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Pour comprendre l'intérêt de L. Bouyer pour Odon Casel, nous pouvons voir qu'il semble provenir d'une des convictions majeures de Dom Lambert Beauduin lui-même : « l’œuvre de Dom Casel devait fortifier et approfondir cette compréhension, si vitale pour Dom Beauduin, d'une liturgie qui n'est pas un détail, si important qu'on le veuille, mais le centre et, d'une certaine manière, le tout de la vie de l'Église44. » L'œuvre d'Odon Casel a soulevé une polémique assez grande, et L. Bouyer

nous renvoie à un ouvrage de référence sur le sujet, une thèse de doctorat de Théodore Filthaut, dans lequel nous pouvons trouver cette précision : « La doctrine des mystères est née dès la fin de la première guerre mondiale du désir de donner au mouvement du renouveau liturgique qui se

43 L. Bouyer, Le Mystère pascal..., p. 79.

manifestait dans l'Église catholique, un fondement théologique solide et conforme à l'esprit de la liturgie, de l'Écriture et des Pères45. » L'intérêt de L. Bouyer pour Odon Casel est donc fondamental,

et ceci va nous aider à comprendre pourquoi il ne rejette pas simplement sa théorie à cause de ses hypothèses qu'il juge dépassées, mais qu'il va plutôt essayer d'en préserver les résultats concernant la notion de Mystère, en reprenant sa démarche à nouveaux frais.

En résumé, L .Bouyer dit que Odon Casel a repris le matériel46 produit par l'école comparative47 qui

visait à réduire l'importance du christianisme primitif et en a proposé « une nouvelle interprétation, beaucoup plus profonde et beaucoup plus riche que celle de ses adversaires48. » Il fait un résumé

des grands thèmes de la théorie de Casel : les mystères païens issus des religions orientales introduites dans l'Empire Romain auraient fourni au christianisme un cadre providentiel pour manifester la grâce divine. Le Mystère chrétien, au fond, est « le Transitus, le passage de la mort à la vie, à travers la Croix jusqu'à la Résurrection, qui a été une fois pour toutes accompli dans le Christ49. » Cette action passée, définitive, est incarnée dans la liturgie. La substance de cette action y

est présente de façon mystérieuse mais réelle et entière, et pas seulement sa vertu salvifique.

Nous allons donc voir comment L. Bouyer procède. À partir d'une réflexion sur l'assemblée chrétienne comme réalisation parfaite du Qahal juif, il centre sa réflexion sur la messe. Il montre ensuite en quoi l'hypothèse d'une influence des religions à mystères sur la liturgie chrétienne est non seulement inutile, mais erronée, car l'eucharistie chrétienne s'inscrit en continuité avec la liturgie des repas juifs, mais investie d'un sens nouveau. L'origine de la notion de Mystère est donc à rechercher du côté judéo-chrétien : à partir de saint Paul, il montre l'origine juive de la notion. Et c'est par une théologie de la Parole de Dieu dont l'Eucharistie est le sommet que L. Bouyer va retrouver les principales affirmations de Odon Casel50.

45 T. Filthaut, La théologie des mystères : exposé de la controverse  , Tournai, Desclée, 1954, p. 1.

46 En particulier, la conception d'un culte chrétien primitif qui proviendrait des religions à mystères païennes. 47 L. Bouyer met derrière ce vocable des penseurs comme Lietzmann, Bousset, Reitzenstein, Loisy. 48 L. Bouyer, La vie de..., p. 116.

49 L. Bouyer, La vie de..., p. 116-117.

50 Voir par exemple T. Filthaut, La théologie..., p. 8 : « En résumé, Dom Casel distingue trois degrés essentiels dans le mystère : Dieu, le Christ, l'Église (le culte). Ces trois chaînons ont entre eux une relation intime fondamentale : Dieu, invisible par nature, agit visiblement dans le Christ pour le salut de l'homme et il re-présente cette action dans l'Église. »

2.1 La liturgie au cœur de la religion chrétienne : Qahal et Ecclesia

Selon L. Bouyer, l'approfondissement de l'intelligence de l'Église comme peuple de Dieu la désigne comme la réalisation parfaite du Qahal de l'Ancien Testament. L'histoire du développement de cette assemblée de Yahvé fait preuve d'« une très frappante continuité de ses éléments essentiels51. » Les

étudier permet de découvrir notre propre liturgie, et notamment la place centrale de la messe.

