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Facteur d’effet

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4. Évaluation des impacts sanitaires de la pollution de l’air

4.2. Méthodes d’évaluation des impacts sanitaires

4.2.3. Potentiels de toxicité

4.2.3.4. Facteur d’effet

Cette partie cible les méthodes mêmes d’appréhension des effets toxiques des substances.

Dans ces conditions, le facteur d’effet correspond au changement d’effet par changement de dose d’exposition (soit un nombre de cas par unité de dose d’exposition). Il peut être décomposé en deux sous-facteurs, l’un spécifique à la substance et l’autre à la maladie provoquée, comme le montre l’équation suivante (Huijbregts et al., 2005).

Dose

∂ correspondant au changement de la probabilité de la maladie m par unité de dose d’exposition.

Le Tableau 13 donne la valeur accordée au facteur d’effet du benzène pour ses effets cancérogènes et pour ses effets non cancérogènes. Ce facteur ne reflète pas la gravité relative de ces effets. Les incertitudes ne sont pas exprimées dans l’article pour ce niveau de détail.

Tableau 13 : Exemple du facteur d’effet proposé pour le benzène (d’après Huijbregts et al., 2005)

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4.2.3.4.1 Partie spécifique à la substance

Cette composante représente le potentiel toxique de chacune des substances étudiées.

Dans l’approche des impacts intermédiaires, elle constitue à elle seule le facteur d’effet.

Différentes données représentant un effet d’une substance peuvent être utilisées par les différents modèles. Il s’agit d’un des paramètres clés expliquant les variations entre les résultats de ceux-ci dans l’estimation des effets toxiques pour l’homme (Hauschild et al., 2008).

Le Tableau 14 donne les principales valeurs proposées, leurs principaux avantages et limites. Par ailleurs, il faut noter que seules les expositions par ingestion et par inhalation sont considérées (pas le contact cutané). Pour les polluants retrouvés principalement dans l’air, seule l’inhalation peut être incluse.

Tableau 14 : Comparaison des valeurs indicatrices pour le facteur d’effet (d’après McKone et al., 2006)

Valeurs indicatrices Avantages Limites principales

VTR : Mesures de

− Risque nocif plutôt que risque à faible dose

− Valeur expérimentale de la zone la moins fiable de la courbe dose-réponse

Ne sont pas encore largement adoptées bien qu’implicites dans la plupart des mesures

L’utilisation des doses efficaces (ou doses d’effet, ED50 ou ED10), doses journalière vie entière de la substance pour lesquelles 50 % (ou 10 %) de la population est affectée (ou probabilité de 50 % que l’effet se produise) a été préconisée à l’issue d’un atelier organisé par le groupe de travail sur les impacts toxiques de l’initiative sur les cycles de vie du PNUE/SETAC (McKone et al., 2006).

Les principaux critères à la base de cette décision concernent des aspects techniques pour les effets non cancérogènes : une VTR désigne un seuil en dessous duquel il n’y a pas d’effet alors qu’en ACV on considère que l’absence d’effet provient seulement d’une absence d’émission (Owens, 2002). De plus, les VTR ne sont pas conçues pour comparer des substances n’ayant pas le même mécanisme et la présence de facteurs de sécurité pour la toxicité humaine fait que le lien numérique avec la substance ne reflète ni un effet ni un mécanisme (plusieurs substances peuvent avoir numériquement la même VTR et pourtant agir par des mécanismes très différents, n’occasionnant pas les mêmes effets) (Owens, 2002). Des études spécifiques ont été réalisées pour les effets cancérogènes (Crettaz et al., 2002) et les

effets non cancérogènes (Pennington et al., 2002). Les valeurs toxicologiques de référence (VTR) élaborées par les organismes reconnus, tels que l’US EPA ou l’OMS (cf § 2.3.1) peuvent encore être utilisées dans certaines méthodes (Huijbregts et al., 2000). Ces deux approches sont détaillées ci-dessous.

L’équation (2) illustre l’utilisation des doses efficaces dans le calcul du facteur d’effet. Le sous-facteur spécifique à la substance correspond à l’inverse de cette dose (Huijbregts et al, 2005 ; Goedkoop et al ., 2009). Pour des raisons pragmatiques, ces travaux se basent sur les hypothèses d’absence de seuil d’action et de linéarité des courbes dose-réponses aux faibles doses.

