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Hydrogels pour applications biomédicales 18 

1.  Présentation des concepts 18 

1.1.  Hydrogels pour applications biomédicales 18 

La première définition générale de la biocompatibilité, acceptée comme référence par la communauté scientifique, a été publiée en 1987 par Williams : la biocompatibilité est la capacité d'un matériau à être utilisé avec une réponse appropriée de l'hôte pour une application spécifique.[95] En 2008, Williams tente d'analyser au cas par cas chaque grande catégorie de biomatériaux.[96] Il propose alors une nouvelle définition plus précise de la biocompatibilité :

"La biocompatibilité réfère à la capacité d'un matériau à remplir sa fonction requise en rapport avec la thérapie médicale, sans induire d'effets locaux ou systémiques indésirables chez le receveur ou le bénéficiaire de cette thérapie, mais plutôt en générant la réponse cellulaire ou tissulaire la plus appropriée et bénéfique dans cette situation spécifique et en optimisant la performance pertinente de cette thérapie".

La notion de biocompatibilité est souvent divisée en deux catégories : la biocompatibilité structurale (forme du matériau et ses propriétés mécaniques) et la biocompatibilité surfacique (nature du matériau, topographie et biochimie de la surface). Les biomatériaux sont divisés en cinq catégories en fonction de leur nature : les carbones, les matériaux naturels modifiés (acide hyaluronique, collagène…), les céramiques et verres (hydroxyapatites, alumine…), les métaux (titane, acier inoxydable…) et les polymères qui seront plus explicitement développés par la suite.[97]

1.1.1. Classes d'hydrogels pour applications biomédicales

Les hydrogels sont des matrices de chaînes polymères pouvant absorber une grande quantité d'eau, jusqu'à plus de 90% pour certains. Il y a deux principales définitions acceptées pour les hydrogels :

 Matrice gonflée dans l'eau de polymères réticulés, produite par la réaction d'un ou plusieurs monomères

 Polymère présentant une exceptionnelle capacité à gonfler dans l'eau et retenir une importante fraction de l'eau dans sa structure, sans se dissoudre.

Ces deux définitions peuvent être regroupées en une seule qui consisterait à présenter les hydrogels comme des polymères réticulés constituant une matrice hautement absorbante et ne se dissolvant pas dans l'eau si le polymère choisi ne se dégrade pas par hydrolyse. Ils sont réticulés de manière physique (interaction entre ions, greffage de blocs, cristallisation) ou de manière chimique (polymérisation radicalaire, addition ou condensation). Du fait de leur capacité d'absorption des liquides hydrophiles, les hydrogels ressemblent à des tissus biologiques mieux que n'importe quel autre biomatériau synthétique.[98]

1.1.2. Polymères biocompatibles pour hydrogels

Les hydrogels sont très utilisés en biomédecine,[99] ce qui a favorisé le développement de procédures de synthèse et d’assemblage bien contrôlées, à partir de polymères,[100-102] de copolymères[103-105] ou encore de polymères fonctionnalisés.[106-108] La pertinence des hydrogels comme matériaux biomédicaux et leur performance dans une application donnée dépendent en grande partie de leur structure. Il existe une très vaste gamme de polymères utilisables pour la formation d'hydrogels pour les biomatériaux, à condition qu'ils soient biocompatibles (Tableau 4). Le choix du polymère se fait surtout en fonction des besoins (délivrance ou encapsulation), du coût, de la disponibilité et de la reproductibilité du polymère. Le poly (méthacrylate 2- hydroxyéthyle) (PHEMA) fut le tout premier polymère utilisé pour former un hydrogel, en 1960.[109] Petit à petit, d'autres polymères ont été utilisés, puis des co-polymères, pour améliorer les propriétés des hydrogels.

Tableau 4. Liste non exhaustive de polymères biocompatibles pouvant former des hydrogels 

Nom complet Abréviation Formule

Poly (méthacrylate 2-hydroxyéthyle) PHEMA

Acide poly (lactique-co-glycolique) PLGA

Acide poly (L-lactique) PLLA

Poly (éthylène glycol) PEG

Dans ce projet, deux types d'hydrogels paramagnétiques ont été développés : un hydrogel de poly (éthylène glycol) et un hydrogel d'alginate. Ces deux polymères sont en effet biocompatibles, ils ne se dégradent pas avec le temps et ils présentent une méthode de réticulation en hydrogel qui est rapide et compatible avec le milieu biologique. Ils vont donc être présentés en détail dans les deux sections suivantes.

