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Le plan d’aménagement et de développement, le schéma d’aménagement et de

PARTIE II : L’intégration de l’adaptation aux changements climatiques au droit

CHAPITRE 8 : La Loi sur l’aménagement et l’urbanisme et l’adaptation au

8.1 Le plan d’aménagement et de développement, le schéma d’aménagement et de

Il existe deux communautés métropolitaines au Québec, soit Québec et Montréal. En vertu de la LAU, elles ont l’obligation de maintenir en vigueur un plan métropolitain d’aménagement et de développement (ci-après : « plan métropolitain »). Son contenu est prévu à l’article 2.24 de la LAU :

2.24 Le plan métropolitain, dans une perspective de développement durable,

définit des orientations, des objectifs et des critères aux fins d’assurer la compétitivité et l’attractivité du territoire de la communauté métropolitaine. Les objets sur lesquels portent les orientations, les objectifs et les critères sont les suivants:

[…]

7° l’identification de toute partie de territoire de la communauté qui, chevauchant le territoire de plusieurs municipalités régionales de comté, est soumise à des contraintes majeures pour des raisons de sécurité publique, de

santé publique ou de bien-être général. [nos italiques]

Une fois le plan métropolitain adopté, la communauté métropolitaine visée doit faire le suivi et la mise en œuvre de celui-ci. Les dispositions sur le sujet ne mentionnent aucunement l’ACC, mais on retrouve la mention de « développement durable », comme souligné au paragraphe précédent. L’absence d’une obligation de considérer les changements climatiques dans l’élaboration du plan ne signifie toutefois pas que cela n’a pas été fait, au contraire, tel qu’en fait foi le plus récent plan métropolitain de la Communauté métropolitaine de Montréal.

Dans ce dernier, diffusé en 2012, la communauté métropolitaine de Montréal avait entre autres comme objectif d’identifier les zones de contraintes majeures qui chevauchent le territoire de plusieurs MRC. Elle en a ainsi identifié six, dont le risque d’inondation. Toutefois, dans la politique, celle-ci n’est pas traitée avec les cinq autres contraintes. Elle est plutôt abordée dans la section réservée à la protection de l’environnement, plus

précisément en ce qui concerne la protection de rives et des plaines inondables475. Le plan indique que la « Communauté demande aux MRC et aux agglomérations du Grand Montréal d’intégrer à leur schéma d’aménagement et de développement la cartographie et les cotes des zones inondables pour les cours d’eau chevauchant le territoire de plusieurs MRC »476. Le but est non seulement d’assurer la qualité des cours d’eau, mais aussi la sécurité des personnes et des biens477.

Ce plan métropolitain vise aussi l’« identification des risques associés aux incidents climatiques et chevauchants plusieurs MRC »478. Plusieurs risques climatiques y sont mentionnés, dont des variations des précipitations, mais les risques d’inondation n’y sont pas traités spécifiquement. Cela s’explique par leur catégorisation comme un enjeu qui relève de la protection du milieu naturel. Il est possible de constater, avec cet exemple, que les risques d’inondation peuvent être associés à diverses problématiques et qu’ultimement, ce sont des efforts de classification ou des choix politiques qui dictent l’angle sous lequel ces problèmes sont abordés.

Ces plans sont l’occasion pour les communautés métropolitaines d’élaborer une vision globale pour l’ensemble des municipalités sur leur territoire479 et d’identifier les problèmes qui transcendent les frontières administratives. Grâce à la nécessité d’identifier les zones soumises à des contraintes majeures en matière de sécurité publique, la préoccupation des changements climatiques et de l’adaptation peut y être intégrée. Bien qu’il n’existe que deux communautés métropolitaines, elles regroupent environ 4 millions d’habitants480 ce

475 Communauté urbaine de Montréal, Plan métropolitain d’aménagement et de développement - Un grand

Montréal attractif, compétitif et durable, 2012 à la p 183, en ligne : <http://cmm.qc.ca/fileadmin/user_upload/pmad2012/documentation/20120530_PMAD.pdf> (consulté le 20 octobre 2017).

476 Ibid à la p 190. 477 Ibid.

478 Ibid à la p 10.

479 Pour une liste complète des municipalités, voir Loi sur la communauté métropolitaine de Montréal, RLRQ

c C-37.01, art 2 et Annexe I; Loi sur la communauté métropolitaine de Québec, RLRQ c C-37.02, art 2 et Annexe A.

