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Carte 3. Ratio manuels par élèves au niveau régional au Mali en 2007-08

2. Les orientations de la Banque mondiale

Concernant les orientations de la Banque mondiale, son entrée dans les politiques éducatives s’est faite à l’origine par le biais de la théorie du capital humain développée par des économistes de l’université de Chicago tels que Schultz et Becker (Heyneman, 2003). D’après cette logique, « la politique éducative doit consister en une adéquation maximale des ressources humaines aux besoins de l’économie » (Akkari, 2001, p. 16)

Selon Jones (1992), l’organisation a la foi dans le pouvoir du savoir, des compétences et expériences pour transformer les individus et les sociétés, et en particulier pour accroître la productivité des travailleurs. D’ailleurs, Samoff (2005) précise que la Banque considère l’éducation comme un système de livraison : les bons élèves terminent leurs études avec la tête pleine de connaissances qu’ils peuvent ensuite utiliser pour leur futur métier. Toujours dans la même idée, un accroissement des bourses éducatives pour les pauvres dans les zones rurales augmentera les richesses et diminuera les inégalités. La Banque mondiale met en avant des pays asiatiques, les « Tigres », tels que Taiwan, la Malaisie, la Corée, la Thaïlande, comme preuve que la théorie du capital humain fonctionne (Banya & Elu, 1997).

Pour l’organisation, il ne semble pas y avoir d’alternatives à cette théorie puisqu’elle s’en sert depuis des décennies (Hickling-Hudson, 2002) : elle est « appliquée dès les années 70 au

‘tiers-monde’ par l’économiste George Psacharopoulos de la Banque mondiale, et elle considère l’éducation comme « un bien privé, individuel, marchandisable, dont le principal bénéfice serait de nature économique » (Lewandowski, 2011, p. 2).

Cette théorie du capital humain est à mettre directement en lien avec l’idéologie néolibérale, qui est à la base pour de nombreux auteurs de l’intervention de la Banque mondiale : « Les conditions préalables de la Banque pour l’éducation ne peuvent seulement être comprises comme une prise de position idéologique, dans la promotion d’un système mondial intégré le long des lignes du marché » (Jones, 1998, p. 152). La finalité est de réussir dans une économie globalisée (Hickling-Hudson, 2002) et ainsi de « s’adapter aux ‘inévitables’ grands changements de notre époque » (Lagier & Diarra, 2006, p. 2). Plus que dans toute autre région, Stein (2004) pense que l’Afrique a dû adopter cette vision néolibérale, étant en grande partie dépendante de la Banque. Au Mali plus précisément, « cette priorité est définie en relation avec le but général du PISE qui est de permettre au Mali d’acquérir, par le biais de l’éducation de base universelle, la capacité de répondre aux exigences du marché économique mondial » (Lagier & Diarra, 2006, p. 4). Kamat (2012), Klees, Samoff et Stromquist (2012) ou Robertson (2012a) développent les arguments néolibéraux invoqués pour soutenir les politiques de la Banque. Ils insistent en particulier sur les potentiels bienfaits de la privatisation selon l’organisation. Je reviendrai plus en détail sur ce point ultérieurement.

Je remarque également que lorsque des concepts comme l’équité ou la lutte contre la pauvreté sont introduits dans le discours de la Banque mondiale, c’est dans l’objectif de « corriger les imperfections du marché, notamment en ce qui concerne les pauvres et donc à ‘mieux faire fonctionner les marchés pour les pauvres’, comme il est souligné dans le rapport sur le développement 2001 » (Bourdon, 2002, p.133). Laval et Weber (2002) ou Bhola (2006) sont du même avis sur ce leurre dans l’évolution de la pensée de la Banque mondiale. Benicourt (2001) précise que la Banque, « tout en reconnaissant la complexité de la pauvreté, adopte une démarche ‘monétaire’. Elle cherche à voir comment divers éléments se combinent pour exacerber la condition des income-poor » (p. 53). Lautier (2002) souligne de façon identique que cette vision de la pauvreté contraste avec l’approche de Sen, en partie adoptée par le PNUD, qui met l’accent davantage sur la justice sociale et les « capabilities ». Mestrum (2008) note d’ailleurs que des thématiques comme la lutte contre la pauvreté sont tellement consensuelles au niveau international que l’organisation n’a pas de soucis pour imposer sa vision.

