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Nanoparticules de silice mésoporeuses 33 

1.  Présentation des concepts 18 

1.3.  Nanoparticules de silice mésoporeuses 33 

Comme on vient de le voir, il existe deux méthodes principales pour obtenir un hydrogel paramagnétique : greffer un agent de contraste sur le polymère ou piéger ce dernier dans la structure réticulée. Dans le cadre de ce projet, c'est la seconde méthode qui a été choisie. Un bon contraste entre l'hydrogel et le milieu environnant peut en effet être atteint si l’hydrogel montre une relaxivité r1 élevée. Lier les complexes à des macromolécules, pour en ralentir le taux de rotation, est une méthode connue pour amplifier r1.[16] L'intégration de chélates de gadolinium dans des nanoparticules peut aussi permettre d'atteindre cet objectif.

Dans le cadre de ce projet, des nanoparticules de silice mésoporeuses (MSN) ont été synthétisées et fonctionnalisées avec un chélate de gadolinium, pour obtenir un agent de contraste efficace et piégeable dans un hydrogel. Le taux de corrélation rotationnel du complexe DTPA-Gd sera ainsi ralenti et l’efficacité de l’agent de contraste, augmentée. Cette section va présenter les MSN et leur synthèse puis les méthodes utilisées pour les fonctionnaliser.

12 Le couplage de l'EDC avec un dérivé NHS est fréquemment utilisé pour ouvrir les acides carboxyliques.

13 La gélification ionotropique est basée sur la capacité des monomères polyélectrolytes de se réticuler en présence de

1.3.1. Introduction aux nanoparticules de silice mésoporeuses

Selon la définition de l'UICPA (Union Internationale de Chimie Pure et Appliquée), les matériaux poreux sont divisés en trois catégories, en fonction de leur diamètre de pore (dpore) : les microporeux (dpore < 2 nm), les mésoporeux (2 nm < dpore < 50 nm) et les macroporeux (50 nm < dpore). Longtemps, le domaine des matériaux poreux a été plutôt celui des matériaux microporeux, avec les zéolithes prédominant toutes les autres catégories de matériaux poreux. Les matériaux mésoporeux se limitaient aux verres et aux gels poreux. Ces matériaux présentaient un système poreux désordonné, avec une large distribution de taille des pores.

Les premiers matériaux mésoporeux ordonnés apparaissent en 1990, synthétisés par des chercheurs japonais.[134] Deux ans plus tard, en 1992, la Mobil Corporation publie la synthèse de la famille des silices M41S.[135] À l'origine, la création de ces matériaux de silice mésoporeuse n'avait pour but qu'une utilisation comme tamis moléculaire. Cependant, les chercheurs réalisent rapidement leur potentiel dans de nombreux domaines d'application (adsorption, catalyse, séparation, élution de médicaments…) et les recherches pour améliorer leur synthèse se multiplient, notamment pour le contrôle des paramètres. La famille des matériaux mésoporeux s'étend rapidement aux oxydes métalliques, aux sulfures métalliques, aux métaux purs, aux hybrides organiques-inorganiques, au carbone et aux polymères.

La silice mésoporeuse reste cependant le matériau le plus attractif et prometteur par sa grande surface spécifique, son diamètre de pore ajustable et monodisperse, son système poreux ordonné et sa facilité de synthèse et fonctionnalisation. À la suite de la première utilisation des MCM-41 comme système de délivrance de médicaments, publiée en 2001,[136] de nombreux travaux ont porté sur le contrôle et l'influence des différents paramètres de synthèse, tels que la taille et la morphologie finale des particules.[137-139] Un contrôle précis des différentes mésophases de la famille M41S (Figure 21) a été réalisé en modifiant les surfactants ou les ratios surfactants/précurseurs inorganiques,[140, 141] grâce à la compréhension du mécanisme de synthèse par Firouzi.[142, 143]

Figure 21. Les différentes mésostructures de la famille des M41S : A) MCM‐41; B) MCM‐48 et C) MCM‐50. 

Une fois la taille des particules contrôlée et diminuée à un diamètre utilisable en médecine (une centaine de nanomètres environ), de nombreuses publications sont apparues sur les possibilités qu'offraient les nanoparticules de silice mésoporeuses pour la médecine.[19-21, 144-146] Parmi les applications envisagées, on trouve surtout la délivrance de médicaments antidouleur[147-149] et anticancéreux.[20, 150, 151]

1.3.2. Principales voies de synthèse des nanoparticules de silice mésoporeuses pour applications biomédicales

La synthèse de silice mésoporeuse consiste à former un réseau en trois dimensions de silice autour de micelles. Ces dernières sont créées par l'assemblage de surfactants qui sont des molécules possédant une tête polaire et une queue hydrophile (Figure 22). Lorsque ces molécules sont en présence d'un solvant polaire et à une concentration micellaire critique, elles forment des micelles, c’est-à-dire qu'elles se regroupent pour minimiser le contact de leur queue hydrophile avec le solvant.

