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Statuts des langues et politique linguistique au Liban

4.2 La politique linguistique au Liban

La notion de politique linguistique connaˆıt plusieurs acceptions, elle r´ef`ere `

a des situations diff´erentes qui lui conf`erent de nombreux concepts. Toutes ces consid´erations attestent qu’elle est difficile `a manier. Selon Halaoui (2011), dans son acception minimale, la notion de politique linguistique renvoie `a la conception th´eorique sous-jacente `a la r´ealisation d’un ensemble d’actions sur la langue. Dans ce cas la politique linguistique est une chose, les actions sur la langue en sont une autre. Elle se d´efinit alors comme : l’ensemble des choix conscients effectu´es dans le domaine des rapports entre langue et vie sociale13.

La politique linguistique consiste `a prendre des d´ecisions majeures suprana-tionales ou nasuprana-tionales (Chaudenson 1989 : 100-101, 1996 : 16)14. Il s’agit donc du niveau de d´ecision o`u sont r´efl´echies et propos´ees les actions `a entreprendre. La politique linguistique correspond ainsi `a la phase la plus abstraite d’une op´ e-ration d’am´enagement linguistique consistant en la formulation d’objectifs. Elle est d´efinie comme la conception th´eorique qui pr´eside `a la r´ealisation d’actions de celui-ci15. Ainsi, sans son acception large, la politique linguistique r´ef`ere `a l’en-semble des actions entreprises sur la langue. Que ces actions soient r´ealis´ees ou en cours de r´ealisation16. L’observation de la politique linguistique sous l’angle de sa configuration permet `a Halaoui (2001) de mettre au jour : des politiques seulement pens´ees, des politiques explicites, des politiques implicites.

Les politiques linguistiques pens´ees

Contrairement `a l’id´ee d´efendue par Chaudenson (1996 : 119-120) selon

la-13. Calvet,op. cit., p. 2.

14. Nazam Halaoui. « Politiques linguistiques : faits et th´eories ». Dans : Ecritures, Paris (2011), p. 20.

15. Ibid., p. 146. 16. Ibid., p. 20.

quelle « des pays r´ev`elent des actions sur la langue mais n’ont pas de politique linguistique », ou de politique linguistique nettement affirm´ee (Clavet 2001 : 170), il apparaˆıt que l’action humaine dans le domaine des langues est toujours motiv´ee et la motivation en constitue en quelque sorte la politique ou la conception qui lui sous-jacente. La politique linguistique peut ˆetre plus ou moins ´elabor´ee sans que cela ne lui enl`eve son caract`ere politique. Par exemple, la politique du « laisser faire » repr´esente bien d’une certaine mani`ere une politique linguistique. Il en r´e-sulte qu’il n’est pas de pays qui n’ait pas `a son actif des actions sur la langue. Les politiques linguistiques pens´ees semblent ˆetre aujourd’hui les plus nombreuses.

Les politiques linguistiques explicites

Une politique se d´efinit comme celle qui pr´esente clairement ses objectifs, leurs justifications et les modalit´es de leur mise en œuvre. On peut donner en exemple la politique qu´eb´ecoise de la langue fran¸caise qui fonde l’am´enagement linguistique de la province du Qu´ebec pr´esent´ee devant l’assembl´ee nationale de la province en 1977.

La politique linguistique implicite

Une politique linguistique est implicite lorsqu’elle transparaˆıt seulement de la r´ealisation des actions men´ees sur la langue, quand elle n’est inductible que de l’observation de ces mˆemes faits. Une telle politique se manifeste de deux mani`eres : elle apparaˆıt dans le discours de ceux qui d´efendent ou critiquent ses r´ealisations, on la trouve aussi dans les ´ecrits (des journalistes ou chercheurs) qui la d´ecrivent en vue de la rendre publique. Dans ce cas elle est plus ou moins noy´ee dans la description des actions auxquelles elle a donn´e lieu. On peut citer en exemple la politique linguistique des ´etats du Maghreb (Alg´erie, Maroc, Tunisie) en faveur de l’arabe qui ressort des travaux de Graguillaume (1983).

Le concept de politique/planification par d´efaut a ´et´e propos´e par Calvet (1983) `a propos de la situation dans certains pays africains. Le mˆeme concept a ´et´e repris par Baggioni (1991, 1996) `a propos de la situation de l’Ile Maurice, de Madagascar et de l’Alg´erie. En d’autres termes, il arrive dans bon nombre de pays que le choix ne soit pas formul´e clairement, il est plutˆot assimil´e `a une planification linguistique par d´efaut. Dans ce cas, on peut faire r´ef´erence aux travaux de Jean-Louis Calvet qui distingue : la politique linguistique qui met en pr´esence le naturel et l’artificiel, c’est-`a-dire la gestion in vivo et la gestion in vitro et la politique linguistique qui met en pr´esence l’unit´e et la pluralit´e o`u l’action sur la langue se distingue de l’action sur les langues. En proposant cette typologie, l’auteur se situe dans le cadre de l’administration de la langue par l’homme, ce qui permet d’observer les types de gestion du plurilinguisme.

La gestion in vivo concerne les modalit´es selon lesquelles l’homme, face `a un probl`eme de communication, agit sur la langue de mani`ere spontan´ee, sans avoir ´et´e dirig´e par quiconque. Par opposition au premier type de gestion (in vivo), la gestion in vitro concerne les modalit´es selon lesquelles l’homme agit sur la langue de mani`ere provoqu´ee et organis´ee.

La typologie « glossique » de B. Heine

Heine (1992 : 23-27) s’int´eresse aux politiques linguistiques publiques, celles qui ´emanent d’un ´Etat, et `a la communication linguistique nationale selon que celui-ci fait usage d’une langue nationale ou d’une langue ´etrang`ere. Il distingue : les politiques linguistiques endoglossiques et les politiques linguistiques exoglos-siques.

Les politiques linguistiques endoglossiques

communication primaire. Ces politiques linguistiques sont soit r´eellement prati-qu´ees, soit ne le sont pas vraiment. Les premi`eres ont pour objectif d´eclar´e de promouvoir les langues comme moyen de communication au gouvernement, dans l’administration et l’´education, primaire, secondaire. Les secondes s’assignent aussi pour objectif de promouvoir les langues locales mais elles favorisent l’utilisation d’une langue ´etrang`ere au gouvernement dans l’administration, l’enseignement sup´erieur et la presse ´ecrite.

Les politiques exoglossiques

Dans les politiques linguistiques exoglossiques, on retient une ou deux langues ´etrang`eres comme langues officielles, dans l’administration ou l’´education `a l’ex-ception parfois des premi`eres ann´ees du primaire o`u des langues nationales peuvent ˆetre utilis´ees. Ces politiques font usage de langues ´etrang`eres comme langues de communication primaire. Elles sont `a l’œuvre dans tous les pays d’Afrique noire en g´en´eral. Bien qu’il y ait certaines lois qui r´egissent les statuts des langues, la politique linguistique du Liban est donc de laisser faire et exoglossiques.