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Pour débuter notre étude, il convient de dresser un très bref panorama de l’écosystème dans lequel s’inscrivent la plupart des organisations de la Management Education. Sans entrer dans un niveau inutile de détail, nous allons constater l’importance de la recherche. Cette orientation, perçue comme une nécessité, est traduite dans la mise en avant de cer- taines parties prenantes considérées comme incontournables, aux côtés de celle qui est a priori essentielle, le groupe des étudiants.

1.3.1. Les parties prenantes incontournables

Les organisations de la Management Education, puisqu’elles enseignent les Sciences de Gestion, sont contraintes de satisfaire à des exigences multiples, issues de la pléiade de parties prenantes. La littérature spécialisée, regroupée dans un champ dénommé « Mana- gement Education » [c] (e.g. Colby et al., 2011; French & Grey, 1996; Ghoshal, 2005; Pfeffer & Fong, 2002) qui s’intéresse aux nombreuses problématiques de la formation au

management et dont la simple existence tend à indiquer les difficultés de ses acteurs, ap- porte de nombreuses réponses et analyses qu’il convient de résumer tant elles éclairent notre cadre. Toutefois, l’empirie offre ici encore la meilleure des illustrations.

Visiter les sites internet des organisations qui contribuent à la Management Educa- tion, dans toute sa diversité, de la formation courte « post-bac » française à l’une des plus prestigieuses de ses institutions contemporaines étatsuniennes – ces dernières seraient dominantes sur ce marché (Lussier, 2014: 113) –, amène à constater immédiatement les nombreuses exigences qui pèsent sur cette « formation ». Il est bien entendu que la pré- sence de ces parties prenantes n’implique pas nécessairement, en elle-même, leur impor- tance ou leur prise en considération. Toutefois, une forte homogénéité des catégories re- présentées tendrait à indiquer un caractère « incontournable » de ces premières. Dans une thèse dont l’objectif n’est pas de discuter comment est organisée la Management Educa- tion par rapport à ses parties prenantes, réflexion déjà largement menée par ailleurs (e.g. Colby et al., 2011; Lussier, 2014), la prise en compte, au moins dans cette première phase dont l’objectif est de dresser un panorama du cadre de l’étude, des sources principales d’influence, semble suffisante. Le Tableau 1 (page 32) présente quelques données qui permettent de saisir les profils généraux d’un panel d’organisations de la Management Education ; il s’agit d’un « état » des lieux réalisé en 2015, aux alentours de la deuxième étidion du séminaire artistique étudié.

Le Tableau 2 (page 33) révèle la tendance multipolaire des parties prenantes de la Management Education. Toute organisation de la Management Education semble ainsi devoir répondre à un nombre assez effarant d’acteurs, dont les attentes sont pourtant ex- cessivement différentes. Il n’est pas question de nier l’aspect fonctionnel des supports de communication que représentent les sites internet institutionnels. Toutefois, il semble qu’une organisation de la Management Education ne conçoive pas son fonctionnement sans une association, proclamée très publiquement, avec ces parties prenantes, probable- ment parce que les « clients » ne conçoivent nullement qu’elle ne la « possède » pas. Tournons-nous vers la partie prenante centrale pour notre travail : les étudiants.

ENCADRÉ MÉTHODOLOGIQUE7 :

Les Tableau 18 et Tableau 2 (respectivement page 32 et page 33) présentent une analyse des différentes parties pre-

nantes mentionnées sur le site internet de chaque organisation. Il s’agissait de déterminer, parmi les cinq grands types de parties prenantes qui semblent importants, lesquels étaient mentionnés sur le support numérique institutionnel de communication de chaque organisation, et de quelle façon.

