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PARTICIPATION : DES OPTIONS CLAIREMENT DIFFERENCIEES

2. Participation : un large éventail de fictions au service du pouvoir

Dans la mise en scène des situations de pouvoir, le pouvoir doit être cherché dans les caractéristiques d’une liaison avec le gouvernement ou avec la société civile pour ne pas affronter les enjeux d’une situation partagée entre gouvernants et gouvernés.

Dans cette situation unilatérale, la ressource du pouvoir est destinée à une activité stratégique pour intégrer tous les citoyens au gouvernement pour les uns, et en même temps peut être considérée comme une activité instrumentale pour faire participer la société aux enjeux publics, dans le cas de Bordas.

Au premier plan, la naturalité de la situation démocratique et les effets de légitimité du pouvoir en faveur des citoyens joue d’évidence, pour le lecteur.

Au deuxième plan, le pouvoir élargit l’angle d’analyse à l’action publique sous la forme d’un partage avec la société civile.

Sous l’effet des solutions envisagées, et au-delà des divergences constatées, la notion de pouvoir prend une dimension symbolique et fournit des arrangements pour la participation.

Nous nous sommes focalisés sur les aspects plus ou moins perceptibles de la participation, ce qui nous a conduit à nous intéresser plus spécifiquement au niveau d’implication des acteurs politiques sur les tâches qui leur sont confiées dans les propositions théoriques.

Dans le tableau suivant, nous avons simplifié les usages de la notion de pouvoir, et nous avons cherché à mesurer l’exercice du pouvoir en fonction du verbe qui lui a été associé.

A partir de l’éventail de définition, quatre verbes sont susceptibles de déterminer le jeu des possibles et de nous offrir des indications en matière d’exercice du pouvoir.

Dans le débat qui les noue avec la notion de pouvoir, nous présentons sur une progression traduisant le niveau probable d’implication : [appartenir/exercer/diriger/décider].

Ce sont donc quatre possibilités de participation que nous proposons de commenter en nous appuyant sur le tableau suivant.

Tableau 2 : Les idées directrices de la participation au pouvoir

a. Une posture en surplomb

Au premier niveau, pour Belin, Magnard et Nathan, le pouvoir est la propriété des citoyens dans le gouvernement et fournit les raisons d’agir à l’ensemble des citoyens.

Avec ce premier type de définition, le lecteur fait l’expérience de l’ascension des citoyens au gouvernement en démocratie.

Bien plus encore, la situation des citoyens observée depuis le gouvernement au prisme du droit renvoie à la naturalisation de la situation des citoyens au gouvernement en démocratie. La notion de pouvoir participe à clarifier le champ d’exercice de l’autorité des citoyens dans le gouvernement.

Sur ce premier modèle, l’orientation théorique est portée sur l’entrée des citoyens dans le système politique.

La plasticité institutionnelle des citoyens, prend forme sur la ressource du pouvoir comprise comme une capacité d’action consciente.

L’approche réputationnelle fait la publicité de l’ensemble des citoyens vers laquelle s’oriente définitivement notre compréhension de la démocratie.

Dans ce schéma, les trois énoncés n’établissent pas de relation directe entre le pouvoir et la participation pour les acteurs de la démocratie. Dans ce type d’expérience, les citoyens sont ceux qui possèdent le pouvoir, mais pas forcément ceux qui l’exercent. La participation n’a pas été abordée.

b. La gestion mécanique du pouvoir

Au deuxième niveau, dans la progression imprimée par le manuel d’histoire Hatier, l’orientation théorique se traduit cette fois-ci par la participation des citoyens au gouvernement.

Dans la description, les citoyens exercent le pouvoir au sein du gouvernement. Ce modèle d’intervention appelle deux remarques dans la manière dont l’argumentation peut être interprétée.

Primo, La légitimité des citoyens est interprétée dans la fonction gouvernementale, caractérisée sur une fonction mécanique vaste (exercer). En définitive, pour le lecteur, il est difficile de saisir les actes effectivement accomplis dans l’exercice du gouvernement.

L’exercice régulier du pouvoir correspond à un rôle d’administration ou encore à une forme de pilotage du gouvernement où se pose la question de la pratique autonome : « est-ce que les citoyens agissent pour leur propre compte, ou se bornent-ils à exécuter l’ordre quand ils exercent le pouvoir ? ».

Deuxio, la force de l’énoncé réside dans l’expertise des acteurs ordinaires, reconnue dans la généralisation de l’exercice du pouvoir acquis à l’ensemble des citoyens au sein du gouvernement.

