3.2 Analyse des interactions métal-ligands dans les isomères du complexe
3.2.4 NBO impliquées dans les interactions métal-ligands
Les résultats obtenus par l'analyse NBO montrent que les NBO du ruthénium et des
ligands bipyridines, DMSO S-liés et DMSO O-liés impliquées dans les interactions σ et π
métal-ligands sont les mêmes dans tous les isomères, seule l'importance de ces interactions
change. Par conséquent, pour présenter les NBO du ruthénium, des ligands bipyridines et des
ligands DMSO S-liés impliquées dans les interactions métal-ligands, nous avons choisi
d'uniquement commenter les résultats obtenus pour l'isomère cis-SS. De la même manière, pour
présenter les NBO des ligands DMSO O-liés impliquées dans les interactions métal-ligands,
nous avons choisi d'uniquement commenter les résultats obtenus pour l'isomère cis-SO (seules
les NBO du ligand O-lié seront commentées dans ce cas).
a) NBO du ruthénium, des ligands bipyridines et des ligands DMSO S-liés
impliquées dans les interactions métal-ligands (isomère cis-SS)
Les NBO impliquées dans les interactions métal-ligands pour l'isomère cis-SS sont données
dans le tableau 6 et représentées figure 7 (les tableaux A4-A9 résument les informations
relatives aux NBO d'intérêt pour tous les isomères). Comme cet isomère possède une symétrie
C
2, seules les NBO qui impliquent des atomes non équivalents dans cette symétrie sont
présentées (les atomes N
3, N
4et S
2sont respectivement équivalents aux atomes N
2, N
1et S
1)
NBO population
LP-N
11,67
LP-N
21,68
LP
1-Ru 1,94
LP
2-Ru 1,93
LP
3-Ru 1,89
LP-S
11,58
LP*
4-Ru 0,93
LP*
5-Ru 0,82
LP*
6-Ru 0,29
Tableau 6.
NBO impliquées dans les interactions métal-ligands dans l'isomère cis-SS et population de ces NBO. Les NBO sans exposant sont de type Lewis et les NBO avec l'exposant * sont de type non-Lewis.Figure 7.
Représentation des NBO données dans le tableau 6.On peut constater que l'analyse NBO ne définit aucune liaison métal-ligands mais uniquement
des paires libres centrées sur le ruthénium et les atomes qui lui sont coordinés. Comme nous
l'avons vu lors de l'étude de la structure électronique du DMSO libre, une liaison entre deux
atomes n'est reconnue pendant le calcul des NBO que si la contribution de deux NHO en
interaction est suffisante. Comme les liaisons de coordination sont fortement polarisées,
celles-ci ne sont pas reconnues dans le calcul des NBO.
Les populations des NBO de type Lewis présentées dans le tableau 6 sont significativement
inférieures à 2. De plus les NBO de type non-Lewis LP*
4-Ru, LP*
5-Ru, LP*
6-Ru centrées sur
le ruthénium ont une population particulièrement élevée pour ce type d'orbitales. Par
conséquent, il existe de forts écarts à la structure de Lewis calculée. Nous allons voir, à l'aide
LP-N
1LP-N
2LP
1-Ru
LP
2-Ru LP
3-Ru LP-S
de l'analyse des interactions donneur-accepteur, que ces écarts correspondent à des
délocalisations soit à partir des NBO des ligands vers le ruthénium (donation σ), soit à partir
des NBO du ruthénium vers les ligands (rétrodonation π) (l'ensemble des interactions
donneur-accepteur entre le ruthénium et les ligands calculées pour l'isomère cis-SS sont données dans
les tableaux A10-A13). Les principales interactions entre les NBO de type Lewis d'un ligand
bipyridine et les NBO de type non-Lewis du ruthénium sont celles entre les NBO LP-N
1,
LP-N
2et les NBO LP*
