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Exemples de cas concrets

P OLITIQUE ABC P AYS B AS

La politique ABC est une politique mise en place aux Pays-Bas qui vise à faire correspondre les

profils de mobilité des entreprises/activités et les profils d’accessibilité des lieux.

La politique de localisation des entreprises ABC a été initiée par l’État néerlandais en 1988, à l’occasion du VINEX (le complément à la Quatrième Note sur l’aménagement du territoire – l’équivalent du SDER wallon). Elle a depuis été mise en œuvre au sein des principales agglomérations du pays (Amsterdam, Rotterdam, La Haye et Utrecht), mais également à plus petite échelle, au sein de villes moyennes comme Groningen ou Maastricht37 (CEPESS, 2006). Son objectif est de placer « la bonne entreprise au bon endroit » via une stratégie de localisation des activités visant à mettre en adéquation le profil de mobilité de l'entreprise et le profil d'accessibilité du lieu. Cette politique ABC s’accompagne de normes relatives à l’offre en stationnement

d’autant plus contraignantes que l’accessibilité en transport en commun est bonne (CPDT,

2010).

Concernant les activités, la politique ABC différencie, comme son nom l’indique, les profils de

mobilité A, B et C. Le critère de base retenu pour la typologie des activités correspond au potentiel d’utilisation des modes alternatifs à la voiture.

● Le profil A regroupe les activités intensives en espace (commerces, bureaux) qui génèrent essentiellement des déplacements de personnes (employés ou clients).

● Le profil C reprend principalement les activités génératrices de transport de marchandises (industrie lourde, logistique …) et caractérisées par un usage extensif de l’espace (faible nombre d’emplois par unité de surface).

● Le profil B représente une situation intermédiaire, correspondant notamment aux sociétés actives dans les services aux entreprises où une partie importante du personnel est amené à se déplacer en voiture au cours de sa journée de travail.

À l’image des activités, les lieux sont également classés en trois profils d’accessibilité A, B et C. Le critère de base retenu pour la typologie des lieux correspond à la qualité de l’offre en transports

en commun et, secondairement, aux caractéristiques de la desserte routière.

● Le profil A est constitué de lieux très accessibles par les transports publics (par exemple, les quartiers de gare).

● À l’opposé, le profil C regroupe les lieux peu accessibles en transports en commun mais offrant un accès facile au réseau autoroutier et routier principal.

● Le profil B correspond à une situation intermédiaire, impliquant au minimum une desserte en bus à forte fréquence permettant une liaison facile avec un centre urbain proche et une grande gare (CEPESS, 2006).

37 À Maastricht, le projet Céramique correspond à un exemple conçu sur la base des principes de la politique de l’ABC.

Figure 18 : Les trois profils de mobilité et d’accessibilité de la politique ABC aux Pays-Bas.

Mais dès la fin des années 1990, la politique ABC a été a été abandonnée à la suite des

nombreuses critiques dont elle a fait l’objet. Bien que son principe de base qui est de « mettre la bonne entreprise au bon endroit » soit unanimement admis, son manque de souplesse a été largement dénoncé par le monde de l’entreprise. Son abandon découle donc du fait qu’appliquée avec rigidité, cette politique ne permettait pas une adéquation entre l’offre et la demande38 pour les activités censées se localiser en des lieux bien desservis par les transports en commun (CPDT, 2010).

En 2010, la CPDT avait déjà réalisé une analyse détaillée des critiques dont cette politique a fait l’objet dans la littérature abondante rédigée à ce sujet. Nous en avons retenu les critiques suivantes qu’il conviendrait d’éviter en cas de transposition de la politique ABC en Région wallonne :

● Inadaptation de la logique ABC en dehors des grandes villes en raison de la seule prise

en compte du rôle des transports publics en tant qu’alternatives à la voiture (non prise

en compte du vélo, principale alternative à la voiture en dehors du centre des grandes villes aux Pays-Bas) avec par exemple une inadaptation des normes de stationnement en raison de la faiblesse de l’offre de transport en commun qui caractérisent ces milieux ;

● Manque de disponibilités foncières et immobilières en zones A et B (les zones bénéficiant d’une bonne accessibilité en transport en commun) et lente mise en œuvre des

sites disponibles au regard des besoins des entreprises ;

● Absence de prise en considération de la complexité des schémas de mobilité des individus.

Il nous semble pertinent d’interpréter cette dernière critique relative à la non prise en compte des

chaînes de mobilité des travailleurs comme un appel à plus de mixité des fonctions à proximité des lieux d’emplois et, plus encore, au sein des quartiers résidentiels. Assurer une

forte proximité entre logements, écoles, crèches, commerces, banques, restaurants… est indispensable si l’on veut lutter contre la dépendance à la voiture via une politique ABC. Cette politique perd en effet en efficacité et en applicabilité si un trop grand nombre de travailleurs sont obligés de prendre la voiture malgré la localisation optimale de leur lieu de travail en raison des multiples trajets secondaires qu’ils doivent combiner avec ce déplacement domicile-travail. C’est le

38 La demande en zones A et B a fortement excédé l’offre réellement disponible sur le marché, ce qui a contraint à un nombre de dérogations tel que l’abandon de la politique a dû être décidé.

cas si, vu leur lieu de résidence, rejoindre commerces de proximité ou école des enfants ne peut être fait à pied, à vélo ou en transport en commun. La politique ABC doit donc être englobée

dans une politique plus globale de la ville compacte mettant l’accent sur la mixité des fonctions, et son principe de base de « la bonne entreprise au bon endroit » nous semble conserver toute sa pertinence.