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ENVERS UNE PARTIE AU CONTRAT DE TRAVAIL

En cas de violation du contrat, la partie lésée peut vouloir résilier -ce dernier avec effet immédiat; demander une réparation (ou prendre des mesures disciplinaires) ; ou encore obtenir du juge une injonction (souvent à titre provisionnel).

A. LA RJ!SILIATION nu CONTRAT AVEC EFFET IMMJ!nIAT

Dans tous les systèmes considérés, la violation de l'obligation de paix peut justifier la résiliation du contrat de travail avec effet immédiat. Pour saisir la portée d'une telle sanction, il faut l'insérer dans un cadre plus général, celui des effets de la grève sur la relation individuelle entre l'employeur et le travailleur.

1. République fédérale d'Allemagne

Le 28 janvier 1955, en République fédérale d'Allemagne, le Tribunal fédéral du travail décida que la participation à une grève légitime ne constitue pas une rupture du contrat de travail, mais entraîne seulement la suspension des obligations du travailleur. Le rôle de la grève comme instrument de pression en vue de la réglementation

27 Préteur de Rome, 26 mai 1962, Massimario di giurisprudem.a deI lavoro, 1964, p. 382 sqq., 3&3 et 388. Ce jugement filt réformé pour d'autres raisons.

134 DROIT COMPW contrat de travail avec effet immédiat', sauf si la violation est de peu d'importance'. Il en va de même lorsque la grève est le fait de tra·

vailleurs non organisés, car les luttes sauvages restent dépourvues de légitimité '.

2. Suède

La question de savoir si la grève représente une violation du contrat de travail demeure délicate en droit suédois 5. En 1970, la Cour du travail décida qu'une grève illicite doit être assimilée à une absence injustifiée et qu'elle constitue Wle infraction sérieuse aux obligations du travailleur. Les salariés qui avaient participé à une telle grève furent suspendus à titre de mesure disciplinaire 6.

Un arrêt de 1975 illustre de manière plus nuancée la jurisprudence en la matière. Une grève illicite éclata dans un hôtel. Deux travail· sur cet ordre. Elles furent alors licenciées à leur tour. La Cour annula le licenciement des deux. premières travailleuses, en application de la loi sur la protection dè:-!'emploi. Le problème était de savoir si

toutes les parties ont le devoir de créer les conditions propices à la reprise du travail. Le congé régulier ou le renvoi immédiat n'entrent en ligne de compte que lorsque d'autres moyens de liquider le conflit se sont montrés inefficaces. Une telle condition sera rarement satis-faite au début de la grève. Il suit que le renvoi immédiat des deux premières grévistes ne se justifiait pas au regard de ces principes.

La solution fut en revanche différente s'agissant des travailleuses renvoyées plus tard. Le fait de continuer la grève malgré l'ordre de la Cour n'était pas excusable. Certes, le but des grévistes était de forcer l'employeur à reprendre leurs deux collègues. Mais cette ques-tion ressortissait à la compétence des tribuoaux. Compte tenu du refus de se remettre au travail, l'employeur était fondé à penser que le conflit ne pouvait être réglé rapidement, mais risquait de se pro-longer considérablement. En conséquence. le renvoi immédiat était fondé 7.

Au cours de l'élaboration de la loi de 1976, le secrétaire d'Etat déclara que le congé régulier et le renvoi immédiat pouvaient sanc-tionner un combat illicite, en particulier lorsqu'il est impossible de convaincre un travailleur de renoncer à une revendication qui est clairement en violation du contrat et de reprendre le travail 8. Le professeur Schmidt a suggéré qu'une telle sanction ne devrait pas être dans le pouvoir du seul employeur, mais que c'est à la Cour du travail qu'il appartiendrait de la prononcer'.

3. Etats·Unis

Les sections 7 et 13 de la loi Wagner, aux Etats·Unis, garantissent le droit de recourir aux mesures de combat, en particulier à la grève 10.

Cette garantie déploie en principe les effets suivants. Lorsqu'uo tra-vailleur entre en grève, l'employeur bénéficie de la faculté d'engager uo remplaçant pendant la grève et de le conserver après cette der-nière, étant précisé qu'il lui incombe le devoir de réemployer le gréviste dès que le poste est quitté par le remplaçant ou qu'uo autre poste semblable devient vacant. La relation de travail n'est donc pas brisée. Le gréviste jouit d'un droit préférentiel à être réemployé.