4-Ru, LP*
5-Ru, LP*
6-Ru. Les énergies de stabilisation liées à ces interactions
sont comprises entre ~ 30 kcal.mol
-1et ~ 90 kcal.mol
-1(cf tableau A10). Les autres interactions
donneur-accepteur sont toutes inférieures à ~ 10 kcal.mol
-1. De la même manière, les principales
interactions donneur-accepteur entre les NBO de type Lewis d'un ligand DMSO S-lié et les
NBO de type non-Lewis du ruthénium sont celles entre la NBO LP-S
1et les NBO LP*
4-Ru,
LP*
5-Ru, LP*
6-Ru. Les énergies de stabilisation issues de ces interactions sont comprises entre
~ 56 kcal.mol
-1et ~ 100 kcal.mol
-1(cf tableau A11). Les autres interactions donneur-accepteur
donnent toutes des énergies de stabilisation inférieures à ~10 kcal.mol
-1. Les paires libres
LP-N
1, LP-N
2et LP-S
1(LP-S
1correspond à la NBO LP-S du soufre dans le ligand DMSO libre)
correspondent à des orbitales hybrides sp qui pointent dans la direction du ruthénium, les paires
libres LP*
4-Ru, LP*
5-Ru sont des orbitales de type d dont les lobes pointent dans la direction
des ligands et la paire libre LP*
6-Ru est une orbitale de type s (cf figure 7). Par conséquent, les
interactions entre les NBO LP-N
1, LP-N
2et LP-S
1centrées sur les ligands et les NBO LP*
4-Ru, LP*
5-Ru et LP*
6-Ru centrées sur le ruthénium sont associées aux liaisons de coordination
et à la donation σ.
Nous allons maintenant nous intéresser aux interactions donneur-accepteur entre les NBO de
type Lewis du ruthénium (LP
1-Ru, LP
2-Ru et LP
3-Ru) et les NBO de type non-Lewis des
ligands. Comme les NBO LP
1-Ru, LP
2-Ru et LP
3-Ru sont des orbitales de type d dont les lobes
ne pointent pas dans la direction des ligands (cf figure 7), les interactions donneur-accepteur
entre ces NBO et les NBO de type non-Lewis des ligands sont associées à la rétrodonation π.
L'étude de ces interactions montre que les NBO LP
1-Ru, LP
2-Ru et LP
3-Ru interagissent avec
de nombreuses NBO de type non-Lewis centrées sur les ligands mais que les énergies de
stabilisation associées à ces interactions sont assez faibles (< ~ 3 kcal.mol
-1, cf tableau
A12-A13). Il n'est donc pas possible de mettre en avant une ou quelques NBO vers lesquelles
s'effectue spécifiquement la rétrodonation. On peut tout de même constater que l
esNBO
accepteurs des ligands bipyridines sont principalement des NBO Ry* centrées sur les azotes et
des NBO BD* associées aux liaisons π N-C. Les NBO accepteurs des ligands DMSO S-liés
sont soit des NBO Ry* centrées sur le soufre, soit des NBO BD* associées aux liaisons σ S-C
et S-O. Si on somme toutes les énergies de stabilisation supérieures à 1 kcal.mol
-1, on trouve
que l'énergie de stabilisation des NBO de type Lewis du ruthénium par un ligand bipyridine est
d'environ 16 kcal.mol
-1et d'environ 10 kcal.mol
-1pour un ligand DMSO S-lié. Ceci montre que
la rétrodonation π est faible mais significative.
b) NBO des ligands DMSO O-liés impliquées dans les interactions
métal-ligands (isomère cis-SO)
Nous allons maintenant nous intéresser aux NBO impliquées dans les interactions entre le
ruthénium et le ligand DMSO O-lié dans l'isomère cis-SO. Les NBO susceptibles d'être
responsables de la donation σ du ligand DMSO O-lié sont les paires libres de l'oxygène. Ces
NBO sont données dans le tableau 7 avec leurs populations et sont présentées figure 8.
NBO population
LP
1-O 1,97
LP
2-O 1,90
LP
3-O 1,76
Tableau 7.