De nombreuses sources ont été utilisées pour l’analyse : site internet officiel, classements, documents proposés par l’entité, liste des accréditeurs (AACSB, EFMD, AMBA et CEFDG) etc. Ils ne sont pas tous mentionnés pour des rai- sons d’espace disponible. Toutefois, l’ensemble des informations provient d’une source fiable. Pour certains éléments, l’information n’est pas précisément identifiable ou « discutable » (e.g. le nombre de membres de la Faculté, en particu- lier par rapport à l’intégration ou non de certains profils) ; dans ces cas, une valeur approchée indiquée par « environ » (noté env.) est proposée, ce qui est suffisant dans le cadre de notre démarche. Pour les accréditations qui dépendent du programme (e.g. le Grade de Master), il a été choisi d’indiquer « oui » dès lors que l’un des programmes « phare » (e.g. MBA) est accrédité. Les informations correspondent à des éléments en constante évolution, ce qui implique que des écarts peuvent survenir entre la date de rédaction et de consultation.

La collecte de données a été réalisée entre le 23 juillet 2015 et le 30 septembre 2015. Les organisations ont été choisies afin d’obtenir un panel le plus représentatif possible de la Management Education ; toutefois, comme le terrain de la thèse est en France, une part importante a été donnée à ce pays dans le choix (critères utilisés : importance sur le mar- ché national, importance sur le marché français, et modèle alternatif à la « Business School » tel que l’Institut d’Administration des Entreprises). L’objectif était aussi de représenter les différents niveaux de formation.

Le Tableau 2 identifie la réponse aux critères ainsi :

- « Recherche », critère qui indique l’expression de l’intégration de l’acteur dans la « Recherche académique » : réfé- rence à la Faculté, à la Recherche, à une formation doctorale ou à des publications académiques ;

- « Entreprises et Organisations Clientes », critère qui indique l’expression de la capacité de l’acteur à proposer des

services à des organisations clientes, ou la volonté de produire des profils et/ou connaissances directement utiles aux organisations : référence à la formation « Executive » ou à ce type de programmes, référence à des publications profes-

sionnelles, des missions de « conseil-intervention » ;

- « Grand public », critère qui indique l’expression de la volonté de fournir des services utiles au grand public, tels que de la formation gratuite en ligne ; les critères sont : référence à des formations gratuites, des évènements grands pu-

blics, des productions grands publics (revues etc.), des vidéos accessibles à tous et produites par cette organisation ; - « Anciens », critère qui indique la volonté de proposer un espace d’expression aux anciens, de communiquer sur leur

réussite « exemplaire » ou de valoriser ce réseau ; les critères sont : présence d’un réseau d’anciens (Alumni etc.),

interviews d’anciens, présentation d’anciens ;

- « Étudiants actuels », critère qui indique l’expression de la volonté de prendre en compte les attentes et besoins des

étudiants actuels ou de les placer au centre de l’activité organisationnelle, avec un aspect « informatif » qui consiste à décrire les profils et un aspect « service » qui consiste à avancer des services aux étudiants actuels ; les critères sont,

pour l’aspect « informatif » : présence d’une référence à des étudiants actuels ; les critères sont, pour l’aspect « ser- vice » : présence d’une référence à des services étudiants (rubrique « campus », associations, intranet etc.).

7 Pour les données « annexes » de la thèse, i.e. celles qui ne représentent pas le cœur de l’étude sur

l’usage d’une pédagogie par l’art en pratique dans la formation au management, je me suis contenté de proposer un encadré méthodologique, à l’image de ceux utilisés par les revues telles que la Revue Française de Gestion.

8 Le budget pour ce tableau peut être le poste « dépenses » du « Compte de résultat » dans certains

cas (e.g. ENA). Pour les budgets, j’ai cherché à m’appuyer sur des sources telles que « rapports d’activité », fiche AACSB etc. Par ailleurs, « NP » signifie « Non Pertinent » et ND « Non Déterminé ».

Tableau 1 – Profil de 21 organisations de la Management Education (informations consultées entre le 25 septembre 2015 et le 30 septembre 2015)

Organisation Pays Année de création

Taille de la Faculté Full Time (dont % de Docteurs) Statut (pu- blic/privé) Informations particulières Budget et devise, en millions (année,

forme 20--) AACSB EQUIS AMBA

Grade de Master (pour la France) Rang Le Point 2015 (Mas- ters) Rang Finan- cial Times 2015 (Global MBA) École Nationale

d’Administration (ENA) France 1945 - public Pas de Faculté 42,3€ (14) NP NP NP ? NP NP (École) Polytechnique France 1794 1650 (per-sonnels) public

