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Pollution atmosphérique et santé

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3. Des émissions atmosphériques des transports à leurs effets sur la santé

3.3. Effets sur la santé

3.3.4. Pollution atmosphérique et santé

La pollution atmosphérique présente une forte hétérogénéité spatiale et temporelle, tant au niveau de la nature des substances la composant (différences qualitatives) que de leurs niveaux de concentration relatifs (différences quantitatives). Il s’agit d’un mélange complexe, par opposition à un mélange simple qui serait composé d’un nombre relativement restreint de composés et dont la toxicité totale pourrait être caractérisée par une combinaison de la toxicité et des interactions des composés. D’après l’US EPA (2000), dans le cas d’un mélange complexe, l’estimation de la toxicité totale ne peut pas être basée sur la toxicité de tous ses composants, car elle contiendrait trop d’incertitudes et d’erreurs pour être utile.

Les effets sanitaires que l’on observe sont ceux de ce mélange et il serait très difficile de déterminer la part attribuable à chaque substance. En effet, l’effet total est probablement différent de la somme des effets individuels (Dominici et al., 2010). De plus, les effets reliés à la pollution atmosphérique ne sont pas spécifiques : d’autres facteurs, environnementaux ou non, conduisent conjointement au développement de ces pathologies.

L’approche multipolluant semble la plus pertinente dans le domaine de l’étude de la qualité de l’air et de ses effets. Des travaux sont en cours pour développer des méthodes permettant de prendre en compte les effets d’un mélange (Dominici et al., 2010). Les principes de base de cette approche sont l’additivité des doses pour un effet identique et l’indépendance d’action pour des effets différents (Kortenkamp et al., 2009). L’additivité correspond à un scénario protecteur sauf dans le cas de synergies, situations rares qu’il faut identifier pour les traiter de manière appropriée. Cependant, un aspect reste délicat à intégrer : si les concentrations d’exposition aux substances sont inférieures aux seuils définis de toxicité, cela ne signifie pas l’absence de risque pour une exposition au mélange. En effet, dans ce cas, des effets peuvent apparaître à des niveaux inférieurs à ceux observés pour une exposition à une substance unique (expérimentale). Le cas de la pollution atmosphérique est particulièrement

Des émissions atmosphériques des transports à leurs effets sur la santé

ardu, en raison de la grande hétérogénéité qualitative et spatiotemporelle de sa composition.

Aucune méthode ne permet actuellement d’évaluer sa toxicité globale.

A défaut de pouvoir estimer les effets d’un tel mélange, deux approches peuvent être envisagées : une approche polluant par polluant ou une approche par le biais d’un polluant indicateur.

La première approche possible pour étudier les effets de la pollution atmosphérique sur la santé consiste en une évaluation polluant par polluant. Les substances ayant été les plus étudiées sont celles utilisées en tant qu’indicatrices. Les effets identifiés ou envisagés sont détaillés dans le Tableau 9. Dans cette situation, les effets sont étudiés par une approche toxicologique, dans des conditions expérimentales (laboratoire). Il faut noter que les paramètres d’exposition à ces polluants sont difficilement maîtrisables en laboratoire, ce qui complique la mise en place d’études toxicologiques. Pour les faibles niveaux d’exposition, il est difficile de mettre en évidence les effets propres des substances utilisées en indicateurs du mélange et leurs mécanismes sous-jacents.

Tableau 9: Effets sanitaires propres aux indicateurs de pollution (d’après Pascal, 2009 ; INERIS, 2010)

Substance Effets (à court et long terme)

NO2 Inflammation des voies respiratoires possible

Baisse suggérée de la fonction respiratoire

Aggravation suggérée des pathologies respiratoires chroniques (asthme et bronchite chronique obstructive)

Augmentation suggérée de la sensibilité aux infections SO2 Irritant respiratoire

Bronchoconstriction (surtout chez les personnes souffrant déjà d’une pathologie respiratoire chronique)

Particules Effets généraux des PM10 et PM2,5à variabilité selon diamètre Variabilité probable selon la composition des particules

Fonction respiratoire (Possible inflammation pulmonaire à stress oxydatif local)

Système cardiovasculaire

Effets possibles sur le système nerveux autonome (augmentation de la fréquence cardiaque et baisse de sa variabilité)

Potentiellement cancérogènes à long terme

CO Atteintes du système nerveux central et des organes sensoriels

Effets sur le système cardio-vasculaire COV Irritation des yeux

Irritation des poumons, bronchites en exposition chronique

Potentiellement cancérogène à long terme

O3 Altération de la fonction respiratoire (inflammation des voies respiratoires et Irritation de la gorge et des poumons)

Aggravation de maladies respiratoires chroniques, augmentation de la fréquence des crises d’asthme et autres symptômes respiratoires

Irritation des yeux

Altération résistance aux infections possible

Dans cette approche, chaque polluant est ainsi caractérisé par une ou plusieurs valeurs toxicologiques de référence. Or, en ce qui concerne les effets non cancérogènes des principales substances règlementées (NOx, PM…), aucun seuil d’effet n’a pu être actuellement mis en évidence, que ce soit via l’épidémiologie ou la toxicologie.

Les difficultés rencontrées pour estimer un seuil de toxicité peuvent en partie être expliquées par le fait que l’ensemble de la population est exposé à ces substances, dont les individus particulièrement sensibles (physiologie, pathologie déjà présente…). Ces personnes développeraient les effets pour des niveaux d’exposition bien inférieurs à ce qui serait trouvé en laboratoire. En effet, lors des expériences en laboratoire, le nombre d’individus exposés est limité, ce qui diminue la variabilité de sensibilité intraspécifique et permettrait d’identifier un seuil quand les conditions d’exposition sont bien maîtrisées. Par exemple, pour une maladie avec un risque de 10-4, il est moins probable d’observer un cas quand on suit 100 personnes que quand on en suit 10 000.

