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Chapitre 1 : Etude bibliographique

3. Les voies de réparation de l’ADN

3.1. La réparation par excision de bases (BER)

La réparation par excision de bases (Base Excision Repair : BER) corrige des « petits » dommages spécifiques des bases qui n’entrainent pas de distorsion importante de la double hélice de l’ADN. Ce type de dommage est retrouvé dans les cas de dégradation spontanée de l’ADN entrainant la formation de sites AP, de cassures simple brin ou des suites de l’oxydation (8oxoG, diols de Thymine et de Cytosine), la méthylation, la désamination (C désaminé en U) ou encore la peroxydation lipidique (Ethénobases) (Lindahl, 1993). Cette voie de réparation a lieu dans deux compartiments cellulaires : le noyau et les mitochondries. Dans le noyau, la BER est active tout au long du cycle cellulaire mais elle est particulièrement active en phase G1 du cycle cellulaire (Dianov and Hübscher, 2013). Comme nous l’avons vu, elle se déroule en quatre étapes : la première est spécifique à la lésion et est initiée par une famille d’enzymes appelée ADN N-glycosylases dont la première fonction est la reconnaissance des différents dommages. Les trois prochaines étapes présentent des mécanismes différents dépendant du type d’ADN N-glycosylase prenant en charge la lésion ainsi que de l’état physiologique de la cellule. Nous allons décrire en détail les différents acteurs impliqués dans les quatre étapes de ce mécanisme de réparation.

44 3.1.1. Première étape : Reconnaissance du dommage

Elle consiste à reconnaitre et exciser la liaison N-glycosidique entre le sucre et la base lésée par une ADN N-glycosylase (Hegde et al., 2008). Les ADN-N-glycosylases sont indispensables à ce mécanisme de réparation puisqu’elles sont capables de trouver de petites lésions cachées dans un très large excès de bases « normales ». Chez les mammifères, au moins onze ADN N-glycosylases localisées dans le noyau ont été identifiées et sont spécifiques d’un type de dommage ou d’un groupe (Krokan and Bjoras, 2013) (Tableau 1). Par exemple, la glycosylase OGG1 prend en charge deux lésions oxydatives dont la 8oxoG et SMUG1 prend en charge quatre lésions dont εC. Elles viennent se lier à l’ADN dans le petit sillon et vont ensuite basculer la base endommagée dans le grand sillon (Huffman et al., 2005).

Ils existent deux types de glycosylases classés selon leur mode d’action :

- Les glycosylases dites monofonctionnelles qui ne possèdent qu’une activité glycosylasique et qui vont générer un site AP.

- Les glycosylases dites bifonctionnelles qui possèdent en plus de leur activité glycosylasique, une activité β-lyase ou β, δ-lyase qui permet d’inciser l’ADN après la formation du site AP pour former une cassure simple brin (CSB).

En général, toutes les glycosylases qui enlèvent la base U sont monofonctionnelles et la plupart des glycosylases qui sont spécialisées dans la reconnaissance des bases oxydées sont bifonctionnelles (NTHL1, NEIL).

Tableau 1 - ADN N-glycosylases chez les mammifères intervenant dans la voie BER (adaptée de Krokan and Bjoras, 2013)

45 3.1.2. Deuxième étape : Incision du brin d’ADN

Il existe deux mécanismes distincts pour cette étape d’incision de l’ADN : une effectuée par APE1 et l’autre effectuée par les glycosylases bifonctionnelles.

3.1.2.1. Par APE1

La protéine AP-Endonucléase 1 (APE1) appartient à une famille d’enzymes capable de reconnaitre et de cliver les sites AP. Son activité est dépendante de Mg2+

, entrainant l’hydrolyse de la liaison phosphodiester en 5’ du site AP. Cela conduit à la formation de deux extrémités : une extrémité 3‘-OH en amont et une extrémité 5’désoxyribose phosphate (5’dRp) (Masuda et al., 1998). Chez les mammifères, il est estimé que 95% des sites AP sont pris en charge par cette enzyme (Demple and Harrison, 1994).

3.1.2.2. Par une glycosylase bifonctionnelle

Les glycosylases bifonctionnelles possèdent une activité AP lyase en plus de leur activité glycosylase permettant d’inciser l’ADN après la formation du site AP.

Parmi ce type de glycosylase, on distingue les glycosylases qui possèdent une activité β-élimination de celles qui possèdent une activité β, δ-élimination. Dans le premier cas, l’élimination β entraine la formation d’une extrémité 5’P et une extrémité 3’aldéhydique insaturée α, β, 4-hydroxy-2-pentenal (ddR5p). Dans le second cas, cela conduit à une extrémité 5’P et une extrémité 3’P (Hegde et al., 2008).

