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Chapitre 1 : Etude bibliographique

4. La réponse aux dommages de l’ADN (DNA Damage Response ou DDR)

4.1. Organisation générale de la réponse aux dommages de l’ADN

Il était important d’introduire l’ensemble des systèmes de réparation de l’ADN que nous venons de voir puisque ces voies de réparation vont être régulées de manière fine par ce qu’on appelle communément la DDR (DNA Damage Response). Cette partie va donc s’intéresser au déclenchement des mécanismes de réparation à travers les différentes voies de signalisation qui existent pour initier et activer ces mécanismes.

Au cours de ces 20 dernières années, les avancées concernant la DDR ont été profondément bouleversées en termes de concept. En effet, plusieurs facteurs clés de ce mécanisme d’initiation, de signalisation et de transduction ont pu être identifiés (Harper and Elledge, 2007). Ceci notamment grâce à l’équipe de Stephen Elledge qui a d’ailleurs reçu cette année le « Breakthrough Prize in Life Sciences » pour ces recherches sur la détection des dommages à l’ADN et la manière dont l’information est relayée dans la cellule afin d’activer les systèmes de réparation et ainsi favoriser la survie cellulaire.

Ce mécanisme fut découvert chez la levure puis les récents travaux ont permis de montrer que ces voies de régulation sont très conservées chez les mammifères.

La DDR regroupe l’ensemble des mécanismes cellulaires qui vont permettre de signaler le dommage et d’activer les différentes voies de réparation de l’ADN (Zhou and Elledge, 2000). La DDR est très complexe puisqu’elle correspond à un réseau de plusieurs voies qui interagissent ensemble pour accomplir une réponse cellulaire. Le recrutement des facteurs impliqués dans la DDR est un processus régulé de manière spatiotemporelle où les facteurs sont assemblés au dommage de façon séquentielle et coordonnée. En, effet, la DDR est constituée de plusieurs niveaux qui vont faire intervenir différentes protéines : les protéines dites « senseurs », les transducteurs, les médiateurs et les effecteurs (Figure 23). Il est important de noter que toutes les protéines de ces voies sont liées et la plupart interagissent entre elles.

La DDR peut être activée suite à la présence d’un dommage mais également suite au stress réplicatif correspondant à la situation qui engendre le ralentissement ou l’arrêt de la réplication (Gelot et al., 2015). De plus, la DRR a pour but d’activer les différentes voies de réparation de l’ADN mais elle peut également entrainer d’autres types de réponses variées au niveau cellulaire que nous détaillerons plus loin.

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Figure 23 - La cascade de signalisation de la réponse aux dommages de l’ADN (adaptée de Zhou and Elledge, 2000)

4.2. Les Senseurs

Les senseurs correspondent aux protéines qui vont détecter les lésions de l’ADN et activer les différentes protéines impliquées dans la transduction du signal. Nous allons décrire ces senseurs en fonction des protéines qu’ils vont activer : ATM, DNA-PK ou ATR. Ces protéines sont centrales dans la DDR et ont conduit à donner leur nom aux trois voies. Nous parlerons donc de voie ATM, ATR ou DNA- PK qui correspond à la cascade d’évènements impliquant ces trois protéines. Nous détaillerons également les senseurs PARP1 et 2 qui peuvent activer ces trois protéines.

4.2.1. Activation de la voie ATM

La voie ATM (Ataxia-Telangiectasia Mutated) est activée suite à la présence de CDBs (Paull, 2015). C’est le complexe MRN (Mre11, Rad50, Nbs1) qui agit comme un senseur pour l’activation d’ATM et qui permet son recrutement aux sites endommagés via la protéine Nbs1 de MRN (Lee and Paull, 2005). Le mécanisme exact d’activation d’ATM par MRN n’est toujours pas connu. Néanmoins, la forme inactive d’ATM se présente sous la forme d’un dimère. Lorsqu’il est recruté aux sites endommagés, il va se dissocier (Bakkenist and Kastan, 2003). Deux autres protéines sont également impliquées dans l’activation d’ATM : Tip60 qui va acétyler un résidu Lysine d’ATM et la phosphatase PP5 dont les rôles exacts dans cette activation sont ignorés (Ali et al., 2004; Sun et al., 2005).

