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Nous allons considérer ce qui m’a amené à opter pour ce sujet de recherche, puis pour l’étude empirique inductive, d’inspiration « enracinée », i.e. pour comprendre un phéno- mène tel qu’il est vécu par les acteurs (e.g. Corley, 2015; Gioia et al., 2013), ce dans la logique de l’objectivation participante (e.g. Bourdieu, 2003b).

3.1.1. Le choix de la question de recherche et son étude

L’interrogation qui guide la recherche eut pu, initialement, être formulée ainsi : « Qu’apporte donc l’art au management, et en particulier à la formation à celui-ci ? » C’est ce qui m’interrogeait, ce à quoi je souhaitais répondre, la question « naïve » (dans le bon sens du terme). Cet « insight » fondateur de la réflexion provenait d’une expérience personnelle du théâtre dans ma formation initiale au management, ainsi que d’une inter- rogation sur le caractère « différent » de l’art par rapport à ce qui domine dans la forma- tion au management, que j’avais aussi directement vécu. Ces éléments furent initialement confrontés à la littérature scientifique.

3.1.1.1. L’origine de la démarche empirique retenue

Après cette expérience, je découvrai rapidement, dans la préparation de mon entrée en thèse, que mon interrogation s’inscrivait dans un champ préexistant qui étudie les pra- tiques artistiques dans l’univers de la gestion, et en particulier dans la Management Edu- cation : je notais ainsi que la pratique de l’art dans ce cadre était déjà étudiée (Adler, 2006; Berthoin Antal, 2009; Moshavi, 2001; Schiuma, 2009; Taylor & Ladkin, 2009).

Lors des 18 premiers mois de la recherche, environ, je constatais que cette littéra- ture rapprochait aussi du développement général d’innovations en matière de pédagogie dans la Management Education (e.g. Edwards et al., 2013; Mucchielli, 2012). Je consul- tais progressivement les travaux sur les approches critiques de la recherche en manage- ment (e.g. Alvesson et al., 2011; Zald, 2002), le volet « Critical Management Education » (e.g. French & Grey, 1996; Grey, 2002; Huault & Perret, 2011) et l’un de ses objectifs : questionner les tenus pour acquis du management et de sa formation, avec la considéra- tion de thématiques relativement « oubliées » dans le cadre de la littérature mainstream (par rapport à laquelle toute littérature ou pratique critique se définit, par nature). Par ail- leurs, je m’initiais aux travaux sociologiques qui étudient les liens entre art et gestion (Chiapello, 1998) et aux différentes approches qualitatives de la recherche pour trouver

un paradigme adéquat pour la thèse, à la fois par la consultation des grands débats et de grands ouvrages spécialisés (notamment Alvesson, 2003; Dyer & Wilkins, 1991; Eisenhardt, 1991; Yin, 2011), mais aussi par la lecture de travaux qualitatifs susceptibles de m’intéresser (e.g. Alvesson & Spicer, 2011).

3.1.1.2. La formulation d’une question initiale de recherche

Pendant cette période, j’avais abouti à la formulation d’une question initiale de recherche, qui allait ensuite guider la thèse : « L’art dans la formation au management : une alterna- tive pédagogique critique ? » Face à cette question, une première étape empirique (en parallèle de la poursuite des lectures) devait permettre de « débroussailler le terrain », d’obtenir des propos des acteurs intéressés par l’art dans la formation au management.

3.1.2. Le point de vue des formateurs

Ainsi, en amont du début de l’étude du cas unique sur lequel s’appuie principalement la thèse, j’interrogeais des acteurs de la Management Education qui étaient intéressés par l’usage de l’art dans ce cadre. Deux éléments doivent être retenus de cette démarche, et des propos de ces différents individus : 1) « l’espoir » placé en l’art par ces acteurs et très souvent fondé dans l’opposition a priori entre art et « raison », entre art et sciences etc. (ce qui, nous allons le voir, rejoint la littérature) ; 2) l’existence de diverses interrogations sur les conditions pratiques d’usage de l’art dans la formation au management (e.g. des « intuitions » quant à de possibles limites de cette réflexion, des questionnements).

