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Objectif : Mieux prendre en compte la capacité des personnes à assumer

financièrement leur perte d’autonomie dans un triple objectif d’équité

intergénérationnelle, intragénérationnelle et territoriale

Les mesures de diminution du reste à charge ici proposées sont volontairement ciblées sur les ménages à revenus modestes. Il n’est pas proposé de refonte radicale de l’aide sociale à l’hébergement, étant assumé que la priorité en matière d’affectation de dépenses nouvelles doit aller à l’amélioration de la qualité des prises en charge et à l’augmentation du temps de présence humaine professionnelle, qualifiée, en proximité de la personne.

Il est proposé de créer une nouvelle allocation, dégressive en fonction des ressources, afin de réduire le reste à charge sur les dépenses d’hébergement en EHPAD. Cette nouvelle

allocation se substituerait aux aides au logement et à la réduction d’impôt existant actuellement.

Les mesures ici proposées visent également à harmoniser les pratiques en termes d’ASH et à mettre fin à de fortes hétérogénéités de traitement entre les départements. Elles entendent par ailleurs augmenter le reste à vivre des personnes les plus modestes accueillies en établissement. Enfin, la prise en compte du patrimoine dans le calcul des prestations serait renforcée, dans un même souci de justice sociale.

et en état de perte d’autonomie avancée ne pourraient pas avoir un reste à charge excédant leurs ressources courantes. Lors de l’entrée en établissement, les personnes âgées et leur famille auraient ainsi la garantie que le prélèvement sur le patrimoine de la personne ou la participation des obligés seraient limités dans le temps.

Le « bouclier » fonctionnerait selon les mêmes mécanismes que l’actuelle ASH (allocation

différentielle entre 90 % des ressources et les frais d’hébergement avec un reste à vivre minimal) mais sans obligation alimentaire des descendants ni recours sur succession. Il serait ouvert à l’ensemble des personnes éligibles à l’ASH et qui cumulent deux conditions de durée :

Être évalué en GIR 1 ou GIR 2 au sens de la grille AGGIR depuis au moins quatre ans. La date s’apprécierait à partir de la première validation en GIR 1 ou GIR 2 de l’évaluation par les services de l’ARS ou du conseil départemental ;

Être hébergé en EHPAD ou en ESLD depuis plus de quatre ans.

Le bouclier serait déclenché automatiquement, que les établissements soient habilités ou non. Pour les établissements non habilités, le passage au régime du bouclier entraînerait de fait, la tarification sur la base du tarif moyen du département sur les places habilitées.

Le critère sur le degré de perte d’autonomie se justifie par la volonté de ne pas créer de distorsion dans le choix d’hébergement de la personne. Établir le bouclier à l’ensemble des résidents quel que soit leur degré de dépendance pourrait en effet conduire les personnes à privilégier une entrée précoce en établissement indépendamment de leurs besoins.

Le « bouclier » serait versé par les départements mais serait intégralement remboursé par un fonds de concours de la CNSA, matérialisant ainsi la solidarité nationale et faisant exception à la règle de proportionnalité (cf. proposition n° 127). Le coût net de la mesure est estimé à 650 M€. Environ 90 000 résidents en EHPAD et ESLD (soit 15 %) seraient concernés par ce bouclier pour un gain moyen de l’ordre de 740 €/mois.

Cette proposition ne doit toutefois pas conduire à exclure les établissements pour personnes âgées du bénéfice du financement par les fonds dédiés au logement social. S’il s’avérait délicat de supprimer l’allocation logement pour cette raison, une autre piste consisterait à supprimer la réduction d’impôt et à revoir le barème de l’APL en établissement pour personnes âgées pour réduire le reste à charge des personnes aux ressources comprises entre 1 000 et 1 600 €.

Proposition 129 : Harmoniser les pratiques en termes d’aide sociale à l’hébergement en supprimant à court terme l’obligation alimentaire pour les petits enfants et en introduisant un barème indicatif national.

