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3. Effets des principaux stress abiotiques de l’environnement sur le développement et la

3.1. Effets des stress sur le développement des céréales à l’échelle du peuplement et de la

3.1.4. Multi-stress

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3.1.3. Stress salin

Les salinités élevées sont un stress qui affecte aux alentours de 20% des terres arables, et il va

concerner jusqu’à la moitié des sols cultivés en 2050 (Shrivastava et Kumar 2015). Un stress

salin appliqué au cours du développement des grains induit une diminution de leur nombre et

de leur poids (Francois et al. 1984). Zheng et al. (2008) ont noté que l’application d’un stress

salin durant la croissance du blé induit une réduction de l’activité photosynthétique, la

conductance stomatique, la quantité de pigments et d’ions, la surface, le contenu en eau et la

durée de vie des feuilles, et de l’accumulation de matières sèches dans les épis.

3.1.4. Multi-stress

En 2013, Rasmussen et al. (2013) ont montré que, lorsque des plants d’Arabidopsis sont soumis

à des stress, 61% des modifications transcriptomiques observées en réponse à ces

multi-stress ne sont pas prédites par la réponse des plantes aux traitements mono-multi-stress.

En environnement naturel, les contraintes sont souvent multiples. De nombreuses publications

étudient le stress hydrique en serre, en conditions contrôlées, mais les réponses des plantes à ce

mono-stress ne reflètent que partiellement leur réponse à un stress sécheresse en plein champs

qui sera très probablement couplé à une contrainte thermique par exemple. En effet,

l’interaction entre 2 stress ne représente pas uniquement l’addition des effets de chaque stress

séparément mais crée une synergie. Shah et Paulsen (2003) ont montré que les effets d’un stress

hydrique (diminution de la photosynthèse, la conductance stomatique, la surface foliaire, le

poids des grains et le taux de sucres solubles contenus dans les épis) se trouvent amplifiés

lorsque l’on ajoute un stress thermique à la culture. A contrario, l’efficacité de l’utilisation de

l’eau par la plante, qui est améliorée par le stress hydrique, se trouve diminuée par le stress

thermique. Selon les auteurs, la synergie qui se met en place entre les 2 stress réduit

considérablement la productivité du blé, principalement en impactant les processus

photosynthétiques. Blum (1996) a montré que la sécheresse en plein champs affecte la

croissance des structures aériennes et souterraines ainsi que l’accumulation de matières sèches,

la photosynthèse et la conductance stomatique. De plus, elle induit un évitement de la part de

la plante qui va accélérer sa floraison afin d’échapper à ce stress, ce qui a pour effet d’impacter

négativement son rendement (Kottmann et al. 2016). Par ailleurs, sa perception par la plante en

début de période reproductive conduit à une réduction de la demande en carbone en diminuant

Figure 14 : Messagers secondaires et facteurs impliqués dans la perception et la transduction

du signal dans la réponse au stress hydrique. La kinase His est supposée fonctionner comme

osmosenseur chez les plantes. Le calcium (Ca

2+

) et l’inositol 1,4,5-triphosphate (IP

3

) sont les

messagers secondaires les plus probables du signal stress hydrique. Le processus de

phosphorylation fonctionne via des voies de transduction du signal de stress hydrique et des

voies ABA. L'ABA joue un rôle important dans la régulation de l'expression des gènes et dans

les réponses physiologiques en cas de stress hydrique. (Tiré de Shinozaki et Yamaguchi

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pollen ou encore un avortement des ovules (Blum 1996). Le développement du grain est aussi

très sensible à la sécheresse en plein champ qui peut, par exemple, conduire à une réduction de

la taille du grain en affectant la phase de remplissage(Sanjari Pireivatlou et Yazdansepas 2010).

Gouache et al. (2014) ont proposé une méthode de mesure de l’impact des stress par le suivi de

l’ « indice foliaire vert intégré », révélateur d’une sénescence prématurée des surfaces vertes de

la plante. L’intérêt principal de cet indice est sa capacité à appréhender des stress multiples et

serait selon son auteur un moyen efficace de caractériser la tolérance de nouvelles variétés à

des nombreux stress.

Comment alors les signaux de stress sont-ils perçus et intégrés par la plante ? Quels sont les

mécanismes moléculaires de la mise en place d’une réponse aux stress abiotiques ?

