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Polymérisation de miniémulsions stabilisées par des nanoparticules de CeO 2

II.2 Synthèse et caractérisation de latex nanocomposites sans tensioactif stabilisés par des

II.2.1 Propriétés et caractéristiques des nanoparticules de CeO 2

II.2.2.2 Polymérisation de miniémulsions stabilisées par des nanoparticules de CeO 2

La deuxième étape de la synthèse des latex nanocomposites consiste à polymériser les gouttelettes de monomère. En présence d’un amorceur anionique, le sol acide chargé positivement flocule. Afin d’éviter une déstabilisation du sol acide au cours de la polymérisation, nous avons employé un amorceur chargé positivement le dihydrochlorure de 2,2’-azobis(2-amidinopropane) (AIBA) dont la structure chimique est représentée sur la Figure II-32. CH3 CH3 N N CH3 CH3 +NH2 H2N+ H2N NH2 Cl- Cl

-Figure II-32 : Structure chimique de l’amorceur cationique (AIBA) utilisé dans les réactions de polymérisation en miniémulsion.

Nous venons de voir que la teneur en CeO2 joue un rôle très important sur la stabilité des gouttelettes de MMA pendant l’étape d’émulsification. Pour étudier son influence sur la stabilité des particules polymère, nous avons consacré une série d’expériences à la polymérisation de miniémulsions stabilisées par des teneurs en CeO2 comprises entre 20 et

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35%/MMA (c'est-à-dire pour des gouttelettes de diamètre inférieur à 150 nm). Pour chacune de ces polymérisations, nous avons reporté sur la Figure II-33 l’évolution de la conversion en fonction du temps et du diamètre des particules en fonction de la conversion. Les conditions opératoires ainsi que les résultats obtenus juste avant que le latex ne se déstabilise à forte conversion sont détaillés dans le Tableau II-19 ci-dessous.

Tableau II-9 : Caractéristiques des miniémulsions et des particules de latex obtenues par polymérisation en miniémulsion du MMA pour différentes teneurs en CeO2

a) Exp. %CeO2/ MMA t (h) Conv. (%) Dp (nm) initial/final b) PD initial/final b) Np (L-1) initial/final Couverture (%) initiale/finale NZ44 20 0,8 78 148/217 0,14/0,06 1,4.1017/3,8.1016 31/55 NZ39 25 1 85 139/202 0,17/0,05 1,8.1017/4,8.1016 37/65 NZ40 30 1,25 83 112/195 0,16/0,09 3,3.1017/5,3.1016 36/75 NZ42 35 3 85 101/200 0,22/0,05 4,7.1017/5.1016 37/90 a)

Conditions expérimentales : AMA= 1,9 μmol.m-2 de CeO2 ; MMA/eau = 20/100 (% en poids) ; ODA: 4%/MMA ; sonication : 5 minutes à 67% de 750W ; température de polymérisation : 70 °C ; AIBA = 1% /MMA ; b) mesuré par DDL. a) b) 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 3,5 0 20 40 60 80 100 20 % CeO2/MMA 25 % CeO2/MMA 30 % CeO2/MMA 35 % CeO2/MMA Conversion (%) Temps (h) 0 20 40 60 80 100 0 100 200 300 400 500 600 700 20 % CeO2/MMA 25 % CeO2/MMA 30 % CeO2/MMA 35 % CeO2/MMA Dp (nm) Conversion (%)

Figure II-33 : a) Evolution de la conversion en fonction du temps et b) du diamètre des particules en fonction de la conversion au cours de la synthèse par polymérisation en miniémulsion de latex de PMMA stabilisés par des quantités croissantes de CeO2

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La cinétique de polymérisation est rapide et indépendante de la teneur en CeO2 (Figure II-33- a). Quelle que soit cette teneur, la conversion est limitée à une valeur proche de 85%. Par ailleurs, une fois atteint ce pallier de conversion, le latex devient systématiquement instable pour une teneur en CeO2 inférieure à 35% comme l'illustre l'augmentation du diamètre des particules en fin de polymérisation (Figure II-33-b). Enfin, les valeurs de taux de couverture et de diamètres reportés dans le Tableau II-19 indiquent que les particules doivent être suffisamment couvertes pour rester stables après polymérisation (latex stable lorsque TC est supérieur ou égal à 90%).

