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Changement d’échelle : proposition d’une grille de lecture caractérisant l’urbanité d’une tour

Caractériser la contribution d’une tour à l’urbanité de la ville

3. Changement d’échelle : proposition d’une grille de lecture caractérisant l’urbanité d’une tour

Afin de décrire ce qui fait qu’un objet complexe tel que la tour multifonctionnelle ou la ville verticale peut contribuer à la ville et à son urbanité, nous devons décrire les caractéristiques, composants et enjeux d’une tour dite « urbaine », ou d’une tour pouvant potentiellement générer l’urbanité. Pour cela, nous utilisons la grille précédemment proposée à l’échelle du bâtiment, et déclinons les quatre composants fondamentaux de l’urbanité à travers les trois approches de la qualité urbaine.

Nous justifions la possibilité de parler de « l’urbanité d’un bâtiment » par le fait que les travaux scientifiques sur l’urbanité vus précédemment permettent de décrire le caractère urbain de tout lieu à toutes les échelles possibles : y compris donc à celle du bâtiment1. Cette vision est par ailleurs

clairement véhiculée dans les discours des professionnels, politiques et opérationnels de la ville lorsqu’ils justifient les tours multifonctionnelles ou les « villes verticales » comme outil d’intensification en définissant la tour comme « ville sur la ville » ou « quartier de ville remontée à la verticale ».

Illustrant cette possibilité, nous pouvons citer l’étude de Bertolini (2006) qui s’attache à décrire l’urbanité des pôles d’échange intermodaux comme lieux clés du développement de nouveaux espaces publics de la ville du XXIème siècle. Un peu comme annoncé dans l’ouvrage Ville en gare d’I. Joseph (Devisme, 2000) et dans une analyse de l’urbanité de la Gare du Nord par les « compétences de rassemblement » (Joseph, 1996), cette étude considère que ces espaces ne sont pas des « non-lieux », mais au contraire, des lieux où sociabilité, conflits ou encore hétérotopie peuvent apparaître : il s’agit là d’une position identique à la nôtre qui consiste à prendre en compte ces espaces semi-publics de la ville contemporaine malgré leur éventuel statut juridique privé. En se basant sur les travaux de Lofland (1998) et le couple [intensité – diversité] comme vecteur de développement d’espaces les plus publics possibles et potentiels créateur d’urbanité, il propose la liste suivante de recommandations pour le cas des pôles d’échanges intermodaux :

- Mixité des usages (activités et flux),

- Nombreuses opportunités d’interaction entre la vie intérieure et extérieure au bâtiment, - Haute visibilité et présence humaine à toutes les heures,

- Suffisamment de points d’accès lisibles et de points d’échange entre les différents types d’activités,

- Une structure interne favorisant le mélange des flux dans le temps et dans l’espace, - Liens avec l’environnement élargi.

Une fois admise l’hypothèse selon laquelle une tour est susceptible d’abriter un morceau de ville ou un quartier à la verticale, et que cette « ville sur la ville » peut se caractériser par son degré d’urbanité

intrinsèque, nous devons nous poser la question de l’intégration de cet objet urbain dans son

environnement existant.

Ces tours dans leur recherche d’urbanité et d’intensification d’un quartier (voire d’une ville), ne peuvent négliger l’environnement dans lequel elles s’insèrent. La ville intense est justement la ville des courtes distances où sont primordiales les liaisons entre les fonctions et les usages, l’accessibilité, la continuité dans le temps et dans l’espace, la proximité, la diversité et la mixité des fonctions

1 A ce sujet, le dernier numéro de la revue Urbanisme questionne l’urbanité des grands stades

urbaines, ainsi que la qualité des lieux et des espaces publics (Da Cunha & Kaiser, 2009). Ces tours peuvent alors être considérées comme solution pour reconstruire la ville sur la ville si elles permettent l’intensité en regroupant des fonctions urbaines sur une surface restreinte tout en assurant une continuité dans l’espace et dans le temps. Qu’elles soient conçues dans une idée d’acuponcture urbaine, de génération d’une nouvelle attractivité ou d’un emblème pour le quartier, l’objectif est donc bien de chercher la continuité à la fois spatiale, fonctionnelle et psychologique avec celui-ci. Pour caractériser l’urbanité d’une tour, il faut alors nécessairement questionner la tour dans son quartier

environnant.

Deux échelles, deux composants complémentaires de l’urbanité d’une tour émergent alors ; 1. la ville à l’intérieur de la tour : où la tour est caractérisée par son urbanité intrinsèque, 2. et la tour intégrée dans la ville : où la tour est caractérisée par son urbanité dans le quartier.

Afin d’expliciter les caractéristiques, composants et enjeux d’une tour dite « urbaine », nous proposons de décomposer l’objet tour en la somme de ces deux échelles (Figure 15).

Ces deux échelles s’additionnent alors pour établir les composants de l’urbanité d’une tour : nous utilisons la grille de lecture de l’urbanité d’un lieu proposée plus haut (Tableau 4) et la déclinons à ces deux échelles de notre bâtiment (Tableau 5 et Tableau 6) :

Tableau 5 : Les éléments caractérisant l’urbanité de la ville dans la tour

La ville à l’intérieur de la tour Les 3 approches complémentair es de la qualité urbaine (Montgomery , 1998)

Concentration Hétérogénéité Centralité Publicité

Les éléments fondamentaux de description de l’urbanité (Stock & Lucas, 2012)

Forme mutualisation Compacité / Continuité Hiérarchie des espaces

Ouverture au public

Activité Intensité Diversité Hiérarchie/

granulométrie Coprésence

Image humaine/ vitalité Echelle Connectivité Lisibilité Convivialité

Tableau 6 : Les éléments caractérisant l’urbanité de la tour dans la ville

La tour intégrée dans la ville Les 3 approches complémentair es de la qualité urbaine (Montgomery , 1998)

Concentration Hétérogénéité Centralité Publicité

Les éléments fondamentaux de description de l’urbanité (Stock & Lucas, 2012)

Forme Accessibilité physique Intégration Point de repère Perméabilité/ continuité

Activité complémentarité Attractivité / Mixité/ diversité Polarité Ouverture / coprésence

Image Vitalité/accessibi

lité visuelle Lisibilité

Symbole

territorial Publicité

La grille d’analyse ainsi obtenue (composée des grilles relatives aux deux échelles complémentaires) permet de donner les éléments de caractérisation de la contribution d’une tour à l’urbanité de la ville. Elle peut s’appliquer à toute tour dès lors qu’elle est considérée dans son contexte urbain : la grille permet alors une réflexion exhaustive des éléments à détailler et à analyser afin de discuter de l’apport de l’objet à la ville.

Synthèse du chapitre 5 – Caractériser la contribution d’une tour à

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