1.1.3. L'alginate

L'alginate est un polymère polysaccharide d'origine naturelle qui se trouve principalement dans les algues marines brunes.[110] D'une manière générale, l'alginate est un copolymère linéaire composé d'unités d'acide -D-mannuronique (unités M) et d'unités d'acide -L-guluronique (unités G), représentées dans la Figure 10. Ces unités sont successivement répétées soit en alternance (-M-G-), soit en blocs (-M-M- ou -G-G-). La distribution de chaque unité (nombre et répartition) va dépendre des sources (c’est-à-dire des espèces d’algues algynophytes) à partir desquelles l'alginate est isolé. De nombreuses propriétés de l'alginate sont influencées par la distribution des unités M et G (taux de dégradation, gonflement et viscoélasticité par exemple).[111]

Figure 10. Formule chimique des unités composant le polymère alginate. 

Grâce aux groupes carboxyles sur les unités M et G, l'alginate peut se lier à des cations divalents (Mg2+, Mn2+, Ca2+, Sr2+, Ba2+, Cu2+ et Pb2+) pour former un hydrogel. La méthode choisie dans ce projet est la gélification après ajout d'ions Ca2+ puisqu’il s’agit d’un cation non toxique, déjà présent dans le corps humain. Le mécanisme est explicité dans la section 3.4.2.1. En raison de sa biocompatibilité [112] et de ses propriétés de gélification en présence de Ca2+, l'alginate est largement utilisé dans le domaine biomédical sous forme d'hydrogel, en particulier pour l'encapsulation de cellules pour la transplantation et la thérapie cellulaire.[92, 113, 114]

1.1.4. Le poly (éthylène glycol) (PEG)

Le poly (éthylène glycol) (PEG) est un polymère produit par une interaction entre l'oxyde d'éthylène et de l'eau ou entre monomères d'éthylène glycol. Les propriétés du PEG en font un excellent candidat pour les hydrogels biocompatibles.[115] Il est non toxique, possède une clairance rapide de l'organisme et est approuvé par la FDA. Il est aussi soluble dans l'eau. Sa furtivité au système immunitaire et sa résistance naturelle à l'adsorption des protéines et des cellules en font aussi un polymère de recouvrement très prisé pour les biomatériaux.

Il y a de nombreuses utilisations du PEG en tant que polymère biocompatible :  Applications pharmaceutiques pour des complexes PEG-protéines;[116]

 Modification de surface avec du PEG pour empêcher l'adsorption de protéines et de cellules;[117]  Hydrogels de PEG pour l'encapsulation de cellules ou l'administration de médicaments;[118]  Recouvrement de molécules pour la furtivité;[119]

 Complexes et micelles de PEG-liposomes pour l'administration de médicaments.[120]

Il existe deux méthodes principales de réticulation pour les hydrogels de PEG : la réticulation chimique et la réticulation physique, chacune ayant ses avantages. Laréticulation chimique (polymérisation radicalaire, addition ou condensation) conduit à des hydrogels plus stables mais plus rigides.[121] La réticulation physique (interaction entre ions, greffage de blocs, cristallisation) donne des hydrogels moins rigides mais le degré de réticulation peut ne pas être maitrisé avec précision.[122] Le choix de la méthode de polymérisation se fait donc en fonction de l'utilisation visée et des contraintes qui en découlent. Dans le cadre de ce projet, c'est la réticulation chimique qui a été sélectionnée car pour une application de recouvrement de matériel médical, il fallait un hydrogel qui soit permanent. La photo-polymérisation permet d'obtenir facilement et rapidement une structure chimiquement réticulée par des liaisons covalentes, donc stables.

