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2.2.1. Généralités

Comme il a déjà été mentionné, les nanocristaux magnétiques ont été largement étudiés dans la littérature. C’est un domaine de recherche en plein essor allant de la catalyse en phase liquide, la biotechnologie/biomédecine et l’IRM au stockage des informations… Bien qu'un certain nombre de méthodes appropriées aient été développées pour la synthèse de nanocristaux magnétiques avec des compositions différentes, les applications réussies dans les domaines énumérés ci-dessus dépendent de la stabilité des particules sous différentes conditions. Dans la plupart des applications envisagées en nanobiotechnologies, les matériaux ont de meilleures propriétés lorsque leur taille est en dessous d’une valeur critique, qui dépend du matériau mais qui est généralement autour de 10-20 nm pour les oxydes de fer. Dans ce domaine de taille, chaque nanocristal est un domaine magnétique unique et montre un comportement superparamagnétique lorsque la température est supérieure à la température de blocage. Ces nanocristaux individuels ont un large moment magnétique constant et se comportent comme un atome géant paramagnétique avec une réponse rapide aux champs magnétiques appliqués avec une rémanence (magnétisme résiduel) et coercivité (le champ nécessaire pour ramener l'aimantation à zéro) négligeables ou nulles. Ces caractéristiques font des nanocristaux superparamagnétiques un système attrayant pour des applications biomédicales, car le risque de formation d'agglomérats est négligeable à la température ambiante.

Cependant, un problème inévitable associé à des objets dans cette gamme de taille est leur instabilité intrinsèque sur de longues périodes de temps. Ces petits cristaux ont tendance à former des agrégats pour réduire l'énergie associée à la grande surface par rapport au volume des particules de taille nanométrique. En outre, les nanocristaux métalliques sont chimiquement très actifs, et sont facilement oxydés en présence d'air, ce qui entraîne généralement une perte de magnétisme et de la dispersion.

Deux critères dominent les propriétés magnétiques des nanocristaux : l’effet de petite taille et les effets de surface qui donnent lieu à diverses caractéristiques particulières, telles que résumées dans la Figure 2.6. Un des effets résultant de la petite taille est par exemple comportement superparamagnétique proposé par Louis Néel dès 1949. Les effets de surface sont liés à la rupture de la symétrie de la structure cristalline à la limite de chaque particule.

Figure 2.6 :Différents effets magnétiques se produisant dans des nanocristaux magnétiques16.

La Figure 2.6 est une vue simplifiée de certains phénomènes présents dans les nanoobjets magnétiques. En réalité, une compétition entre les divers effets permettra d'établir le comportement magnétique global. L’arrangement des spins dans a) est ferromagnétique (FM) et antiferromagnétique (AFM) dans b) ; D= taille du domaine et Dc= taille du domaine critique. Dans c) il s’agit d’une combinaison de deux phases ferromagnétiques différentes (flèches violettes et flèches noires en (a)) qui peut être utilisée pour la création de nouveaux nanomatériaux fonctionnels, tels que des aimants permanents, qui sont des matériaux ayant une forte magnétisation rémanente (Mr) et une haute coercitivité (HC), comme représenté schématiquement sur la courbe de magnétisation (c), d) une illustration du moment magnétique superparamagnétique (SPM). Un aimant superparamagnétique est défini comme un moment magnétique géant qui peut fluctuer lorsque l'énergie thermique, kBT, est plus grande que l'énergie d'anisotropie. Ils ne présentent aucune rémanence ou coercivité, à savoir, il n'y a pas d'hystérésis dans la courbe de magnétisation au-dessus d’une certaine température, appelée température de blocage (d). e) L'interaction à l'interface entre un ferromagnétique et un antiferromagnétique induit une ouverture de l’hystérèse « exchange bias ». f) Les nanoparticules purement antiferromagnétiques pourraient présenter une relaxation superparamagnétique ainsi qu'une aimantation nette découlant de spins non compensés en surface (flèches bleues en (b)).

2.2.2. « Sun’s method » pour synthétiser les colloïdes γ-Fe

2

O

3

Sun et al.17 ont rapporté une méthode simple et efficace pour la synthèse de nanocristaux de Fe3O4. Le précurseur de fer, l’acétylacétonate de fer (III) noté Fe(acac)3, est porté à reflux sous flux d’azote en présence de 1,2-hexadecanediol, d’acide oléique et d’oleylamine dans du diphényl éther. Les réactifs sont d’abord mélangés et portés à 200°C afin d’homogénéiser le milieu réactionnel, puis chauffés à reflux (~ 300°C) afin que la

réaction s’opère. Cette technique permet de synthétiser des nanocristaux parfaitement monodisperses et de taille contrôlée. La taille varie de 4 à 6 nm selon le temps de réaction. Avec un procédé d’ensemencement (seeded growth) fait en plusieurs étapes, la taille des nanocristaux magnétiques peut atteindre 20 nm. A noter que ces NPs sont hydrophobes à cause de la présence d’acide oléique et d’oleylamine à leur surface. Il est ainsi facile de les redisperser dans de l’hexane et du dichlorométhane.

En 2011, El Mendili et al.18 ont synthétisé des NCs de fer constitués majoritairement de la phase γ-Fe2O3 en se basant sur le protocole de Sun et al. Ils ont montré que le passage de Fe3O4 à γ-Fe2O3 se fait naturellement et ne nécessite pas d’oxydation forcée sous flux d’oxygène à haute température contrairement à ce qui a été rapporté par Sun et al17

.

Au cours de cette thèse, les NCs de γ-Fe2O3 ont été synthétisés en se basant sur la méthode proposée par Sun et al.