Dans le registre des inégalités de genre, Stromquist (2012), Leach (2000) ou Niang (2006) démontrent que le choix par la Banque mondiale d’agir en faveur de la scolarisation des filles

est justifié dans l’optique d’accroître la productivité. Zoundi (2008) a écrit que pour la Banque, « la promotion de la croissance économique durable et la réduction intergénérationnelle de la pauvreté passent prioritairement par le développement du capital humain, à savoir l’éducation des filles et des femmes, une ressource productive essentielle ‘à ne pas gaspiller’ » (p. ii).

Même l’utilisation d’approches éducatives alternatives, serait à mettre en lien avec le néolibéralisme :

L’emprise du néolibéralisme comme modèle de développement dans les années 1980 et 1990 a mis en avant la démocratisation politique comme un préalable au développement économique. Et l’éducation a joué un rôle central dans le projet de démocratisation.

Compte tenu de ses tendances démocratiques, la pédagogie centrée sur l’apprenant était un choix naturel pour le développement des relations sociales démocratiques dans les écoles des pays bénéficiaires de l’aide. (Tabulawa, 2003, p. 7)

Dans tous les rapports de la Banque mondiale, l’éducation au service de la croissance économique serait mise en avant comme la priorité majeure des politiques éducatives (Robertson et al., 2007). C’est ainsi qu’Hibou (1998a) dénonce les effets pervers du « tout économique ». Et il paraît évident pour certains auteurs que les analyses de l’organisation s’effectuent essentiellement à travers ce prisme « d’une terminologie simple de relation cause-effet ; du coût/bénéfice ; du rendement ; de réalisations, input, output » (Dyer, 1990, p. 41).

Cette vision économiste ne laisse pas de place à des visions plus progressistes ou non-économiques (Klees, 2011). La Banque mondiale se soucie très peu des considérations pédagogiques ou socioculturelles, qui sortent par ailleurs de la vision occidentalo centrée (Crossley & Watson, 2003). Pour Leher (2004), cette éducation est donc de moins en moins polytechnique, dans le sens où l’entendait Marx, et est de plus en plus instrumentale, le but étant de préparer les citoyens au monde du travail. Les projets sociétaux et les processus d’apprentissage ne sont pas intéressants puisqu’entre autres ils ne sont pas mesurables. Il est intéressant de noter, comme l’a démontré Welmond (2002) que même les enseignants sont considérés par l’organisation comme des acteurs économiques.

Klees (2002), Thiel (2008) ou Vally et Spreen (2012) critiquent l’omission de la Banque d’une approche de l’éducation basée sur les droits, celle-ci étant davantage liée aux besoins de l’économie. Pourtant Leach (1999) précise qu’un employé de la Banque mondiale, non économiste, a suggéré qu’il fallait utiliser des analyses sociales et culturelles pour la

planification des projets de développement. Mais sur 30 projets, 27 n’ont pas pris en compte ces aspects.

Un point soulevé par d’autres auteurs (Coraggio, 1997 ; Hibou, 1998b) est que la Banque mondiale base son action sur la théorie économique néoclassique qui selon eux possède déjà des lacunes méthodologiques dans son application, et dont les techniciens de la Banque sont conscients. En plus, elle remodèle cette théorie à son avantage ; elle n’est pas utilisée de manière complète : l’intervention de l’Etat est justifiée dans cette théorie alors que la Banque mondiale la réduit au strict minimum. Cela conduit l’organisation à simplifier le discours d’économie politique en retenant notamment certaines hypothèses et des normes implicites réductionnistes ou en jouant sur les mots.

D’ailleurs, Klees, Stromquist et Samoff (2012a) ont relevé dans le dernier rapport stratégique de l’éducation élaboré par la Banque un persistent auto-référencement. Les auteurs utilisent principalement les études réalisées par l’organisation elle-même pour justifier l’action. Les évidences provenant de l’extérieur de l’institution sont simplement ignorées. Steiner-Khamsi (2012) critique le discours de la Banque laissant entendre qu’elle parle au nom de tous, alors qu’en réalité, elle n’écouterait qu’elle-même.

