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Montages réglementaire et juridique de l’opération : une complexité liée au territoire de La Défense

A son annonce, le projet Phare est communiqué tel un projet emblématique et à l’image du grand plan de relance du territoire OIN de La Défense. Différents règlements et orientations d’urbanismes s’appliquent alors au secteur de la Porte Nord.

Des contraintes dans le Plan Renouveau :

Le projet Phare émerge à la fois comme ambition et comme outil des trois échelles temporelles d’actions du Plan Renouveau. Dans le Plan d’urgence, ou le « temps économique » d’une part, il s’agit de répondre à la mise en considération des demandes du secteur privé (…) qui n’ont pas attendu les décisions gouvernementales (…) dans un cadre de compétition internationale féroce » (Lescop, 2010b, p. 4). Le Plan d’urgence définit des schémas opérationnels d’aménagement sur trois secteurs prioritaires de La Défense dont le site de la tour Phare : la Porte Nord. Outre des objectifs de modernisation des transports en commun, et de développement tertiaire1, le plan d’urgence

ambitionne l’« amélioration de la qualité de vie par la rénovation des accès et des circulations » et la création et la requalification des espaces publics (Lescop, 2010b, p. 5). Enfin, il prévoit la construction d’une tour dite « phare » au niveau du secteur Porte Nord (Lescop, 2010b, p. 4).

Le projet entre, d’autre part, dans les objectifs des autres échelles du Plan Directeur exprimés à l’horizon 2020. Dans ce plan la tour Phare est un des trois projets immobiliers stratégiques permettant de réaffirmer et de « magnifier les entrées du quartier d’affaires en lien avec le réaménagement du boulevard circulaire» (EPAD, 2006, p. 11). En tant que projet immobilier stratégique, la tour a pour objectif de développer et d’embellir le site, de « donner plus d’importance à leur fonctions de portes du quartier des affaires » (p.11) et « d’améliorer leur fonctionnement qualitatif, c’est-à-dire leur contexte urbain » (EPAD, 2006, p. 11).

A l’échelle du Plan d’Action exprimé sur le court terme, la tour Phare constitue également un des projets stratégiques à édifier sur les portes du quartier (volet n°4). Il s’agit ici d’autoriser la construction de « nouveaux immeubles destinés en priorité à faciliter l’évolution immobilière de « grands comptes » et de leur environnement d’affaires sur le site » (EPAD, 2006, p. 17). La tour Phare devrait être ainsi, et grâce à un concours d’architecture un « emblème du renouveau de La Défense, qui sera caractérisée par son audace architecturale et son caractère innovant, et pas nécessairement par sa hauteur » (EPAD, 2006, p. 17).

Le périmètre OIN de La Défense : un supplément à la réglementation locale

Le statut d’Opération d’Intérêt National (OIN) décrété par l’Etat implique, sur le territoire concerné, des superpositions de réglementations portant sur différentes échelles2. Il a « pour effet de soumettre

les autorisations de construire au Maire au nom de l’Etat ou au représentant de l’Etat dans le

1 450 000m² d’immeubles tertiaires entre 2007 et 2013, dont 150 000m² de démolition-reconstruction.

2 Il s’agit d’un périmètre, défini à l’article R 490-5 du code de l’urbanisme à la suite du décret du Conseil d’Etat du

département, après avis du Maire ou du président de l’établissement public compétent, en l’occurrence l’EPAD » (Lescop, 2010b, p. 5). C’est ainsi l’Etat qui prend les orientations d’aménagement dans le périmètre définit via les services d’un aménageur et le pouvoir de délivrer ou non les permis de construire de la zone considérée. Des prescriptions supplémentaires s’appliquent alors à tout projet sur ce secteur.

L’emplacement du projet Phare est, en particulier, situé dans un secteur1 dit « Monumental » (Lescop,

2010b, p. 5) où les projets d’aménagement et d’architecture doivent « renforcer l’identité du secteur » (p. 5), intégrer les flux de personnes (usagers des transports, des commerces et des touristes) déjà présents sur le territoire et travailler la qualité de leur accès sur la dalle et dans les rues des communes voisines. Celui-ci prévoit certaines orientations urbaines comme la requalification du boulevard circulaire en boulevard urbain avec la constitution d’un front urbain. Il prévoit aussi la construction d’une tour et la requalification de la place Carpeaux devant « faire l’objet d’un traitement urbain valorisant » (Lescop, 2010b, p. 5). Les futures constructions doivent prendre en compte la question des accès en transport en commun et devront densifier le secteur. A cet endroit, et concernant la construction qui pendra place sur la porte Nord, ces recommandations urbaines sont en particulier décrites de manière très opérationnelle (EPAD, 2006)2.

La révision simplifiée du POS de Puteaux

Le fait que l’opération Phare se situe dans un périmètre OIN n’empêche pas l’application des règles locales d’urbanisme. En l’occurrence, le projet se situe sur la commune de Puteaux régi par un POS3.

