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2. LES PRODUCTIONS DES ÉLÈVES

2.4 La phase de validation

La photographie ci-dessous appartient à la phase de validation entre émetteur et l'élève-récepteur.

Photographie 11 : échanges autour de la validation

Date, septembre 2012

Les élèves échangent. La validation est immédiate. Il suffit d'un regard. Les deux trains ne sont pas identiques. Ils ont des similitudes comme les mêmes couleurs présentes dans les deux trains et le même nombre de cubes par couleur. Les deux trains ont aussi la même « taille » mais ils sont radicalement différents. Les élèves recherchent en quoi. Ils caractérisent les différences et pour cela, ils font un retour au message. Ils font des aller-retour du message aux constructions. Il est nécessaire de comprendre pourquoi le message ne convient pas ?

2.4.1 Retour sur la conception des messages

Le nombre va faire son apparition comme un moyen efficace d'émettre des messages dans l'élaboration des trains, par une prise de conscience des élèves que le nombre désigne et possède des statuts différents. Ils codent différentes représentations.

Nous montrons une photographie de trains. Ils sont dessinés par un élève avec le message correspondant. Ici, le « Journal du Nombre » nous semble particulièrement intéressant parce que l'élève gère la compréhension de la « structure du train » aussi bien dans le sens horizontal que vertical. Le Journal du Nombre (l'espace feuille) oriente en sorte le message, parfois l'élève pense que le message est erroné mais le train et le message sont simplement inversés. Ici, l'élève semble

avoir résolu la problématique de la véracité du message malgré l'orientation du message ou du train. L'élève a écrit des messages avec des nombres. Il a représenté alors le train correspondant au message. Inversement, il a « dessiné » le train et réalisé le codage du message. Ce travail dans le Journal du Nombre, par l'utilisation de la gestion de la page du cahier, dans le sens de la hauteur ou de la largeur, a fait prendre conscience de la validité et de la permanence du message en lien avec la représentation choisie. Nous faisons l'hypothèse que la représentation devrait aider à penser la structure du problème sans un enferment dans un mode de représentation. La photographie n° 12 semble montrer la compréhension de la permanence d'un message.

Essai 1

Considérons maintenant un autre travail dans le Journal du Nombre sur la situation des trains et la réalisation de messages. L'élève relie l'expérience (la construction du train avec les cubes) au dessin du train (carrés de couleurs). Il attache par un trait le nombre avec la lettre du nom de la couleur à la quantité. Le codage est doublé puisque le message est écrit en couleur 3 B, le nombre 3 et la lettre B sont écrits en bleu.

Photographie n° 12 : un train et un message (Journal d'Jean-Louis C)

Date, septembre 2012

L'élève explore les petits nombres qu'il raccroche à une quantité de cubes et à une couleur. Le message est la traduction de l'expérience, selon nous, puisque l'élève trace des liens de couleurs

qui relient le train dessiné et le message. Ce même élève dessine dans le Journal du nombre, un autre train et un autre message.

Essai 2

Photographie n° 13 : un train/tour (Journal d'Jean-Louis C)

Date, septembre 2012

Ce type de message a provoqué un travail autour de la permanence du message. Il dépend de l'orientation de la lecture du message et/ou de celle du train. Cela a amené une exploration spécifique des expressions, : « c'est pareil mais c'est l'inverse », « c'est presque pareil... », « le train est à l'envers … mais si on le tourne, c'est pareil … »

2.4.2 Les parties fictives

Un autre dispositif de la recherche ACE concerne les parties fictives. Ce sont des parties dont l'enjeu est de faire partager par tous les élèves les connaissances (les cas particuliers, les limites) que la situation contient mais que les élèves pourraient ne pas avoir rencontrées lors des parties de jeu. Les parties fictives permettent aussi comme le Journal du Nombre, la diffusion par un retour sur l'expérience et une avancée du temps didactique. Nous pourrions peut-être dire que les parties fictives permettent une institutionnalisation des connaissances en appui sur les connaissances de la classe (il s'agit d'une enquête/étude collective). Ce sont deux outils nécessaires à l'avancée du temps didactique mais de deux temps différents. Avec le Journal du Nombre, l'élève

travaille/étudie dans sa propre temporalité. Avec les parties fictives, l'élève travaille/étudie dans l'avancée du temps des savoirs de la classe. Parfois, ce sont les enquêtes réalisées lors des parties fictives qui sont reprisent pas les élèves dans le Journal du Nombre comme pour s'approprier encore mieux le savoir en jeu.