Cette emprise de l’économie est d’autant plus vraie que la Banque mondiale espère un retour sur investissement des actions destinées aux politiques éducatives. Pour mesurer cet investissement, elle s’appuie très fortement sur l’analyse conventionnelle des taux de rendement de l’éducation (Watson, 1996 ; Robertson et al., 2007). Cette approche n’est pas sans poser problème puisqu’il faut calculer rapidement les taux de rendement avec des projets sur le long terme, de surcroît avec des informations statistiques lacunaires. Bennell (1996) a identifié des carences théoriques et empiriques qui rendent l’application de ce type d’analyse problématique. Pour l’Afrique en particulier, il s’agit d’un instrument inadéquat (Vinokur, 2003). D’ailleurs, d’après Gonzales (1999), cette volonté de retour sur investissement s’est peu concrétisée dans l’action de la Banque puisque malgré les milliards de dollars déversés dans le secteur de l’éducation, il y a eu peu d’intérêt pour mettre en place des cadres précis ayant comme visée « où » et « comment » cibler les fonds. Pourtant, elle « soutenait avec l’appui de chiffres que la rentabilité de l’enseignement primaire était plus élevée que celles des autres niveaux d’enseignement dans les pays en développement » (Orivel, 2002 p. 5) Ainsi, la question que la Banque mondiale se pose quand elle veut agir dans l’éducation est

comment rendre l’investissement rentable :

Les travaux apologétiques de la Banque mondiale, fondés sur les méthodes de calculs de taux de rendement privés et sociaux, traduisent des taux de rendements micro en propositions de politiques d’affectation de ressources entre le secteur éducatif et les autres secteurs mais également à l’intérieur du système éducatif entre les cycles. (Hugon, 2006 p.

4)

Lauglo (1996) remet en cause ce type d’analyse en termes de coût-bénéfice. En effet, la scolarisation peut également avoir des effets indésirables comme la légitimation de l’injustice sociale ou l’ignorance de la diversité culturelle.

Dans ce souci de rentabilité, les investissements éducatifs, notamment liés à la qualité, qui supposent des coûts trop élevés, et qui en plus ne sont pas efficaces, doivent être évités (Soudien, 2012). Et souvent, ce sont les enseignants qui ont été visés par la minimisation des coûts prônée par la Banque mondiale :

L’école, pour la Banque mondiale, ne peut plus constituer un sanctuaire bénéficiant des faveurs des pouvoirs publics avec une formation initiale de deux années et une grille de salaire considérée par les experts de la Banque comme excessive au vue des services rendus par un maître dans une classe. (Barro, 2008, p. 67)

L’argument utilisé est que le soi-disant salaire élevé des enseignants a eu pour effet de réduire les taux de scolarisation. D’où la nécessité pour la Banque de ne pas dépasser un ratio de 3,5 fois le PNB par habitant (Bennell & Akyeampong, 2007). Cela amène d’ailleurs à une inefficacité du système, ce qui est contraire aux vœux de l’organisation, puisque cela « favorise des blocages systématiques de l’école avec des grèves à répétition » (Barro, 2008, p.

26). Marphatia, Legault, Edge & Archer (2010) démontrent aussi les contradictions à l’interne dans les analyses puisque certains auteurs de l’institution prouvent que les enseignants contractuels (moins qualifiés et rémunérés) ont des moindres taux d’absentéisme que leurs collègues fonctionnaires alors que d’autres auteurs toujours de cette institution ont montré qu’une rémunération moins stable pouvait accroître ce taux. D’ailleurs, pour Tao (2012), ce concept d’absentéisme est utilisé comme un principe abstrait en-dehors de tout cadre personnel, culturel et historique. Ainsi, l’efficacité de l’école n’est pas identifiée par la Banque à travers la satisfaction ou la motivation des enseignants par exemple (Bennell, 2007).

D’autres auteurs notent tout de même que la Banque mondiale a financé des programmes de formation des enseignants, dont un programme de formation continue pour enseignants au

Malawi (Kunje et al., 2003). Aussi, la Banque reconnaît que des enseignants avec un vaste répertoire de compétences d’apprentissage sont plus efficaces que ceux avec un répertoire limité (Gonzales, 1999).

Avec cette logique quantitative plutôt que qualitative, il n’est pas étonnant de constater qu’une priorité absolue est accordée par les spécialistes de la Banque aux conditions matérielles de l’enseignement (bâtiments, manuels scolaires, etc.) (Barrett et al., 2007) qui ne sont que des « instruments pour atteindre des finalités éducatives, qui dépassent largement le cadre de la relation pédagogique et qui englobent des aspects économiques et socioculturels » (Akkari, 2001, p. 21). Altinok (2005) rappelle comment a été légitimé ce choix : les dépenses sont « appuyées par une multitude d’études économétriques qui traitent l’éducation comme une ‘fonction de production’ » (p. 12).

Afin de mieux comprendre la logique économico-centrée de la Banque mondiale, il peut paraître pertinent de préciser que la Banque mondiale est devenue de loin le plus gros employeur d’économistes et de professionnels du développement (Mundy, 2002 ; Stein, 2004). 20% des spécialistes de l’éducation travaillant à la Banque Mondiale avaient leur formation universitaire en éducation. Autrement dit, les orientations éducatives de l’institution sont majoritairement construites par des non-spécialistes de l’éducation (Heyneman, 2003).