Tout refus de réemploi fondé sur l'appartenance au syndicat ou la participation à la grève est prohibé. Ainsi, il est interdit à l'employeur de licencier uo gréviste, que le congé soit régulier ou immédiat.

Cependant, la loi tient compte de l'intérêt de l'employeur à poursuivre

7 Schmidt, Law and ... , p. 222 sq.

8 Schmidt, Law and ... , p. 223.

9 Schmidt. Law and ... , p. 224.

10 29 V.S.C. 157 et 163. Voir aussi la sectiqn 158 (a) (1) et (3).

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l'exploitation de son entreprise, de telle sorte qu'elle fait courir au gréviste le risque d'être supplanté. La relation de travail ne s'éteint cependant pas. Le travailleur a le droit d'être réemployé, en conservant ses privilèges d'ancienneté 11.

La protection du droit de grève s'efface lorsque le combat en est tenu pour indigne. de par ses buts ou ses moyens. C'est notamment le cas lorsque le travailleur commet une pratique déloyale. Or, on se souvient que la section 8 (d) de la loi Wagner sanctionne comme telle toute mesure de combat tendant à modifier par la force le contenu de la convention pendant la validité de cette dernière. L'employeur peut alors riposter en licenciant les grévistes, de telle manière que la relation de travail soit définitivement rompue. C'est ce que le texte légal prévoit expressément 12. Il en va de même quand la grève contre·

vient à une clause de paix 13.

Les conventions collectives disposent souvent que la violation de l'obligation de paix du travail justifie le licenciement du gréviste.

Certaines d'entre elles prévoient que la question de savoir si le tra-vailleur en cause a participé à l'action non protégée est sujette à détermination par l'arbitre. Il est aussi quelquefois précisé que le congédiement ne sera pas infligé si c'est la première fois que le travailleur viole la convention 14.

4. France

L'article L. 521·1 du code français du travail dispose: «La grève ne rompt pas le contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié. » La jurisprude:nce a eu l'occasion d'examiner si le travailleur qui entre en grève maJgré l'existence d'une clause de trève pendant la conciliation commet Ûhe faute lourde. Elle a fourni une réponse nuancée, découlant de la définition même de la faute lourde, qui suppose, dans le cas d'une grève contraire à une telle clause, une participation volontaire et donnée en connaissance de cause. D'où une distinction entre deux sortes de grévistes: d'une part, ceux qui ont participé à l'arrêt de travail en sachant que cet arrêt violait une

Il Gorman, p. 328 sqq., 341 sqq., 348 sq.; Developing Labor Law, p. 526 sqq.;

Suppl. 1971·1975, p. 300 so.; Suppl. 1976, p. 145.

l2 29 U.S.C. 158 (d); Local 1113, United Electrical Workers v. NLRB, 223 F.

2d 338 (D.C. Cir., 1955). Voir aussi 29 D.S.C. 158 (b) (3) et (d) (4).

lB NLRB v. Sands Co. 306 D.S. 332, 334 (1939); NLRB v. Rockaway News, 345 U.S. 71, 80 (1952); Atkinson v. Sinclair Refining Co., 370 U.S. 238, 246 (1962); Suburban Transit Corp. v. N.L.R.B., 536 F. 2d 1018, 1020 (3' Cir., 1976).

Voir aussi International Union, United Mine Workers of America and Boone County Coal Corp., 117 N.L.R.B. 1095, 1097 (1957). Connan, p. 306.

l i Collective Bargaining Negociations ... , p, 77: 276 sqq.

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clause de conciliation, en particulier les délégués syndicaux et les meneurs; d'autre part. ceux qui ont simplement suivi par solidarité, en ignorant que la grève était contraire aux accords intervenus. Les premiers commettent personnellement une faute lourde, et risquent le renvoi immédiat. les seconds non 1$. Cette discrimination envers les meneurs a été vivement critiquée 18,

5. Italie

En Italie, certains auteurs ont aussi soutenu que la violation de la clause de paix peut entraîner un congé immédiat, quand bien même la grève ne fait, en principe, que suspendre les obligations dérivant du contrat de travail17Mais nous ne connaissons pas de décision en la matière.

6. Royaume·Uni

Pendant de longues années, il fut admis sans hésitation en Grande-Bretagne que le travailleur qui entendait se mettre en grève devait donner son congé en respectant le délai fixé pour la résiliation du contrat de travail!·. En 1963, Donovan L.J. sema le doute à propos de la signification et de l'effet d'un tel congé. Il souligna que l'inten·

tion du travailleur n'est pas de mettre fin au contrat de travail, mais au contraire de poursuivre la relation contractuelle, encore qu'à des conditions différentes 19.

