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CHAPITRE IV: Les formes de la recherche en Algérie

II. Les moyens de la recherche scientifique

Les crédits accordés à l'université dans le cadre de la recherche ont connu une évolution en dents de scie avec une tendance à la baisse, en particulier après la dissolution de l'ONRS en 1983.

II.1. Le budget de fonctionnement

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des crédits de fonctionnement de 1979 à 1990.

Tableau 36: Crédits affectés à la recherche universitaire algérienne:

Année Enveloppe* Indice° Année Enveloppe* Indice°

1979 98 500 100 1985 48 000 49 1980 78 000 79 1986 73 000 74 1981 107 040 109 1987 81 000 82 1982 115 000 117 1988 81 000 82 1983 120 000 122 1989 81 000 82 1984 50 000 51 1990 107 000 109 *en 103 dinars. °base 100 en 1979

Source: document ministère aux universités, journées d'études sur la recherche universitaire, 28-29 mai 1991, Alger.

La chute brutale qui caractérise les années 1984 et 1985 s'explique par le vide organisationnel qui suit la disparition de l'ONRS. L'enveloppe retenue au cours de ces deux exercices budgétaires est allouée à quelques équipes ayant survécu à l'ex-ONRS, le CREA notamment.

Quoique timide la reprise de la croissance des crédits de fonctionnement à partir de 1986 résulte de l'installation, par le HCR, de premières équipes et unités de recherche en juin de la même année.

C'est également en 1986 que le principe de l'individualisation de la recherche au sein de l'Université est enfin admis avec l'ouverture d'une ligne "Recherche" dans la nomenclature du budget des établissements de l'enseignement supérieur. En définitive évaluée en termes réels (dinars constants) l'érosion du budget de recherche est encore plus accentuée.

II.2. Budget d'équipement

Des crédits importants, inscrits à l'ordre de l'ONRS, ont été débloqués dans le cadre du plan quadriennal 1980-1984 pour l'acquisition d'équipements scientifiques et la réalisation d'infrastructures de recherche (CREA, CISTTT,...). Finalisées entre 1985 et 1989 le coût des opérations d'investissement s'est élevé à 115,57 millions de dinars.

C'est à ce titre qu'ont été créés des laboratoires de:

- Physique, chimie, sciences de la terre, biologie à Constantine, Oran, USTHB (Alger), Tlemcen, Bel Abbes, Sétif, Tizi-Ouzou.

- Technologie à l'ENPolytechnique (Alger), Annaba. - Sciences médicales à Oran, Alger.

- Océanographie, acquisition par l'ISMAL d'un navire océanographique.

Pour la période 1990-1994, les budgets de fonctionnement et d'équipement consacrés à la recherche ont évolués comme indiqué dans le tableau suivant:

Tableau 37: Budgets de fonctionnement et d'équipement consacrés en Algérie à la recherche Année Budget de fonctionnement* Budget d'équipement*

1990 108.791 000 49.000 000 1991 156.950 000 96.800 000 1992 161.500 000 81.350 000 1993 156 000 000 114 200 000 1994 223 000 000 140 100 000 *(en dinars)

Source: Ministère délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche scientifique, Déc.1993.

Le plan d'investissement pour la recherche universitaire prévoyait, dans le cadre du plan quinquennal 1990-1994, une autorisation de programme de 400 millions de dinars. Le rôle des pouvoirs publics a été déterminant dans la mise en oeuvre des éléments nécessaires à une politique de la recherche. Le financement de la formation à l'étranger sur budget de l'Etat est un des volets essentiels de cette politique. En 1992, par exemple les crédits ont été de l'ordre de 526 825 000 de dinars répartis et consommés comme indiqué dans le tableau suivant.

Tableau 38: Financement public algérien de la formation à l'étranger en 1992

Postes Crédits alloués* Crédits consommés* Consommés / alloués

France 466 440 000 275 420 362,36 59,05 Tchécoslovaquie(ex) 1 620 000 674 258,17 41,62 Yougoslavie(ex) 940 000 254 515 27,08 Turquie 575 000 94 790,05 16,49 Belgique 6 550 000 2 169 496,17 33,12 Autriche 570 000 183 922,48 33,27 Portugal 400 000 114 194,85 29,55 Canada 47 000 000 34 337 551,60 73,06 Italie 2 290 000 146 586,80 6,43 Chine 450 000 187 653,17 41,70 Total 526 825 000 313 583 330,65 *(en dinars)

Source: "Rapport sur la coopération internationale", Ministère délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche scientifique, Direction des échanges de la coopération, Décembre 1993.

On remarquera que la France, à elle seule, doit recevoir pour la formation des étudiants et chercheurs algériens dans 17 de ses universités l'équivalent de la somme de 466 440 000 dinars.

II.3. Le potentiel de chercheurs de l'enseignement supérieur

Une enquête menée au moment de la RES avait donné les résultats suivants quant au potentiel de chercheurs disponibles:

Tableau 39: Chercheurs algériens en 1971-1972

Secteur Total Algériens

M.E.S.R.S 293 164

Autres ministères 90 51

Total 383 215

source: Ministère délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche scientifique, Décembre 1993.

