces travaux les auteurs obtiennent des couches de 128 µm d’épaisseur pour 74% de porosité, mais ils ne donnent pas d’images de leur structure et ne commentent pas leur uniformité.

Zangooie ont également fait quelques tests sur le SiC de type-p [289]. Il est intéressant de voir qu’ils obtiennent des structures très typiques de la face Si du SiC type-n, y compris la couche faiblement poreuse en surface. Tout comme sur type-p, leurs couches présentent une évolution de structure avec la profondeur, et ne dépasse pas 22 µm.

Une étude assez approfondie de la gravure électrochimique a été faite par Shishkin et al. [240]. Sur la face silicium, ils ont testé une large gamme de concentrations (1-20% HF) et ont constaté que dans cette plage il n’y avait pas de porosification, mais de l’électropolissage. Sur la face C ils observent deux morphologies poreuses différentes (« branches » et « filament »). La taille des nanostructures diminue lorsque la densité de courant augmente, et varie entre 40 nm et

quelques nm. Ils ont également mesuré la vitesse de gravure et la porosité en fonction de la densité de courant, entre 0.5 et 60 mA/cm2. Ils atteignent ainsi des porosités de 95%, mais l’épaisseur des couches poreuses est entre 1 et 5 µm. Ce qui est intéressant pour la face C type-p est que, contrairement à la face Si de type-n, il n’y a pas de couche à faible porosité en surface, et seules les traces de polissage sont résistantes à la gravure.

Le fait que la face Si soit propice à l’électropolissage a été exploité par Chang [46] pour le micro-usinage du SiC. Ils arrivent ainsi à graver des cavités de 200 µm de profondeur en quelques heures avec un état de surface acceptable.

Ke et al. ont mené une étude en variant de nombreux paramètres dans le but d’optimiser l’électropolissage sur la face Si [129]. Cela leur a permis d’identifier des paramètres permettant de graver 20 µm en 30 minutes, avec une rugosité de 1.9 nm RMS. Ils ont aussi identifié une plage de paramètres (notamment une concentration en HF plus élevée) permettant de porosifier la face Si. Ils ont également optimisé l’électropolissage sur la face C ; le fini est moins bon (6.8 nm RMS), mais les vitesses de gravure comparables. Au final ils aboutissent à des cartes de procédé qui identifient les zones de porosification et d’électropolissage en fonction de la densité de courant et la concentration en HF.

En résumé, pour le SiC de type-p, la face Si est plus propice à l’électropolissage, et la face C à la porosification, même si des pores peuvent être obtenus sur la face Si également. La face C donne lieu à des structures très fines et poreuses, comparables au silicium mésoporeux. Sur la face Si, il y a moins de données sur les morphologies possibles [129, 289], mais un article montre des structures très similaires à celles qui peuvent être obtenues sur la face Si du SiC dopé n. L’éclairage UV n’est pas utilisé ici, puisque les trous sont le porteur majoritaire (voir section suivante pour plus d’explications). L’uniformité des structures obtenues n’est pas commentée, mais la porosification se fait dès la surface sur la face C. Finalement, l’effet des paramètres de fabrication a été bien décrit, en particulier sur la face C [129, 240].

Autres polytypes

La deuxième annonce de la porosification du SiC a été faite sur des couches épitaxiées de SiC 3C [258], et Shishkin et al. ont mis en évidence deux morphologies sur ce polytype [239]. Une étude a également été faite sur le polytype 15R [275]. À part ces travaux, l’immense majorité a été effectuée sur les substrats 4H/6H.

Conclusion

Le SiC de type-p semble plus facile à porosifier, puisque les couches sont poreuses dès la surface. Aussi, sa porosification est mieux décrite dans la littérature. Malheureusement, il est

aussi moins disponible commercialement, ce qui nous a imposé le choix du SiC de type-n. La majorité des travaux concernant la porosification du SiC a été faite sur ce dernier. Cependant, il n’y a quasiment pas eu d’études systématiques, et certaines publications ne décrivent pas suffisamment les paramètres utilisés pour reproduire leurs résultats. De plus les différentes publications ne sont pas toutes en accord, notamment quant à la nécessité d’utiliser de l’éclairage UV pendant la gravure. De plus, les couches poreuses formées sur le SiC de type-n ont l’air d’être moins uniformes et la plupart des auteurs sont d’accord sur la présence d’une couche très peu poreuse en surface du carbure de silicium poreux. L’absence de couches uniformes est un obstacle à la caractérisation des propriétés du carbure de silicium poreux, et une couche à faible porosité en surface pourrait constituer un court-circuit thermique.

Donc actuellement, la fabrication du carbure de silicium poreux n’est pas suffisamment décrite, et l’effet des paramètres de porosification n’est pas assez connu pour permettre la fabrication reproductible de couches uniformes et épaisses.