De cette constatation pouvaient découler deux interprétations.

D'une part, la notification de la grève n'équivaudrait pas à une rési~

liation du contrat de travail. Ce dernier serait suspendu, non violé, du fait de la grève. Ainsi pensait le professeur Wedderburn 20. Lord Devlin l'entendit autrement. Pour lui, la notification ne visait pas à résilier le contrat, mais à informer l'employeur que l'obligation du travailleur allait être enfreinte. Dans l'esprit du travailleur, le contrat

Hi Cour de cassation, section sociale, 14 janvier et 5 mai 1960, I.C.P. 1960 II 11692. espèces 2 à 6, et note Lindon; Brun. La jurisprudence .... p. 646 sq.; Brun et Galland, p. 438; Sinay, p. 217 sq.; Despax et Pélissier, p. 239; G. Lenoir, Le contenu des conventions collectives, Droit social. 1955, p. 478 sqq.) 484; Mimin, La grève ... , p. 131; P. Mimin, Avant la grève: la clause de conciliation dans les conflits collectifs de travail, I.C.P. 1959 l 1467 bis.

16 Boitel, Validité .... p. 6 SQ.; Javillier, p. 513. VoU- aussi Sinay. p. 217 sq.

17 Pera, La sciopero ...• p. 633; Riva·Sanseverina. Per la vaIidità ... , p. 373.

18 Voir, au lieu de plusieurs, Grunfeld, p. 330 sq.; Cronin et Grime, p. 434 sqq.

19 Rookes v. Barnatd (1963) 1 Q.B. 623, 682 sq.

2Q Wedderburn, The Right ta Threaten Strîltes II. p. 529 sq.

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demeure en force jusqu'à ce que l'employeur le résilie en raison de la grève ". Ce point de vue, qui fut adopté par Lord Denning en 1965 ", se heurta à de vives critiques. Le professeur Grunfeld objecta que la notification a manifestement pour but de rendre licite l'arrêt de travail: le salarié entend éviter de violer le contrat 23.

La commission Donovan voulut distinguer entre deux situations.

Lorsque le travailleur notifie à l'employeur son intention de se mettre en grève, il annonce une violation du contratl même si le délai qui s'écoule entre la notification et l'arrêt de travail équivaut au délai de résiliation. En revanche, lorsque le travailleur informe l'employeur de son intention de résilier le contrat, la grève n'enfreint aucunement ce dernier, dans la mesure où le délai de notification est suffisant.

La commission refusa de se laisser persuader que, en réalité, le travailleur ne souhaite aucunement, en règle générale, mettre un terme au contrat. D'ordinaire, le travailleur aurait bel et bien cette intention. Il peut en outre se produire que la notification donnée par Je travailleur tende à résilier le contrat quand bien même elle semble se borner à annoncer l'arrêt du travail. C'est affaire d'inter·

prétation dans chaque cas particulier. S'agissant de la théorie de la suspension du contrat. la commission fut d'avis qu'elle soulevait de très nombreux problèmes. Il appartenait au parlement de les examiner avant de décider s'il jugeait bon de la traduire dans la loi ".

A peine un mois s'était·il écoulé depuis la soumission du rapport Donovan à la reine que Lord Denning, en 1968, revisa sa position, sans pour autant se ranger aux vues des commissaires. Il fit palinodie quant à l'intention présumée du travailleur. En notifiant l'arrêt de travail, celui-ci ne manifeste ni l'intention de violer ses obligations ni celle de mettre un terme au contrat. Il veut seulement suspendre ce dernier. Le magistrat adhérait donc à la doctrine de la suspension, qu'il considérait comme 'conforme au droit moderne des conflits col·

lectifs 25. Des trois juges à la Cour d'appel, Lord Denning fut le seul à énoncer clairement ce principe. Lord Davies parut incliner en sa faveur 2., mais la solution qu'il atteignit dans le cas particulier peut s'expliquer par d'autres raisons 27. C'est dire que la portée de la décision restait incertaine.

En réalité, il semble que la théorie de la suspension ne l'a pas emporté. En 1976, le Tribunal d'appel du travail déclara que l'arrêt

" Rookes v. Barnard (1964) A.C. 1129, 1204.