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Afin de comprendre la limitation de la conversion à 85%, nous avons effectué une polymérisation en présence de 25% de CeO2/MMA en faisant un ajout complémentaire d’AIBA 50 min après le début de la polymérisation. On constate que le taux de conversion est inchangé et des analyses de chromatographie en phase gazeuse du latex obtenu ont révélé la présence de monomère résiduel. Ceci semble indiquer que cette limite en conversion n’est pas due à un défaut d’amorceur. Pour expliquer cette limite de conversion nous nous sommes référés aux travaux de Cauvin et al. [140] qui ont polymérisé des miniémulsions de styrène stabilisées par des particules de Laponite en utilisant plusieurs types d’amorceurs. Au cours de ces travaux, les auteurs ont pointé l’importance de l’emploi d’un amorceur non ionique et organosoluble pour s’affranchir des problèmes d’entrée et de sortie des radicaux qui peuvent avoir lieu en utilisant un amorceur chargé tel que le persulfate de potassium (KPS) ou l’AIBA. Dans notre cas, il est probable que les oligoradicaux formés en phase aqueuse pénètrent facilement les gouttelettes au début de la polymérisation si on admet que la couche de CeO2 n'est initialement pas dense en surface. Cependant, l’entrée des radicaux est vraisemblablement freinée lorsque la couche de CeO2 devient plus compacte au fur et à mesure de l’avancement de la réaction. D’autre part, la présence d'ODA combinée au caractère « solide » de l’interface peut fortement ralentir la diffusion du monomère hors des particules, et par conséquent la formation d’oligoradicaux en phase aqueuse. Ainsi, le taux de conversion n’atteint jamais les 100%.

D’autre part, l’évolution du nombre de particules tout au long de la polymérisation (Figure II-34) indique que celui-ci diminue d’une manière significative au début de la polymérisation et à la fin lorsque le latex se déstabilise. La diminution du nombre de particules à faible conversion (< à 10% ce qui correspond à un temps de réaction de 10 min) est concomitante avec l’augmentation du diamètre des particules (Figure II-33-b). Ceci indique une coalescence importante et limitée puisqu’elle a lieu uniquement au début de la polymérisation. Celle-ci est d’autant plus importante que la teneur initiale en CeO2 est faible. Cette coalescence limitée peut être attribuée à une moindre efficacité de stabilisation des particules de PMMA par les nanoparticules de CeO2. En effet, lorsque le monomère polymérise, la phase huileuse n’est plus la même et par conséquent la tension interfaciale H/E et les interactions chimiques entre les nanoparticules de CeO2 et la phase organique changent. L’énergie d’adsorption des particules de CeO2 à la surface des particules de latex en croissance change également et ceci peut avoir une influence sur la stabilité de l’émulsion [25, 34]. Si la tension interfaciale PMMA/eau est plus importante que la tension interfaciale MMA/eau, les particules auront tendance à coalescer pour réduire l’aire interfaciale en formant des particules plus grosses et

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plus couvertes. Ce processus s’arrête lorsque la quantité d'interface créée est égale à celle que les particules de CeO2 peuvent stabiliser.

D’autre part, au fur et à mesure de la polymérisation, les chaînes formées au voisinage des nanoparticules de CeO2 via la présence de l'AMA écrantent vraisemblablement leurs charges de surface. En début de polymérisation, ce phénomène contribuerait à la coalescence limitée décrite plus haut et se traduirait à forte conversion par la déstabilisation du latex (phénomène d'autant plus marqué que la concentration en CeO2 est faible). Cet écrantage des charges permet de rapprocher les nanoparticules de CeO2 et de rendre la couverture plus compacte. Ces observations indiquent que le système n'obéit vraisemblablement pas aux critères d'une polymérisation en miniémulsion (à savoir une nucléation de toutes les gouttelettes de départ, sans variation significative de leur nombre, et sans migration notable des espèces). En effet, le nombre de particules diminue de manière significative tout au long de la polymérisation, initialement en raison des phénomènes de coalescence puis suite à la déstabilisation du latex.