2.4.3 Le travail spécifique dans le Journal du Nombre

Nous présentons une des premières productions réalisées dans le Journal du Nombre.

Essai 1

Photographie n°14 : Les annonces en trois termes dans le Journal du Nombre

Date, le 25 octobre 2012

Nous formulons maintenant des hypothèses sur le rôle spécifique du Journal du nombre dans l'élaboration du nombre par l'élève. Nous rappelons l'enjeu d'autonomie qui consiste à rendre l'élève producteur des problèmes qu'il se donne à lui-même. Nous pensons fortement que le Journal du Nombre peut permettre une « étude distanciée » des connaissances apportées/découvertes lors de l'exploration des situations à partir du matériel des cubes et/ou du jeu des annonces « Dé et doigts » (pour les exemples référencés ci-dessous). L'élève, par ce retour dans le passé, procède à un « travail de fouilles » des mises en situation des différents modules. Il « revient » sur les connaissances naissantes et issues de l'expérience directe. Lors des mises à jour, les connaissances semblent se solidifier par les répétitions de l'exploration dans les différentes phases de jeu (aux contraintes évolutives). Avec l'usage du Journal du Nombre, nous pensons que les connaissances de l'élève pourraient se consolider par une enquête/étude spécifique. En fait, ce

temps est un « temps de retour » personnel sur les expériences de chaque élève. L'élève met à distance les temps de jeu et de gain (annonce gagnante) pour poursuivre l'enquête. Il s'oriente vers un gain plus symbolique (plus de connaissances mathématiques). Cette enquête/recherche d'un gain nouveau peut/doit garantir la certitude de gagner encore plus souvent au jeu des annonces. Pour cela, le savoir doit être stabilisé pour évoluer encore. Sans le temps de mise à distance, les parties de jeu apporteraient toutefois des connaissances par la répétition (la présence de plusieurs parties dans un même module) mais la particularité de ces connaissances sont leur « inscription » dans la situation. Ce sont des situations fortement « attachées » à la situation. Elles « dépendent » de la situation. Elles vivent et évoluent avec et dans la situation. Nous pensons qu'un savoir stabilisé pour être disponible en toute circonstance doit subir une réactualisation et une organisation des connaissances. Pour cela, l'élève doit donc revenir et réfléchir à ce qu'il pense avoir appris. Le moyen que nous choisissons de mettre à la disposition de l'élève est l'usage fréquent du Journal du Nombre. Nous précisons que si le retour est un retour individuel, son existence est évidemment le partage. Il permet l'accroissement des connaissances. Examinons ce que semble permettre ce retour à partir de la production d'élève présentée ci-dessus (ce travail appartient au Journal du Nombre de Michelle).

L'élève inscrit/note les connaissances de l'expérience directe du jeu mais si l'élève sait/connait que 2 + 2 + 2 c'est 6, il n'a pas nécessairement pris le temps de mettre en relation cette connaissance avec les autres connaissances qu'il possède sur le nombre 6. Il est réalisé avec le jeu des annonces lors de la contrainte des trois mains. Une équipe de trois élèves s'entend pour annoncer un nombre et le montrer en posant chacun une et une seule main sur la table. Que nous apprend le travail de l'élève ?

A chaque fois, les trains dessinés sont un long train bien supérieur à trois mains (5 + 5 + 5). L'élève ne tient pas compte de la contrainte des trois mains pour la structure (la longueur global) du train. Par contre, elle utilise la contrainte du dé pour les décompositions et notamment les constellations de 1 à 6. L'élève a produit quatre histoires vraies du nombre 6 en trois termes ( 2 + 2 + 2, 1 + 1 + 4, 3 + 3 + 0, 5 + 1 + 0) et deux autres décompositions pour le nombre 3 (1 + 2 + 0) et le nombre 2 (2 + 0 + 0). Le zéro est noté une ou deux fois dans la décomposition et permet de respecter la contrainte des trois mains c'est-à-dire les trois termes. (cf. la photographie ci-dessous)

Essai 2

La production suivante est issue du même Journal du Nombre (celui de Michelle). L'élève écrit une annonce en deux termes égale à un lancer en deux termes puisque ce dernier est réalisé avec deux dés.