480 Ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire, « Communauté métropolitaine de

Québec », en ligne : Site Web du MAMOT

<https://www.mamot.gouv.qc.ca/fileadmin/publications/organisation_municipale/cartotheque/CMQuebec.p df> (consulté le 12 février 2018); Ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire, « Communauté métropolitaine de Montréal », en ligne : Site Web du MAMOT <https://www.mamrot.gouv.qc.ca/fileadmin/cartes/cm/663.pdf> (consulté le 12 février 2018).

qui signifie que la vision qui y est énoncée a une influence sur près de la moitié de la population québécoise.

De leur côté, les MRC doivent maintenir en vigueur des schémas d’aménagement et de développement. Selon les auteurs Jean-Pierre St-Amour et Marc-André LeChasseur, « le schéma d’aménagement se veut d’abord et avant tout un document de planification élaboré à l’échelle régionale pour refléter des préoccupations générales tout en tenant compte des orientations gouvernementales »481. Les dispositions législatives relatives à ceux-ci prévoient des dispositions similaires à celles visant les plans métropolitains. L’article 5 de la LAU prévoit notamment que :

5. Le schéma doit, à l’égard du territoire de la municipalité régionale de comté:

[…]

4° déterminer toute zone où l’occupation du sol est soumise à des contraintes

particulières pour des raisons de sécurité publique, telle une zone d’inondation,

d’érosion, de glissement de terrain ou d’autre cataclysme, ou pour des raisons de protection environnementale des rives, du littoral et des plaines inondables; [nos italiques]

Malgré la similarité entre la disposition qui porte sur le plan métropolitain et celle sur le schéma d’aménagement, nous ne pouvons que souligner l’application explicite de cette dernière aux risques d’inondation.

Alors que l’article 5 prévoit les dispositions obligatoires d’un schéma d’aménagement et de développement, l’article 6 de la LAU énonce le contenu facultatif. Il s’agit notamment de la densité et des affectations du sol, des systèmes de transport prévus, mais aussi de la possibilité de déterminer les orientations en matière de « planification de l’aménagement et du développement durables du territoire »482.

481 Jean-Pierre St-Amour et Marc-André LeChasseur, Loi sur l’aménagement et l’urbanisme annotée,

Éditions Yvon Blais, (feuilles mobiles), I/4.

Le maintien en vigueur du schéma d’aménagement est l’obligation de la MRC483. Son implantation est toutefois la responsabilité des municipalités locales. Chaque municipalité qui se trouve sur le territoire de la MRC doit, sauf exception, adopter un plan d’urbanisme conforme au schéma dans les 24 mois de son entrée en vigueur pour l’ensemble de son territoire484. La LAU oblige les MRC à réviser leur plan d’aménagement aux cinq ans485 et elles peuvent le modifier en tout temps486.

L’intérêt tant du schéma d’aménagement que du plan métropolitain en ce qui concerne l’aménagement du territoire et la prévention des inondations est indéniable. Toutefois, il importe de souligner que ceux-ci « ne crée[nt] aucune obligation quant à l’échéance et aux modalités de réalisation des équipements et infrastructures qui y sont prévus »487. De plus, ils ne sont que des énoncés de vision stratégique. Ils n’ont pas d’effet contraignant sur la population488, qui doit plutôt se conformer aux règlements d’urbanisme, adoptés par les municipalités locales conformément au plan métropolitain et au schéma d’aménagement. Les municipalités locales sont responsables de la mise en œuvre du schéma d’aménagement. Cela se traduit par l’adoption d’un plan d’urbanisme et d’un règlement de zonage. Le premier est en réalité optionnel, mais une fois adopté, ne peut pas être abrogé489. Le contenu obligatoire du plan d’urbanisme comprend « les grandes orientations d’aménagement du territoire de la municipalité », les affectations du sol et certains renseignements en matière de transport490. Quant au contenu facultatif, il inclut, par exemple, les coûts de la mise en œuvre du plan et les zones à protéger, ainsi que « tout

483 Ibid, art 3. Elle n’a toutefois pas d’ « obligation quant à l’échéance et aux modalités de réalisation des

équipements et infrastructures qui y sont prévus », Ibid, art 32. Voir aussi Jacques L’Heureux, « Nature et effets d’un schéma d’aménagement et d’un plan d’urbanisme » (2000) 31:1 RDUS 3 aux pp 31‑32.

