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et la parenté sociale qui est plus représentée par le « fank »

Si nous revenons sur les belles sœurs, il faut percevoir la notion d’usufruit, qui est

véhiculée par le radical « ri » qui signifie : manger. La belle-sœur c’est celle qui a le droit

de « manger » et qui doit le faire. « ariman

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» , a-ri signifiant qu’elle mange. De la

même façon, le pluriel « kuriman » conjugue ce droit et devoir de manger « qu’elles

143 Fankaf : la concession 144

Filaf : le patrilignage 145

Kuriman : les belles sœurs 146

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mangent ». Et quand on prend le terme « furimanaf

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», elle est encore plus explicite par

son préfixe, « furi » qui veut dire manger en diola. Nous comprenons par ces désignations

les prérogatives dévolues aux belles sœurs du patrilignage. Ceci n’est qu’une forme

d’équilibre entre enfants du même « fank ». Nous sommes cependant, loin d’une toute

puissance des belles sœurs, au détriment des épouses. Il y’a une volonté d’équilibrer les

relations qui est très manifeste, à notre avis. Il faut relever d’ailleurs les suffixes

accompagnant les appellations des belles sœurs en diola. « Ariman », « kuriman », ou

encore « furimanaf », dans ces termes, il y’a la désinence « man », qui est le début d’une

action. Il nous semble que ce soit l’action de partir. La belle-sœur a le droit de manger et le

devoir de partir. En fait, nous partons du principe que l’appellation réelle, serait

« arimanajaw », ce qui pourrait se traduire par « qu’elle mange et qu’elle parte ». Ce terme

à lui seul définit les prérogatives et devoirs de chaque élément de la famille, et prévoit les

inter actions entre membres d’un même « fank ». Les femmes devant quitter la famille, une

fois mariées, reviennent pour manger leur part en quelque sorte lors des cérémonies. Il faut

d’ailleurs préciser qu’à ce propos, que l’on ne devient « ariman » qu’une fois mariée.

Le statut de « ariman » ou belle-sœur est une étape que la fille du patrilignage

acquiert avec le mariage. C’est la socialisation des femmes qui est symbolisée par le

concept de belle-sœur. Cela participe de l’équilibre familial et du partage des tâches dans

la société. Cela conforte une fois de plus que le rite de passage au statut de femme diola

passe par le mariage et surtout par la maternité.

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I.3.9 Le mariage diola

On intègre le groupe par le canal du mariage aussi. Ça concerne surtout les femmes.

Faut-il le rappeler, c’est une femme qui intègre un foyer, et partant un lignage. Nous

sommes en face d’une société virilocale, d’où cette intégration d’une femme dans un autre

groupe. Les rites diffèrent selon l’origine de la future épousée. C’est plus simple quand il

s’agit d’une femme issue du même village que le futur mari. Les choses deviennent plus

complexes quand la femme à accueillir vient d’ailleurs. Nous le voyons lors des

cérémonies de mariage.

Il y’a deux parties qui concernent les deux familles des futurs conjoints. La

procédure traditionnelle nécessite plusieurs étapes. Le mariage chez les diolas, comme

chez beaucoup de groupes traditionnels, engagent la collectivité. Ce n’est donc pas une

affaire entre individus, mais un contrat entre deux entités. On peut analyser cette situation

comme une demande et une acceptation et ce des deux côtés. Il y’a des codes communs au

groupe. Mais comme pour beaucoup d’autres cérémonies, d’un village à un autre, il y’a des

variations. Même si nous sommes face à un groupe qui revendique une égalité, il n’en

demeure pas moins que les échanges matrimoniaux sont bien étudiées et ne sont donc pas

aussi systématiques qu’on pourrait le croire de prime abord. Ainsi, en parlant de demande

et d’acceptation, cela concerne les deux parties. Le côté du futur conjoint, s’il est

visiblement dans une démarche de demande pour intégrer un membre, par l’épouse à venir,

dans son lignage, il y’a une autre partie moins évidente, d’acceptation de ce membre dans

le groupe. Cette partie ne se fait pas aussi simple, s’agit-il de diolas. A partir du moment où

les deux fiancés sont ressortissants de deux villages différents, la prudence reste de mise.