Photographie n° 15 : les annonces en deux termes avec deux dés

Date, le 26 octobre 2012

La production semble montrer les liens/les relations que l'élève « tisse » entre les nombres. Par exemple, le relation du « un de plus », l'élève sait/connait que 8 + 3 = 10 + 1, c'est 11 et avec « un de plus, c'est 12 ». Elle devrait donc écrire (11 + 1 = 12 + 0), hors, ce n'est pas ce qui est écrit dans le Journal du Nombre (11 + 2 = 10 + 2). Les connaissances sur les nombres inférieurs à 10 semblent très stables (les décompositions sont toutes vraies). Nous dirions que les décompositions sur les nombres supérieurs à dix sont en cours d'élaboration (la décomposition pour le nombre 11 est vraie et celle pour le nombre 12 ne l'est que partiellement). Le nombre 6, c'est 6 + 0 = 3 + 3. Le nombre 3 c'est aussi la moitié de 6 (2 + 1 = 3 + 0). L'élaboration du nombre n'est pas seulement la connaissance de la pluralité des désignations d'un même nombre mais aussi la construction des liens entre les nombres et entre les différentes désignations (les propriétés, les rapports sont inclus). Toutes les décompositions avec les petits nombres sont justes. L'élève tente une exploration parmi les nombres plus grands. Le travail sur la longue durée à partir des petits nombres ne semble pas provoquer « d'enfermement » dans les connaissances maîtrisées puisque la situation contraint l'élève à explorer un « territoire inconnu ». C'est la situation (deux dés) qui crée cela. De plus, les annonces, ici, sortent de la contrainte du groupement de cinq (un main, c'est cinq doigts)

Les élèves explorent cette situation dans le Journal du Nombre et il semblerait que l'utilisation systématique du nombre par les élèves pour coder la quantité totale de cubes mais aussi la quantité

de cubes de chaque couleur devient une pratique de classe. Elle permet l'écriture de messages « gagnants » (performants) parce que « conformes » aux constructions futures réalisées à partir de la lecture des messages. Les deux usages du nombre, le nombre-tout (la somme des cubes) et le nombre-partie (pour chaque couleur, le nombre de cube correspondant) se banalisent. Nous poursuivons la construction de l'arrière-plan avec les premiers modules de la recherche ACE.

2.4.4 La contrainte de l'écrit

Dans le passage systématique, propre à ACE, du travail oral au travail écrit (symbolique), une nouvelle contrainte est apparue. L'élève doit écrire l'annonce. Il peut toujours s'appuyer sur les deux mains pour « construire » la décomposition mais il faut davantage utiliser l'écrit et notamment l'écriture conventionnelle du nombre. Quelles sont les conséquences produites par la contrainte de l'écrit dans le milieu : comment jouer au jeu des annonces, « dé et doigts » sans les mains et les doigts ?

L'élève, avons-nous pensé, peut coder l'annonce prononcée. Il possède l'écriture conventionnelle des petits nombres pour réaliser cette tâche. Il continue à jouer. Il respecte la règle du jeu qui oblige à dire et montrer. A l'écrit, montrer avec les doigts devient écrire avec une décomposition additive en deux termes. Pourtant, comment peut-il signifier qu'il s'agit pour notre exemple du nombre 2. Il lui reste à valider et prouver son gain. Comment écrire que 1 + 1 c'est 2 puisque l'élève ne peut plus montrer ni dire la relation ? Comment va-t-il prouver qu'il s'agit bien du même nombre ? Que peut-il donc faire ? Nous allons rechercher des traces, des indices qui puissent nous orienter parmi les stratégies pratiquées par l'élève afin de faire des hypothèses sur l'appropriation des signes et la compréhension du système numérique. Actuellement, nous poursuivons l'élaboration de la poursuite de l'arrière-plan commun auteur-lecteurs. Nous recherchons comment l'élève entre, aborde et négocie l'entrée dans la symbolisation par l'observation de quelques productions extraites du « Journal du Nombre ».

L'élève écrit dans le Journal du Nombre des questions mathématiques qu'il a rencontrées lors des diiférentes phases de jeu dans les différents modules. Ce travail (cf. la photographie 13 ci-dessous) nous montre un élève pour lequel le nombre n'est pas uniquement une écriture chiffrée associée à un mot-nombre.

L'enjeu de l'étude de l'égalité avec le signe « = » est de permettre un travail en profondeur sur les décompositions d'un nombre (ici, on observe un travail autour du nombre 6), avec l'exploration de la commutativité et la puissance du zéro.