Un verbatim particulièrement éloquent fut proposé dans le premier entretien, en ce qu’il illustre de très nombreux aspects des différentes discussions :

« Je pense que l’art euh… c’est une folie qu’il n’y en ait pas plus. Tu vois… mais, alors là, là je vais même dans les Business Schools c’est-à-dire que le fait qu’on multiplie à deux niveaux si tu veux euh… la méconnaissance donc de l’art, c’est-à-dire de sortir d’un cadre plus rationnel avec de l’analyse etc., qu’on n’ait pas d’espaces pour les étudiants, pour les MBA pour ça. Et puis l’autre espace, c’est le corps aussi, euh au sens c’est pas que le sport, c’est pas… c’est physiquement, qu’ils bougent, qu’ils aillent voir, qu’ils aillent sur le terrain. Qu’ils fassent… tu vois. [après avoir détaillé les problèmes d’approches managériales exclusivement ancrées dans la « pensée »] Donc l’art, c’est aussi la métaphore, c’est la synchronisation, c’est l’association, c’est l’intuition, tu vois tu fais un lien avec aussi les travaux de [nom d’un chercheur] sur l’intuition. [...] » (entretien 1)

Cet extrait incarne presque, à lui seul, tout « l’espoir » que les acteurs rencontrés semblent placer en l’art, et la place qu’ils aimeraient que l’art – ou le sensible de manière générale – trouve dans la Management Education. En fait, pour les personnes interrogées, l’art peut globalement a) permettre d’intégrer des dimensions oubliées du management, de sortir du paradigme dominant « rationaliste », b) permettre aux individus formés de réfléchir, de s’éloigner d’une approche désincarnée du management, sans esprit critique etc., et c) apporter une expérience de pratiques utiles aux futurs acteurs des organisations (e.g. la pratique du théâtre pour la prise de parole en public).

Ces entretiens m’indiquèrent aussi une difficulté des formateurs interrogés à ex- pliquer leur démarche. Un premier volet d’analyse pointe qu’ils croyaient, en général, à l’intérêt de l’art pour la formation au management. Beaucoup pensaient que l’art était important pour la société, mais aussi assez différent de ce qui domine dans la Manage- ment Education. Le deuxième volet des résultats des entretiens traduit de très nombreuses interrogations des formateurs. Et le troisième indique qu’ils identifient des apports plus directs basés sur une compétence utile aux managers que l’art peut contribuer à dévelop- per. En accord avec la littérature ici encore – il faut noter que cette population s’appuie largement sur la recherche, parfois très spécialisée (e.g. Art & Management) pour ses propos, voire la construit car la publie ; ceci est une vraie particularité qui peut expliquer un alignement du propos avec les publications –, les personnes interrogées se question- nent beaucoup sur les effets réels de la pratique artistique en formation, s’inquiètent d’effets difficiles à contrôler. Ils remarquent parfois la présence pas si nouvelle de l’art dans la Management Education, mais se demandent comment mobiliser avec pertinence cette méthode par nature complexe. Le Tableau 7 (page 104) propose des verbatims inté- ressants qui incarnent ces éléments. Il s’agit moins d’arriver à un codage systématique que de les donner à voir, car la fonction de cette démarche empirique restait purement exploratoire, afin d’orienter la démarche empirique principale à conduire ultérieurement.

Ces éléments permirent, mis en discussion avec la littérature existante, le choix de la méthodologie pour l’étude principale. Globalement, il faut donc retenir de ces entre- tiens que ces formateurs intéressés par ces approches artistiques « espèrent » beaucoup de l’art lorsqu’il est mobilisé en tant que moyen de formation, mais qu’ils se posent de nom- breuses questions sur la réalité pratique, le fonctionnement réel. Enfin, remarquons que les approches sont très différentes : certains font pratiquer l’art aux étudiants, d’autres intègrent l’esthétique aux raisonnements, d’autres font « consommer » de l’art puis réflé- chir à l’aide de celui-ci.

ENCADRÉ MÉTHODOLOGIQUE :

Le Tableau 7 (page 104) présente une analyse empirique du discours de formateurs sur la pratique artistique dans la Management Education. Il s’agissait de chercher à comprendre l’intérêt pour une telle pratique, les sources de la dé- marche, les motivations, les craintes etc., bref, d’en apprendre un maximum sur leurs démarches.

Un total de 10 entretiens formels non directifs – mais avec des relances régulières de ma part – a été réalisé auprès d’acteurs de la formation au management intéressés par l’usage de l’art dans leur rôle ou dans leur cadre organisation- nel, sur la période février-juin 2014.