22 Stratford V. Lindley (1%5) A.C. 269, 285.

23 Grunfeld, p. 332 sqq.

24 Rapport Donovan, p. 243 sqq.

25 Morgan v. Fry (1968) 3 Ali E.R. 452, 458.

26 Ibid., p. 461. Voir K. Foster, Strikes and Employment Contracts, Modern Law Review, vol. 34 (1971), p. 275 sqq., 281.

27 Cronin et Grime, p. 440.

139 immé-diat ". Cependant, il a été suggéré que lorsque la grève est très courte, la violation du contrat ne présente pas une gravité suffisante pour justifier une telle sanction 30.

Si la grève en l'absence de résiliation constitue de toute manière une violation du contrat, quel rôle jouera une clause de paix qui, on l'a vu, peut être insérée dans celui-ci? Selon le professeur Grunfeld, lorsque le contrat individuel renferme une telle clause, cela signifie que le travailleur s'interdit de le résilier (même en respectant le délai de congé) dans le dessein d'exercer une pression 81. En d'autres dans une certaine mesure, le principe de la suspension. Elle prévoyait que, fournie à temps, la notification de la grève ne devait pas être interprétée comme un avis de congé ou une répudiation du contrat 33.

En conséquence, le fait de prendre part à une grève après due notifi-cation ne pouvait être considéré comme une violation du contrat de travail aux fins d'une action en responsabilité contractuelle intentée contre le travailleur". Cependant, la notification de la grève ne pri-vait pas l'employeur du droit de renvoyer le travailleur M. En d'autres termes, la suspension n'avait qu'une portée limitée. Bien que le contrat demeurât en force nonobstant la grève et que l'employeur ne pût

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Toutefois, cette suspension limitée ne se produisait pas si le gré-viste enfreignait une disposition du contrat de travail limitant le recours aux moyens de combat, c'est-à-dire une clause de paix for-mulée dans une convention collective et renfennée, implicitement ou par voie de référence, dans les contrats individuels. Le travailleur risquait alors et le renvoi et l'action en dommages-intérêts 37. La loi de 1971 différenciait donc, mais faiblement, selon, ou non, qu'une clause de paix se trouvait insérée dans le contrat individuel.

Si la grève ne suspend pas le contrat de travail selon le droit actuel (ni, en pratique, sous l'empire de la loi de 1971), le travailleur bénéficie d'une protection importante que l'on ne saurait négliger:

les textes de 1971 et de 1974 prohibent les renvois déloyaux. Quand bien même l'employeur a le droit de congédier ses travailleurs en grève, il ne peut procéder de manière sélective. La loi tient le renvoi pour déloyal s'il touche quelques grévistes seulement (par exemple les meneurs) ou si, après que tous les grévistes ont été congédiés, l'employeur n'en réengage que quelques-uns 38. D'une grande efficacité pratique, une telle protection s'étend sur les travailleurs sans égard au point de savoir si ces derniers ont enfreint une clause de paix.

B. LES DOMMAGES-INTÉRllTS BT LES MESURES DISCIPLINAIRES

Si le congé avec effet immédiat forme une réponse draconienne, on rencontre aussi d'autres sanctions: la réparation du préjudice et les mesures disciplinaires. En réalité, la frontière entre ces deux types de sanctions n'est pas toujours facile à marquer.

1. Répu/;ùque fédérale d'Allemagne

En République fédérale d'Allemagne, une grève enfreignant l'obli-gation de paix peut constituer un acte illicite aussi bien qu~une vio-lation du contrat individuel de travail. A ces deux titres, l'auteur encourt une condamnation à réparer le dommage 1.

37 lndustrial Relations Act. s. 147 (3). Cooper, p. 111 ; Cronin et Grime, p. 107;

Selwyn, Guide ... , p. 141; Rideout (1973), p. 80 et 393; Gayler et Purvis, p. 395;

Drake, p. 317.

3S IndustriaJ Relations Act, s. 26; Trade Union and Labour Relations Act,

paragr~ph 8 of Sch~ule 1; Rid:OUl (1973), p. 112 sqq.; Drake, p. 154; .Cooper, p. 101, Selwyn, Gwde ... , p. 128, Selwyn, Law of Employment, p. 129, Kahn·

Freund, p.

no

sq.; Stock v. Frank Jones (Tipton) Ltd. (1978) 1 Weekly Law Reports, 231, 234 (House of Lords).

l Brax et Rüthers, p. 162 et 170 sq.; SolIner, p. 93; Schaub, p. 902 sq.;

Bobrowski et Gaul, p. 565; Zollner, p. m.