L. Bouyer explique que l'ecclesia d'Athènes aussi bien que le Qahal juif sont constitués par une convocation qui leur donne une sorte de personnalité morale, le Qahal étant réuni pour écouter et répondre à la parole de Dieu. Il donne trois exemples pour comprendre les caractéristiques essentielles du Qahal. Le premier est la sortie d'Égypte : la foule est constituée comme peuple par un processus qui comprend une préparation commune, la proclamation de la Parole de Yahvé, l'acceptation par l'assemblée de l'Alliance ainsi conclue et ratifiée par un sacrifice. C'est l'autorité de Dieu qui constitue cette assemblée autour de sa Parole. Le deuxième exemple est la nouvelle consécration du peuple par le roi Josias : la Parole de Dieu convoque le peuple, elle est proclamée et le peuple l'accepte « par une solennelle célébration du sacrifice fondamental, c'est-à-dire la célébration de la Pâque.52 » Le troisième exemple est le retour de l'exil : le sacrifice final est remplacé

par une promesse de sacrifice lorsque la ville et le Temple seront reconstruits.

Ce type de culte sans célébration sacrificielle a pris à ce moment-là une importance considérable, c'est ce qui donnera le culte synagogal. Le rappel des œuvres de Dieu n'est plus l'accomplissement de ses promesses, mais « le gage et la préfiguration d'œuvres bien plus grandes, dont l'accomplissement futur, par cette même Parole salvatrice et créatrice, devait être l'objet de l'espoir et de la prière du peuple53. » C'est déjà une prière eucharistique exprimant l'attente eschatologique du

petit reste d'Israël. Les sacrifices n'étant pas capables d'exprimer cette attente, c'est dans des repas rituels qu'elle va être célébrée : « Au temps de notre Seigneur, nous voyons donc, à la veille de chaque sabbat et de chaque fête de l'année juive, les familles et les pieuses communautés (Habouroth) se rassembler pour un repas de communauté qui s'ouvrait par la fraction du pain. » La première communauté chrétienne reprend les mêmes éléments, mais portés à leur perfection dans la messe grâce à l'institution des Apôtres. Les Apôtres sont envoyés par Dieu pour parler en

51 L. Bouyer, La vie de..., p. 40. 52 L. Bouyer, La vie de..., p. 41. 53 L. Bouyer, La vie de..., p. 43.

son nom, leur enseignement convoque l'assemblée, ils proclament la Parole. La prière, action de grâce juive en sa forme, est dotée alors d'une signification nouvelle et définitive révélée par le Christ, qui est le sceau de la nouvelle Alliance. Ainsi, la réalisation de ce nouveau Qahal est inséparable de l'annonce de la mort et de la résurrection du Seigneur : elle accomplit parfaitement cette annonce, mais n'est possible que parce que le kérygme est proclamé. Selon L. Bouyer, ce sont là les éléments constitutifs de notre liturgie :

La liturgie, dans l'unité de sa plénitude, doit donc être vue comme la réunion du peuple

de Dieu rassemblé, sur la convocation de la Parole de Dieu, par le ministère apostolique, pour que ce peuple, prenant conscience de son rassemblement, puisse entendre la Parole de Dieu elle-même dans le Christ, puisse adhérer à cette Parole au moyen de la prière et de la louange au sein de laquelle la Parole est proclamée, et ainsi sceller, par le sacrifice eucharistique l'Alliance accomplie par cette même Parole54.