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Figure 24 - Activation d’ATM (Cimprich and Cortez, 2008)

4.2.2. Activation de la voie DNA-PK

La voie DNA-PK est activée comme ATM suite à la présence de CDBs. Cependant, le senseur de cette voie est l’hétérodimère Ku70/80. Celui-ci va permettre le recrutement de DNA-PK. DNA-PK possède un double rôle : elle est impliquée dans la DDR et a également un rôle majeur dans l’activation de la voie c-NHEJ (Partie voie c-NHEJ).

4.2.3. Activation de la voie ATR

Contrairement aux voies ATM et DNA-PK, la voie ATR (Ataxia-Telangiectasia and Rad3-related) est activée en réponse à une variété plus importante de types de lésions (adduits de l’ADN, pontages, CDBs de type cohésif) qui vont entrainer une CSB de l’ADN (Cimprich and Cortez, 2008) ou à la suite d’un stress réplicatif (Byun, 2005). En effet, la formation d’une CSB a lieu lors des voies de réparation NER, long-patch BER et MMR. Son activation est un processus comportant de multiples étapes car l’interaction d’ATR avec l’ADN dépend de la protéine RPA (Zou and Elledge, 2003). RPA est fixée sur l’ADN simple brin et va entrainer le recrutement d’ATR via sa protéine régulatrice ATRIP. ATRIP interagit directement avec RPA permettant la formation d’un complexe ATR-ATRIP-RPA au niveau du site endommagé (Ball et al., 2005; Cortez, 2001). Le complexe interagit ensuite avec un second complexe 9- 1-1 constitué de Rad9-Rad1 et Hus1. Le recrutement de ce dernier complexe 9-1-1 s’effectue via la protéine Rad17. La phosphorylation de la sous-unité Rad9 de 9-1-1 permet l’association de TopBP1 avec ATR entrainant alors son activation. TopBP1 possède un domaine qui permet la stimulation de l’activité kinase d’ATR par contact avec ATRIP et ATR. De plus, TopBP1 est également un substrat d’ATR (Partie Médiateurs et Effecteurs ci-après). En effet, ATR va phosphoryler un résidu Sérine de TopBP1 permettant une boucle d’amplification du signal induit par TopBP1 et donc l’activation d’ATR.

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Plus récemment, une nouvelle protéine senseur ETAA1 a été identifiée et possède un domaine permettant également l’activation d’ATR comme TopBP1. Cette protéine est recrutée par interaction directe avec RPA contrairement à TopBP1 qui est mobilisée via Rad9 (Bass et al., 2016; Feng et al., 2016). L’hypothèse la plus probable est que TopBP1 et ETAA1 sont recrutées selon les différentes déformations de l’ADN engendrées par les dommages.

Figure 25 - Activation d’ATR (Cimprich and Cortez, 2008)

4.2.4. Activation par PARP1 et 2

Les trois voies d’activation (ATM, DNA-PK et ATR) que nous venons de décrire peuvent être également activées par la famille de protéine PARP (Poly (ADP-Ribose) Polymérase). Cette famille de glycosyltransférase est constituée de 17 membres mais uniquement PARP1 et PARP2 sont impliquées dans la DDR (Schreiber et al., 2006). Elles sont activées par des CSBs ou des CDBs et catalysent l’addition de chaines poly (ADP-ribose) par l’utilisation de NAD+ sur les protéines afin de permettre le recrutement des transducteurs ATM, ATR et DNA-PK. PARP1 et 2 sont très efficaces dans la reconnaissance des « trous » dans l’ADN grâce à leurs deux doigts de zinc. Leur activation entraine la synthèse des chaines PARP (PARPylation) en quelques secondes sur des protéines cibles que sont l’histone H1 et H2B ainsi que elle-même (Schreiber et al., 2006). Cette action permet un relâchement de la chromatine pour

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faciliter l’accès aux sites endommagés. La PARPylation des histones contribuerait au remodelage de la chromatine et au recrutement des protéines impliquées dans les voies de réparation.