Les effets cancérogènes et non cancérogènes sont séparés. Tout d’abord, les ED50 d’un grand nombre de substances (1547 – Gold, 2010) sont disponibles dans la base de données sur les potentiels de cancérogénicité (CPDB) (Huijbregts et al., 2005 ; Rosenbaum et al., 2008 ; Gold, 2010). Ce projet, développé à l’Université de Berkeley entre 1980 et 2005, comprend l’analyse de 6540 expériences animales à long terme sur le cancer. Il permet un accès rapide aux données expérimentales analysées et a standardisé les résultats obtenus via des protocoles très différents (durée, animal, voie d’exposition…). Les résultats sont disponibles sur le site Internet du projet (Gold, 2010). Ces valeurs sont utilisées quand elles existent. Cependant, il est important de signaler que toutes les substances pour lesquelles des ED50 sont disponibles dans cette base de données ne sont pas classées en tant que cancérogènes certains pour l’homme par le CIRC. Trois scénarios cohabitent en ACV sur la manière d’appréhender les risques, et ainsi de sélectionner les substances. Dans la vision « individualiste », seules les substances classées 1 par le CIRC, soit cancérogènes certains pour l’homme, sont à prendre en compte, alors que la vision « hiérarchiste » inclut en plus les substances potentiellement cancérogènes pour l’homme (2A et 2B selon le CIRC). La vision « égalitariste » considère de surcroît les substances non classifiables (3 selon le CIRC) et parfois même celles non classifiées. Par ailleurs, ces ED50 correspondent aux moyennes toutes voies d’exposition confondues. Or, pour une substance, toutes les voies d’exposition ne sont pas forcément efficaces, ce qui conduirait dans notre situation à prendre en compte des substances en trop.

Pour les substances non incluses dans cette base de données et pour les effets non cancérogènes, les ED50 doivent être calculés. L’équation (2) indique le mode de calcul, lorsque les données sur les relations dose-réponse dans la base IRIS de l’Agence états-unienne de l’Environnement (US EPA) sont suffisantes (Huijbregts et al., 2005).

t

avec ED50 p,r la dose vie entière (en kg) d’une substance p affectant via la voie d’exposition r 50% de la population humaine,

ED50 a,t,p,r la dose d’effet (en kg.kg-1 ou en kg.m-3) d’une substance p affectant par la voie r 50% de la population de l’espèce a testée pour une durée t ;

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Xr est le poids moyen d’un corps humain (70 kg) ou le taux moyen d’inhalation (13 m3 par jour) ;

LT la durée de vie moyenne (75 ans) ; N le nombre de jours par an ;

CFa est le facteur de conversion interspécifique ; et CFt le facteur de conversion du temps d’exposition.

Pour les substances cancérogènes, en absence de données expérimentales suffisantes, les ED50 sont estimées à partir des valeurs toxicologiques de référence, c’est-à-dire des excès de risque unitaire (qx

*, slope factor - § 3.3.3.4), de la base IRIS, d’après l’équation suivante.

50 *

1

p q

p CF q

ED = × (3)

avec CFq le facteur de conversion de 1/q* en ED50. Ce facteur de conversion est obtenu en prenant la moyenne géométrique des ratios entre l’ED50 humain et l’inverse de q* pour 64 substances.

Pour les effets non-cancérogènes, les ED50 pour les humains sont calculées selon la formule suivante :

r p N

r

p CF NOEL

ED50 , = × , (4)

avec CFN le facteur de conversion des doses sans effet (NOEL) en ED50, dérivé en prenant la moyenne géométrique des ratios de l’ED50 humain en NOEL de 21 substances.

En absence de NOEL, on utilise la dose la plus faible ayant un effet (LOEL), via un facteur de conversion CFL correspondant au passage d’une LOEL à une NOEL, selon l’équation suivante :

NOELp,r = CFL x LOELp,r

Cette dernière équation paraît cependant très approximative, puisqu’elle sous-entend que le rapport entre la dose sans effet (NOEL) et la dose avec le plus faible effet observé (LOEL) est constant. Or, ces valeurs dépendent fortement du protocole d’expérimentation et leur rapport n’est pas forcément significatif pour la substance. Il s’agit ainsi d’une formule appliquée uniquement au cas où très peu de données seraient disponibles, en suivant le principe qu’une estimation approchée vaut mieux que rien.