484 LAU, supra note 482, art 33 al 1. Deux exceptions existent : cet alinéa ne s’applique pas à la Municipalité

de Saint-Benoît-du-Lac et à la Paroisse de Saint-Louis-de-Gonzague-du-Cap-Tourmente, art 33, al 2.

485 Ibid, art 55. 486 Ibid, art 47. 487 Ibid, art 103.

488 Jean-Pierre St-Amour et Marc-André LeChasseur, Loi sur l’aménagement et l’urbanisme annotée,

Cowansville, Yvon Blais, Feuilles mobiles, Titre 1, p. 0/1. Voir notamment Recyclage St-Michel inc c St-

Michel (Municipalité), 1998 CanLII 12887, EYB 1998-06356 (CA); Municipalité régionale de comté de la Rivière-du-Nord c Ceveco inc, 1997 CanLII 10043, EYB 1997-02363 (CA); Saint-Michel Archange (Municipalité) c 2419-6388 Québec inc, [1992] RJQ 875, 1992 CanLII 2888 (CA); Saint-Mathieu-de-Beloeil (Municipalité) c 9016-4500 Québec inc, 2000 CanLII 19261; EYB 2000-21858 (CS).

489 LAU, supra note 482, art 81. 490 Ibid, art 83.

autre élément de contenu visant à favoriser un urbanisme durable »491. Le plan d’urbanisme est donc un outil directeur, qui permet d’avoir une vue d’ensemble des objectifs d’occupation du territoire.

Le règlement de zonage est quant à lui contraignant et opposable aux citoyens, ainsi qu’à la municipalité elle-même. Cet outil offre des pouvoirs importants aux municipalités locales quant aux usages permis sur son territoire. Elles peuvent, par exemple, lorsqu’il y a un cours d’eau ou un lac à proximité ou un danger d’inondation, « régir ou prohiber tous les usages du sol, constructions ou ouvrages, ou certains d’entre eux »492. Cela permet à une municipalité locale de prohiber ou de réglementer les constructions dans les zones de grand et de faible courant et, dans l’éventualité où un citoyen y construirait un ouvrage interdit, d’en ordonner la démolition493. Nous traiterons du zonage en détail un peu plus loin.

Les dispositions de la LAU sur le schéma et les plans d’aménagement et d’urbanisme ne mentionnent pas les changements climatiques. On y trouve toutefois, tel que vu dans les paragraphes précédents, l’expression « développement durable » lorsqu’il est question du plan métropolitain, de « planification de l’aménagement et du développement durables » pour les schémas d’aménagement et celle d’« urbanisme durable » en regard des plans d’urbanisme. Selon nous, l’utilisation de ces expressions inclut nécessairement la prise en compte de l’évolution du climat et des impératifs d’ACC. Il ne peut autrement y avoir de développement ou d’urbanisme durable. De toute façon, rien dans la loi n’empêche une communauté métropolitaine, une MRC ou une municipalité locale de considérer les enjeux d’ACC dans sa planification territoriale. Néanmoins, la mention explicite de l’ACC ou des enjeux liés aux changements climatiques aurait comme avantage d’éviter un débat sur la question ainsi que d’envoyer un message clair aux villes et aux municipalités.

Quoique l’aménagement du territoire soit un champ d’intervention prioritaire de la

Stratégie sur l’ACC, depuis 2013, les dispositions analysées de la LAU n’ont depuis subi

que très peu de modifications. La Loi visant principalement à reconnaître que les

491 Ibid, art 84 (8). 492 Ibid, art 113 (16).

municipalités sont des gouvernements de proximité et à augmenter à ce titre leur autonomie et leurs pouvoirs494, sanctionnée en 2017 et dont les dispositions sont actuellement en vigueur, a modifié l’article 6 en lui ajoutant le paragraphe 9, analysé précédemment495. Son préambule mentionne que « les municipalités exercent des fonctions essentielles et offrent à leur population des services qui contribuent à maintenir un milieu de vie de qualité, sécuritaire et sain, notamment dans un contexte de développement durable, de réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’adaptation aux changements climatiques ». Bien que certaines dispositions de la LAU aient été modifiées pour y intégrer la préoccupation du développement durable, ce n’est pas le cas pour l’ACC ou les