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Mouvement de tubes de flux magn´etique

2.5 Les sauts de fr´equence comme sondes de la structure interne des pulsars

2.5.3 Mouvement de tubes de flux magn´etique

Le mod`ele de l’avalanche catastrophique des tourbillons fournit une interpr´etation d´etaill´ee des sauts de fr´equence et notamment des ph´enom`enes de relaxation, mais reste tr`es sp´eculatif. Ce mod`ele s’appuie en particulier sur l’analogie entre les tubes de flux magn´etique dans un supraconducteur ordinaire et les lignes de tourbillons dans l’´ecorce d’une ´etoile `a neutrons. Cependant il existe des diff´erences importantes. En particulier, la taille des tubes dans un supraconducteur ordinaire, qui sont ancr´es sur des d´efauts du solide, est tr`es grande devant la distance entre les atomes, ce qui n’est pas le cas des tourbillons dans une ´etoile `a neutrons. Le calcul des forces d’ancrage des tourbillons est donc n´ecessairement entˆach´e de nombreuses incertitudes. Des ´etudes de Jones (1998) et Donati & Pizzochero (2003, 2004) sugg`erent mˆeme que les tourbillons ne sont pas ancr´es du tout dans l’´ecorce.

De plus, le mod`ele de l’avalanche des tourbillons implique une corr´elation entre l’am- plitude des sauts de fr´equences et le temps ´ecoul´e entre deux sauts successifs. En effet,

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on pourrait s’attendre `a ce que la dur´ee s´eparant deux sauts successifs soit beaucoup plus grande lorsque les contraintes accumul´ees dans la croˆute sont enti`erement relˆach´ees dans des sauts de large amplitude au lieu d’ˆetre lib´er´ees en partie dans des sauts de faible amplitude. Or l’´etude statistique r´ecente de Wang et al. (2000) montre que de telles cor- r´elations ne sont pas observ´ees, ce qui semble indiquer que le d´eclenchement des sauts de fr´equence est un ph´enom`ene local. Cette conclusion conforte le mod`ele propos´e par Ru- derman et al. (1998), selon lequel les sauts proviennent de tremblements de croˆute induits par des distorsions du champ magn´etique.

Dans le sc´enario standard (voir chapitre 1), le coeur d’une ´etoile `a neutrons est form´e d’un m´elange homog`ene de neutrons, protons et ´electrons. Les protons s’apparient en paires de Cooper et forment un supraconducteur. En supposant que celui-ci est de type II, le flux magn´etique `a l’int´erieur de l’´etoile est quantifi´e en un ensemble de tubes dont la densit´e surfacique est donn´ee par la formule (`a comparer avec l’´equation (2.18))

nΦ = B Φ0 , (2.20) o`u Φ0 ≡ h 2e, (2.21)

est le quantum de flux. La forme de ces tubes est d´etermin´ee par la configuration du champ magn´etique. Par ailleurs, les neutrons sont dans une phase superfluide comme dans l’´ecorce, mais d’une nature diff´erente. La rotation du pulsar engendre un ensemble de lignes de tourbillons parall`eles `a l’axe de rotation. Ces lignes de tourbillons sont enchevˆetr´ees dans d’innombrables tubes de flux (pour un pulsar comme V´ela ou le Crabe, le nombre de tubes de flux est environ 1013 fois plus grand que le nombre de tourbillons !).

Suite au ralentissement du pulsar, les lignes de tourbillons s’´eloignent de l’axe de rota- tion entraˆınant des tubes de flux dans leur mouvement et coupant mˆeme parfois certains tubes. La redistribution des tubes de flux se traduit par une modification du champ ma- gn´etique. Comme le champ magn´etique `a l’int´erieur de la croˆute est essentiellement gel´e du fait des tr`es hautes conductivit´es ´electriques, le mouvement des tubes de flux donne naissance `a des contraintes dans l’´ecorce. Ces contraintes sont finalement relˆach´ees par des tremblements de croˆute dont les sauts de fr´equence en sont la signature. Le surfreinage qui survient `a la suite de certains sauts s’explique dans ce mod`ele par une tectonique des plaques d’origine magn´etique. Les tremblements de croˆute s’accompagnent de mou- vements de plaques en surface (au sein desquelles le champ magn´etique est pi´eg´e) qui modifient ainsi la configuration du champ magn´etique. Le surfreinage s’interpr`ete alors par une augmentation du champ magn´etique ou de l’angle α du dipˆole (voir Link et al. (1998) et Franco et al. (2000)), ce qui d’apr`es les ´equations (2.8) et (2.9), accentue le rayonnement et donc le ralentissement du pulsar.

Le mod`ele de Ruderman et al. (1998) pr´edit que les pulsars de longue p´eriode ont une faible activit´e, ind´ependamment de leur ˆage, parce que les contraintes g´en´er´ees par les tubes de flux ne sont plus suffisantes pour d´eclencher de larges sauts de fr´equence. Or de tels sauts de l’ordre de ∆Ω/Ω ∼ 10−7 − 10−6 ont ´et´e r´ecemment d´ecouverts (voir

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Kaspi et al. (2000), Kaspi & Gavriil (2003) et Dall’Osso et al. (2003)) dans le pulsar X anormal1 1RXS J1708-4009 dont la p´eriode est de P ' 11 s. Des indices observationels

d’un saut de fr´equence dans un autre pulsar X anormal ont ´et´e r´ecemment rapport´es par Morii et al. (2004). Par ailleurs, selon Link (2003) (voir ´egalement les r´ef´erences cit´ees) l’existence de pr´ecession de longue p´eriode comme les observations du pulsar PSR B1828- 11 le sugg`erent, semble exclure la pr´esence de supraconducteur de type II dans le coeur d’une ´etoile `a neutrons. L’observation de sauts de fr´equence dans ce type de pulsars ne pourrait donc pas s’expliquer par le mod`ele de Ruderman et al. (1998). Par ailleurs les travaux de Jones & Andersson (2001) indiquent que l’ancrage des tourbillons superfluides dans l’´ecorce est beaucoup trop faible pour donner lieu `a des sauts de fr´equences dans des pulsars en pr´ecession.

De nouvelles piste sont donc `a explorer. Carter et al. (2000) ont montr´e que la simple existence d’une rotation diff´erentielle entre l’´ecorce et un superfluide donnait naissance `a des contraintes du mˆeme ordre de grandeur que celles induites par l’ancrage des tourbillons superfluides. En outre, ce m´ecanisme ne requiert aucune hypoth`ese sur la pr´esence ou non de tourbillons superfluides et de tubes de champ magn´etiques et pourrait donc ˆetre beaucoup plus g´en´erique que les mod`eles discut´es jusqu’`a pr´esent. Leur estimation repose n´eanmoins sur un mod`ele simplifi´e dans lequel la croˆute est d´ecrite par un fluide parfait ind´ependant du superfluide. Une autre voie a ´et´e ouverte r´ecemment par Andersson et al. (2004) qui ont sugg´er´e qu’une instabilit´e de type Kelvin-Helmholtz dans un m´elange de superfluides de neutrons et de protons coupl´es par des effets d’entraˆınement pourrait ˆetre `a l’origine des sauts de fr´equence.

1Ces pulsars sont qualifi´es d’anormaux parce que contrairement aux pulsars radios, l’´energie des pulses

ne provient pas de l’´energie de rotation mais probablement d’un champ magn´etique tr`es intense de l’ordre de 1010

Premi`ere partie

Etude macroscopique d’une ´etoile `a

neutrons

Chapitre 3

Formulation covariante de

l’espace-temps newtonien

Sommaire

3.1 Introduction . . . 39