Formation de dirigeants mais pas de pro- gramme « busi- ness » 119€ (14-15) NP NP NP oui NP NP

emlyon Business School France 1872 107 (81,1%) privé - 57,4€ (14-15) oui oui oui oui 4 -

ESC Pau France 1969 33/38 privé - ? non non non oui (groupe) 31 -

ESCP Europe France 1819 132 (94,7%) privé - 77,5€ (14-15) oui oui oui oui 3 -

Faculté de Gestion – Universi-

té d’Angers France ND 59 public - ? non non non oui NP - Gordon Ford College of

Business – Western Kentucky

University USA 1884

66/75

(83,3%/81) public - 12USD (14-15) oui non non NP NP -

Grenoble École de Manage-

ment (GEM) France 1984 196 (68,9%) privé - 50,5€ (14-15) oui oui oui oui 6 - Harvard Business School USA 1908 234 privé - ? oui non non NP NP 1

HEC Paris France 1881 137 privé - 107€ (14-15) oui oui oui oui 1 16

HKUST Business School Chine 1991 150 env. public ? ? oui non non NP NP 14

IAE9 Lyon France 1956 150 public - ? non non non oui NP -

IAE Paris Sorbonne France 1956 38 public - ? non non non oui NP -

IE Business School Espagne 1973 234 privé - ? oui oui oui NP NP 12

IMD Suisse 1990 ou 1946/57

(fusion) 60 privé - 105,2CHF (14-15) oui oui oui NP NP 20

INSEAD France 1957 175 env. privé Pas de formation undergraduate 174€ (14-15) oui oui oui oui NP 4 ex aequo

IUT Gestion Lyon France 1967 (IUT) - public - ? NP NP NP NP NP NP

IUT Gestion Paris Descartes France 1968 (IUT) 150 (IUT) public - ? NP NP NP NP NP NP

London Business School Royaume-Uni 1964 146 public - ? oui oui oui NP NP 2

Montpellier Business School France 1897 83 privé ? oui non oui oui 12 -

Sciences Po Paris France 1872 200 public Formation de dirigeants 164€ (14) NP NP NP oui NP NP

9 Dans l’ensemble de la thèse, IAE pour les « Instituts d’Administration des Entreprises » par la suite, IUT pour les « Instituts Universitaires de Technologie ». Sauf

Tableau 2 – Expression des parties prenantes du même panel d’organisations de la Management Education qu’au Tableau 1, selon l'apparition de la partie prenante (oui ou non, avec naviga- tion verticale dans la page) sur l'accueil du site internet de chaque organisation (informations consultées entre le 23 juillet 2015 et le 30 septembre 2015)10

Organisation Pays Recherche Entreprises et Organisations clientes Grand public (exemples) (exemples) Anciens (informatif ou services pour) Étudiants actuels

École Nationale

d’Administration (ENA) France oui oui (formation continue et sur-mesure notamment) oui (vidéos de conférences, revue etc.) non plutôt non (webmail ?)

(École) Polytechnique France oui oui (Executive Education) oui (évènements) oui (rubrique) oui (accès)

emlyon Business School France oui oui (rubrique entreprise) oui (chaîne vidéo etc.) oui (rubrique diplômés, vidéos etc.) plutôt nonréseau par autre page) (informatif et accès au

ESC Pau France oui oui (Executive Education) oui (vidéos, réseaux sociaux) oui (profils anciens, rubrique etc.) oui (information + accès portail)

ESCP Europe France oui oui (formation continue) oui (vidéos, réseaux sociaux) oui (rubrique) oui (intranet + informations)

Faculté de Gestion – Universi-

té d’Angers France oui plutôt non oui (témoignages) oui (témoignages) oui (services + informations) Gordon Ford College of

Business – Western Kentucky

University USA oui oui (MBA dans sous-menu)

oui (conférences, réseaux

sociaux etc.) non oui (rubrique)

Grenoble École de Manage-

ment (GEM) France oui oui (Executive Education) oui (vidéo, iTunes U etc.) oui (rubrique) plutôt oui (accès ?) Harvard Business School USA oui oui (Executive Education) oui (site cours digitaux, lectures conseillées etc.) oui (rubrique) non