Il faut noter que ces facteurs de correction sont accompagnés d’une incertitude, correspondant à la racine carrée du rapport entre les 97,5e et 2,5e percentiles de la distribution de la variable. Or, cette incertitude n’est pas commentée, même quand elle paraît être importante.

Les valeurs de l’OMS sont préférées à celles de l’US EPA quand cela est possible. Les ED50 ont ainsi été calculées pour 463 substances pour une exposition orale et pour 58

substances pour l’inhalation.

La formule suivante (Huijbregts et al., 2000) propose l’utilisation de VTR pour prendre en compte la toxicité de la substance. Le facteur de toxicité correspond également dans cette situation à l’inverse de la valeur de référence.

avec DJEr,p,s,e la dose journalière d’exposition estimée pour la substance p via la voie r, à l’échelle s après émission dans le compartiment e (en kg.kgmc

-1.jour-1) et VTRr,p dans la même unité.

Pour l’inhalation, les VTR sont souvent exprimées en concentrations (mg.m-3). Les concentrations peuvent alors être rapportées en doses grâce au taux moyen d’inhalation, qui fournit le volume moyen d’air inhalé sur une période.

4.2.3.4.2 Partie spécifique à la maladie

Ce sous-facteur, illustré par l’équation (2) du développement de Huijbregts et al. (2005), repose sur la probabilité d’occurrence de la maladie et la répartition de la sensibilité dans la population considérée. Son calcul repose sur deux principales hypothèses de travail :

Additivité des doses pour des substances ayant le même mode d’action (mêmes effets critiques, avec la même cible moléculaire sur les mêmes tissus cibles et par les mêmes mécanismes d’action biochimique ou partageant un même intermédiaire) ;

Relation dose-réponse log-normale. Le choix de cette fonction de répartition pour modéliser les données expérimentales est relativement arbitraire, mais il est considéré comme vraisemblable d’après les auteurs de par l’existence de variables suivant une distribution log-normale dans divers domaines scientifiques, notamment les études toxicologiques de médicaments et d’après le théorème central limite (d’après lequel le produit d’un large nombre de variables indépendantes sera distribué log-normalement).

Une autre hypothèse est également posée : une maladie n’est provoquée que par un seul mode d’action. Ceci n’est pas forcément vrai, mais permet de simplifier l’affectation des substances aux effets auxquels elles sont associées.

Le facteur développé est compliqué et ni le mode de calcul ni les hypothèses sous-jacentes n’apparaissent.

Des probabilités d’occurrence des maladies ont été fournies par les travaux autour du fardeau mondial de maladies (Huijbregts et al., 2005 ; Goedkoop et al., 2009) pour les niveaux de 1990.

Ce facteur a ainsi été dérivé pour 49 maladies (Goedkoop et al., 2009).

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4.2.3.4.3 Complémentarité de ces sous-facteurs et estimation du facteur d’effet

Les différentes méthodes proposent des facteurs de caractérisation, qui peuvent être utilisés dans la réalisation d’une ACV. Cela se traduit notamment par l’expression du facteur d’effet en une forme plus générale. Dans le modèle USEtox, par exemple, le facteur d’effet est exprimé comme l’inverse de la dose multiplié par un facteur de 0,5 (0,5/ED50) (Rosenbaum et al., 2008).

Pour le modèle USES-LCA (Van Zelm, 2009), deux équations générales dans la méthode proposée par Huijbregts et al. (2005) sont dérivées, pour les effets cancérogènes (6.1) et non cancérogènes (6.2). linéaire aux faibles doses de la relation dose-réponse. Cette linéarité ne peut pas être vérifiée par des essais et dépend du modèle utilisé.

* avec la méthode log-normale (21 fois pour les effets cancérogènes et 35 pour les autres). Ces résultats sont interprétés comme indiquant que la méthode linéaire conduit à un facteur potentiellement plus conservatif, c'est-à-dire plus sécuritaire.

Les constantes étant différentes d’une méthode à l’autre, il est important de connaître les hypothèses derrière celle qu’on utilise, ce qui permet de mieux contrôler les incertitudes sur les résultats et leur interprétation.

4.2.3.5. Points forts et limites pour les effets sanitaires

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