0 20 40 60 80 100 1x1017 2x1017 3x1017 4x1017 5x1017 20 % CeO2/MMA 25 % CeO2/MMA 30 % CeO2/MMA 35 % CeO2/MMA Np/L Conversion (%)

Figure II-34 : Evolution du nombre de particules en fonction de la conversion au cours de la synthèse par polymérisation en miniémulsion de latex de PMMA stabilisés par des quantités croissantes de CeO2

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Dans le cas des latex de PMMA stabilisés par 30 et 35% de CeO2, nous avons caractérisé la morphologie des particules par MET et cryo-MET (Figure II-35).

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a) b)

c) d)

Figure II-35 : Clichés a) MET de particules de PMMA stabilisées par 30% de CeO2/MMA et b) MET à froid et c et d) cryo-MET de particules de PMMA stabilisées par 35% de CeO2/MMA.

Sur le cliché Figure II-35-a, les nanoparticules de CeO2 semblent pour la plupart présentes à la surface des particules de latex. Il n’y a pas ou peu de nanoparticules de CeO2 libres dans la phase externe de l’émulsion. Les particules de latex sont polydisperses en taille et déformées. Afin de savoir si la forme déformée et non sphérique des particules de latex provient de la nature de l’échantillon et non d’une déformation par irradiation sous le faisceau, nous les avons observées par MET avec un porte-échantillon froid et ensuite par cryo-MET. L’observation des particules de latex à sec et à froid Figure II-35-b montre bien que c’est sous irradiation que les particules de PMMA se déforment et non pas au séchage, puisqu’on observe des particules sphériques non déformées par MET quand le porte-objet est refroidi.

Les clichés de cryo-MET Figure II-35-c et d mettent en évidence deux types de particules. La majorité est sphérique et polydisperse alors que certaines sont déformées et apparaissent « dégonflées ». Nous remarquons aussi sur ces clichés que cette morphologie est observée plus fréquemment lorsque le diamètre des particules est plus important. L’observation de ces particules sous fort grossissement montre que les particules sont très fortement couvertes ce qui est en concordance avec la valeur du taux de couverture obtenu après polymérisation pour

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une teneur en CeO2 correspondant à 35% CeO2/MMA (TC = 90%). Dans notre cas, les particules « dégonflées » peuvent provenir de la quantité résiduelle de monomère qui n’a pas pu polymériser (conversion atteinte en fin de polymérisation de 85%) et qui a migré vers la phase externe de l’émulsion ou qui s’est évaporéavant vitrification lors de la préparation des échantillons. Comme pour les gouttelettes, ceci peut entrainer un affaissement de la surface. Mais les nanoparticules de CeO2 sont capables d'assurer la stabilisation de la morphologie dégonflée en se comportant comme un « solide ».

La coalescence des particules de latex et leur perte de stabilité en fin de polymérisation pouvant entraîner le piégeage des particules de CeO2, nous avons effectué des coupes des particules composites stabilisées par 25% CeO2/MMA obtenues après 50 minutes de polymérisation (soit avant la déstabilisation du latex) et nous les avons observées par MET (Figure II-36). Sur ces photos, on n’observe pas de CeO2 à l’intérieur des particules de latex. L’origine de la déstabilisation des particules de latex n’est par conséquent pas liée à un enterrement des nanoparticules de CeO2 mais sûrement à l'écrantage des charges de surface suite à la polymérisation comme décrit plus haut.

a) b)

Figure II-36 : Clichés de MET d’une coupe de particules de PMMA stabilisées par 25%

CeO2/MMA et observées après 50 min de polymérisation; Echantillon centrifugé à 15 000

tour.min-1 pendant 30 minutes et séché à l’étuve (épaisseur de la coupe : 70 nm).