Cependant, il ne faudrait pas oublier que l’institution étudiée est avant tout une banque, et qu’il est a priori normal qu’elle envisage prioritairement son action comme un investissement et qu’elle l’évalue en ces termes (Jones, 1992). Ainsi, elle agit comme une institution financière dans l’octroi des crédits (Jones, 1997). La Banque ne valorise d’ailleurs pas les résultats des projets auxquels elle participe, qui peuvent être mauvais, pour être sûr que cela ne remette pas en cause le remboursement des crédits (Jones, 1992).

D’ailleurs, la Banque mondiale fonctionnerait quelque peu comme une entreprise (Altinok, 2005). Cet argument est mis en avant par le fait qu’elle utilise des valeurs cibles ou benchmarks dans ses analyses des politiques éducatives. Celles-ci sont utilisées dans le but d’accroître la performance des systèmes éducatifs en prenant comme modèle les pays qui, selon elle, ont le mieux réussi économiquement. Généralement, il s’agit des pays asiatiques déjà mentionnés plus haut. Et ceci aurait pour conséquence de « déboucher très souvent sur une baisse de la rémunération des enseignants, une diminution des taux de redoublement » (Altinok, 2005, p. 21). Plus précisément, Bourdon (2006) écrit que parmi les caractéristiques

du modèle efficace pour la Banque mondiale se trouvent la rémunération des enseignants à hauteur de 3,6 fois le PIB par tête ou un taux moyen de redoublement en-dessous de 10%.

La contrainte dans l’utilisation des benchmarks pour analyser les systèmes éducatifs est que ceux-ci valorisent des modèles homogènes ne prenant pas en compte la diversité des contextes :

L’analyse en terme de fonction de production prend comme hypothèse qu’un enseignant ou qu’un élève sont identiques pour tous les pays, les assimilant à des facteurs de production. Pour autant, il est évident que des facteurs subjectifs, non médiatisés par le marché, peuvent intervenir et remettre en cause le bienfondé de l’approche normative.

(Altinok, 2005, p. 17)

D’ailleurs, la Banque a mis en place un système de statistiques, le World Bank’s System Assessment and Benchmarking for Education Results (SABER), pour évaluer la performance des systèmes éducatifs avec des objectifs homogénéisants (Barrett & Tikly, 2012 ; Steiner-Khamsi, 2012 ; de Siqueira, 2012 ; Klees, 2012 ; Samoff, 2012b ; Soudien, 2012 ; Verger &

Bonal, 2012).

La valorisation de ces benchmarks a été prise en compte par les politiques d’éducation en Afrique subsaharienne, et notamment au Bénin, dont le gouvernement en accord avec la Banque a établi des cibles en termes de recrutement des enseignants : « Le ministère a finalement recruté 3 000 enseignants en vertu d’un contrat de deux ans qui a commencé avec l'année scolaire 1997-98, en les payant moins de la moitié que ce que les enseignants fonctionnaires gagnent » (Welmond, 2002, p. 51). Cela aurait conduit à une déprofessionnalisation des enseignants (Steiner-Khamsi, 2012).

Un des axes prioritaires pour la Banque mondiale, en droite ligne avec l’idéologie néolibérale, et devant servir de valeur cible et donc de conditions pour l’octroi de prêts, concerne la privatisation, et d’une certaine manière aussi, la décentralisation. L’Etat, d’après la Banque mondiale, n’est pas assez efficace et n’a pas toujours les moyens pour prendre en charge son système éducatif, d’où la nécessité de le désengager, et cela depuis des décennies (Robertson, 2012b). Des auteurs (de Siqueira, 2012 ; Klees, 2012 ; Stromquist, 2012 ; Verger & Bonal, 2012) attirent l’attention sur les impacts potentiels et réels de cette promotion de la privatisation par la Banque sur l’équité et la démocratie. Par exemple, la Banque mondiale a contraint certains pays à l’utilisation de frais de scolarisation à l’école primaire, et notamment au Malawi (Klees, 2008a).

Aussi, la privatisation a pu se développer de manière plus subtile à travers « la substitution des emplois de titulaires de la fonction publique par des emplois éphémères de contractuels de droit privé dans le secteur de l’éducation (volontaires de l’éducation et contractuels) » (Solaux

& Suchaut, 2002, p. 1).