Parmi ces individus, on trouve 4 formatrices et 5 formateurs, membres de Facultés à des « niveaux académiques » très variables (du Professeur des Universités Docteur jusqu’au formateur non titulaire d’un Doctorat), dans 6 organisations importantes de la Management Education européenne. Parmi ces 6 organisations, 4 sont situées en France, 1 en Angle- terre et 1 au Danemark. Le public et le privé sont représentés. Le dixième entretien fut conduit avec 1 individu qui a travaillé en forte proximité avec un académique qui avait mis en place une démarche de grande ampleur qui créait des liens entre Art et Sciences Sociales, ce qui intégrait aussi une septième organisation à l’échantillon.

9 entretiens parmi les 10 ont pu être enregistrés (l’un des formateurs, entretien 3, préférait ne pas être enregistré) – parfois dans des conditions difficiles, car certains entretiens ont été réalisés dans le hall du bâtiment ou à la cafétéria. Un entretien fut réalisé par visioconférence, sans que ceci n’ait réellement d’effet perceptible sur la démarche. Ces entretiens représentent près de 10 heures d’enregistrement.

Les données présentées sont issues d’une analyse qui visait à identifier des éléments clefs qui améliorent la compréhen- sion de l’intérêt de l’étude principale menée dans cette thèse. Bien que des regroupements aient été effectués pour le rendu ici proposé, il ne s’agit pas d’un « codage systématique ». L’objectif n’est pas de donner une « représentativité », mais de donner à voir des éléments empiriques liés à l’analyse déjà proposée aux chapitres 1 et 2, en la nuançant par le point de vue des acteurs terrain. Il s’agit donc d’empirie avant tout illustrative et compréhensive.

6 personnes interrogées ont proposé par elles-mêmes une expérience artistique en formation. Ce sont des profils de formateurs qui animent en formation. Ce sont les entretiens, avec les caractéristiques de l’activité étudiée :

- entretien 1 : création plastique de type « collage » sur deux jours ; public « très formé » de type MBA qui a déjà eu huit jours de formation en amont de cette activité avec le formateur en question ; 5 éditions du séminaire avec 25 per- sonnes environ par édition ;

- entretien 3 : création plastique de type « dessin » par séances étalées dans la durée ; public de formation initiale ; - entretien 4 : même expérience que l’entretien 1, il s’agit du second formateur de la même activité ;

- entretien 5 : création plastique dans différentes conditions, nombreuses éditions de l’expérience ; - entretien 7 : utilisation de textes littéraires ; public de formation initiale ;

- entretien 9 : théâtre dans la formation ; public varié.

4 personnes interrogées sont intéressées par la démarche artistique en formation mais n’ont pas indiqué l’avoir prati- quée elles-mêmes :

- entretien 2 : profil intéressé par les approches alternatives au « rationnel » ; - entretien 6 : profil intéressé par les questions philosophiques dans le management ;

- entretien 8 : profil intéressé par l’usage de l’art pour enrichir la formation en sciences sociales ; - entretien 10 : profil intéressé par les liens entre art et management, actif dans ce domaine de recherche.

Le « statut » artistique des activités utilisées par ces formateurs pourrait parfois être discuté (e.g. « est-ce créatif ou est- ce artistique ? »). Globalement, pour les formateurs qui ont eux-mêmes pratiqué la démarche artistique en formation, ce sont des démarches ancrées dans la création ou la mobilisation d’une forme pour s’exprimer. Les formes retenues par ces formateurs sont différentes (e.g. peinture, sculpture, théâtre). Pour ceux qui s’intéressent à l’art, il s’agit plutôt de comprendre le fait artistique, « en quoi il est différent ». Dans tous les cas, ces individus semblent convaincus d’un apport potentiel de l’expérience sensible à la formation au management, ce qui justifie leur présence dans l’échantillon.

Tableau 7 – Extraits d’entretiens avec des acteurs de la formation au management utilisateurs (ou intéressés par l’utilisation) de l’art dans ce cadre – structure du tableau inspirée de Corley & Gioia (2004: 188–189) (Nota Bene : pour des raisons de mise en page et de lisibilité, les hésitations et répétitions ont été lissées) (sur deux pages)

