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CHAPITRE 5 DISCUSSION

5.2 Thèmes et patterns autour d'une approche d'enseignement pour

5.2.3 Un outil de communication utilisé dans un contexte d'apprentissage qu

d'apprentissage qui valoriserait le partage, la discussion et la collaboration

Comme nous l'avons remarqué dans notre processus de catégorisation des données par thèmes, l'ordinateur XO est également perçu comme un outil de communication. Dans leurs discours, les décideurs pédagogiques évoquent ces fonctionnalités de mise en réseau via la connexion par réseau maillé et l'activité discutée comme des possibilités d'utilisation offertes. Mais au-delà de cela, ce que nous avons pu remarquer grâce à la mobilisation de notre perspective interactionnelle, c'est que cette communication peut prendre diverses formes. La forme de communication qui nous semble être la plus abordée est le partage des productions entre les élèves. Comme nous l'avons soulevé à maintes reprises dans notre analyse, la production d'une entité publique par les élèves semble être au cœur des utilisations envisagées par les décideurs pédagogiques et devrait corollairement occuper la même importance dans les formations aux enseignants visant l'intégration pédagogique du XO. L'ordinateur est ainsi considéré comme un outil permettant à l'apprenant d'extérioriser, de réifier ses apprentissages.

Et bien l'élève peut communiquer plusieurs choses, il peut émettre des hypothèses, il peut donner une idée, il peut dire ce qu'il pense. Tout dépendra de la consigne qui lui aurait été donnée au départ. Donc si on lui a donné, si on lui a demandé de dialoguer avec son camarade, par exemple, pour faire un compte rendu. Ou bien pour parler de quelque chose qu'il a vécu, il va communiquer pour dire bon voilà j'ai fait telle chose, j'ai vu telle chose, voilà ce que j'ai pensé. Et nous sommes à donner des consignes qui seront donc capables de sortir de lui des idées qu'il a. Ainsi, extérioriser ce qu'il a en lui au fonds voilà comment est-ce que je vois la situation de cette communication-là. (P-7)

Dans un autre ordre d'idées, il a également été question dans les discours de situations éducatives où les apprenants partageaient leurs connaissances ou leurs ressources. Néanmoins, malgré que l'approche par résolution de problèmes fut un thème que nous

avons vu abordé à de nombreuses reprises à l'intérieur des discours, le partage des connaissances et des ressources n'est pas nécessairement situé dans un tel contexte. On y parle de partage, mais on n'y parle pas toujours de partage dans l'optique de résoudre un problème.

Dans les extraits précédents et dans l'ensemble des discours, les interactions envisagées entre les élèves semblent surtout valoriser la discussion, le dialogue et le partage sans toutefois être systématiquement orientées vers un effort exprimé et manifeste de construire des savoirs ensemble comme il en serait question à l'intérieur de modèles d'apprentissage collaboratif assisté par l'ordinateur (ACAO) (Stahl, 2006). Pourtant, la collaboration est l'un des thèmes que nous avons vus émerger des discours articulés autour des interactions entre les élèves d'une classe utilisant l'ordinateur XO. Néanmoins, il appert que les décideurs pédagogiques n'ont pas développé suffisamment autour des formes concrètes de collaboration qui se manifesteraient dans les interactions entre les élèves dans un but de construction collective des savoirs. Toutefois, les discours nous permettent de nous pencher sur des éléments connexes à une démarche d'apprentissage collaboratif. Comment l'enseignant organise-t-il les tâches? Quels sont les rôles de l'enseignant? Quels sont les buts collectifs poursuivis?