1.1.4.1. Choix du PEG

Il existe de nombreuses formes pour le poly (éthylène glycol) (PEG) : linéaire, ramifié, avec différentes fonctions en bout de chaîne et différentes longueurs de chaîne. L'encapsulation des nanoparticules de silice mésoporeuses impose deux contraintes :

 il faut que le PEG soit suffisamment volumineux pour ne pas entrer dans les pores, afin de conserver ces dernières libres pour une utilisation en relargage de médicament dans des travaux futurs,  il faut que les chaînes forment des réticulations suffisamment petites pour garder les nanoparticules à

l'intérieur du réseau formé.

Une molécule de PEG de 20 kDaramifiée en quatre branches de 5 kDa a été choisie pour piéger les nanoparticules (Figure 11).

Figure 11. 4A‐PEG‐TA (4arms–poly (ethylene glycol)‐tetraacrylate). Poly (éthylène glycol) à quatre bras terminés par des  fonctions acrylates 

La conformation en étoile plutôt que linéaire permet d'empêcher le PEG de pénétrer dans les pores et la faible taille de chaque branche assure une distance entre deux réticulations suffisamment petite pour ne pas laisser passer les nanoparticules de silice mésoporeuses. Le rayon hydrodynamique du PEG choisi est entre 10 et 15 nm, ce qui assure que le polymère n’entrera pas dans les pores des nanoparticules, d’environ 3 nm.

1.1.4.2. Choix de la méthode de réticulation

La photo-polymérisation présente de nombreux avantages par rapport aux autres techniques de réticulation des hydrogels. C'est une méthode rapide dont on peut contrôler la durée par activation et désactivation du photo-initiateur, une molécule capable de former des radicaux pour amorcer la polymérisation. La production de chaleur est faible, sans risque donc de dégrader les particules à l'intérieur de l'hydrogel et les faibles quantités d'UV utilisées ne présentent pas non plus de risque pour ces particules.[123-125] Les fonctions acrylates vont se lier par une liaison covalente par ouverture des doubles liaisons C=C activées par le centre actif du photo-initiateur. La molécule de PEG choisie se termine par quatre fonctions acrylates qui, une fois la photo-polymérisation amorcée, permettront au polymère de se réticuler et de former un réseau tridimensionnel solide, selon le mécanisme décrit ci-après.

La technique de photo-polymérisation consiste à utiliser des photons de longueur d’onde correspondant à la lumière ultra-violette ou dans le domaine du visible. Il s’agit d’un mécanisme de polymérisation radicalaire qui se divise en trois parties (Figure 12) :

 L'initiation avec la rupture du photo-initiateur pour créer un radical libre puis l'activation des monomères,  La propagation durant laquelle les monomères s'additionnent en polymères,

 La terminaison, c'est-à-dire la recombinaison des radicaux libres.

Figure 12. Mécanisme de polymérisation radicalaire (M : monomère, R : initiateur) 

Cette polymérisation passe par l'activation d'une molécule : le photo-initiateur (souvent simplement appelé initiateur). Cette molécule peut être un activateur dans l'UV ou dans le visible. La molécule, qui fonctionne aux longueurs d’onde dans l’UV-visible, va se scinder en deux centres actifs qui vont déclencher la

polymérisation, tel que schématisé Figure 12. Les initiateurs UV sont plus fréquemment utilisés que ceux dans le visible pour leur contrôle aisé et leur efficacité supérieure.[126]

Dans le cadre d'un PEG terminé par une fonction acrylate, la polymérisation radicalaire va permettre l'addition des chaînes par l'ouverture de la double liaison C=C en une liaison C-C, qui n'est pas biodégradable. L'hydrogel ne se dégradera donc pas par rupture des réticulations. La Figure 13 présente un exemple de polymérisation d'un polymère terminé par une fonction acrylate. L'amorceur est un radical benzoyle qui va activer la liaison alcène pour "l'ouvrir" et permettre une liaison avec une autre terminaison acrylate.

Figure  13.  Exemple  de  polymérisation  radicalaire  d'un  polymère  se  terminant  par  une  fonction  acrylate  (adapté  de 

Polymérisation sous rayonnements UV) [127] 

1.2. Les agents de contraste paramagnétiques pour l’IRM