• Aucun résultat trouvé

L’ouverture du territoire se mesure notamment par rapport aux flux de populations qui circulent entre le quartier étudié et le reste de la ville, et à leur évolution. Nous avons recherché ce qui, dans les trois exemples étudiés, avait pu influer sur ces variables. Les flux semblent avoir augmenté sur le quartier Mistral, notamment grâce aux établissements d’enseignement supérieur : « L’école d’infirmières et le Greta sont très importants pour nous,

ils amènent à eux deux 500 personnes par jour dont au moins 50 salariés qui viennent d’ailleurs. C’est quelque chose qui vient brasser. Et cela contribue au changement d’image »1

Mais il y a aussi une contribution, certes moindre, de l’AFEV qui employait l’an dernier treize volontaires en service civique (dont la plupart étudiants ou anciens étudiants) en plus des trois salariés. Néanmoins, sur les 80 étudiants espérés dans les KAPS du quartier Mistral, seuls une trentaine sont présents. C’est donc un relatif échec pour l’opération, qui doit être relativisé car c’est la première année. Les raisons semblent être principalement la mauvaise réputation du quartier. En effet, la plupart des personnes qui habitent la résidence ne connaissaient pas Grenoble auparavant. Une femme d’une trentaine d’années, avec qui nous avons échangé,

1

81

semble satisfaite de sa fréquentation du Plateau. C’est d’ailleurs grâce à cela qu’elle a connu le quartier Mistral, dont elle semblait avoir une bonne image. Elle précise y être allée tout d’abord pour faire faire des activités à ses enfants, puis elle s’est engagée en tant qu’administratrice. Handicapée motrice, elle se réjouit de l’accessibilité du Plateau pour les personnes à mobilité réduite. On peut donc en déduire que, si cela ne semble pas poser problème pour les personnes de l’extérieur d’avoir des activités régulières à Mistral (hebdomadaire pour les bénévoles de l’AFEV et les adhérents du Plateau, quotidienne pour les étudiants et les personnes employées sur le quartier), il est plus difficile de convaincre ces personnes d’y vivre.

Sur Grammont, l’ouverture du quartier s’est faite progressivement. Etant proche d’un grand axe souvent sujet à des embouteillages, le boulevard de l’Europe, le quartier est souvent traversé par des automobilistes habitant l’agglomération. La bibliothèque amène de nombreuses personnes de l’extérieur du quartier, même si cela n’a pas été régulier depuis son ouverture : « Nous avons une fréquentation d’environ 60% de gens de l’extérieur du quartier.

Des gens du plateau Est de Rouen, avec la voie rapide et le pont Mathilde ce n’est pas loin, même des gens de Sotteville qui sont plus près d’ici que de la médiathèque (de Sotteville), ou qui préfèrent. »1 Dans les exemples étudiés, les populations que l’on cherche à attirer étaient des étudiants, ou des personnes plutôt de la classe moyenne ayant des activités culturelles et/ou sportives et étant suffisamment mobiles. C’est souvent en construisant de nouveaux équipements que l’on parvient à les faire venir : « L’équipement Simone de Beauvoir a créé

une mixité plus que réelle. Au début il y a eu des difficultés ce qui est normal»2. La mixité socio-économique se réalise dans les trois cas étudiés, peut-être encore davantage concernant la mixité par les étudiants et par la bibliothèque. Ce sont donc surtout des jeunes de 18 à 30 ans qui sont tous ou ont été dans un cursus d’études supérieures, de situation socio- économique plutôt avantagée (les frais d’entrée de l’école d’infirmières sont assez conséquents), ce qui contraste avec la population du quartier, qui compte très peu d’étudiants. De même, la résidence KAPS propose un loyer plutôt modéré mais qui reste tout de même plus élevé qu’un loyer de colocation classique et qu’un logement CROUS. Le Plateau amène aussi des personnes de l’extérieur, plutôt des enfants et de jeunes parents. Les activités proposées ne sont pas chères mais ne sont pas non plus gratuites. Des volontaires féminines de l’AFEV fréquentaient également certaines activités sportives au Plateau. La mixité

1

Entretien avec la responsable de la bibliothèque Simone de Beauvoir au pôle culturel Grammont.

2

82

générationnelle se réalise davantage via la bibliothèque, parce que les quartiers choisis ont plutôt une population très jeune et que le Plateau, identifié comme une structure jeunesse par les habitants de Mistral, n’attire pas beaucoup de personnes âgées. La mixité des sexes et la mixité ethnique sont des sujets dont on parle peu. La mixité hommes-femmes est très difficile à réaliser dans les quartiers populaires du fait entre autres d’une forte religiosité et de l’emprise des hommes sur les femmes. Dans le cas du récit d’une habitant des Hauts de Rouen, le problème de la mixité sexuelle et ethnique s’est posé : au cours de l’entretien, cette femme d’une quarantaine d’années parlait d’un « café pour les hommes » où elle avait l’habitude de se rendre et se disait bien acceptée, cela a rapidement suscité un débat avec les autres personnes présentes lors de l’entretien sur l’intégration des femmes étrangères et sur le communautarisme des femmes maghrébines. La mixité ethnique est difficile à réaliser également. En effet, il est rare de voir deux personnes d’origine différentes se parler dans l’espace public, sauf sur la place du marché et pour des contacts assez limités liés au commerce. Le lien entre l’AFEV, dont les bénévoles sont de toutes origines, et les familles accompagnées, souvent d’origine maghrébine ou asiatique, est peut-être le plus producteur de mixité ethnique.

B.

Les contacts entre les personnes de l’intérieur et celles