Photographie n°16 : les décompositions

Date, 9 octobre 2012

Essai 2

A partir des signes « = » et « ≠ », nous faisons l'hypothèse que l'élève peut rechercher en quoi et comment l'annonce est différente. Est-elle plus petite, plus grande ? Et de combien ? Est-il toujours nécessaire de calculer pour comparer deux écritures additives.

L'égalité est une notion importante sur laquelle se greffe de nombreuses autres notions mathématiques qui entrent en relation avec le signe « = ». L'élève étudie l'égalité de deux écritures additives en deux termes. Il rencontre donc la partition avec par exemple l'écriture 3 + 3, mais aussi la commutativité avec des écritures du type 0 + 1 = 1 + 0 et enfin, l'élément neutre avec 4 + 0 pour maintenir l'égalité entre les deux écritures additives en deux termes.

Nous allons maintenant ajouter deux autres photographies qui montrent les objets sémiotiques de la recherche ACE. Il s'agit de la boîte à calculer et de la ligne graduée. Cette dernière (la ligne graduée) évolue au fur et à mesure de la construction du nombre pour devenir une ligne sans graduation.

Photographie 17 : la boîte à calculer

Date, le 14 octobre 2012

La boîte à calculer est un autre système sémiotique. Elle se compose de deux étages, l'étage supérieur contient le nombre-tout et à l'étage inférieur les nombres-parties (la décomposition). La consigne est de penser une annonce à trois termes en complétant la boîte à calculer. Les annonces à trois termes peuvent s'émanciper du « jeu des annonces » d'où des décompositions avec les nombres 8, 10 et 7.

Photographie n°18 : la notion d'égalité

Date, le 27 novembre 2012

Sur le cahier de droite, l'élève use des signes mathématiques « = » et « ≠ » pour préciser le gain. Si l'annonce est égale au lancer, l'élève gagne. Si l'annonce est différente, l'élève perd. C'est un premier critère de validation qui prend appui sur la ligne graduée. Il montrerait d'après nous la construction du « savoir que », c'est-à-dire d'une connaissance déclarative. La preuve est la ligne graduée et démontre l'équivalence du nombre et de l'annonce en trois termes. Le zéro montre sa neutralité. Sur le cahier de gauche, nous observons des annonces en trois termes. Elles sont d'un type particulier. L'élève conçoit l'annonce en trois termes à partir de l'annonce en deux termes. Il utilise le zéro comme élément neutre dont il fait varier la place dans les écritures additives. L'élève utilise ses connaissances anciennes pour construire de nouvelles connaissances.

Essai 5

Nous présentons maintenant un exemple de situation avec la ligne graduée dont le statut est double. Elle sert à représenter l'annonce en trois termes, c'est-à-dire à faire correspondre la décomposition additive (en trois termes) et le mot-nombre. Par groupe de quatre élèves, le lanceur (responsable du lancer de dé) valide l'annonce proposée par les trois élèves-annonceurs (chaque élève-annonceur utilise une et une seule main). Le trinôme a choisi un nombre et le montre à l'aide de trois mains. Puis, un élève représente l'annonce sur le journal du nombre à l'aide de la ligne graduée. Le lanceur-arbitre lance le dé. L'équipe gagne si et seulement si l'annonce est égale au lancer. On change les critères en fonction du module. La ligne graduée sert aussi de preuve pour valider le gain. La certitude mathématique est en construction. Avec l'utilisation du signe « + » pour écrire des nombres, nous remarquons que le nombre n'est plus seulement perçu comme une suite d'unités de un.

Essai 6

Photographie n°19 : la ligne graduée

Date, le 11 octobre 2012

Essai 7

Sur le même Journal du Nombre, nous observons la comparaison d'écritures additives. L'élève a entouré les décompositions du nombre 6. Cela qui lui permet d'user du signe « < » pour obtenir l'assurance que 3 + 3 < 10.

Nous précisons que l'année 0 correspond aux premières expérimentations dans les classes d'étude. Les séances de la progression ACE sont réalisées et modifiées si besoin. La place du Journal du Nombre dans la recherche ACE est donc pensée dès l'origine (cf. notamment Sensevy, 1996a, 1996b, 1998) comme un outil d'aide à la conceptualisation du nombre au moyen de l'enquête mathématique. Il est intégré au domaine « module Situations». La première mise en œuvre, sur le long terme, se déroulera pendant l'année 1, c'est-à-dire l'année scolaire 2012/2013. La seconde mise en œuvre se déroulera durant l'année 2, c'est-à-dire l'année scolaire 2013/2014.

Photographie n°20 : la comparaison

Date, le 22 novembre 2012