Bien que la collaboration, de la manière dont on l'entend dans le modèle de l'ACAO, au sein des interactions entre les élèves n'a pas été approfondie on relève une ouverture sur d'autres interactions possibles. Comme il est précisé cet extrait du discours du participant 7, la collaboration en contexte d'utilisation de l'ordinateur XO ne se limiterait pas uniquement aux interactions entres les élèves et pourrait se manifester à plusieurs niveaux, et ce, entre différents acteurs :

Maintenant au niveau de la communication. Puisque les élèves devront collaborer d'abord avec les camarades, mais aussi avec les enseignants. Donc, ils devront communiquer. Donc la possibilité la possibilité de communication entre les élèves, entre les groupes d'élèves, entre les élèves et l'enseignant, entre les élèves d'une classe et d'autres classes. (P-7)

adulte (un partenaire d'apprentissage plus compétent) ou comme dans la perspective piagétienne où le processus de négociation s'effectue surtout entre les acteurs d'un même niveau (des enfants entre eux) (Hogan & Tudge, 1999). Il est intéressant de constater qu'un décideur pédagogique voit la possibilité de formes multiples de collaboration. Ainsi, à travers les interactions entre les différents acteurs, il serait légitime d'étudier les formes que peut prendre cette collaboration autour de l'utilisation de l'ordinateur XO en questionnant davantage les décideurs sur les activités collaboratives des élèves.

En ce qui concerne l'environnement de classe, il faut préciser que c'est un élément qui fut peu présent dans les discours des décideurs pédagogiques. Il est fort probable que la conduite des entretiens axée sur les utilisations des ordinateurs par les acteurs en soit la cause. Néanmoins, c'est autour du thème de la collaboration que nous relevons quelques indications sommaires concernant l'environnement d'apprentissage et son design. L'organisation de l'espace pourrait être soumise à une volonté de l'enseignant de faire travailler les élèves en groupe sur une tâche commune :

Disons que le travail en groupe avec le XO, on peut mettre un enfant, un groupe de trois à cinq pour travailler ensemble pour une même tâche, fut-elle rotative par élève, mais ça dirige déjà l'espace et le rôle du maître maintenant, il est juste un guide. Les enfants peuvent construire eux-mêmes ensemble peut-être. (P-2) On peut partager les activités…. je m'explique. En groupe nous sommes dans une salle de classe, le maître peut organiser le travail de manière à mettre les uns à côté des autres et il donne une tâche commune à exécuter avec des consignes précises. (P-2)

En effet, notre interprétation des discours des décideurs pédagogiques nous porte à croire que la collaboration reste tributaire de l'organisation réfléchie par l'enseignant. C'est à lui que reviendrait la responsabilité de définir et d'encadrer les tâches que les élèves, assistés de l'ordinateur XO, auraient à réaliser en collaboration :

Bien ça c'est une première chose, mais faudrait aussi qu'avec l'arrivée du XO que ... les enseignants puissent développer de nouvelles compétences. Par exemple, savoir organiser un travail en groupe, parce que c'est le genre de travail qui se fait vraiment en situation classe. Donc l'enseignant doit savoir organiser le tra... le travail en petits groupes et amener donc les apprenants à se

servir de l'ordinateur XO pour pouvoir collaborer et partager des ressources. (P-4)

Comme le soulève le participant 4 et comme nous serons amenés à traiter de cette question plus loin dans ce chapitre, ces formes d'interactions entre les élèves ont des répercussions sur le rôle de l'enseignant tant sur les aspects de planification et d'organisation du travail que sur les aspects de structuration de l'environnement d'apprentissage : « Les bons, les mélanger de façon que certains élèves puissent jouer le rôle de leaders et amener le groupe à partager. » (P-4, p.102)

Néanmoins, cette responsabilité d'élaboration d'une situation apprentissage collaborative qui incombe aux enseignants amène son lot de défis. Rappelons que les enseignants ont en moyenne 68 élèves dans leur classe. Ce ratio ne tient pas compte des grandes disparités qui existent dans certaines provinces où il s'élève à plus de 96 élèves par enseignant dans l'Extrême-Nord ou 92 élèves par enseignants dans la province du Nord-Ouest. C'est une dimension qui devra obligatoirement être abordée avec les enseignants lors des formations ou dans le cadre des mesures d'accompagnement si les décideurs pédagogiques veulent promouvoir l'utilisation de l'ordinateur XO pour supporter l'apprentissage collaboratif. Loin de nous l'idée d'évoquer une incompatibilité de cette approche collaborative avec une pédagogie de grands groupes cependant, nous insistons sur la considération de cette dimension problématique comme il en est question dans l'extrait qui suit :

