• Aucun résultat trouvé

Chapitre 1 : Etude bibliographique

2. Lésions de l’ADN

2.3. Lésions formées suite à l’exposition à des agents génotoxiques (Facteurs exogènes)

Nous allons décrire dans ce paragraphe des lésions qui peuvent être formées suite à l’exposition à des agents génotoxiques de l’environnement. Nous nous concentrerons uniquement sur les lésions qui seront étudiées dans le cadre de cette étude mais il existe d’autres types de lésions (cassures double brin, pontage ADN-ADN, …) qui peuvent être également formées. Les lésions que nous allons examiner sont très étudiées et entrainent une forte déformation de la double hélice de l’ADN.

40 2.3.1. Les dommages photo-induits de l’ADN

Les rayonnements UV du soleil sont divisés en trois classes suivant leur longueur d’onde : UVA (320-400 nm), UVB (290-320 nm) et les UVC (190-290nm). L’ADN absorbe à une longueur d’onde maximum de 260 nm soit uniquement les UVC et un peu d’UVB. Cependant, le rayonnement solaire qui atteint la surface terrestre est uniquement constitué d’UVA et UVB car les UVC sont absorbés par la couche d’ozone. Il est composé plus précisément de 5% d’UV (dont 5% UVB et 95% UVA), 63% de lumière visible et 32% d’infrarouge (Sage, 1993).

Les deux types de photoproduits principalement formés suite à une exposition solaire sont les dimères de pyrimidines (bases T et C) de type cyclobutane (CPD) et les photoproduits 6-4 (6-4PP). La proportion de ces deux photoproduits dépend de la dose d’exposition ainsi que de la séquence de l’ADN.

Les CPDs sont formés par réaction de cycloaddition entrainant la formation de liaisons covalentes entre les carbones C5 et C6 de deux bases pyrimidiques (Cadet et al., 2012). Cette modification de la structure chimique des bases entraine une faible distorsion de la double hélice.

Les 6-4PPs sont produits par une réaction de Paternò-Büchi formant deux liaisons covalentes entre la double liaison située entre les positions C5 et C6 d’une base pyrimidique et le groupe carbonyle ou amino en position C4 d’une seconde base pyrimidique (Cadet et al., 2012). Cette lésion entraine une distorsion plus importante de la double hélice ce qui la rend plus mutagène que les CPDs. Ces lésions peuvent également être converties en leur isomère de valence Dewar par absorption des photons de longueurs d’onde comprise entre 310 et 340 nm (Taylor et al., 1990).

Les quatre CPDs et 6-4PPs majoritairement formés dans l’ADN sont TT, CT, TC et CC. Cependant, les CPDs TT et TC, et les 6-4PPs TC sont ceux qui sont principalement formés dans l’ADN cellulaire à la suite d’une irradiation aux UVB ou après irradiation avec un simulateur solaire (Cadet et al., 2005; Mouret et al., 2006).

41

Un bain de soleil d’une journée peut conduire à la formation de 100 000 photoproduits dans un kératinocyte (Hoeijmakers, 2009).

Il est important de noter que les UVB peuvent induire les deux types de photoproduits : CPDs et 6-4PPs et entrainent également la formation de lésions oxydatives 8oxoG mais dans des proportions bien moins importantes comparées aux photoproduits (Kielbassa et al., 1997). De plus, suite à une irradiation de la peau ou de kératinocytes en culture aux UVB, la proportion de CPDs formés est cinq fois plus importante que les 6-4PPs(Mouret et al., 2006).

Les UVA sont beaucoup moins absorbés par l’ADN que les UVB, on pourrait donc penser qu’ils ne peuvent pas induire de dommages. Cependant, ils entrainent la formation de CPDs par un mécanisme direct d’absorption des photons. Ils peuvent également être produits par un processus indirect de photosensibilisation suite à l’excitation de chromophores exogènes (cétones aromatiques, quinolones) qui conduit à un transfert d’énergie triplet (Ridley et al., 2009). Enfin, suite à une irradiation avec un simulateur solaire (SSL), la formation d’isomère de Dewars est détectée de manière significative et la proportion de 64-PPs diminue comparée à une irradiation aux UVB (Figure 13). Les UVA induisent également des lésions oxydatives par des processus de photosensibilisation par des chromophores endogènes (flavoprotéines, hémoprotéines, mélanines, …).

Figure 13 - Distribution relative de la formation des photoproduits dans des cellules CHO suite à une irradiation UVB ou par SSL. La quantification des photoproduits a été effectuée par HPLC-MS/MS (Cadet et al., 2012)

2.3.2. Les adduits du BPDE

Ces adduits sont formés à partir du composé Benzo[a]pyrène-7,8-dihydrodiol-9,10-epoxyde (BPDE) issus de la biotransformation du Benzo[a]pyrene (B[a]P) appartenant à la famille des Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAPs) qui sont des polluants atmosphériques ubiquitaires, issus des activités humaines ou de processus naturels que nous détaillerons plus tard (Partie 6).

42

Le BPDE existe sous la forme de deux diastéréoisomères : syn et anti. Chacun pouvant conduire à deux énantiomères : (+) et (-). Il y a donc quatre isomères du BPDE (Geacintov et al., 1997). Nous ne parlerons ici que de l’isomère (+)-anti-BPDE qui est la forme la plus réactive vis-à-vis de l’ADN et qui est la plus mutagène pour les cellules (Geacintov et al., 1997; Xue and Warshawsky, 2005). Le BPDE est caractérisé par la présence d’un diol époxyde possédant des propriétés électrophiles qui lui permettent de réagir avec les sites nucléophiles présents dans l’ADN. Il en existe quatre qui sont des groupements amines exocycliques : les positions N2 et N7 de la base G, la position N6 de A et la position N4 de C. Cela peut donc conduire à la formation de quatre adduits du BPDE : BPDE-N2-G ; BPDE-N7-G ; BPDE-N6-A et BPDE- N4-C. Cependant, la localisation de la liaison conditionne la stabilité chimique de l’adduit formé. En effet, l’adduit BPDE-N7-G présente une forte instabilité s’accompagnant de la formation d’un site AP suite à l’hydrolyse de la liaison N-glycosidique. Ces adduits formés sont volumineux comparés aux autres types de lésions que nous avons décrits jusqu’à maintenant comme nous pouvons le voir sur la Figure 14.

Parmi les agents exogènes responsables de la formation de ces adduits, le tabagisme (20 cigarettes/jour) induit la formation d’environ 100 à 200 adduits par cellule (Phillips et al., 1988).

Figure 14 - Structure chimique de la base azotée : BPDE-N2-Gua