Lorsque plusieurs auteurs ont causé ensemble ce dernier, ils sont responsables solidairement pour le tout 2. Cette règle a cependant été considérée comme inéquitable: chaque gréviste ne devrait répondre que de la part du préjudice qui est imputable à son propre compor-tements.

Quid si le syndicat lui-même a provoqué l'arrêt de travail? Selon les uns, la grève serait alors un fait purement collectif, de sorte que seule l'orgartisation pourrait être recherchée. Selon d'autres, une pareille solution aurait pour conséquence queles individus perdraient le sens des responsabilités, alors même qu'un dommage aurait été infligé par leur faute. En droit positif, la grève illégitime n'autorisant pas la suspension du contrat de travail, les salariés peuvent être tenus à réparation même si leur syndicat se trouve en faute 4.

En pratique, une condamnation individuelle à réparer le dommage ne semble jamais être intervenue: les demandeurs se sont toujours satisfaits de la constatation de leur droit 5. Certes, on souligne que le risque de devoir payer une somme considérable en couverture du préjudice ne manque pas de déployer un effet dissuasif 6. Mais la prévention n'est-elle pas le rôle de la peine plutôt que celui des dommages-intérêts?

2. Suède

Lors de l'élaboration de la loi de 1928, en Suède, le parlement écarta la proposition des experts qui suggéraient de mettre à la charge des personnes violant la convention une sorte d'amende fixée indépen-damment de l'étendue du dommage et versée à la victime. Il posa que seule la réparation du préjudice devait être visée. Toutefois, pour protéger le travailleur contre la nécessité de payer de trop fortes sommes, il décida de limiter sa responsabilité à un montant de 200 couronnes (correspondant à l'époque à un mois de salaire) '.

Dans sa jurisprudence, la Cour du travail ne s'en est pas tenue au point de vue que l'allocation de dommages-intérêts tendait à répa-rer le préjudice. Au contraire, eUe a considéré le montant de 200 cou-ronnes comme le sommet d'une échelle pénale, la condamnation ayant

2 AP 3 zu § 1 TVG, Friedenspflicht (BAG, 17.12.1958). Nipperdey, p. 1041.

a Hasskamp, p. 106.

4 SaUner, p. 93; Schaub, p. 903; Siebrecht, p. 126. AP 3 zu § 1 TVG. Friedens-pflicht (BAG, 17.12.1958).

5 Daubter, p. 164.

6 W. ZOllner, über einige extreme Thesen zum Arbeitskampfrecht. Zeitschrift für Arbeitsrecht, vol. 4 (1973), p. 227 sqq., 231.

7 Schmidt, The Law ... , p. 213 sqq.; Schmidt, Law and .... p. 213 sq.

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davantage pour objet la prévention (par la punition) que l'indemni-sation 8. Les travaux préparatoires de la loi de 1976 montrent que cette conception a triomphé. Le secrétaire d'Etat indiqua en effet que l'on ne saurait exiger des travailleurs une indemnité qui dédom~

magerait pleinement l'employeur en cas de grève illicite. La condam-nation sert seulement à rappeler le principe que les conventions col-lectives sont de véritables contrats qu'il faut respecter. Le paiement d'un montant même modeste suffit à atteindre ce but 9. Au milieu des années soixante-.dix, deux cents couronnes représentaient un pouvoir d'achat extrêmement faible. Il arrivait que des travailleurs disent: «Je fais grève, parce que je peux payer deux cents pour obtenir une augmentation des salaires fixés dans la convention collective en vigueur. Une décision provisionnelle de la Cour leur enjoignit de reprendre le travail, mais ils l'ignorèrent. Ils furent condamnés à payer 400 couronnes chacun. Le dépassement de l'ancien montant maximum était justifié par la longueur de l'arrêt de travail que la convention doit être respectée. Bien que, en cas d'insoumission au jugement, le montani .... puisse être accru pour rendre plus fort l'ordre de reprendre le travail, il ne fallait pas que la condamnation à payer une somme d'argent fonne une pression équivalant à une contrainte de travailler sous peine d'amende. La somme globale devait donc rester modérée. Au cas particulier, la situation revêtait une gravité manifeste. Le président du syndicat était intervenu avec force pour mettre fin à la grève. mais vainement. Les travailleurs savaient

143 D'après l'article 43 de la loi de 1976, lorsque les travailleurs liés

143 D'après l'article 43 de la loi de 1976, lorsque les travailleurs liés