C'est toujours le rôle pédagogique, l'enseignant est un facilitateur. Il y a plusieurs objectifs qu'on vise à travailler et leçons. Bon mettre les enfants en groupe ça peut aussi cultiver des valeurs éthiques, partager ce qu'on a avec ceux qui n'en a pas, l'entraide on peut partager cela, mais tout réside dans l'organisation de sa classe. Il faut que l'enseignant ait une forte personnalité, nous avons un problème ici chez nous c'est le problème des effectifs. Ces effectifs nous poussent à adopter des comportements en rapport avec eux ce qui fait en sorte que quand on a un effectif qui est très grand, bon, il faut se moduler en fonction de ses objectifs et organiser sa classe parfois même l'espace géographique qui est réservé aux enfants ne permet pas de faire un travail. Il faut aller un peu plus de l'inventivité, il faut inventer, il faut créer, il faut aller avec eux, peut-être leur demander quelles sont les propositions qui peuvent faire pour qu'on puisse s'organiser. (P-2)

Il est aussi intéressant de souligner que les décideurs pédagogiques envisagent par ces mêmes utilisations un apprentissage de la vie en société. En effet, comme nous le disions, les situations éducatives que nous organisons à partir des discours des participants sont caractérisées par les échanges, le partage des ressources, le dialogue et le partage des connaissances. Comme il en est question dans les extraits des discours suivants, la poursuite d'objectif commun et la reconnaissance de l'interdépendance des uns et des autres à l'effort collectif sont des éléments soulevés qui prépareraient l'élève à la vie en société et par extension au développement des compétences citoyennes :

L'enfant qui a, qui est dans cette salle de classe peut faire un transfert de ses compétences d'organisation, de partage, d'entraide dans un autre contexte qui est propre à soit la famille, soit la cour de récréation, soit le village et peut-être une fois devenu plus grand ces compétences-là étant assises en lui, il peut faire un bon rassembleur, il peut ... (P-2)

Bien. Partager parce que d'abord un, la vie faut aller un peu plus loin. La vie en société est régie par les échanges entre les uns. En même temps l'élève [se] forme, l'école forme l'élève à pouvoir vivre en société. D'abord la petite société que forme la classe. Dans cette société il faudrait mettre les relations entre les élèves, entre les gens qui composent une société, qui soient des relations vivantes. Or, pour avoir des relations vivantes avec les gens, il faut bien communiquer avec eux, il faut dire, il faut leur dire ce qu'on pense, ce qu'on veut, ce qu'on souhaite et en retour répondre aussi aux sollicitations des autres. Donc cette communication ici permettra à l'élève de s'extérioriser de se socialiser davantage. Et c'est un point fondamental parce que l'école il faut pas l'oublier, l'école a pour objectif principal de permettre à l'élève de pouvoir vivre en société. Et la société humaine est faite de partages, de communications, d'échanges, d'échange verbal, d'échange écrit, voilà. Donc c'est une activité vraiment fondamentale. (P-7)

En somme, nous retenons des discours des décideurs pédagogiques une valorisation certaine du partage des connaissances et des ressources, de la discussion et de la collaboration au sein d'une situation éducative où le XO serait utilisé. L'exploration des perspectives cognitives ayant pour objet d'études l'apprentissage par les pairs ou des recherches effectuées autour de l'ACAO seraient des avenues à considérer par les décideurs pour modéliser et communiquer plus précisément aux enseignants les formes que pourraient prendre ces interactions de nature collaborative entre les élèves qui utiliseraient

des ordinateurs XO, et ce, tant en ce qui a trait à la collaboration autour de l'écran de l'ordinateur que de la collaboration à travers son utilisation.