L. Bouyer donne alors quelques traits fondamentaux de la liturgie. L'action et la parole sont étroitement liés : « Puisque cette liturgie est avant tout la descente de la Parole de Dieu jusqu'à nous, elle est fondamentalement une liturgie de la Parole. » La deuxième partie de la messe aussi, en ce qu'elle est « Parole visible » de Dieu. « Cependant, il faut immédiatement compléter cette vérité que la messe est une liturgie de la Parole par le fait que la Parole qui parle dans la liturgie est cette même Parole par laquelle le monde a été créé et doit maintenant être recréé : la Parole de Dieu, sa Parole créatrice. » Ainsi, par le ministère apostolique, Dieu se rend présent et agit dans la liturgie. La messe est donc le lieu par excellence de la proclamation et de la réception de la Parole de Dieu :

Par l'existence de ce contexte liturgique dans lequel se fait la proclamation de la Parole de Dieu, contexte qui est congénital à la Révélation elle-même, nous apprenons que la Révélation n'est pas seulement affaire d'idées ou de notions, mais plus précisément un appel, une vocation. Le Peuple de Dieu est appelé par la Parole de Dieu à faire et à devenir ce que la Parole de Dieu proclame, et à agir ainsi par la puissance de la Parole elle-même55.

Cette idée nous permet de mieux comprendre pourquoi L. Bouyer concentre sa réflexion sur la célébration de l'eucharistie, comme lieu par excellence de l'action de Dieu dans la liturgie.

54 L. Bouyer, La vie de..., p. 46. 55 L. Bouyer, La vie de..., p. 47.

2.2 Au cœur de la liturgie : un mystère d'origine païenne?

Nous avons dit que L. Bouyer rejetait l'hypothèse d'une origine païenne du Mystère chrétien. Comment s'y prend-il pour faire cela?

Pour analyser le lien entre mystères païens et Mystère chrétien, il s'intéresse à la forme permanente de la liturgie pour voir s'il existe des correspondances avec les mystères païens. Que nous dit la tradition sur la forme permanente de la liturgie, selon L. Bouyer ? Parce qu'elle est vivante, on ne  peut la réduire à un schéma logique ou à un concept. Son cœur est dans l'eucharistie, composée d'éléments très complexes et dont il s'agit de voir l'unité. L. Bouyer part d'un auteur protestant suédois, Yngve Brilioth, dans son livre Foi et pratiques eucharistiques56, pour montrer que la seule

influence envisageable entre les religions à mystères et le christianisme pourrait se situer dans la notion de Mystère elle-même, et non pas dans la dimension rituelle de ces religions. Selon lui, quatre éléments irréductibles font partie de la forme traditionnelle de la liturgie chrétienne : la communion, le sacrifice, l'eucharistie (l'action de grâce) et le mémorial, le tout étant animé par une cinquième réalité plus profonde : le Mystère. C'est l'heureuse combinaison de ces éléments qui donne la plénitude de la liturgie chrétienne, et toute époque qui met trop l'accent sur un point voit commencer une forme de décadence religieuse.

Commençons par préciser le vocabulaire que L. Bouyer reprend à Y. Brilioth. « Communion » est ici à comprendre au sens de koinônia, « communier avec » : c'est le repas. « Sacrifice » désigne l'action de l'Église dans la célébration de l'eucharistie. Cette notion n'a été associée à la Croix que progressivement : selon les premiers auteurs chrétiens, « tout est sacrificiel dans la synaxe chrétienne57 », car c'est le tout de la vie du chrétien vivant dans l'agapè divine. L'action de grâce part

du pain et du vin et englobe la Création et la Rédemption, elle est « une attitude qui découle de la foi exaltante qui reçoit et qui assimile la divine agapè à sa source dans le Saint-Esprit. La clé de l'action de grâce est donnée par l'alleluia : une prière contemplative qui pénètre la vie tout entière, par la contemplation non pas d'une abstraction sublime et hautaine, mais de la divine condescendance du Dieu vivant58. » « Mémorial » désigne en premier la « Croix », mais aussi « toute l'histoire sacrée du

peuple de Dieu », y compris la Résurrection et la Glorification du Christ. Toute l'eucharistie est mémorial, et L. Bouyer affirme que Y. Brilioth souligne très bien le lien entre les Paroles et le repas.

56 Cité par L. Bouyer dans L. Bouyer, La vie de..., p. 101. : Yngve Brilioth, Eucharistic faith and practice, Londres, 1930. 57 L. Bouyer, La vie de..., p. 103.