L’impact sanitaire de l’ensemble des substances toxiques pour l’homme est actuellement impossible à estimer.

L’autre approche d’évaluation des effets sanitaires de la pollution atmosphérique a recours aux études épidémiologiques (études de la population dans ses conditions réelles d’exposition). Elle utilise les associations stables et cohérentes identifiées entre un indicateur de la pollution atmosphérique et certains évènements sanitaires (admissions hospitalières ou consultations pour symptômes respiratoires, cardiovasculaires, mortalité…). Les substances indicatrices ne sont pas considérées pour leurs propriétés propres, mais en tant que marqueurs d’un mélange (pollution atmosphérique) ; il s’agit le plus généralement des polluants règlementés, soit les particules fines (PM10, PM2,5), l’ozone, le NO2 et le SO2. Il s’agit de l’approche la plus utilisée actuellement (méthode d’évaluation des impacts sanitaires de la pollution atmosphérique, « environmental burden of diseases »…)

De nombreuses études épidémiologiques ont été menées sur ce sujet. La plupart traitent des liens à court terme entre la pollution atmosphérique et certains évènements de santé. En effet, ce type d’étude est plus facile à mettre en place en raison d’une moindre complexité, de durée et de coûts inférieurs par rapport à ceux nécessaires aux études de cohorte pratiquées pour les études à long terme. De plus, les évènements sanitaires à long terme étudiés doivent être définis d’une manière précise. En effet, les effets de la pollution atmosphérique à court et long terme peuvent être mêlés. Par exemple, dans le cas de l’asthme, l’exposition chronique à la pollution atmosphérique pourrait être un facteur de risque pour la pathologie chronique sous-jacente, alors qu’une exposition à court terme se traduit par un évènement aigu (crise d’asthme) (Extrapol 29, 2006). Par ailleurs, l’étude des effets à long terme en épidémiologie ne permet pas d’assurer que les risques mis en évidence correspondent aux risques actuels, puisque, sur des durées supérieures à 20 ans, la pollution a évolué quantitativement et qualitativement (Extrapol 29, 2006).

Des émissions atmosphériques des transports à leurs effets sur la santé

Les principaux résultats de ces études sont présentés dans le Tableau 10. Chaque indicateur sanitaire est indiqué sur la même ligne que le(s) polluant(s) traceur(s) pour lesquels une association a été trouvée à court ou à long terme.

Tableau 10 : Principaux effets sanitaires corrélés aux indicateurs de pollution atmosphérique dans les études épidémiologiques (non exhaustif) (d’après InVS, 2008)

Evènement sanitaire indicateur Polluants traceurs Effet à

Mortalité

Toutes causes, cardio-pulmonaire et par cancer du poumon

Crise d’asthme chez les enfants

Hospitalisations pour asthme

Nombre de visites médicales à domicile PM10, PM2,5 Court terme

Cancer du poumon

L’exposition à la pollution atmosphérique est associée à une augmentation de risque pour certains évènements de santé, se traduisant notamment par une réduction de la qualité et de l’espérance de vie. La cohérence des différentes études menées sur le sujet, en plus des connaissances expérimentales en toxicologie et des bénéfices sanitaires observés lors de la réduction des niveaux de pollution atmosphérique urbaine, tend à démontrer la nature causale des relations observées (Kunzli et al., 2000 ; InVS 2008; Pascal, 2009). L’hypothèse de causalité de la relation entre la pollution atmosphérique et certains évènements sanitaires (voir Tableau 11) est à la base des méthodes d’évaluation des impacts.

Les effets liés à une exposition à long terme sont plus importants que ceux liés à une exposition à court terme, d’après les diverses études disponibles. De plus, ces expositions concernent des niveaux de pollution très bas, rencontrés dans de nombreuses villes européennes. Cependant, le niveau d’association à long terme entre un ou plusieurs polluants traceurs et un indicateur sanitaire varie selon les études menées dans différents pays. Cette variabilité pourrait refléter des différences qualitatives et quantitatives de la composition de la pollution atmosphérique urbaine ou des caractéristiques locales.

Certaines informations, qui pourraient être très utiles, ne sont pas toujours disponibles. Ce problème se pose principalement pour les effets à long terme, résultant d’une exposition chronique sur des années. En effet, pour estimer un impact sanitaire futur (nombre de cas…), on utilise des informations obtenues par des études épidémiologiques mettant en relation un nombre d’évènements sanitaires avec des niveaux d’exposition à un polluant traceur, représentant la pollution de l’air pour cette période passée. Or, entre temps, la composition du mélange de polluants aura vraisemblablement changé. De plus, la sensibilité de la population à la pollution de l’air risque d’évoluer avec l’augmentation progressive de son l’âge. Par ailleurs, les effets des particules ultrafines provenant du trafic routier restent encore peu connus, de même que les effets à long terme de l’ozone, peu étudiés.

Il serait intéressant de pouvoir estimer la part des polluants primaires dans les impacts totaux de la pollution atmosphérique et de la comparer avec celle des polluants secondaires.

Ceci serait particulièrement important pour observer la pertinence de l’indicateur que nous recherchons, puisque celui-ci ne traitera que des polluants primaires. Il est également possible que la répartition des effets attribuables à des polluants primaires ou non soient variable dans le temps et l’espace, notamment dans le cas des précurseurs.

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