A ce deuxième niveau, l’idée d’associer les citoyens à l’exercice du pouvoir, paraît donc attachée aux idéaux de mise en capacité des citoyens ordinaires.

c. La direction acéphale du gouvernement

A ce troisième niveau, la participation qu’élabore le manuel Hachette, prend sens dans la direction du gouvernement confiée à l’ensemble des citoyens.

L’agencement exagéré, en quête de direction tenue par l’ensemble des citoyens en démocratie, n’a pas de dimension réaliste dans notre toile interprétative.

Cependant ce modèle dépasse les deux autres parce que le sens attribué au pouvoir des citoyens en démocratie, précise les enjeux de pouvoir sur la participation à la direction du gouvernement.

Cette stratégie contribue à créer un répertoire d’action qui autorise l’ensemble des citoyens à développer leur prise d’initiative sur un axe, leur confiant la maitrise d’un scénario d’évolution.

Cette dernière situation affole les deux précédentes, car le sens de pouvoir crée une nouvelle voie stratégique pour les acteurs politiques avec un développement possible redevable à une forme d’intelligence collective, en terme organisationnel.

Pour l’ensemble des énoncés, la polyphonie des sens de pouvoir met en exergue la forme commune du pouvoir qui prend sa coloration sur un modèle d’acteur « les citoyens » dans une activité centralisée au gouvernement, toutefois coupée des réalités ordinaires, qui font le menu de l’expérience des citoyens.

Dans ses apports originaux, la question politique n’est pas définie par une compétence politique spécifique. La politique est envisagée depuis l’expertise ordinaire des gouvernants.

Notre dernier rendez-vous nous entraîne dans un autre contexte où la préférence va à la dynamique de groupe impulsée par les gouvernés, dans le cadre de la décision.

d. La décision, le pouvoir d’imposer

Dans les modèles théoriques, l’aporie scolaire que nous emprunterons au grec (aporia) littéralement sans chemin (a-poros) dans le CNTRL, immobilise le système politique sur un régime improbable où les opportunités d’intervention sont inexistantes ou de nature indéterminée.

Aporie évitée en partie par Bordas dont la proximité définitoire avec le modèle d’organisation athénien se construit sur la figure de la décision collective, un temps fort du processus de la délibération.113

Ce manuel d’histoire réintroduit la société dans le partage du pouvoir avec le gouvernement dans le système politique. Bordas conçoit la société comme un environnement d’acteurs politiques chargés d’aucune fonction publique, mais dont la participation est médiatisée par la décision, dans son rapport de pouvoir avec le gouvernement.

L’extension dynamique du projet politique concédée par Bordas, et son impératif politique de l’accès à la décision pour ceux qu’elle affecte, s’inscrit dans la réflexion éthique de Paul Ricœur, pour lequel on retrouve cette visée de l’accroissement de la participation « la démocratie est le régime dans lequel la participation à la décision est assurée à un nombre toujours plus grand de citoyens ».114

Pour notre part, cette définition, a minima, impose une forme intemporelle à la décision sans trahir l’originalité de la démarche théorique.

Dans cette voie la plus haute de la participation, la définition de Bordas doit être prise avec beaucoup de précaution sur les conditions de possibilités de l’action, laissées à la discrétion du lecteur.

Les insuffisances de la production symbolique de la décision sont compensées par le paradigme général du modèle familier de l’Ecclésia.

Dans les repères de la leçon, cette Assemblée se définit comme le lieu de vie politique des Athéniens, leur offrant l’opportunité de participer collectivement aux enjeux qui les affectent.

La délibération que nous ne confondons pas avec la décision, fait l’objet d’une démarche documentaire qui rend compte des problèmes objectifs de l’action collective à l’Ecclésia. La délibération fait apparaître l’intérêt d’une réflexion sur le modèle de décision institutionnalisé.

113. Chez Bordas la décision rend compte de l’accord collectif L’auteur fait remarquer que la décision collective ne fait pas l’objet d’un

partage d’expérience comme la discussion. Elle est le second temps de la délibération une fois celle-ci achevée.in LAMIZET, Bernard. La communication délibérative In : La situation délibérative dans le débat public : Volume 1 et 2 [en ligne]. Tours : Presses universitaires François-Rabelais, 2004 Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/pufr/7118>. ISBN : 9782869065000. DOI : 10.4000/books.pufr.7118. 1

114 In RICŒUR Paul. « Éthique et politique ». In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°5, 1985. pp. 58-70,

3.

Forme d’auto-critique de la société moderne à travers une gamme de

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