Thème Extrait d’entretien

L’ART COMME DIFFÉRENT DE CE QUI DOMINE DANS LA MANAGEMENT EDUCATION

L’art comme opposé du théorique, de l’abstrait, du conceptuel, de l’intellectuel

& l’art comme activité pratique, concrète, sensible

« Donc l’art à quel moment il est arrivé ? […] Alors c’est vrai que moi j’ai vu le... comment je dirais… le moment où est apparu… Alors là je parle de l’art plutôt… créatif, enfin de l’art, comment je dirais ? Dessin, expression. C’est quand on a commencé en gros à sortir du cadre management traditionnel avec des rôles bien définis etc. C'est-à-dire que la question d’oser, de sortir de ses limites, de réinterroger les choses, enfin quand on a vu arriver ces compétences comme devenant de plus en plus nécessaires, alors que paradoxalement euh, c’est pas toujours, c’est pas toujours si vrai que ça hein. C’est pas toujours… mais quand on a vu arriver cette évolution où il devenait difficile de réussir si on restait un très bon petit soldat, du fait de la complexité des orgas, du fait de la transversalité, du fait de… Enfin bon, un certain nombre de choses, des équipes euh… plus éphémères, de la virtualisation aussi, tu vois de… des lieux professionnels, tu travailles avec des gens que tu rencontres jamais vraiment physiquement… Enfin bon bref, une fois qu’il y a eu ça on a vu arriver effectivement des compétences en lâcher prise, des compé- tences en remise en cause, et qui supposaient oser. Et je trouve que l’art a été souvent utilisé là tu vois. [Guillaume : « Oui oui, tout à fait. »] C’est-à-dire beaucoup pour dire au fond créons une occasion où les gens vont se confronter à leurs propres limites. Moi, c’est… ça a été beaucoup… L’utilisation a été là. [un peu plus tard dans l’entretien, parlant de sa propre démarche « artistique » en formation] Et donc maintenant j’arrive à [nom de son projet créatif/artistique] et tu vois on l’a conçu comme ça avec [nom d’une première collègue] et [nom d’une deuxième collègue], c’est-à-dire qu’on s’est dit à un moment donné que nous on avait la modélisation. C'est-à-dire qu’en fait en gros la création c’est pour pouvoir à un moment donné… euh… oser et ouvrir. Il y a… euh… si tu veux, c’est pas un processus rationnel… ça passe beaucoup par du lâcher prise. Ca passe beaucoup par à un moment… c’est un autre… un autre type de façon de faire fonctionner ton cerveau, c’est pas une analyse, tu vois, rationnelle, analytique. » (entretien 1)

« […] J’ai commencé une réflexion qui est toute récente hein, sur la place des émotions, et de l’imagination dans les enseignements de [organisation du formateur]. […] Tu sais que les Sciences de Gestion, elles privilégient les approches rationalistes […], les approches rationalistes euh… On t’explique, on t’explique comment prendre une bonne décision, financièrement. Enfin machin. Voilà. Bon. […] Et en fait, toutes les réflexions sur l’imagination et sur les émotions, qui sont déjà anciennes. Damasio, c’est, c’est 80, les années 80 euh… sont probablement écartées aujourd’hui des enseignements de gestion. […] Et sauf quand l’émotion est instrumentalisée comme par exemple en marketing sensoriel ou ce genre de choses. Pareil pour l’imagination. L’imagination, on la… cantonne en général à euh… à des cours de créativité. On la cantonne éventuellement à des cours sur l’innovation. Mais euh, on pourrait parler de la dimension imaginative de partout, partout […]. » (entretien 2)

« [dans une discussion sur les apports pour l’établissement de formation et, plus généralement, pour les organisations]

Bah moi je pense qu’elle gagne à être quand même dans le… comment dire euh… dans son temps hein. Ça veut dire que quelque part elle est… Elle est dans son temps et elle gagne à développer de l’innovation. Déjà. [Guillaume : « D’accord. »] Et être dans le courant qui fait qu’on s’aperçoit bien des limites des modèles de la pensée qui ont dominé la pensée organisationnelle et le mode de fonctionnement des organisations quelles qu’elles soient. Donc pour moi on est euh… on est… modernes voire postmodernes pour employer des termes un petit peu à la mode. Et donc on est plutôt dans un courant de créer de l’innovation. » (entretien 4) » « [sur un atelier « théâtre »] […] L’objectif, c’était l’impro. On ne travaillait pas sur les méthodes de créativité. On était, on est anti-méthodes, en fait, dans le théâtre hein, puisqu’on est sur le corps et sur le vivant ; donc on n’est pas sur l’analytique et le cerveau, sur le cerveau analytique on va dire. On est vraiment sur l’émotion et sur l’instant, donc tout ce qu’on fait, c’est anti-méthode… méthodes de créativité, euh moi je sais ce que c’est parce que j’ai enseigné en marketing […]. [plus tard dans l’entretien] Alors, évidemment ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas analyser et faire de la réflexion, mais nous on leur dit « la réflexion, c’est bon ». Vous avez des tas de cours en marketing, les SWOT, les Ansoff, les, les… vas-y que j’te pousse des matrices dans tous les sens, euh c’est bon quoi, vous en avez partout. La finance, le BFR, le [inaudible] ? L’analyse en grande masse du bilan, euh voilà ! Vous en aurez des trucs pour analyser. Nous on va vous faire autre chose. Et tout de suite, ils comprennent où ça va [claque des doigts]. » (entretien 9)