NBO associées aux paires libres de l'atome d'oxygène O1 du ligand DMSO O-lié dans l'isomère cis-SO et population de ces NBO.Figure 8.
Représentation des NBO associées aux paires libres de l'atome d'oxygène du ligand DMSO O-lié dans l'isomère cis-SOLa paire libre LP
2-O
1est une orbitale de type p qui correspond à la paire libre LP
3-O de
l'oxygène dans le DMSO libre. Les deux paires libres LP
1-O
1et LP
3-O
1sont des orbitales
hybrides de type sp qui sont différentes des paires libres LP
1-O et LP
2-O du DMSO libre (cf
figure 5). Le nuage électronique de l'oxygène d'un ligand DMSO O-lié est donc fortement
modifié par rapport à celui de l'oxygène du DMSO libre. L'analyse des interactions
donneur-accepteur entre les NBO de type Lewis du ligand DMSO O-lié et les NBO de type non-Lewis
du ruthénium montre que seule la NBO LP
3-O
1interagit significativement avec le ruthénium et
plus particulièrement avec les NBO LP*
5-Ru et LP*
6-Ru (cf tableau A14). L'énergie de
stabilisation issue de l'interaction donneur-accepteur entre la NBO LP
3-O
1avec ces dernières
est d'environ 40 kcal.mol
-1(LP*
5-Ru) et d'environ 62 kcal.mol
-1(LP*
6-Ru). Les autres
interactions donneur-accepteur sont toutes inférieures à environ 7 kcal.mol
-1. Comme la paire
libre LP
3-O
1pointe vers le ruthénium, celle-ci est donc responsable de la donation σ du ligand
DMSO O-lié. Quant aux interactions π, l'analyse des interactions donneur-accepteur entre les
NBO de type Lewis du ruthénium et les NBO de type non-Lewis du ligand DMSO O-lié
montrent que celles-ci ont toutes des énergies de stabilisation inférieures à environ 1 kcal.mol
-1
(tableau A15). Par conséquent, la rétrodonation π vers un ligand DMSO O-bonded est
insignifiante.
c) Bilan
A ce stade, nous avons vu quelles sont les principales NBO du ruthénium, des ligands
bipyridines, des ligands DMSO S-liés et des ligands DMSO O-liés qui sont impliquées dans la
donation σ. Ces NBO correspondent aux paires libres centrées sur les atomes directement
coordinés au ruthénium et dont les lobes pointent vers le ruthénium. Cette donation s'effectue
vers deux orbitales de type d et une orbitale de type s du ruthénium. Nous avons également vu
quelles sont les NBO du ruthénium qui sont principalement responsables de la rétrodonation π.
Ces NBO sont trois orbitales de type d qui peuvent être assimilées aux orbitales dπ. La
rétrodonation π du ruthénium vers un ligand bipyridine et vers un ligand DMSO S-lié est
particulièrement faible par rapport à la donation σ de ces ligands mais significative pour jouer
un rôle dans la stabilisation des orbitales dπ. En revanche la rétrodonation π vers un ligand
DMSO O-lié est négligeable. Ce résultat montre que la rétrodonation π ne joue aucun rôle dans
la compensation de la charge transférée par l'oxygène (donation σ) d'un ligand DMSO O-lié
vers le ruthénium comme l'avait avancé Adamo et. al. pour expliquer que la charge naturelle de
cet atome est pratiquement identique dans le ligand DMSO O-lié et dans le DMSO libre. Au
contraire, le fait que la rétrodonation π vers le ligand DMSO O-lié est négligeable montre que
cette compensation est uniquement due à l'effet inductif donneur des groupements méthyles du
ligand DMSO.
3.2.5 Caractères relatifs σ-donneur et π-accepteur des ligands bipyridines, DMSO
Dans le document
Étude théorique de propriétés photophysiques et photochimiques de complexes de ruthénium
(Page 91-96)