• Aucun résultat trouvé

Niveau de compétences adéquat des élèves [CondExt-Comp-Él]

Nous avons sélectionné trois conditions externes à la situation pédagogique comme telle et identifiées comme étant très déterminantes au sujet de l’efficacité des TICE sur l’amélioration de l’apprentissage et de l’enseignement :

• un niveau de compétence adéquat des usagers (élèves et enseignantes) ;

• un équipement adéquat (logiciel = application et matériel = tablettes, Wi-Fi, etc.) ;

• la motivation des enseignantes à s’engager dans des projets novateurs misant sur les tablettes.

36.1 Niveau de compétence adéquat des usagers [CondExt-Comp]

Nous avons ainsi divisé la catégorie niveau de compétence adéquat des usagers en deux sous catégories, soit : niveau de compétence adéquat des élèves et niveau de compétence adéquat des enseignantes.

36.1.1 Niveau de compétences adéquat des élèves [CondExt-Comp-Él]

Les élèves ont présenté une grande disparité au sujet de leur niveau de compétences de départ. Cela est notamment dû au fait que certains n’avaient jusque-là jamais touché à une tablette alors que d’autres en possédaient soit déjà une ou en avait déjà utilisé (parents, amis, famille). Leur progression en termes de gestion technique de l’outil fut particulièrement rapide. Les enseignantes ont d’ailleurs plusieurs fois mentionné leur étonnement à ce sujet.

Él5 : « Comme je joue souvent sur le téléphone de mes parents, je suis plus habitué [que les autres]. » - Loïc :

« Ha ! C’est un téléphone tactile, tu glisses les doigts sur l’écran pour… ? » - Él5 : « Oui. Je crois que c’est un Samsung. » – Loïc : « Et tu penses que ça t’aide à utiliser les tablettes ? » - Él5 : « Oui. » [P5-§43]

Ens2 : « 28 janvier : Deux élèves sur huit ont eu besoin de mon aide pour retrouver leur texte, mais ont pu ensuite continuer l’activité. Pour les autres élèves, l’activité n’a posé aucun problème. » [P6-§44]

Mais deux jours plus tard, la même enseignante écrivait :

Ens2 : « 30 janvier : Cette fois aucun élève n’a eu besoin de mon aide. Ils semblent de plus en plus autonomes.

Ils font même des trucs que je ne connais pas. Par exemple, Blerim est super à l’aise avec le traitement de texte, il sait parfaitement revenir sur un mot et corriger 2 lettres puis se redéplacer à la fin de sa phrase pour continuer son texte. Lorsque je lui ai demandé s’il avait une tablette à la maison, il m’a répondu que non. Je suis vraiment surprise de la vitesse à laquelle ils apprennent. Nous avons aussi pu envoyer des textes sur le webdav afin de les stocker. Je l’ai montré à un élève qui l’a montré à un autre, etc. »[P6-47]

Ens2 : « Certains élèves ne savaient plus où trouver l’application « Pages », ni comment renommer leur document : la répétition des actions est importante, plus on pratique et plus on maîtrise.... Il faut donc proposer régulièrement aux élèves des activités qui leur permettent d’automatiser ces gestes. […] Il faut aussi un bon doigté pour souligner uniquement la partie voulue, certains sont plus habiles que d’autres... là encore il faut s’entrainer. » [P6-92-94]

Cela semble logique, plus le même type d’usage de la tablette en classe est répété et plus les effets se font sentir sur le niveau de compétences techniques et les réflexes des élèves. De plus, la mémorisation des procédures paraît très rapide chez les élèves et apporterait une certaine motivation chez l’enseignante qui ne se doit plus de répéter à chaque fois les mêmes choses.

Ens2 : « Moi j’ai trouvé vraiment génial, c'est que, après t’as plein de trucs que tu n’as même plus besoin de leur expliquer. Parce qu'ils savent déjà. Donc, au début, il fallait tout mettre en route, montrer. Et puis, petit à

111 petit, s’ils ont l'habitude de travailler avec des tablettes, ça veut dire qu’après les connaissances ne font

qu'augmenter. » [P1-§174]

Ens1 : « Bon, peut-être pas la première fois, parce qu'ils n'étaient pas au clair. Mais après, au bout d'un moment quand ils sont devenus à l'aise, ils passaient aussi d'une page à l'autre pour aller vérifier un mot dans le dictionnaire. Ce que tu n'arrives pas à obtenir en classe avec le gros bouquin dictionnaire, sauf si tu te fâches. Bon, certains s’y mettent aux ouvrages de références. Mais là, c'était naturel, on n'avait pas besoin de leur dire. » [P1-§162]

Ens1 : « Cette application145 a réellement aidé les élèves. Ils n’ont pas terminé plus rapidement, à mon avis parce qu’ils sont encore en phase de découverte et “d’entrainement de l’utilisation de leurs doigts” sur la tablette. » [P6-§229]

Nous avons pu remarquer un fait intéressant : il arrive parfois qu’une certaine inversion des rôles entre enseignant et élèves se manifeste. Ces moments surviennent lorsque l’enseignante ne possède pas les compétences (généralement techniques) nécessaires pour mener à bien l’activité, ou que l’élève accède à une information puisée sur Internet qui contredirait ou nuancerait ce qui a été dit par l’enseignante. Ainsi l’élève devient pour un court instant le transmetteur de savoir et l'enseignant se retrouve en posture d’apprenti. Malgré cela, nos deux enseignantes n’ont pas mal vécu ces courts moments d’inversion des rôles et auraient même tendance à y voir un certain intérêt. Ces échanges ont généralement eu lieu lors de moments de type collaboratifs.