Ensuite L. Bouyer essaie de définir le Mystère à partir des lignes de pensée de Y. Brilioth : Toujours fidèle aux lignes de pensée proposées par Brilioth, mais en employant maintenant notre propre vocabulaire, nous pouvons dire que le Mystère concrétise la triple conviction de l'Église quand elle célèbre l'eucharistie. Elle croit que le Christ est présent d'une manière inexprimable dans la célébration. Elle croit que ce qu'elle fait aujourd'hui, c'est lui-même qui est en train de le faire par elle. Elle croit que cette action d'aujourd'hui, qui est à lui comme elle est à elle, est finalement l'unique action salvatrice de Dieu par le Christ à travers l'histoire, c'est-à-dire que la messe c'est la Croix, mais la Croix toujours vue dans la perspective totale dont nous parlions quand nous examinions la notion de mémorial59.

L'équilibre de ces quatre notions dans la profondeur du Mystère permet d'envisager la présence réelle du Christ dans son Église : comme victime dans les espèces, mais d'abord comme grand prêtre de toute la hiérarchie, et dans tout le corps de l'Église. Un déséquilibre ici produirait une dégénérescence de la religion chrétienne en magie. Pour montrer cela, Y. Brilioth fait le lien avec les religions à mystères antiques, qui ont des ressemblances apparentes avec l'eucharistie chrétienne, mais qui étaient des religions naturelles sans lien avec l'histoire. Le seul lien possible entre religions à mystère et christianisme résiderait alors dans la notion de Mystère : « C'est donc bien le Mystère qui semble offrir l'unique ligne de continuité entre ces religions à mystères et le christianisme60. ».

Selon L. Bouyer, le livre de Y. Brilioth serait comme une réponse à Lietzmann61 qui avait écrit, au

temps de L. Bouyer, l'un des livres les plus importants sur l'origine et le développement de l'eucharistie chrétienne. Mais, dans cette réponse, il aurait d'emblée accepté la thèse qu'il y aurait des analogies entre les mystères païens et le Mystère chrétien. C'est précisément ce que conteste L. Bouyer. La théorie de Lietzmann voyait dans l'eucharistie chrétienne « une opposition interne entre deux facteurs en conflit62 », à savoir une source chrétienne provenant du Seigneur, dominée par la

joie et sans lien avec la dernière Cène ou la Croix, et une source païenne provenant de saint Paul. Ce dernier aurait transformé radicalement le repas de la première communauté à l'intention des convertis du paganisme en partant de la mort du Christ et des mystères païens. L. Bouyer rejette cette thèse qui pose de nombreuses difficultés, et notamment le fait qu'elle attribue aux mystères païens « un grand nombre d'idées qui sont purement juives ou chrétiennes, de façon à rendre ces

59 L. Bouyer, La vie de..., p. 106. 60 L. Bouyer, La vie de..., p. 109.

61 Lietzmann, Messe und Herrenmahl: eine Studie zur Geschichte der Liturgie, Bonn, A. Marcus und E Weber's Verlag, 1926.

mystères capables de nous donner une explication du christianisme lui-même63. » Il le fait à partir

d'Oscar Cullmann qui souligne la continuité entre les repas pris au cours de la vie terrestre du Seigneur et ceux pris par la communauté primitive, grâce aux repas pris avec le Ressuscité. Cela rend l'hypothèse de l'opposition de deux facteurs, pour expliquer l'eucharistie, caduque, car il n'y a pas d'opposition entre la Croix et la joie dans l'eucharistie chrétienne :

Lietzmann méconnaît complètement le vrai caractère de la relation entre la Croix et l'eucharistie, telle qu'elle était comprise dans le christianisme primitif, parce qu'il interprète cette relation en se plaçant au point de vue d'une piété moderne et sentimentale, entièrement étrangère à l'ancienne Église. […] Dès les origines, les chrétiens virent la Croix comme illuminée par la Résurrection. La Résurrection n'était pas pour eux une compensation, mais pour ainsi dire le produit naturel de la Croix. Ainsi, toute la construction de Lietzmann tombe en morceaux64.

