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En considérant l’ensemble des sphères familiales, les hommes sont majoritairement plus nombreux que les femmes (Tableau 12). Comme je le montrerai, cette situation a des implications sur la répartition des rôles dans la mobilité et des tâches dans les activités familiales (voir chapitres 5 et 6).

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Sphère familiale

(SF) Homme Femme Total

1 56% 44% 100% 2 54% 46% 100% 3 62% 38% 100% 4 66% 34% 100% 5 67% 33% 100% 6 54% 46% 100% 7 55% 45% 100% 8 54% 46% 100%

Tableau 12 : Répartition selon le genre de l’ensemble des membres des sphères familiales. Source : enquête famille (399 individus concernés).

Au final, ces éléments de caractérisation sociodémographique montrent une hétérogénéité de situations familiales. Certaines sphères familiales (1 et 7) ont un plus fort potentiel de dispersion (membres plus nombreux, ratios de dépendance faible). À l’inverse, d’autres sphères familiales (3, 4 et 5) ont des structures sociodémographiques plus défavorables à la dispersion, avec des ratios de dépendance plus élevés. Cette différenciation, qui sera confirmée par l’analyse du lien entre mobilités, activités et cycle de vie, joue un rôle de toute évidence dans la géographie de dispersion des familles.

2. Diachronie de la dispersion et des mobilités

Spatialiser la dispersion familiale suppose de considérer plusieurs composantes des mobilités spatiales, notamment les destinations (internes ou internationales, courte ou longue distance) et leurs formes (intensité, rythme). Toujours à partir des résultats de l’enquête famille, il s’agit de montrer non seulement que les lieux de l’espace de mobilité ne sont pas équivalents dans les stratégies de moyens d’existence des familles, mais également d’éclairer les reconfigurations du champ des migrations et des mobilités circulaires des familles rurales de la vallée du Río Negro depuis une cinquantaine d’années.

Pour rappel, l’espace de dispersion des familles inclut deux types d’espace : l’espace de référence (c’est-à-dire le périmètre formé par les localités d’étude dans la vallée du Río Negro) et l’espace des mobilités, dont le contour est défini par les pratiques des individus de l’enquête famille, qu’il s’agisse i) des mobilités résidentielles ou migrations (durée du séjour d’au moins six mois) ; ii) des mobilités circulaires, saisonnières ou non (durée du séjour inférieure à six mois). L’espace des mobilités, aux échelles à la fois internes et internationales, correspond donc à l’ensemble des lieux de destination.

130 Par ailleurs, deux paramètres me permettent de catégoriser les lieux de la mobilité. Le premier est la distance-temps qui sépare les lieux de destination des localités de référence dans la vallée du Río Negro. Cette distance-temps, autrement dit la durée du déplacement, est de toute évidence conditionnée par les moyens de transport utilisés par les individus et les conditions d’accès aux lieux137. Dans cette section et la suivante, et tout au long de la thèse ensuite, je distingue trois catégories de lieux selon ce critère de la distance-temps (Tableau 13).

Catégorie Distance-temps Mode de transport

1 Moins de 3 heures Voie terrestre

2 De 3 à 10 heures Voie terrestre

3 Plus de 10 heures Voies terrestre et aérienne

Tableau 13 : Catégorisation des distance-temps entre les lieux de destination et les localités de référence dans la vallée du Río Negro.

La première catégorie correspond à des lieux de destination situés à une distance-temps de moins de 3 heures par voie terrestre (trajet en bus, le plus souvent sur la journée). La seconde catégorie de lieux correspond à une distance-temps de 3 à 10 heures par voie terrestre (trajet en bus). Lorsque ces déplacements impliquent une traversée des frontières nationales, les moyens de transport varient en fonction du budget consacré au voyage, de la connaissance et de l’expérience du parcours, du statut du migrant (légal ou non) et de la période de l’année (voir chapitre 7). La troisième catégorie de distance-temps regroupe les lieux de destination situés à plus de 10 heures de voyage, par voie terrestre ou aérienne. Le mode de transport varie selon le pays de destination : l’avion pour l’Espagne et le Panama138. En revanche, se rendre aux États-Unis ne peut pas se faire en avion pour les habitants de la vallée du Río Negro qui, pour la plupart, entrent clandestinement par voie terrestre sur le territoire étatsunien.

Le second paramètre de catégorisation des lieux de la mobilité est leur niveau d’attractivité. La variable utilisée est le nombre d’évènements de mobilité recensés pour chacun des membres des familles et pour chaque lieu de destination.

137 Les durées de déplacement sont estimées pour des voyages effectués sans changement ou escale, même si cela ne correspond pas toujours aux réalités des déplacements des individus. Il est très fréquent en effet que les mobilités, surtout de longue distance, se fassent en plusieurs étapes et que le passage des postes frontaliers retarde le voyage. Cette question relative aux routes migratoires et pratiques de franchissement des frontières est plus spécifiquement traitée dans le chapitre 7, mais pour exemple le lecteur peut déjà se référer à la figure de l’Annexe 14:.

131 À partir de ces deux paramètres, l’espace de dispersion des familles est tout d’abord analysé de façon diachronique – des années 1950 à aujourd’hui – sur la base des trajectoires migratoires individuelles reconstituées lors de l’enquête famille, ayant permis de recenser les dates et les lieux des événements de mobilité (voir l’encadré n°6). Quels ont été et quels sont aujourd’hui les lieux de migration et de mobilité circulaire ? Comment a évolué l’incidence des mobilités internes et internationales, de courte et longue distance ? En d’autres termes, quelles ont été les étapes des systèmes de mobilités des familles de la vallée du Río Negro ?