• Aucun résultat trouvé

Chapitre 1 : Etude bibliographique

2. Lésions de l’ADN

2.2. Lésions formées de façon endogène et présentes à l’état basal

2.2.1. Les sites abasiques (site AP)

L’hydrolyse de la liaison N-glycosidique entre le sucre et la base entraine la perte de la base azotée et ceci concerne toutes les bases (A, T, C & G). En fonction du type de base qui a été enlevé, la lésion formée est appelée site apurinique (A & G) ou site apyrimidinique (T & C) (site AP) (Figure 6).

35

Figure 6 - Structure chimique d’un site AP

Les sites abasiques sont les plus communément retrouvés dans l’ADN avec environ 10 000 sites AP formés dans une cellule par jour (Lindahl and Barnes, 2000). Ils peuvent être générés de différentes manières :

- par perte spontanée de la base suite à une hydrolyse de la liaison N-glycosidique. Il est important de noter que la dépurination est plus fréquente que la dépyrimidination due à une vitesse d’hydrolyse plus rapide sur les bases puriques que pyrimidiques (Gates, 2009),

- par les ADN N-glycosylases qui interviennent lors de la première étape du processus de Réparation par Excision de Base (BER) (McCullough et al., 1999),

- par des facteurs endogènes comme les ROS ou les phénomènes d’alkylation,

- suite à la perte d’adduits instables (Partie les adduits du BPDE ci-après).

2.2.2. Les lésions oxydatives

Dans les conditions physiologiques, les ROS sont des espèces chimiques issues de la chaîne de transport d’électrons pendant la respiration aérobie. A un faible niveau, les ROS sont des médiateurs de processus cellulaires particuliers comme dans les réactions redox ainsi que dans la défense immunitaire en réponse à l’invasion de pathogènes. La production de ces ROS s’effectue principalement de manière endogène suite au métabolisme aérobie dans les mitochondries mais aussi par les NADPH oxydases (lors de la phagocytose), le métabolisme des lipides dans les peroxysomes et les cyclooxygénases cytosoliques. Au cours de la respiration cellulaire, l’oxygène (O2) est progressivement réduit par un apport contrôlé de 4 électrons pour donner de l’eau selon les réactions suivantes : O2  O2°-  H2O2  OH°  H2O. Cependant, si cette réduction est incomplète, trois ROS sont potentiellement produits : l’anion superoxyde (O2°-), le peroxyde d’hydrogène (H2O2) et le radical hydroxyle (OH°). Des ROS et des

36

espèces réactives de l’azote (Reactive Nitrogen Species : RNS) sont également produites en quantité importante en cas d’inflammation.

Figure 7 - Schéma de la chaine respiratoire mitochondriale (source : Mémo visuel de Biochimie)

Ces ROS peuvent également être formées de manière exogène par les IR ou par divers xénobiotiques.

A l’état basal, la quantité de ROS intracellulaire varie peu due à la résultante d’un équilibre entre leur production et leur élimination par les systèmes antioxydants. Cependant, s’il y a une production excessive de ROS ou que l’élimination est diminuée, il y a une induction d’un stress oxydant au sein de la cellule. Les ROS sont responsables de la formation de plus de 100 types de dommages oxydatifs de bases différents ainsi que de cassures simple brin et des pontages ADN-protéine (Cadet et al., 2010; Ravanat et al., 2012). Nous allons voir le détail de deux types de lésions oxydatives produites par ces ROS : la 8oxoG et les diols de pyrimidines.

2.2.2.1. 8oxoG

La lésion la plus abondamment étudiée et produite par les ROS est la 8-oxo-7,8-dihydro-guanine (8oxoG). Ce dommage est formé suite à l’oxydation en position C8 de la guanine qui est la base possédant le potentiel redox le plus bas ce qui en fait une cible préférentielle d’oxydation (Figure 8). La 8oxoG est majoritairement formée à partir de OH° (Hall et al., 1996). Par ailleurs, cette lésion est également formée par l’oxygène singulet et par l’oxydation à un électron. Pendant la réplication, cette lésion peut former une paire incorrecte avec la base A au lieu de C entrainant des transversions GC  TA.