Figure 22. Schéma d'un surfactant et de la formation d'une micelle en présence d'un solvant polaire 

Lorsque les micelles sont formées dans la solution, un précurseur de silice est ajouté, pour former les nanoparticules de silice par procédé sol-gel (solution-gélification). Au cours de ce procédé, le système est d'abord dans un état liquide, que l'on appelle dispersion stable de particules colloïdales ou "sol", puis il se transforme en "gel" par la création de liaisons de Van der Waals. Ces liaisons vont permettre la formation d'un réseau tridimensionnel, créé par des réactions de polymérisation inorganique : l'hydrolyse et la condensation.

 Hydrolyse : c'est la formation du "sol". Les fonctions Si-OR (alcoxy) sont transformées en fonctions Si-OH (hydroxy) plus réactives. On utilise un catalyseur acide ou basique, chacun conduisant à des résultats différents. Pour un résultat poreux, c'est un catalyseur basique qui devra être utilisé.

Si-(OR)4 + 4(H2O) → Si-(OH)4 + 4(R-OH)

 Condensation : il s'agit d'une oxolation, c'est-à-dire la formation d'un pont oxo (-O-) entre deux atomes de Si. Le réseau macromoléculaire est ainsi formé par élimination d'eau.

Si-OH + HO-Si → 2(Si-O-Si) + 4(H2O)

Les ponts oxo sont schématisés dans la Figure 23 où l'on voit bien la formation du réseau tridimensionnel. Lorsque la silice s'est formée autour des micelles, ces dernières sont éliminées soit par extraction, soit par calcination, ce qui libère des pores dans la silice et rend la nanoparticule poreuse.

1.3.3. Fonctionnalisation des nanoparticules de silice mésoporeuses avec des groupements paramagnétiques

Les nanoparticules de silice mésoporeuses peuvent être fonctionnalisées par deux approches : le greffage post-synthèse et la co-condensation (Figure 24).[152] La co-condensation consiste à condenser une molécule de trialcoxysilane dans les pores pendant la synthèse des nanoparticules. Cette fonctionnalisation conduit à une incorporation homogène du groupe fonctionnel dans le produit. Cependant le nombre de groupements fonctionnels pouvant être greffés par cette méthode est réduit par les conditions de synthèse : solubilité dans l'eau, pH extrême et élimination des tensioactifs ensuite. La fonctionnalisation post- synthèse est la plus couramment utilisée. Il s'agit d'effectuer la condensation après le retrait des tensioactifs par une réaction covalente entre un trialcoxysilane et les silanols libres en surface des nanoparticules. Cette méthode conserve la morphologie et la structure de pore intactes mais peut conduire à une répartition inhomogène du groupe fonctionnel.

Figure 24. Fonctionnalisation de MSN par co‐condensation (en haut) ou par greffage post‐synthèse (bas).[152]  

La fonctionnalisation de MSN avec des agents de contraste permet d'accroitre la relaxivité de l'agent de contraste (donc son efficacité) en réduisant le taux de rotation du gadolinium, comme expliqué dans la section 1.2.2.3. De plus, les MSN permettent d'incorporer une grande quantité de molécules d'agent de contraste dans une seule nanoparticule, ce qui accroit aussi la relaxivité par nanoparticule. W. Lin est considéré comme un pionnier dans le développement de MSN fonctionnalisées par un agent de contraste avec des MCM-41-DTPA-Gd présentant un rapport r2/r1 de 3.96.[22] Parmi les travaux sur les MSN comme agent de contraste, on retrouve aussi des MCM-41 fonctionnalisées avec du gadolinium possédant une relaxivité r2/r1 de 2.27, synthétisées par Taylor et al..[23] Quelques années plus tard, Vivero-Escoto et al. a réalisé des MCM-41-DTPA-Gd recouvertes de PEG présentant un r2/r1 de 2.18.[24] Le meilleur rapport de relaxivité pour les MSN fonctionnalisées au gadolinium est publié par Bouchoucha et al. en 2014 avec des MCM-48-DTPA-Gd recouvertes de PEG possédant un r2/r1 de 1.47.[18]

1.3.4. Caractéristiques des nanoparticules de silice mésoporeuses appropriées pour un piégeage dans un hydrogel

L’hydrogel paramagnétique doit avoir d’excellentes propriétés relaxométriques pour présenter un bon contraste par rapport au milieu environnant. C’est pourquoi les propriétés relaxométriques des nanoparticules contenant l’agent de contraste et piégées dans l’hydrogel doivent être optimales. En cas de détachement ou de relargage, ces nanoparticules doivent aussi être biocompatibles, comme c'est le cas pour les MSN. Dans la famille M41S, des travaux ont été préalablement réalisés sur des MCM-41. Cependant les MCM-48 présentent plus d'avantages. Elles ont une porosité de plus de 70 % avec des canaux interconnectés, ce qui permet une meilleure circulation de l'eau dans les nanoparticules. Or, il a été vu dans la section 1.2.2 que l'interaction entre le gadolinium et l'eau était nécessaire pour que l’agent de contraste réduise le temps de relaxation des protons. Un autre avantage majeur des MCM-48 est leur grande surface spécifique qui permet le greffage d'une grande quantité de chélate de gadolinium par nanoparticule. L'optimisation des quantités greffées par Bouchoucha et al. a permis d'obtenir des nanoparticules avec un rapport r2/r1 de 1.47[18], ce qui en fait de bonnes candidates pour le piégeage dans un hydrogel, afin de produire des couches d’hydrogels paramagnétiques.