Unique organisme chargé de la recherche, l'ONRS présentait au moment de sa dissolution (1983) le bilan suivant:

* Soutien de 109 projets de recherche à l'université et mise en oeuvre de 62 programmes de ses propres centres.

* 1377 enseignants se consacrant à une activité de recherche dont: 639 en sciences exactes, physique, chimie ; 453 en biologie, médecine ; 285 en sciences sociales et humaines. Entre 1984 et 1988 les statistiques officielles font apparaître une augmentation, quasiment un doublement des effectifs de chercheurs soit 2700 et une extension du nombre de projets de recherche dont le total s'élève à 418 et qui se décomposent comme suit:

Sciences exactes 103 Agronomie-biologie 43

Technologie 87 Sciences médicales 31

Sciences sociales et humaines 136 Sciences de la terre 18

Les années 1988, 1989 et 1990 ont connu des fluctuations dont une part est probablement liée aux méthodes statistiques : par rapport à l'année 1988 on enregistre en 1989 une chute du nombre de chercheurs, 1505, consécutivement, semble-t-il, à la baisse des projets de recherche qui tombent à 373. En 1990 on note une curieuse augmentation des effectifs de chercheurs, 2097,

alors que les projets passent à 380. Enfin comme indiqué dans le tableau 40 entre 1990 et 1993 le nombre de projets et les effectifs de chercheurs vont carrément doublés passant respectivement à 877 et 4160.

Tableau 40: Projets de recherche et potentiel de chercheurs en Algérie

Année Projets Enseignants/Chercheurs

1989 373 1505

1990 380 2097

1991 477 2878

1992 627 2956

1993 877 4160

Source: Ministère délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche scientifique, Décembre 1993.

S'agissant du potentiel de chercheurs les chiffres sont à prendre avec beaucoup de précaution car il y a probablement encore une surestimation du potentiel se consacrant réellement à une activité de recherche. Le potentiel d'enseignants de l'université est en effet considéré souvent a

priori comme un potentiel de recherche. Or il ne suffit pas d'avoir un grade universitaire pour

être chercheur. A fortiori dans un pays qui n'a pas encore assis un système national de recherche efficient.

L'inexistence d'un statut de la recherche jusqu'au milieu des années 1980 a constitué un obstacle au développement de la recherche universitaire et une entrave à la mobilité des chercheurs dans le sens université-secteur économique. C'est en 1986 seulement qu'un statut de la recherche est adopté instituant ainsi pour la première fois un corps de chercheurs permanents dont tirera bénéfice le CREAD alors unique centre de recherche dépendant du ministère de l'enseignement supérieur. A ce jour l'université n'a pas encore procédé à la mise en place d'un statut de chercheurs permanents, aussi assure-t-elle cette activité par l'intermédiaire de quelques unités de recherche organisée de façon souple et en équipes légères.

L'activité de recherche dans les universités et les INES est donc animée par des enseignants- chercheurs autrement dit des enseignants qui ne consacrent qu'une partie de leur temps à la recherche moyennant une indemnité. Deux raisons sont invoquées pour justifier la non application du statut de chercheur permanent aux universités et INES: le déficit en enseignants de rang magistral, la croissance fulgurante des effectifs étudiants. C'est cette situation qui, dit-on, a contraint ces institutions à s'occuper quasi-exclusivement de gestion pédagogique délaissant du même coup la gestion et le développement des activités scientifiques dont la recherche. Il y a donc contradiction entre des besoins croissants en personnel enseignants pour faire face à la croissance des effectifs étudiants et l'exigence d'une professionnalisation des chercheurs.

Le secteur productif qui ne disposait dans son ensemble ni de chercheurs, ni de structures de recherche, a subi les contre coups de cette situation. A ce propos B.Benzaghou (ex-recteur de l'Université des Sciences et de la Technologie Houari Boumediéne, USTHB) et A. Mahiou (ex- doyen faculté de droit d'Alger) écrivaient en 1980: "La recherche scientifique algérienne était écartelée entre deux demandes antagonistes: les besoins de l'université en enseignants, avec ce que cela implique comme recherche fondamentale, théorique, ou recherche-formation et l'impatience du secteur économique, confronté à des problèmes immédiats, avec ce que cela

implique comme recherche développement (étude, ingénierie, amélioration des procédés de fabrication...). Cet antagonisme était exacerbé par l'absence de structures de recherche au sein des entreprises publiques, qui recouvraient l'essentiel du secteur industriel... L'Université se trouve au coeur de tous ces problèmes, soumise à des sollicitations antagonistes. Le secteur public ne dispose que de structures de recherches embryonnaires, qui sont le plus souvent des laboratoires d'analyse et de contrôle... Il doit donc débaucher des universitaires, ou s'adresser à l'université pour résoudre ses problèmes à caractère répétitif. L'université est alors culpabilisée ("recherche académique" avec connotation péjorative, "tour d'ivoire") et ces accusations se rencontrent même dans certains discours politiques."1

Un autre frein au développement de la recherche universitaire résulte du caractère administratif et bureaucratique de sa de gestion soumise à un contrôle à priori. Par ailleurs subordonnés au mode de gestion des établissements à caractère administratif, les contrats de recherche liant l'Université aux secteurs socio-économiques demeurent dérisoires.