Il est proposé d’harmoniser les pratiques des départements en matière d’ASH pour assurer une égalité de traitement sur le territoire :

En adoptant un barème national indicatif des taux d’effort maxima appliqués aux obligés alimentaires selon leurs ressources ainsi que de la participation du conjoint resté à domicile ; En excluant les petits-enfants de l’obligation alimentaire (environ la moitié des départements les sollicitent parfois ou systématiquement aujourd’hui), et en envisageant une suppression de l’obligation alimentaire pour tous les

descendants à partir de 2024 ;

En établissant au niveau national la liste des ressources et des charges à prendre en compte pour le calcul de l’ASH. En effet, en matière de calcul des charges, les frais de tutelle ne sont systématiquement déduits de la participation financière des bénéficiaires de l’ASH que par 77 % des départements, les frais de mutuelle par 68 % des départements et les frais d’assurance par 37 % seulement19. Enfin, si 85 %20 des départements intègrent le talon dépendance, non pris en charge par l’APA, dans le cadre de l’ASH, 9 % ne le font jamais.

Les départements seraient accompagnés financièrement pour mener à bien cette harmonisation. En outre, la mise en place d’un seuil de déclenchement de la récupération sur succession, qui verrait la récupération sur succession déclenchée uniquement à partir d’un certain

montant de récupération, pourrait être expertisée.

19. DREES, enquête Aide sociale 2017, données provisoires.

20. L’aide et l’action sociale en France, DREES, édition 2017 – Fiche n° 7

Proposition 128 : Créer un volet « établissement » de la prestation autonomie dégressif en

fonction des ressources et se substituant à l’allocation logement et à la réduction d’impôt en établissement

Les aides directes au paiement du tarif hébergement en établissement se composent essentiellement de deux dispositifs à la charge de l’État :

L’aide au logement distribuée par les CAF (500 M€ environ)

La réduction d’impôt pour frais liés à la

dépendance, perçue par les ménages avec un an de décalage (300 M€).

Selon la DREES, l’aide au logement bénéficie aux ménages très modestes tandis que la réduction d’impôt bénéficie aux ménages aisés, redevables de l’impôt. Par conséquent, les personnes âgées en établissement dont les ressources sont comprises entre 1 000 € et 1 600 € par mois sont les moins aidées. Il est proposé de remplacer l’allocation logement et la réduction d’impôt en établissement pour personnes âgées par un volet « établissement » de la nouvelle prestation autonomie. Cette prestation serait dégressive en fonction des ressources. Elle serait distribuée par les conseils départementaux en remplacement de l’APA établissement supprimée, par la fusion des sections

« soins » et « dépendance ».

L’objectif attendu est triple :

Simplifier la prise en charge financière pour la personne âgée et sa famille. Le financement par la réduction d’impôt et l’allocation logement font intervenir des acteurs (CAF, DGFIP) dont le rôle dans le financement de la perte

d’autonomie du grand âge est mineur. Grâce à cette proposition, le département devient l’interlocuteur privilégié et le financeur unique de la solvabilisation des personnes âgées en établissement ;

Améliorer la situation des personnes aux ressources comprises entre 1 000 et 1 600 € qui sont aujourd’hui objectivement défavorisées ; Compenser par la suppression de la réduction d’impôt les gains que réalisent les plus aisés à la fusion des sections.

« établissement »). En effet, le patrimoine n’est aujourd’hui que faiblement pris en compte dans le barème de l’APA (valorisation du « patrimoine dormant » à hauteur de 3 % de son montant et d’une fraction de la valeur locative des propriétés immobilières hors résidence principale). La prise en compte du patrimoine pourrait être renforcée (à travers une hausse du taux de valorisation du

« patrimoine dormant » à 4 % ou 5 %) et la valeur de la résidence principale pourrait être intégrée dans l’assiette des ressources utilisées pour le calcul de la participation financière du bénéficiaire. Cette mesure remplit deux objectifs d’équité :

Entre les personnes qui sont à charge à domicile, et qui ont des restes à charge objectivement faibles et ceux en établissement, qui assument des restes à charge élevés ;

Entre les personnes propriétaires et celles qui sont locataires qui assument aujourd’hui le même ticket modérateur à revenus égaux alors que leur capacité à participer à leurs frais de perte d’autonomie n’est objectivement pas la même.

Toutefois, l’intégration de la résidence principale doit tenir compte du degré de liquidité et des fortes disparités géographiques des marchés de l’immobilier. Quatre pistes de mise en œuvre opérationnelle sont proposées :

L’introduction d’un forfait-logement dans la base ressources à l’instar de ce qui est fait pour le RSA ou la CMU-C. Cette solution ne permet pas de rendre compte des disparités des valeurs locatives mais est très simple à mettre en œuvre ; L’intégration de la valeur locative retenue pour le calcul de la taxe foncière dans la base ressources annuelles ;

La déduction des loyers payés pour les ménages locataires et la révision de l’ensemble du

barème ;

La valorisation sur la base d’une fraction de la valeur vénale de la résidence principale. Cette piste suppose d’être capable d’évaluer la valeur vénale des biens.