3.2. Réponses de la plante aux stress hydrique et thermique aux niveaux moléculaire

et cellulaire

En biologie végétale, la compréhension des réponses moléculaires, physiologiques et

génétiques des plantes aux conditions de stress environnemental est un domaine de recherche

très actif, dont de nombreuses approches visent à améliorer la tolérance et l'acclimatation des

plantes cultivées. La réponse de la plante aux stress comme les températures extrêmes et le

stress hydrique ou salin implique des gènes catégorisés classiquement en 2 groupes (Shinozaki

et Yamaguchi-Shinozaki 1997). Les gènes de fonction codent pour des protéines assurant une

protection directe de la cellule végétale face au stress, et les gènes de régulation permettent la

perception et la transduction du signal stress au sein des cellules végétales par des voies de

régulation-signalisation générales et spécifiques. Sous leur contrôle, l'activation de réseaux de

régulation complexes permet de modifier l’expression de gènes de réponse afin de contrer les

effets négatifs et de rétablir l'homéostasie cellulaire (Reguera et al. 2012 ; Suzuki et al. 2012)

(Figure 13).

De manière générale, les senseurs détectent le signal stress et initient des cascades de

signalisation qui permettent la réponse de la plante. L'initiation et la régulation de ces processus

de réponse aux stress impliquent principalement des molécules de signalisation comme les

phytohormones (Pieterse et al. 2012 ; Bartoli et al. 2013), les ions calcium (Ca

2+

) (Stael et al.

2015), les espèces réactives de l'azote et de l’oxygène (Kocsy et al. 2013 ; Baxter et al. 2014)

Figure 15 : Détection du stress et signalisation ; un modèle de réponse aux stress abiotiques

dans différents organites (tiré de Zhang et al. 2018c). Le signal généré par les organites peut

provoquer l'expression des gènes et des activités cellulaires, ce qui peut restaurer l'homéostasie

cellulaire sous stress abiotique.

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du signal : les récepteurs ancrés à la membrane, les senseurs de calcium, les protéines kinases,

les protéines phosphatases et les facteurs de transcription.

La détection du signal stress a souvent lieu à la surface des membranes cellulaires, pour être

ensuite relayé vers plusieurs organites (Figure 15). Chez le blé, Leucci et al. (2008) ont montré

une modification de la proportion en composés pectiniques en réponse à un stress hydrique chez

le génotype tolérant Capeiti, qui était absente chez le génotype sensible Creso. Les auteurs ont

supposé que cette modification structurelle de la paroi agirait à la fois comme gélifiant et

comme anti-dessicant, limitant les pertes hydriques.

Parmi les mécanismes communs qui se mettent en place en réponse aux stress abiotiques, la

production des espèces réactives de l’oxygène (ROS) est particulièrement étudiée. Les ROS

jouent un double rôle dans la réponse des plantes aux stress abiotiques. En effet, ce sont à la

fois des sous-produits toxiques du métabolisme du stress mais aussi des molécules importantes

dans la transduction des signaux. Ce sont des initiateurs et intégrateurs des réseaux régulant un

large éventail de processus tels que les réponses de croissance, de développement, de défense

et d'acclimatation aux stress biotiques et abiotiques (Gapper et Dolan 2006 ; Baxter et al. 2014).

La signalisation via les ROS est étroitement liée à la réponse aux hormones végétales,

notamment l'acide salicylique, l'acide jasmonique, l'éthylène, l’ABA et l'auxine (Blomster et al.

2011 ; Pieterse et al. 2012 ; Bartoli et al. 2013). La production de ROS tels que les anion

superoxydes, le peroxyde d'hydrogène (H

2

O

2

), les radicaux hydroxyle et l’oxygène singulet

affecte le fonctionnement des chloroplastes et impacte la photosynthèse. H

2

O

2

et O

2-

sont des

exemples de ROS générés en réponse à de nombreuses conditions de stress comme le choc

thermique, les stress hydrique ou salin (Apel et Hirt 2004 ; Suzuki et Mittler 2006 ; Baxter et

al. 2014). Les stress abiotiques induisent aussi l’expression de gènes codant des enzymes du

système anti-oxydant permettant de piéger les ROS, comme l'ascorbate peroxydase ou la

catalase. Ces enzymes servent à détoxifier les cellules faisant face à une surproduction de ROS

qui, en trop grandes quantités, sont des inducteurs de mort cellulaire. En effet, même si ce sont

des médiateurs secondaires qui améliorent les voies sensibles au choc thermique (Suzuki et

Mittler 2006 ; Baxter et al. 2014), une surproduction de ROS en condition de stress devient

délétère pour la plante. Par exemple, les mutants knockout catalase2 montrent un phénotype

sensible au stress thermique chez Arabidopsis (Vanderauwera et al. 2011).

D’autres gènes intervenant dans les modifications des histones et la méthylation de l’ADN

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