Loïc : « Donc là, il a comme un petit retournement…» - Ens2 : [rires] – Loïc : «…par rapport à ce qu'on a l'habitude de voir dans l'enseignement où l'enseignant enseigne. Et finalement là, c'est l'élève qui commence à enseigner en partie certaines notions à l'enseignant. » - Ens1 : « Oui. » - Ens2 : « Oui. Ben oui. Je pense qu'il y a des moments où cela devient clairement comme ça. » - Loïc : « Et ça, c'est vécu comment ? » - Ens2 : « Moi ça ne me dérange pas du tout personnellement. Après, ça dépend de sa propre philosophie. Moi, je sais que j'ai encore plein de choses à apprendre. Donc ça ne me dérange pas. » - Ens1 : « Mais ouais. » - Ens2 : « Et puis on apprend tous les jours. Et c'est bien ce qu'on leur dit, non? […]. Donc, pourquoi pour moi ça s'arrêterait ? Si on leur dit un truc, il faut être cohérent. Bien sûr qu'ils voient qu'on ne maîtrise pas tout. De toute façon, c'est terminé l'époque où l'enseignant était sur une espèce d'estrade, hein. C'est fini de toute manière. Mais ça nous enlève rien. » [P2-§131-141]

Ens1 : « Il y a plein de fois dans la classe, ce sont les élèves qui montré. Plus Nicolas146 que d’autres peut-être. » [P1-§97]

Ens1 : « Typiquement, passer d'une page à l'autre en glissant, moi j’ai appris ça en regardant un de nos élèves. » [P2-§122]

Nous trouvions intéressant de voir si l’usage du clavier virtuel avait posé problème, car nous avions maintes fois lu sur des forums des difficultés de ce type rencontrées par de nombreux utilisateurs.

Loïc : « Est-ce que vous avez remarqué s'ils se débrouillent mieux sur le clavier physique ou sur le clavier de la tablette, le clavier virtuel ? » - Ens2 : « Je n'ai pas senti de différence. En tout cas, sur la tablette, ils étaient super à l'aise. » - Ens1 : « Ouais, bon parce que eux, le clavier, qu’il soit physique ou sur tablette, ils l’utilisent un doigt. » - Ens1 : « Je pense que si on fait un test maintenant, ils sont certainement plus à l'aise avec la tablette parce qu'ils l'ont beaucoup utilisé. Mais… je sais pas plus que ça. » - Ens2 : « [confirme]. » [P2-86-93]

145 C.-à-d. Solids Elementary (une application permettant de travailler la visualisation dans l’espace) lors d’une activité de math (géométrie 3D) dont il s’agissait d’observer et comprendre les différentes possibilités de développements d’un cube.

146 Prénom d’emprunt.

112 Il n’est donc pas évident d’en savoir plus et nous n’avons malheureusement pas pu obtenir plus d’informations à ce sujet. Les séquences vidéos que nous avons pu tourner en classe démontre une certaine difficulté avec le clavier numérique, notamment en termes d’accès aux accents et en ce qui concerne des manipulation plus « techniques » telle que surligner-couper-coller. L’accès aux lettres ne leur paraît pas évident et l’usage de 2 à 3 doigts semble être partagé par tous les élèves. Nous noterons toutefois qu’aucun des élèves n’a suivi de cours de dactylographie, ce qui pourrait être une des explications.

Él.1 : « Comment on revient à la ligne ? » - Él.2 : « On n’a pas trouvé comment on fait les accents… ». [P8-§141]

Nous nous sommes questionnés sur la facilité/difficulté pour les élèves à utiliser la tablette. Leurs réponses sont variées. Nous trouvons intéressant que les élèves ne soient pas si catégoriques que ça et modèrent leur réponse. En effet, le « ça dépend » est souvent cité et démontrerait que tout dépend de ce qui leur est demandé et tout dépend de leur niveau de compétence. Nous leur avons donc posé la question suivante :

Loïc : « Pour toi, utiliser une tablette, c’est plutôt facile, difficile ou ça dépend ? [pause] T’arriverais à dire pourquoi ? » - El1 : « Ben, faut savoir l’utiliser et après c’est facile quand on sait. » - Loïc : « Donc ça veut dire qu’il faudrait suivre un cours peut-être pour apprendre à utiliser la tablette ? » - El1 : « Ouais. Ou si on en a une chez nous, ou par exemple un iPhone, ben après, c’est plus facile d’utiliser une tablette. » [P5-§60-61]

