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III. Les Lymphomes Anaplasiques à Grandes Cellules (LAGC) :

III.9 La signalisation de NPM-ALK :

III.9.4. Modulation de l’immunophénotype des LAGC par NPM-ALK :

Il est maintenant bien établi que les LAGC sont des pathologies clonales qui dérivent de lymphocytes T transformés comme le montrent les analyses génomiques de leurs loci TCR. Le TCRβ est réarrangée mais pas exprimé de même que de nombreuses protéines caractéristiques de la lignée T et indispensables à la signalisation du TCR telles que CD3 et ZAP-70390. Néanmoins, les mécanismes menant à la perte d’expression de ces protéines ne sont toujours pas connus. Les travaux de Kasprzycka, M et al.391 montrent que l’expression de NPM-ALK confèrent aux cellules tumorales un phénotype de lymphocytes T régulateurs caractérisé par la sécrétion d’IL10 et l’expression du facteur de transcription caractéristique

78 des lymphocytes T régulateurs : FOXP3. La sécrétion d’IL10 inhibe la prolifération des cellules immunitaires normales et augmente la viabilité des cellules tumorales. FOXP3 est un facteur de transcription de la famille forkhead qui est une protéine clé du développement et de la fonction des cellules T régulatrices CD4+/CD25+. Les auteurs montrent également que l’activation de STAT3 est nécessaire à l’acquisition de ce phénotype T régulateur. Cependant, les travaux de Roncador G et al.392 n’ont pas montré d’expression de FOXP3 dans les cas de LAGCs.

Figure 12 : NPM-ALK et la voie de signalisation du CD30 (Source : Chiarle, R, Nat Rev Cancer, 2008291).

Les LAGCs présentent un caractère immunophénotypique caractéristique par l’expression du marqueur de surface CD30 qui appartient à la famille TNFR (tumor necrosis factor receptor) (figure 12). Une association entre NPM-ALK et CD30 a été mise en évidence par Hübinger G et al.393. Néanmoins, cette association n’a pas d’incidence sur l’activité de NPM-ALK. Les travaux de Hsu, FY et al.394 ont mis en évidence une relation entre l’expression de NPM-ALK et celle du CD30. L’utilisation d’un siRNA dirigé contre NPM- ALK a entrainé une diminution de l’expression du CD30 à la surface des cellules. Il a également été montré que la régulation transcriptionnelle du CD30 par NPM-ALK faisait intervenir JunB. Watanabe, M et al.395 ont confirmé ces résultats et ont montré que les MAPK

79 Erk1 et Erk2 activées par la voie de signalisation du CD30, permettent l’expression et l’activation de JunB qui va se fixer sur le promoteur du CD30 permettant ainsi son expression. Plus récemment, les mêmes auteurs ont montré que les ilots CpG du promoteur du CD30 ne sont pas méthylés. L’activation constitutive de JunB et l’absence de méthylation du promoteur du CD30 sont deux phénomènes expliquant la surexpression de ce marqueur de surface dans les cellules de LAGC396. Néanmoins, la contribution du CD30 dans la pathogenèse des LAGC est encore peu connue. La fixation de son ligand naturel CD30L ou l’utilisation d’un anticorps dirigé contre le CD30 entraine des effets divers et opposés tels que la prolifération, l’arrêt du cycle cellulaire, la différentiation et l’apoptose. Le CD30 est connu pour activer la voie impliquant le facteur de transcription NFκB. Wright, CW et al.397

ont étudié la signalisation du CD30 dans les LAGCs en utilisant son ligand naturel. Ils ont ainsi montré que la stimulation du CD30 provoque l’activation de la voie canonique et alternative impliquant NFκB. L’activation de NFkB se fait par le recrutement au niveau de CD30 des protéines TRAFs (tumor necrosis factor receptor-asocciated factors). Les effets dépendent de l’intensité et de la durée de l’engagement du CD30. Ils ont montré qu’une fraction des cellules en présence du ligand de CD30 entre rapidement en apoptose alors que les cellules qui survivent montrent une forte activation des deux voies impliquant NFκB. Après une exposition prolongée des cellules avec le ligand du CD30, elles sont bloquées dans le cycle cellulaire par l’induction de l’expression de l’inhibiteur des cdk p21waf1. Alors que l’expression de p21waf1 est généralement régulée par la voie alternative de NFκB, les auteurs ont ici montré que ce blocage dans le cycle est dépendant de la voie canonique. En effet, l’utilisation d’un siRNA dirigé contre RelA (une sous unité de NFκB impliquée dans la voie canonique) permet de diminuer l’expression de p21waf1 alors qu’un siRNA dirigé contre la sous unité p100/p52 (impliquée dans la voie alternative) n’a que peu d’effet sur l’expression de p21waf1. Cette activation de la voie NFκB est, malgré la surexpression du CD30, absente des cellules de LAGC exprimant NPM-ALK, comme l’ont montré les travaux de Horie, R et al.388. En effet, la présence de NPM-ALK annule l’activation de NFκB par le CD30 en empêchant le recrutement et l’agrégation des protéines TRAF2 au niveau du CD30. Les protéines TRAF2 vont se lier au niveau d’un site consensus situé dans le domaine kinase de NPM-ALK mais également à la partie N-terminale de la protéine NPM sauvage qui est phosphorylée par NPM-ALK. De plus, l’engagement du CD30 dans les LAGC induit une dégradation rapide de TRAF2397. Enfin, les travaux de Ohno, H et al.398 ont montré que la protéine BCL3, qui appartient aux protéines IκB (protéines inhibitrices de NFκB), est

80 surexprimée dans les LAGC. Ces différents évènements réduisent l’activation de la voie NFκB dans les LAGC. Néanmoins, la plupart de ces travaux tendant à montrer le rôle du CD30 dans les LAGC ont été réalisés in vitro, et à ce jour ces fonctions n’ont pas encore été mises en évidence in vivo.