« Et je trouvais que ça avait un intérêt aussi en termes de diffusion d’un certain nombre d’idées ou de connaissances euh… Là aussi, enfin c’est un peu ce qu’Howard Becker dit, c’est euh… La forme artistique, c’est quand même une manière de… s’adresse à un public large qui… et donc ça a aussi une force de diffusion hein, euh de la connaissance et des idées. Donc, ce n’est pas le même type de connaissance ; c’est plutôt la connaissance par l’expérience de la sensation, la connaissance sensible. Et par ailleurs, c’est euh… ça diffuse plus largement. Et je trouve que ça, c’est très séduisant sur des sujets aux enjeux sociaux et sociétaux quoi. Donc ça c’était le point de départ et ça, ça continue à l’être […] » (entretien 10)

L’art associé aux qualités de créativité, flexibilité, sou- plesse, adaptabilité (qualités émergentes dans le « mana- gement » anglo-saxon des années 1990)

« [en tout début d’entretien, après une question d’ouverture de ma part]

[…] là faut qu’on se mette d’accord sur la dimension artistique parce que, ce que moi je mets dans ce terme là c’est faire appel à la capacité d’imagination des individus… euh… à la visualisation, à la capacité à pouvoir passer euh… sur un registre métaphorique… euh… voilà. Essentiellement c’est ça et donc ça a toujours

été lié à des formations en développement de soi. [Guillaume : « D’accord… »] Euh avec… avec euh… en fond aussi l’idée de développement de soi et développe- ment de l’intelligence collective hein, c'est-à-dire que, il y a, il y avait toujours un lien. Donc alors, effectivement dans nos différentes interventions, dans nos cours, assez régulièrement on fait appel à cette dimension de l’imaginaire, de la création de métaphores, voire donc passer dans un autre niveau de langage. […] » (entretien 4)

« L’hypothèse c’est que le contexte d’activité de l’artiste contemporain un peu canonique, finalement euh… ressemble beaucoup ou en tout cas sur un certain nombre d’aspects à la pratique d’entrepreneurs innovants. C'est-à-dire incertitude, objectifs non clairs euh… Voilà tous les éléments que tu peux trouver notamment dans l’effectuation. » (entretien 5)

« Pourquoi j’ai fait ça [utiliser la littérature dans la formation au management] ? Je veux dire, je voulais sans aucun doute faire quelque chose qui serait plus expéri- mental, qui serait plus créatif, euh… [après avoir détaillé des raisons secondaires] La raison plus large était « faire quelque chose qui encouragera vraiment le déve- loppement de la réflexion des étudiants. » (entretien 7)

LA RÉALITÉ DE LA PRATIQUE DE L’ART DANS LA FORMATION AU MANAGEMENT

Une pratique ancienne et assez diffusée

« Pour moi si tu veux, c’est pas une question nouvelle. Par contre c’est bien que tu la… Enfin elle est peu présente en gestion, c’est super que tu t’y intéresses. Euh parce que nous on a monté… On a [nom] qui a monté… On a emmené les étudiants en [année de Programme Grande École] faire de la peinture dans un château en Haute Loire. Ils étaient avec des artistes-peintres. [Guillaume : « C’est typiquement ce genre de… »] Voilà, donc ils vivaient cette expérience de création. Donc c’était il y a… en [19]92 tu vois. Donc c’est pas un truc nouveau [avec emphase] entre guil[lemets]… Enfin tu comprends ce que je veux dire. [Guillaume : « Oui oui tout à fait. »] Je parle de l’école hein, c’est pas un truc nouveau. » (entretien 1)

« [après avoir indiqué ne plus enseigner le module « littéraire » à la date de l’entretien] Mais ce que je fais assez souvent est que, je vais utiliser des exemples, je vais parfois puiser dans… je vais puiser dans les films. Et c’est une chose vraiment commune vous savez. […] De nombreuses euh… de nombreuses, nombreuses per-