Ces deux types d’élimination produisent des extrémités qui vont nécessiter un réarrangement avant de pouvoir continuer le processus de réparation (Jacobs and Schär, 2012; Svilar et al., 2011). Dans le cas de la β élimination, APE1 se charge d’éliminer l’extrémité ddR5p et dans le cas de la β, δ élimination, les extrémités 3’P et 5’P sont enlevées par une Poly Nucléotide Kinase (PNK) (Hegde et al., 2008; Svilar et al., 2011).

Ces actions permettent d’obtenir des extrémités 3’OH et 5’P qui pourront être reconnues et prises en charge par les polymérases pour les prochaines étapes de resynthèse et de ligature d’une nouvelle base non lésée selon deux sous-voies : la voie de resynthèse courte (short-patch) ou longue (long-patch).

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3.1.3. Troisième et quatrième étape : Resynthèse de l’ADN & Ligature de l’ADN

3.1.3.1. La voie de resynthèse courte (short-patch)

Dans le cas de la short patch BER, un seul nucléotide va être remplacé. Généralement, cette sous voie est prédominante dans 80-90% de la voie BER. Elle nécessite des protéines qui ne sont pas impliquées dans la réplication et qui sont donc actives tout au long du cycle cellulaire.

L’extrémité 3’OH est comblée par une ADN polymérase β qui possède une activité dRpase intrinsèque qui va cliver le résidu dRP et insérer une nouvelle base complémentaire à celle se trouvant sur le brin opposé. L’étape de ligature est effectuée par la Ligase I ou III. La Ligase III est présente dans le noyau et les mitochondries de la cellule contrairement à la Ligase I qui est uniquement présente dans le noyau. Le rôle de la Ligase I dans cette sous-voie n’est pas encore totalement élucidé.

La Poly (ADP-Ribose) Polymérase 1 (PARP1) et XRCC1 participent à cette sous-voie mais uniquement dans certains types de short patch (Hanssen-Bauer et al., 2011). XRCC1 est une protéine d’échafaudage qui s’associe à la polymérase afin de l’assembler avec la ligase et de stabiliser le complexe formé.

3.1.3.2. La voie de resynthèse longue (long-patch)

Dans le cas de la long patch BER, 2 à 10 nucléotides seront remplacés. Cette étape a lieu principalement dans les cellules en prolifération car elle utilise des protéines impliquées dans la réplication comme les ADN polymérases δ et ε, PCNA, FEN1 et l’ADN Ligase I (Svilar et al., 2011).

Cette sous-voie fait intervenir les ADN polymérases δ et ε pour la phase de resynthèse en coopération avec le facteur RFC (Replication Factor C) et le facteur de processivité PCNA (Proliferating Cell Nuclear Antigen) (Hoeijmakers, 2001). Cependant, l’incorporation du deuxième nucléotide ne dépendrait pas du statut de la cellule et utiliserait l’ADN polymérase β dans les cellules quiescentes. Dans le cas de cellules en prolifération, cette voie utiliserait préférentiellement les ADN polymérases δ et ε (Akbari et al., 2009). Ces polymérases n’ayant pas d’activité dRpase, les nucléotides qu’elles polymérisent provoquent une zone de recouvrement où l’ancien brin d’ADN n’est plus hybridé à son complémentaire nécessitant l’intervention de Flap endonucléase 1 (FEN1) qui possède cette activité. La ligation a ensuite lieu par l’ADN Ligase I en interaction avec PCNA.

Le choix de la sous-voie dépendrait également d’autres facteurs comme la spécificité de la glycosylase, le type cellulaire, le type de lésion, la disponibilité en ATP ainsi que des facteurs BER disponibles (Fortini et al., 1999; Narciso et al., 2007; Petermann, 2003).

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De plus, PARP1 a un rôle dans la détection et le recrutement des protéines de réparation de cette voie (Gibson and Kraus, 2012). Cependant, son rôle dans la signalisation et le recrutement des protéines de la voie BER n’est pas totalement élucidé. Nous verrons plus en détail le rôle de cette protéine dans la Partie 4.

Dans le cas des cassures simple brin, l’intervention des glycosylases n’est pas nécessaire. Ce sont les protéines XRCC1 et PARP1 qui ont pour rôle de détecter la cassure (Hegde et al., 2008). Ces protéines serviraient ensuite de socle pour le recrutement des autres protéines impliquées dans la voie BER (Figure 15).

Figure 15 - Schéma de la voie de réparation BER (Biola-Clier et al., 2017)