La mesure ne ferait aucun perdant : les personnes âgées actuellement à l’APA en conserveraient le bénéfice si elle leur est plus favorable (cf.

proposition n° 133).

Proposition 130 : Améliorer le reste à vivre des bénéficiaires de l’ASH de 104 €/mois à 156 €/mois.

Le reste à vivre d’un bénéficiaire de l’ASH, c’est-à-dire la somme laissée mensuellement à la disposition des bénéficiaires de l’aide sociale à l’hébergement, est fixé par voie réglementaire. L’article R231-6 du CASF dispose en effet qu’il ne peut pas être inférieure à un centième du montant annuel des prestations minimales de vieillesse (ASPA), arrondi à l’euro le plus proche soit 104 € en 2019. Cette somme paraît parfois insuffisante pour couvrir les dépenses laissées à la charge des résidents. Le résident doit en effet pouvoir financer a minima une prestation de coiffure mensuelle, et quelques achats améliorant son quotidien (vêtements, accessoires de toilette, etc.).

Il est donc proposé de fixer le minimum laissé au résident à 1,5 % du montant annuel de l’ASPA, soit 156 euros par mois pour 2019 au lieu de 104 euros.

La quasi-totalité des bénéficiaires de l’ASH (soit 120 000 personnes environ dont 100 000 en EHPAD) serait concernée par une telle mesure. Son coût brut pour les départements serait de 66 millions d’euros, desquels il faut déduire les montants susceptibles d’être récupérés sur succession.

Proposition 131 : Aligner la prise en compte des ressources du couple dans le cadre de la nouvelle prestation autonomie sur celle des autres

prestations

L’allocataire de l’APA est réputé disposer de 59 % du revenu du couple (1/1,7). Ce taux de 1,7 est supérieur à celui retenu pour l’ASPA (1,55), l’allocation logement (1,5), le RSA socle (1,43 après application du forfait logement) ou dans les pensions de réversion (1,54 ou 1,6). Cela signifie que l’allocataire est réputé disposer d’une part inférieure du revenu du couple pour l’APA que pour ces autres prestations, sans justification apparente. Il est proposé de retenir un coefficient de 1,5 ou 1,6 pour la nouvelle « prestation autonomie » uniquement, plus proche de celui retenu pour les autres prestations. La mesure ne ferait aucun perdant : les personnes âgées actuellement à l’APA en conserveraient le bénéfice si elle leur est plus favorable (cf. proposition n° 133).

Proposition 132 : Mieux valoriser le patrimoine dans les ressources du bénéficiaire de la nouvelle prestation autonomie pour plus d’équité,

notamment entre le domicile et l’établissement La prise en compte du patrimoine pourrait être renforcée dans le cas de la nouvelle prestation (pour ses volets « domicile » comme pour son volet

Exemple : Marie Dujardin* en GIR 2, 1 350 € de pension mensuelle

Réside en EHPAD habilité à l’aide sociale et conventionné pour l’aide au logement.

Tarif hébergement : 60 € par jour

Tarif dépendance : 20,50 €/jour (talon 5,5 €/jour)

Avant Après réforme

Coût total Les 4 premières années de résidence en

EHPAD

À partir de la quatrième année

forfaits soins 1 375 € 2 015 € 2 015 €

forfait dépendance 615 €

forfait hébergement 1 800 € 1 775 € 1 775 €

Total 3 790 € 3 790 € 3 790 €

Prise en charge

Assurance maladie 1 375 € 1 865 € 1 865 €

APA 450 € 0 € 0 €

APL 44 € 0 € 0 €

Réduction d’impôt 0 € 0 € 0 €

Prestation Autonomie 300 € 300 €

Bouclier 431 €

Total 1 869 € 2 165 € 2 596 €

Reste à charge 1 921 € 1 625 € 1 194 €

Taux d’effort** 142 % 120 % 88 %

* Nom fictif

** Rapport entre le reste à charge et les ressources courantes de la personne.