Ce POS a dû être révisé par le Conseil Municipal (le 6 octobre 2007) car il ne permettait pas la construction d’un immeuble de 300 mètres de haut : sa nouvelle version permet de construire sur le nouveau périmètre délimité sur la zone UPM1 à un maximum de 349 NGF. Parmi les règlements appliqués à cette zone dans le POS approuvé, sont autorisées des occupations du sol , des règles d’implantation des construction par rapports aux voies publiques et privées, ainsi que par rapport aux limites séparatives, une emprise au sol précises ainsi qu’une hauteur limite de construction, les stationnements sont aussi règlementés. En revanche, concernant les espaces libres et les plantations : aucune règle ou prescription n’est appliquée : l’article 13 concerné est dit « sans objet » (Unibail- Rodamco, 2009).

L’Etat descriptif de division en volumes : une spécificité de La Défense

La Défense a la particularité d’être constituée en grande partie sur une dalle, une superposition de couches fonctionnelles dédiées aux transports, aux réseaux, aux parkings, aux espaces publics, etc. Cette superposition verticale de strates engendre des complications juridiques dès lors que certaines d’entre elles sont publiques et d’autres sont privées et qu’elles se superposent à un foncier au sol préexistant.

Le foncier sur lequel l’opération Phare sera construite appartenait initialement en partie à l’Epad et à Réseau Ferré de France. C’est l’Epad qui a racheté les terrains propriété de RFF (Réseaux Ferrés de France) pour vendre le total des charges foncières exploitable à Unibail-Rodamco. Le 9 avril 2009, RFF accorde, à la société CNIT Développement, une autorisation de dépôt de permis de construire portant

1 Le secteur B8 des Orientations Générales d’Urbanismes.

2 Il s’agit là encore ; d’améliorer la liaison entre les Faubourgs de l’Arche et les quartiers de La Défense (12 et 6) ;

de concevoir un front bâti le long du boulevard circulaire ; de créer une continuité de l’espace public en lien avec la tour ; réaménager l’espace public et traitement d’une place urbaine mettant en scène le CNIT, la tour et l’accès aux transports ; optimiser l’accès taxis, VIP, secours ; rendre possible l’accès piétons depuis la place Carpeaux la dalle Carpeaux et l’allée de l’Arche ; créer une porte au-dessus de la dalle Carpeaux d’au moins 30 mètres de hauteur ; et enfin de créer un rapport harmonieux entre les différentes architectures en développant un objet fédérateur.

sur les volumes et terrains leur appartenant et pour la réalisation du programme de bureaux Phare (Lescop, 2010b, annexe 5). Le projet Phare est développé sur des parcelles cadastrales de la commune Puteaux, mais il ne repose pas directement sur ces parcelles, mais sur « des lots de volumes existants ou à créer se rattachant à ces parcelles » (Lescop, 2010b, p. 12). Ce volume est décrit par l’Etat Descriptif de Division en Volumes (EDDV) et constitue la base de la négociation financière entre l’aménageur et l’investisseur-promoteur : il définit (parmi d’autres critères) les droits à construire. Cet EDDV entraine la définition de servitudes d’accès, d’entretien, d’appuis, de réseaux etc.

Le protocole et la promesse de vente : des documents contractuels évolutifs:

Les relations entre le MOA et l’aménageur sont basées sur de nombreuses négociations et des documents contractuels ratifiant les accords et ententes prises au fil des étapes du projet. Le protocole d’accord et la promesse de vente sont de ces documents clés arrêtant les négociations sur les éléments numéraires liés au foncier : prix du volume à construire, conditions de réalisation et de rétractations, retards, indemnités et caractéristiques du bâtiment : mètres carrés, occupation de l’espace public, façades, programmation, fonctionnement sur l’espace public, etc.

Le projet Phare a eu la particularité de générer deux protocoles d’accord entre Unibail-Rodamco et l’Epadesa : le premier en 2008, le second en décembre 2010. La crise financière étant survenue peu après la signature du premier protocole, Unibail a demandé à revoir à la baisse le coût de la charge foncière qui, si elle ne diminuait pas, ne permettrait pas au promoteur de construire un bâtiment rentable et donc viable pour ses activités. Après de longues et féroces négociations, le promoteur a pu obtenir une baisse substantielle de la charge foncière et signer un nouveau protocole en 2010 avec l’aménageur pour qui l’objectif était aussi clairement que la tour voit le jour.

La promesse de vente, mois évolutive, est usuellement signée sur la base du projet en phase de faisabilité et lance la phase d’Avant-projet sommaire (APS). Ici, la crise, les conditions particulières et la négociation ont très largement retardé le processus contractuel puisque le second protocole d’accord et la signature de la promesse de vente ont eu lieu après que le permis de construire ait été accordé par le Maire de Puteaux pour le compte de l’Etat le 6 août 2010.

Il est intéressant de noter que l’acteur foncier Unibail-Rodamco tient une place primordiale dans l’immobilier de La Défense : propriétaire de nombreux bâtiments, tours et centres commerciaux, insérés dans les réseaux locaux, celui-ci dispose d’un fort pouvoir de négociation face à l’Epadesa.

La stratégie urbaine de La Défense : une prise en compte des volontés urbaines dans les

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