37

La 8-oxo-7,8-dihydro-2’-désoxyguanosine (8oxodG) est le marqueur ubiquitaire du stress oxydatif dans les cellules qui est le plus communément utilisé (Cadet, 2003).

On retrouve ce dommage à un niveau basal autour de 1 lésion/106 nucléotides (ESCODD, 2003). De plus, on estime qu’entre 400 et 1 500 lésions 8oxoG sont formées dans une cellule par jour (Klungland et al., 1999).

Figure 8 - Structure chimique de la base azotée de la 8oxoG

2.2.2.2. Diols de Thymine et de Cytosine

Les lésions 5,6-dihydroxy-5,6-dihydrothymine (diols de Thymine) et 5,6-dihydroxy-5,6-dihydrocytosine (diols de Cytosine) sont formées par une attaque du radical hydroxyle OH° en position C5 et C6 de la double liaison des bases pyrimidiques (Breen and Murphy, 1995) (Figure 9). Ces lésions peuvent également être produite par des facteurs exogènes suite à l’irradiation aux UV mais en quantité minoritaire comparé aux dimères de pyrimidines formés (Partie dommages photo-induits ci-après) ou après IR.

Il a été estimé qu’environ 300 diols de Thymine sont formées dans la cellule par jour (Adelman et al., 1988).

La formation de diols de Cytosine a été détectée plus tardivement que les diols de Thymine car cette lésion est peu stable en solution aqueuse et se dégrade rapidement lorsqu’elle est en sous la forme d’un nucléoside. Cependant, elle s’avère être stable lorsqu’elle est formée dans l’ADN double brin (Tremblay et al., 1999; Wagner and Cadet, 2010).

38 2.2.3. Les bases alkylées

Les acides gras polyinsaturés des phopholipides des membranes plasmiques peuvent être dégradés à partir de ROS ou de RNS par un processus appelé peroxydation lipidique (Lipid peroxidation : LPO). Un excès de LPO peut être induit par divers mécanismes comme l’inflammation chronique, le déséquilibre alimentaire ou par des problèmes dans le transport des métaux. La LPO est une réaction d’oxydation qui opère en trois phases : l’initiation, la propagation et la terminaison (Winczura et al., 2012). Ce mécanisme en chaine de dégradation des acides gras conduit à la formation de produits de LPO (Figure 10). Trois principaux produits de type aldéhydique sont formés : 4-hydroxyhydroperoxy-2-nonenal (HPNE), malonaldéhyde (MDA) et 4-hydroxynonenal (4-HNE), les deux derniers composés étant majoritaires (Bartsch and Nair, 2004). Ces produits réagissent directement avec l’ADN pour conduire à la formation de diverses bases alkylées dont la longueur des chaînes alkyles peut varier formant des adduits plus ou moins volumineux. Par exemple, le composé MDA conduit à la formation de MDA-Gua (M1G) et le composé HPNE forment des Ethénobases. Nous allons détailler la formation de ce dernier type de lésions.

39

Les Ethénobases sont formées par réaction des produits aldéhydiques conjugués avec l’atome N des bases de l’ADN pour former un exocycle (Figure 11). Ces lésions ont été identifiées non pas par l’analyse de produits issus de la LPO mais par l’analyse des conséquences de la réaction de l’ADN avec un agent exogène, le chloroacétaldéhyde (CAA) (Kochetkov et al., 1971).

Il existe un nombre important de type d’Ethénobases pouvant être formées à partir des produits de la peroxydation lipidique (M1G, 4-HNEG, …). Cependant, dans le cadre de ce projet, nous allons nous focaliser sur les trois Ethénobases suivantes : 1,N2-EthénoGuanine (εG); 1,N6-EthénoAdénine (εA) et 1,N4-EthénoCytosine (εC) (Cadet et al., 2010).

Ces lésions peuvent également être produites à partir d’agents exogènes comme le chlorure de vinyle (VC), le carbamate de vinyle et l’uréthane. Au cours de ces dernières années, plusieurs recherches se sont focalisées sur ces lésions qui sont considérées comme des marqueurs de LPO (Arab et al., 2008; Bartsch et al., 2011).

Figure 11 - Structure chimique des bases azotées : EthénoGuanine, EthénoAdénine et EthénoCytosine