El2 : « Ca dépend. Si on veut chercher un mot dans le dictionnaire, c’est facile parce qu’il y a juste à taper. » [P5-§62] - El3 : « Ca dépend. Par exemple, pour le tangram, quand on tourne les pièces ou pour faire des énigmes, des fois c’est plus facile et des fois c’est moins facile. On a aussi fait l’histoire du moyen-âge sur les tablettes et ça, ça aurait été moins bien sur papier. Je peux pas dire pourquoi. Mais je suis sûre. » [P5-§63] - El4 : « Ca dépend. Des fois, il y a des trucs qu’on sait pas faire. Des fois, il y a des petits bugs. Et des fois, c’est plus facile parce qu’on sait ce qu’on doit faire, on sait comment utiliser. » §64] - El5 : « Plutôt facile. »

[P5-§65] - El6 : « Ca dépend ce qu’on fait. Parce que moi, j’en ai jamais utilisé jusqu’à maintenant. » [P5-§66] - El7 : « Ca dépend. Parce que des fois, par exemple en géographie, des fois, on veut tourner et ça veut pas tourner. » [P5-§67] - El8 : « Plutôt facile. Par exemple, quand on écrit un mot, je trouve qu’on s’habitue vite.

Parce qu’on a les ordinateurs. Et des fois les lettres sont aux mêmes endroits et des fois pas. » [P5-§60-68]

L’usage de la tablette n’étant pas si facile pour tous les élèves, nous nous sommes demandé s’ils trouveraient intéressant de suivre un cours pour apprendre à utiliser les tablettes. Bien entendu, leurs réponses sont variées et correspondent à leur facilité d’utilisation actuelle et la perception qu’ils ont de leur efficacité avec cet outil. Mais ces élèves ne semblent pas trouver un intérêt à apprendre à utiliser cet appareil.

El2 : « Non. C’est facile » [P5-§76] - El4 : « Ben, pourquoi pas pour ceux qui en ont jamais touché. » [P5-§77]

El5 : « Non, pas forcément parce que ça s’apprend quand même assez vite. Après, c’est plutôt de chercher où se trouvent les lettres qui prend du temps. » [P5-§78] - El6 : « Non, parce qu’on apprend très vite et vu qu’on a des conseils, on apprend très vite. Alors un cours pour les tablettes, je vois pas à quoi ça servirait. » [P5-§79] - El8 : « Non, parce que on peut s’habituer. Moi, je n’ai pas de tablette chez moi et je me suis habituée. »

[P5-§81] - El ? « Pour moi, aucune des activités n’a été difficile, alors qu’au début j’avais un peu peur de mal faire avec cet outil. […] J’ai beaucoup appris de cette expérience.» [P7-§32]

Les enseignantes ont eu l’envie de télécharger une application pour réaliser une activité de symétrie en géométrie 2D (Dessin Sur Quadrillage Lite). Ayant déjà installé auparavant une autre application elles-mêmes sur 4 tablettes, ces enseignantes ont pu se rendre compte que ces démarches prennent un certain temps. Ni une ni deux, ces enseignantes ont très vite eu l’idée de former les élèves à l’installation des applications147 et ont ainsi créé une activité de formation à l’installation d’applications sur tablette.

147 Ce qui signifie que les élèves ont eu accès au mot de passe de la tablette.

113 De ce fait, la charge de travail technique a pu être répartie entre les élèves et les 20 tablettes présentes à ce

moment ont été mises à jour en même temps.

Ens2 : « Les élèves qui avaient terminé une activité sur une fiche de mathématiques en cours devaient prendre leur tablette et trouver, puis télécharger depuis le magasin des applications celle qui nous intéressait, c’est à dire “dessin sur quadrillage lite”. » [P6-§59]

Ainsi, certaines mises à jour d’applications ont aussi été effectuées par les élèves. Nous trouvons leur démarche tout à fait intéressante et formatrice. Celle-ci permet de développer les connaissances (techniques) des élèves, crée une relation de confiance entre élèves et enseignantes, développe le sens des responsabilités chez les élèves et, cerise sur le gâteau, soulage les enseignantes d’un temps de travail technique qu’elles n’ont généralement pas tellement apprécié. Le temps économisé peut ainsi être mis à profit d’autres tâches pédagogiques qui les intéressent plus particulièrement. Néanmoins, bien qu’une mise à jour ou une installation d’application puisse tout à fait être assumée par un élève, le fait de transmettre le code à celui-ci peut poser quelques problèmes quant aux éventuelles installations non désirées (payantes) et changement dans la configuration. Malgré tout, leur démarche démontre qu’il n’est clairement pas pratique de devoir assumer ce travail surtout lors de la période en one to one, où chaque modification (mise à jour, installation d’une application,…) aurait dû être faite à l’unité, par les enseignantes. A nouveau, l’utilisation d’un mobile management device parait indispensable à partir d’un certain nombre d’appareils.