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Les recherches de la période moderne

A. Le socle cristallin et cristallophyllien

1. Pétrographie et tectonique

Dans le cours des années 1960, les recherches pétrographiques se poursuivirent sous l’action de Simone Gueirard et de ses élèves : Marc Boucarut* (1938-2010) sur la partie occidentale du massif du Tanneron (1963), Régis Serment et Jean-Marie Triat sur le granite du Plan-de-la-Tour (1967). En 1968, fut soutenue à Grenoble (sous la direction de Simone Gueirard et Pierre Vialon) la thèse de 3e cycle de Jean Orsini sur le Tanneron occidental.

À partir de 1972, Jean-Pierre Pupin et Guy Turco, de l’université de Nice, utilisèrent la typologie du zircon comme géothermomètre des conditions de cristallisation des roches plutoniques du socle provençal.

La première application des méthodes de la microtectonique aux problèmes structuraux du massif des Maures fut l’œuvre de l’école montpelliéraine.

En 1966, parut ainsi, sous la signature de François Arthaud et Philippe Matte, une étude tectonique des Maures dans laquelle ces deux auteurs montrèrent que trois phases de plissement principales ont été à l’origine des structures hercyniennes de ce massif.

Les deux premières, de loin les plus importantes, ont donné la direction Nord-Sud des grandes structures et ont été accompagnées d’un métamorphisme général des séries. Des déformations tardives (3e phase), peut-être antérieures au Stéphanien,

mais pouvant aussi correspondre à la tectonique pyrénéo-provençale, ont replissé l’ensemble, perpendiculairement aux deux premières.

Ces auteurs rejoignirent les conclusions d’André Demay sur l’existence d’une tectonique tangentielle intense mais, contrairement à celui-ci, privilégièrent un déversement des mégastructures d’Est en Ouest.

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Fig. 40. Carte géologique des massifs des Maures, de l’Estérel et du Tanneron par Claude Tempier (1984).

Jean Orsini aboutit (1968) à des conclusions structurales presque analogues pour le massif du Tanneron, retrouvant dans ce massif deux phases tectoniques principales, la première « de type tangentiel, donnant des plis isoclinaux synschisteux, probablement

déversés à l’ouest », la deuxième conduisant à des « plis plus ouverts, dissymétriques, à plan axial proche de la verticale ».

Les analyses microtectoniques effectuées quelques années plus tard (1971) par

Georges Bronner et ses collègues de l’université d’Aix-Marseille 3, dans l’île de

Porquerolles conduisirent à confirmer l’existence de trois phases tectoniques dans les formations épimétamorphiques de ce secteur et à y décrire un vaste pli synclinal kilométrique « matérialisé en plan par la forme même de l’île […] et élément

tectonique majeur dans la structure du massif des Maures ».

En réaction à ces études de microtectonique, une autre interprétation structurale du massif des Maures, mais d’inspiration stratigraphique, fut toutefois fournie (1978) par Monique Seyler et Marc Boucarut (université de Nice). Pour ces auteurs, il est possible d’établir des corrélations lithostratigraphiques des différents termes de la série métamorphique des Maures le long d’une transversale Est-Ouest. Ils conclurent, de plus, à l’existence d’un paléorelief au niveau des gneiss de Bormes et à la manifestation d’une phase tectonique calédonienne responsable de discordances et d’épanchements volcaniques.

Il fallut attendre 1985 pour qu’une interprétation novatrice de « l’accident majeur

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l’université d’Aix-Marseille 3. Grâce à une analyse détaillée de la déformation dans les gneiss, ces auteurs montrèrent que cette faille, dont le rôle important avait été auparavant souligné, « se surimpose à une zone de décrochement ductile sénestre sub-

méridienne antérieure ». Il s’agit, selon eux, d’un décrochement profond, constituant

une limite majeure entre deux domaines structuraux bien distincts : les Maures occidentales, caractérisées par un chevauchement ductile vers l’Ouest, les Maures orientales, charriées vers le NNE.

2. Géochronologie

Les premiers âges géochronologiques « plomb total » sur zircons, s’étaient révélés peu concluants et en désaccord avec les données de terrain. Les datations des unités cristallines et cristallophylliennes des Maures et du Tanneron par la méthode de mesure isotopique du Rubidium/Strontium (87Ru/87Sr) et par celle du couple Potassium/Argon

(40K/40Ar) vont se révéler plus précises.

Ces travaux vont être menés de manière indépendante par deux équipes : celle formée par Henri Maluski (Montpellier) et Claude Allègre (Paris) d’une part, et celle de

Marcel Roubault (1905-1974) et ses collaborateurs de Nancy, d’autre part.

Les datations sur roches totales effectuées sur les gneiss de Bormes (Maluski & Allègre 1970) ont fourni des âges de 480 Ma pour les paragneiss et de 420 Ma pour les orthogneiss, indiquant une granitisation calédonienne et l’existence d’anciens sédiments ordoviciens transformés par le métamorphisme en paragneiss.

Les précisions introduites par études isotopiques sur minéraux (micas) des gneiss de Bormes permirent à Maluski (1971) de mettre en évidence quatre événements chronologiques : une intrusion granitique précambrienne à 560 Ma ; une sédimentation ordovicienne (460 Ma), approchant les données sur roche totale ; une tectonique et un métamorphisme (gneiss) hercyniens autour de 270 Ma (Permien moyen) ; et, enfin, un événement tectonique pyrénéen-alpin dans une fourchette comprise entre 57 et 30 Ma.

Roubault et al. (1970a) obtinrent, cependant, des dates plus anciennes pour l’âge du métamorphisme des gneiss du Tanneron (Dévonien moyen : 387 Ma ± 25 Ma) et des Maures orientales (Mississipien supérieur, autour de 325 Ma).

Henri Maluski et Simone Gueirard déterminèrent (1978) un âge de 580 Ma pour le granite à cordiérite de Barral, situé au sein des gneiss de Bormes, attestant ainsi l’existence d’un noyau précambrien dans le massif des Maures, ce que confirmèrent les études récentes (2003), de Christophe Innocent de l’université d’Aix-Marseille 3 et ses collègues, sur les leptynites des Maures centrales, dont l’âge de mise en place du protolithe serait de 548 Ma (limite Précambrien-Cambrien).

Pour ce qui concerne les roches plutoniques, Roubault et al. (1970a) publièrent des âges autour de 325 Ma ± 10 Ma, pour la mise en place des granites tardi-tectoniques du Rouet, du Plan-de-La-Tour et de l’Hermitan et de 285 Ma ± 5 Ma (Permien inférieur) pour le granite de Camarat.

Terminons ce tour d’horizon de la chronologie des terrains du socle provençal, en rappelant, qu’à la suite de nouvelles découvertes de graptolites dans les schistes

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épimétamorphiques du Fenouillet, Simone Gueirard et ses collègues purent affiner (1970) la chronostratigraphie de Schoeller et déterminer un âge llandovérien supérieur à tarannonien inférieur pour le dépôt de ces schistes.