L’importance de l’appartenance à son terroir prend tout son sens ici. Le devoir de

protection des siens et partant de son village est encore plus important ici. Car pour les

diolas, le lignage est d’abord une structure qui prend ses racines depuis les ancêtres et qui

n’est pas le fruit du hasard. En conséquence, accepter un membre ne va pas de soi. Il faut

être sûr que le membre entrant n’est pas un élément qui va perturber l’harmonie du groupe.

C’est comparable à un organe qu’on veut greffer sur un corps déjà construit et structuré. Il

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n’est donc pas certain que la greffe puisse tenir. Dans ce cas, les conséquences peuvent être

dramatiques pour l’intégralité de ce corps.

C’est le patrilignage du futur marié qui s’occupe de la demande. Mais comme nous

l’avons déjà précisé, la lignée maternelle est toujours importante et a son rôle à jouer dans

la vie de l’individu. Mais là en l’occurrence, le père est mis en avant. Les émissaires

envoyés auprès des parents de la fiancée sont du lignage du père. Ce dernier n’est jamais

présent physiquement. Ce sont toujours ses frères de la même concession qui doivent

s’occuper de cela. Cela signifie que les enfants appartiennent au groupe, et il revient à

celui-ci de s’occuper d’eux. Le retrait du père ne fait que renforcer les liens internes au

groupe. Ce n’est nullement une fuite de responsabilité. Il est encore plus présent par cette

distanciation. C’est aussi valable pour la mère. Le mariage diola, est un des événements

qui permettent de réécrire l’histoire des familles. Pour les générations modernes, c’est

l’une des occasions, sinon la première qui va leur dérouler leur généalogie. Le système de

parenté est assez complexe pour quelqu’un qui ne le connaît pas. Lors des mariages, la

place de chaque membre va lui assigner un rôle. Il y’a d’abord le père/parrain

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) du

mariage qui va se charger des démarches auprès de la future belle famille. Son rôle ne se

limite pas à demander la main de la jeune fille pour son fils/filleul. Il ne s’arrête pas non

plus à la cérémonie. Une fois la demande acceptée, c’est encore lui qui est chargé d’aller

chercher la mariée pour la ramener à son fils. Une mariée est traditionnellement remise au

patrilignage à travers le parrain du marié. Cela signifie qu’il est garant de la réussite du

ménage, et est le premier interlocuteur sinon, le principal, s’il arrive des crises au sein du

couple. Une fois mariée, la femme peut exprimer ses ressentiments auprès du père/parrain

de son mari, pour qu’il intervienne. C’est l’ultime recours pour sauver le couple. C’est

encore lui qui est chargé de ramener symboliquement une fille à ses parents, quand il y a

divorce. Là en l’occurrence, il s’agit du divorce selon les coutumes diolas.

Concernant la future épousée, c’est également son patrilignage qui va recevoir la

demande en mariage et accorder ou refuser sa main. Elle est avant tout la fille de son

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Père/parrain : c’est un oncle du prétendant issu de son patrilignage qui en sera le représentant auprès de la belle famille

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lignage paternel qui doit céder une de ses membres. Mais là aussi, comme pour le futur

époux, la lignée maternelle a ses droits et veillera sur ses enfants.

Si actuellement, les mariages diolas se nouent avec des noix de cola, dans la

tradition, c’était le vin de palme qui scellait le mariage. Il fallait plusieurs voyages avant de

conclure le contrat de mariage. Il y’a ce qu’il est convenu d’appeler les présentations et les

salutations auprès de la belle famille. C’est la première étape qui enclenche la procédure du

mariage en tant que tel. Mais avant celle-ci, dans la famille de l’homme à marier, il y’a un

accord formel entre le père et son fils. C’est lui qui va informer ses frères et les autoriser à

faire les démarches de demande en mariage. L’acceptation est familiale, mais l’autorisation

est paternelle. Il y’a plusieurs consultations dans les deux familles au préalable.

Une fois la prise de contact faite entre les deux, la famille de la femme accepte le

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