HEC Paris France oui oui (Executive Education) oui (conférences, cours digitaux etc.) oui (rubrique) oui (intranet)

HKUST Business School Chine oui oui (Executive Education) plutôt non oui (profils anciens etc.) oui (accès portail)

IAE Lyon France oui oui (Executive Education) oui (conférences etc.) oui (rubrique) oui (rubrique)

IAE Paris Sorbonne France oui oui (Executive Education) oui (vidéos) oui (témoignage) oui (rubrique)

IE Business School Espagne oui oui (Executive Education) oui (réseaux sociaux) oui (rubrique) oui (accès informations)

IMD Suisse oui oui (Executive Education) oui (contenus, réseaux sociaux) oui (rubrique) plutôt oui (accès ?)

INSEAD France oui oui (Executive Education) oui (conférences, liens vers vidéos) oui (rubrique) plutôt oui (accès ?)

IUT Gestion Lyon 1 France oui oui (rubrique) plutôt non plutôt non oui (intranet et services)

IUT Gestion Paris Descartes France oui plutôt non (nom rubrique inadéquat) plutôt non pour l’IUT plutôt oui (rubrique) oui (intranet et services)

London Business School Royaume-Uni oui oui (Executive Education) oui (revue) oui (rubrique) oui (accès et rubriques)

Montpellier Business School France oui oui (Executive Education) oui (réseaux sociaux) oui (rubrique diplômés) oui (accès et rubrique)

Sciences Po Paris France oui oui (Executive Education) oui (contenus) oui (rubrique) oui (accès et informations)

1.3.2. La paradoxale partie prenante essentielle

L’histoire contée par HEC Paris sur son histoire apporte une illustration complémentaire. L’extrait suivant, de nouveau issu des pages « historiques » du site institutionnel d’HEC Paris, l’indique largement : les étudiants, anciens comme présents, disposent depuis tou- jours d’un pouvoir d’influence connu et reconnu par l’institution elle-même.

« Créée en 1883, l'Association des diplômés joue depuis près de

130 ans un rôle majeur dans le développement et le rayonnement d'HEC. Les étudiants en hautes études commerciales ont su pro-

gressivement s'imposer comme une élite reconnue au sein de la so- ciété française et faire valoir leur diplôme comme l'un des plus pres- tigieux en Europe. En plaidant pour une profonde réforme des

études, l'Association est en partie à l'origine du tournant engagé à la fin des années 50, qui vise à rapprocher HEC du modèle améri- cain de la Business School. Alors qu'en 1881 la première promo-

tion d'HEC ne comptait que 57 élèves, l'Association anime aujour- d'hui un réseau de 45 000 diplômés, issus à la fois de l'Ecole, des Masters, du Doctorat et de l'Executive Education d'HEC. » (source : site officiel d’HEC Paris, « Histoire d’HEC Paris », pour l’année 1883 ; consulté le 22 juillet 2015 ; mon emphase)

Les étudiants sont ainsi les éléments centraux, car indispensables, de toute organi- sation de formation. Ils sont aussi déterminants car le niveau des « admis » définit sans doute, au moins en partie, le niveau de sortie, donc le niveau de l’établissement de forma- tion ; les travaux bourdieusiens indiquent la reproduction sociale issue des structures d’enseignement, reproduction largement située dans le recrutement des meilleurs par les meilleures institutions, ce qui rend difficile l’émergence d’un nouvel acteur d’enseignement d’excellence, car il peine à attirer les meilleurs (Bourdieu, 1989; Bourdieu & Passeron, 1970). Ainsi, le groupe des étudiants représente sans doute la partie prenante essentielle de toute organisation de formation. Quels sont les autres critères liés aux étudiants qu’une organisation de la Management Education cherche à valider ?