Lietzmann serait la victime de préjugés libéraux, refusant que Jésus ait pu créer une religion sacramentelle la veille de sa Passion en instituant un nouveau rite. Mais, grâce à Gregory Dix65,

L. Bouyer rejette cette perspective car Jésus n'a pas inventé un nouveau rite mais, il a investi un rite traditionnel juif, celui des repas, d'une signification nouvelle :

Les recherches récentes montrent avec une parfaite clarté que, bien loin de créer un nouveau rite, Jésus s'est contenté d'accomplir une fois de plus un rite entièrement traditionnel dans le judaïsme, mais en y infusant une nouvelle signification et une nouvelle réalité. Ce fait, comme nous allons le voir, rend totalement inutile l'hypothèse d'une influence fondamentale du paganisme sur le Mystère chrétien et nous oblige à envisager ce Mystère, et la liturgie dont il est le cœur vivant, selon des lignes purement juives66.

C'est donc par une réconciliation de la Croix du Christ avec la joie qui en est non pas la rançon, mais le fruit, que L. Bouyer refuse l'hypothèse d'une influence païenne sur la notion de Mystère. L'incompatibilité apparente entre la Croix et la joie dans la célébration eucharistique avait conduit Lietzmann à faire l'hypothèse d'une double origine de la célébration eucharistique, mais L. Bouyer montre que cette hypothèse est superflue. Cependant, la réfutation de l'argumentation de Lietzmann n'est pas en soit un preuve d'une absence d'influence païenne sur cette notion. Il va donc chercher à montrer que son origine se trouve dans la tradition juive.

63 L. Bouyer, La vie de..., p. 111. 64 L. Bouyer, La vie de..., p. 112.

65 Moine et liturgiste anglican de l'abbaye de Neshdom (1901-1952).

66 L. Bouyer, La vie de..., p. 113. L. Bouyer fait référence à Gregory Dix, The shape of the Liturgy, London, Westminster Dacre Press, 1945.

2.3 Mystère paulinien et mystères païens

À partir de ce résultat, L. Bouyer part de la tradition judéo-chrétienne pour expliciter la notion chrétienne de Mystère. Il part d'un consensus : « Tout le monde admet que le premier emploi du mot "Mystère" dans l'Église, aussi haut que nous puissions remonter, est dû à saint Paul, et tout le monde admet aussi que c'est son usage du mot qui a été le facteur dominant pour introduire le développement subséquent du terme dans le christianisme, et spécialement chez les Pères67. » Il

refusera tout lien avec les mystères païens68 : « Le mystère païen était avant tout un rite, et c'était

toujours au rite lui-même que le mot "mystère" et l'idée véhiculée par lui était [sic] proprement appliqués. Toutes sortes d'interprétations furent données au rite au cours des temps, mais le mystère resta toujours le rite lui-même et rien d'autre. Rien ne pourrait être, à aucun point de vue, plus étranger au mystère paulinien69. »

À partir d'une réflexion biblique sur les thèmes de la sagesse, de la révélation et du mystère, L. Bouyer définit le Mystère chez saint Paul d'abord comme sagesse de Dieu révélée (1 Co 2), la Croix de Jésus, et n'ayant rien à voir avec un quelconque rite :

Le Mystère dont parle saint Paul n'est pas un rite connu antérieurement par tous, mais devenu maintenant secret. Le mystère, chez saint Paul, est un plan de Dieu pour le salut du monde, qui a été caché dans les profondeurs de la sagesse divine, inaccessible à l'homme, jusqu'à ce qu'il fût proclamé au monde entier dans l'Évangile. Et, en lui- même, ce plan n'a rien à faire avec aucune espèce de rite. Le plan de Dieu rejoint l'histoire réelle de l'humanité, et non pas directement aucune religion rituelle, et surtout pas ce domaine des énergies naturelles que les religions primitives voulaient stimuler.

Plus tard, dans l'épître aux Colossiens, la notion de mystère s'approfondira : « il n’apparaît plus seulement maintenant comme incluant la victoire obtenue par la croix au moyen de la résurrection,