-Mode opératoire

Dans un ballon tricol nous introduisons 0,71 g de Fe(acac)3 et nous rajoutons 2,58 g d’hexadécandiol qui joue le rôle de réducteur, ensuite 1,70 g d’acide oléique et 1,60 g d’oleylamine sont additionnés, car ils sont les stabilisateurs. A noter que ces produits sont préservés dans une boîte à gants vu leurs sensibilités à l’oxygène de l’air. Ensuite nous rajoutons 20 mL de solvant qui peut être soit le benzyle éther ou le phényl selon la taille souhaitée ; le solvant doit avoir un point d’ébullition très élevé. Le ballon tricol est équipé d’un réfrigérant, d’une sonde de température pour contrôler la température du milieu réactionnel, d’un flux d’argon et d’une agitation magnétique. Le mélange est porté à 200 °C pendant 2 heures pour homogénéiser le milieu ensuite nous augmentons cette température jusqu’à 300 °C pendant 1 heure afin que la réaction s’opère. Après le retour à la température ambiante, la solution est déstabilisée avec environ 50 mL d’éthanol, puis centrifugée pour éliminer les résidus de la réaction. Cette opération est répétée plusieurs fois afin d’éliminer les gros agrégats, les réactifs qui n’auraient pas réagis et l’excès d’acide oléique et d’oleylamine. Enfin les nanocristaux sont dispersés dans du cyclohexane.

Pour faire croître la taille des nanocristaux obtenus le même protocole est répété, mais en ajoutant aux réactifs une quantité de solution colloïdale de γ-Fe2O3 dispersée dans du cyclohexane. Cette étape peut être répétée plusieurs fois pour atteindre la taille souhaitée.

Finalement, nous appliquons une centrifugation sélective pour obtenir des nanocristaux parfaitement monodisperses en taille. Typiquement, 450 μL d'acétone sont ajoutés à une suspension de 1 ml contenant 13 mg de nanocristaux magnétiques dans le cyclohexane, et le mélange a été centrifugé lentement (10 minutes à 5000 g). Le surnageant est conservé. Les monocristaux γ-Fe2O3 obtenus ont un diamètre de 6, 10,5 ou 15 nm.

La croissance et la sélection en taille des nanocristaux ont été suivies après chaque étape par des analyses par microscope électronique à transmission (MET). Les diamètres sont mesurés manuellement en choisissant 200 nanocristaux aléatoirement sur plusieurs images MET. Les résultats de ces mesures sont présentés sous forme de pourcentage de population, ce qui donne une indication sur la distribution en taille des nanocristaux sur la Figure 2.8.

Figure 2.8 :Images MET et distribution en taille des nanocristaux de γ-Fe2O3 après la première étape de synthèse (a), après croissance des nanocristaux par un procédé ensemencé (b) et (c)19.

2.2.3. Protection et Stabilisation des nanocristaux magnétiques

La stabilité chimique est une condition essentielle pour presque toutes les applications des nanocristaux magnétiques. En particulier, les métaux purs, tels que Fe, Co et Ni et leurs alliages métalliques, sont très sensibles à l'air. Ainsi, la principale difficulté de l'utilisation de métaux purs ou d'alliages résulte dans leur instabilité à l'oxydation à l'air, et leur sensibilité à l'oxydation devient d’autant plus élevée que les particules sont petites. De plus, dans notre cas, les NCs magnétiques sont dispersés en phase aqueuse d’où le choix d’une phase oxyde. Par contre, il peut être nécessaire de modifier leur surface pour les protéger et empêcher leurs agrégations à des pH proches de 7.

Dans ce manuscrit deux méthodes ont été adoptées. La première méthode est le revêtement par une matrice de silice qui sera exposée dans la suite. Et la deuxième méthode consiste à utiliser des surfactants ou des polymères pour passiver la surface de ces nanocristaux après leur synthèse pour empêcher leur agrégation. En général, les répulsions électrostatiques ou les répulsions stériques peuvent être utilisées pour disperser des nanocristaux et les conserver dans un état colloïdal stable. Dans le cas des ferrofluides, les propriétés de surface des cristaux magnétiques sont les principaux facteurs qui déterminent cette stabilité. Dans ce but, nos NCs de γ-Fe2O3 sont peptisés. La peptisation constitue au traitement de la surface d’un précipité de nanocristaux par un acide ou une base pour former un colloïde par ajout de charges de surfaces. Dans notre cas, les nanocristaux sont transférés dans l'eau par un procédé de peptisation de la façon suivante : ~ 15 mg de γ-Fe2O3 en suspension dans 1 mL de cyclohexane sont précipités par addition de 3 mL d'acétone. Elles sont séparées du surnageant par un aimant et la poudre résultante est lavée avec du HNO3 2M pendant 15 minutes (agitation au vortex). L’acide nitrique est ensuite retiré et les NCs sont lavés avec de l'eau distillée. Ce processus est répété trois fois et finalement, les NCs de γ-Fe2O3 sont remis en suspension dans 750 μL d'eau. Il est à noter que plus les nanocristaux sont gros, plus leur remise en suspension dans l'eau est difficile. Seuls les plus petits donnent une parfaite suspension transparente dans l'eau, ce qui est un signe d'une bonne dispersion et stabilité au moins à court terme. En utilisant ce protocole, un ferrofluide formé de NCs de γ-Fe2O3

positivement chargés est obtenu. Ces charges positives proviennent des groupes -OH de surface qui ont été protonés dans le milieu acide en –OH2+.

2.3. Nanoparticules de silice multifonctionnelles synthétisées par