Si le contenu de la formation idéale est difficile à déterminer, notamment sa na- ture, sa reconnaissance est essentielle. Cette reconnaissance prend alors quatre formes, dont la valorisation semble varier selon les organisations et les cultures : une forme pu- blique largement représentée par la capacité à délivrer un diplôme reconnu par l’État, une forme privée représentée par les agences d’accréditations (notamment AACSB, EFMD et AMBA) qui délivrent des certifications privées assimilables aux démarches « qualité », une forme partenariale représentée par la capacité à lier des relations académiques avec

les autres organisations, et une forme marchande représentée par la capacité à attirer des clients professionnels qui confient la formation de leurs équipes à l’entité et qu’il con- vient donc de mettre en avant. Et globalement, une « recherche performante » est impor- tante pour l’obtention de ces différentes reconnaissances.

Un tel point de vue a largement été détaillé par Lussier (2014: 89–90, mon emphase), dans sa thèse de Doctorat en Sciences de Gestion. Ainsi, selon lui :

« Un établissement qui se démarque dans les classements internationaux aura

comme avantage d’avoir plus d’étudiants qui y postulent (Bowman et Bastedo,

2011 [cité par Lussier]), mais aussi il pourra attirer plus facilement des cher-

cheurs prestigieux. En plus, le fait d’être bien coté dans les classements permettra

à l’établissement d’obtenir plus facilement des subventions gouvernementales, phi- lanthropiques et venant des entreprises privées et publiques qui préfèrent s’associer avec des institutions d’enseignement prestigieuses (Henzelkorn, 2009 ; Marginson, 2007c,d [cités par Lussier]). Bref, cela permet aux établissements qui se distin-

guent de choisir les meilleurs étudiants étrangers, les chercheurs les plus cités et d’avoir un maximum de ressources financières ce qui inévitablement finira par se répercuter à nouveau en leur faveur sur le classement futur de leur institution, créant ainsi un « cercle vertueux » (Marginson, 2007d ; Durand et Dameron, 2011

[cités par Lussier]). Cette réputation facilite – en même temps – la création de qua- lité dans toutes les facettes d’une institution d’enseignement (formations, re- cherche, encadrements du personnel, qualité des cours, réputation, etc.). »

Lussier (2014: 103) poursuit pour indiquer une conséquence potentielle des clas- sements sur la fonction a priori première d’une organisation de formation.

« Un autre défaut de ces classements, c’est qu’ils mesurent très peu de dimensions, notamment celles que les étudiants devraient considérer avant de choisir un éta- blissement d’enseignement supérieur. Par exemple, la qualité de l’enseignement n’apparait nulle part dans ces classements, car elle est jugée trop difficile à compa- rer internationalement […] »

Dans ces deux brefs passages, révélateurs, apparaît l’ensemble des contraintes es- sentielles qui pèsent sur les organisations – mais aussi l’ensemble des logiques du jeu académique managérial – de la Management Education et sur les individus qui y évo- luent : performer dans les classements internationaux, essentiellement basés sur la (publi- cation de) recherche académique par la Faculté, apporte un « rang », dans les « rankings » (en), qui est synonyme de ressources (financières, certainement, mais encore d’image), d’amitiés partenariales prestigieuses, et donc d’attractivité. Selon Lussier, les classements ne s’interrogent, en réalité, que sur l’alignement des cursus avec ces critères relativement déconnectés de l’enseignement, alors que l’étudiant est, comme nous l’avons vu, in fine celui qui « fait l’école et son classement ». Mais la garantie semble, dans cet environne-

ment, source d’une performativité remarquable et finalement devenue commune (e.g. Austin, 1975; Cabantous & Gond, 2011; Ferraro, Pfeffer, & Sutton, 2005; Ghoshal, 2005) : la description de la performance et de la qualité entraîne une réalité classée en accord avec son discours.

Ces différents gages de qualité ne seraient pas problématiques s’ils n’avaient pour particularité de générer des tensions pratiques. L’une des oppositions principales con- cerne le type de connaissance légitime : l’enseignement pratique réclamé, car valorisé, par les parties prenantes marchandes et privées, affronte alors l’enseignement théorique, ré- clamé, car valorisé, par les parties prenantes publiques et partenariales. Une revue de l’histoire de la Management Education contribue à déterminer la conséquence d’une ten- tative de résolution de cette tension : « l’académisation scientifique » de la Management Education, dont les origines sont pourtant situées dans la volonté d’offrir la garantie d’une connaissance « sérieuse » et actionnable.