Aussi, parmi les réformes demandées aux pays bénéficiaires de son aide, la Banque mondiale préconise la décentralisation et l’autonomie des établissements d’enseignement, compris comme le transfert des responsabilités de gestion et la captation des financements. L’Etat agirait plutôt pour le maintien des fonctions centralisées, notamment en établissant des normes, en facilitant les intrants qui influent sur le rendement scolaire, en adoptant des stratégies flexibles pour l’acquisition et l’utilisation de ces intrants ou en contrôlant les performances scolaires (Croso Silva, Azzi & Bock, 2008). Cette décentralisation peut également se caractériser pour la Banque mondiale par un plus grand rôle joué par la société civile ou la préférence pour des mécanismes de marché plutôt que des méthodes bureaucratiques pour la livraison de services (Mok, 2005). La décentralisation est aussi défendue comme étant un moyen de réduire les coûts. Mais Félix (1996) relève une contradiction par rapport aux « investissements inhérents à la mise en place de cette politique.

Dans le cas du Mali, la constitution de l’ensemble des institutions décentralisées demandera des moyens humains, matériels et financiers importants » (p. 5). Une autre contradiction a été mise en lumière par Suzuki (2002) puisque la Banque préconise la participation des communautés dans la gouvernance scolaire et dans le même temps, le libre choix des parents de l’école. Ainsi, l’intérêt de la communauté peut entrer en conflit avec des intérêts privés.

Delgado-Ramos et Saxe-Fernández (2005) rappellent toutefois que l’organisation a poussé à la privatisation des systèmes éducatifs principalement au niveau de l’enseignement supérieur.

Leach (2000) note pour sa part que l’organisation a fait du plaidoyer pour des écoles primaires gratuites en Afrique subsaharienne, notamment à travers son rapport sur l’éducation de 1995. Enfin, l’Etat a encore toute sa place dans le système éducatif pour l’organisation :

L’Etat devient alors l’organisateur du système, ce qui est aussi le vœu d’un bailleur comme la Banque mondiale qui malgré sa conception libérale de la gestion de la fonction publique ou de l’éducation souhaite voir une bureaucratie forte capable de réguler le système éducatif. (Barro, 2008, p. 7)

Cet affaiblissement du rôle de l’Etat et de l’engouement pour la privatisation est à mettre en lien avec la mise en place des Programmes d’Ajustement Structurel (PAS) par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (Leach, 2000 ; Robertson et al., 2007).

Ces PAS dans le secteur éducatif ont été selon de nombreux auteurs (Dale, 2000 ; Robertson et al., 2007 ; Sanou & Charmillot, 2010 ; Vulliamy, 2010 ; Klees, 2012) imposés aux Etats, et notamment en Afrique subsaharienne. Ils ont même été caractérisés par certains auteurs (Brock-Utne, 2002 ; Geo-Jaja & Mangum, 2003) comme une volonté de perpétuer l’effort entrepris au moment des colonisations par l’Occident, et leur implantation a été facilité par l’élite locale.

Tikly (2001) a bien résumé le contenu de ces politiques en général : coupes dans les dépenses publiques, politiques de libéralisation du commerce, dévaluation de la monnaie, réduction du contrôle des prix, politiques économiques axées sur l’exportation, politiques fiscales révisées pour augmenter les recettes publiques, frais pour les services publics comme l’éducation et accroissement de la privatisation.

Spécifiquement pour l’éducation, voici quelles ont été les caractéristiques des PAS :

Un rôle réduit du gouvernement dans l’offre éducative ; la rationalisation de son rôle dans le financement de l’éducation et dans la supervision du système ; un engagement pour la décentralisation; le recouvrement des coûts et la privatisation dans l’enseignement supérieur; une attention accrue aux facteurs de production tels que les manuels scolaires ; un mouvement axé sur la formation professionnelle et technique. (Robertson et al., 2007, p. xiv)

Les effets néfastes des PAS sur l’éducation ont fait l’objet d’une littérature abondante. De manière générale, quelques effets notoires de ces politiques sont le départ d’enseignants qualifiés et l’augmentation des frais de scolarité, le développement de la privatisation et la réduction des dépenses pour le matériel et les infrastructures scolaires, une baisse générale de

Les effets néfastes des PAS sur l’éducation ont fait l’objet d’une littérature abondante. De manière générale, quelques effets notoires de ces politiques sont le départ d’enseignants qualifiés et l’augmentation des frais de scolarité, le développement de la privatisation et la réduction des dépenses pour le matériel et les infrastructures scolaires, une baisse générale de