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MODES DE COORDINATION PRINCIPAUX: LES ORDRES DE GRANDEUR

une situation de gestion se présente lorsque des participants sont réunis et doivent

VIII. CONVENTIONS DE COORDINATION ET ORGANISATIONS Laurent THEVENOT

3. MODES DE COORDINATION PRINCIPAUX: LES ORDRES DE GRANDEUR

Chacun des modes principaux de coordination que nous avons identifiés repose sur une qualification des objets qui est congruente avec celle des personnes. Ils permettent de lier une approche du travail et des relations professionnelles à une approche des organisations industrielles prenant en considération méthodes, techniques et produits. On évoquera ici successivement les ordres de la concurrence (grandeur "marchande"), de l'éfficacité ("industrielle"), de la confiance ("domestique") et du collectif("civique").

L'ORDRE DE LA CONCURRENCE: GRANDEUR "MARCHANDE"

La référence aux contraintes du marché et de la concurrence est aujourd'hui si répandue dans la littérature qu'il n'est pas nécessaire de revenir longuement sur cet ordre marchand. Même si l'on s'écarte des auteurs qui voient dans la transformation actuelle des organisations productives l'éclatante confirmation des bienfaits d'un monde marchand, et qui, forts de cette confirmation, cherchentà redonner souffle à l'utopie d'un

univers réduit à cette seule nature, l'accord est unanime pour reconnaître le développement de cette modalité d'action, prouvé aussi bien par les indices macro- économiques de l'extension du commerce international (Boyer 1987, p. Il), que par les investigations sur le fonctionnement des entreprises.

Une large part des observations rassemblées trouve sens lorsqu'on les envisage comme le résultat de la relance d'une épreuve de réalité marchande qui vient remettre en cause le compromis fordien. Ces phénomènes font donc nettement ressortir les exigences de cette épreuve. Une première caractéristique majeure de la grandeur marchande apparaît clairement: elle n'a pas de signification temporelle et ne permet, ni de faire référenceà une antériorité comme la grandeur domestique, ni d'investir l'avenir, comme la grandeur industrielle. Les désirs des acheteurs et les opportunités àsaisir pour les vendeurs sont dépourvus de toute stabilité et la relance de l'épreuve marchande va à l'encontre d'une planification industrielle en exigeant de répondre au plus près et au plus vite aux désirs fluctuants et divers des clients (Eymard-Duvernay 1987, p. v).

L'orientation vers une épreuve marchande suppose le renouvellement fréquent des produits, la diversification des gammes et le raccourcissement des séries (Boyer 1987, p.12). Les lots en grandes quantités "bulk" sont remplacés par des marchandises "merchandise" (Zeitlin Totterdhill 1989, p. 166), les conventions de commande et contratsàlong terme sont remis en cause (Eyrnard-Duvernay 1987, p.9 ; Storper 1988, p.16). Dans les industries de la chaussure ou de l'habillement, le nombre des collections ou des saisons est multiplié, et une partie seulement de la gamme est déterminée en début de saison précédente (Courau1t et Rérat 1987, p.110 ; Zeitlin et Totterdill 1989, p.165). L'exemple du fabricant italien proposant à un client un produit ajusté à son souhait le soir-même du jour où il l'a rencontré dans une foire-expositon (Weisz 1987, p.70) se généralise dans des dispositifs comme celui du Sentier où un modèle qui reçoit un accueil favorable peut être réalisé dans les jours qui suivent, dans les ateliers du quartier, souvent en grande quantité (Weisz 1987, p.72). Peu de modèles sont stockés, les contacts avec la clientèle doivent être fréquents pour suivre l'évolution de ses désirs imprévisibles, et les délais de livraison doivent être raccourcis.

Dans ce type d'organisation le marché du travail est plus proche d'un marché, et la mobilité du travail plus forte. Le poids du passé et des traditions, comme la présence d'organisations de nature industrielle, constituent des handicaps dans cette épreuve marchande, et ces dispositifs productifs particulièrement "marchands" s'inscrivent souvent dans un espace vierge sous ces rapports (Storper et Scott 1988 b, p.35). L'espace familial congruent avec ces dispositifs est lui-même marqué par des "modes de vies très privés ("higly privatized forms of domestic life") et l'importance de l'accèsàla propriété individuelle(id., Nelson 1986).

C'est sans doute le dispositif américain de relations industrielles qui est, par comparaison avec celui d'autres pays industrialisés européens et scandinaves, le plus engagé dans la nature marchande, du fait notamment de l'importance de la négociation au niveau local de l'établissement.

Le terme de "niveau" apparaît d'ailleurs inadéquat. Cette différence renvoie plutôtàune différence de forme de coordination, de même que la distinction, en théorie économique, entre "niveau macro" et "niveau micro" ne s'interprète pas correctement en terme d'agrégation. Soulignons enfin que l'appréciation des salariés conforme à l'épreuve de réalité marchande s'écarte aussi bien d'une appréciation domestique dans laquelle l'expérience et l'ancienneté importeraient, que d'une évaluation industrielle qui s'appuierait sur des qualifications professionnelles. Même si elles ne concernent qu'une part du salaire et ne contribuent qu'à en moduler la hausse, ce sont les procédures d'individualisation qui sont cohérentes avec cette épreuve et qui se traduisent notamment par la réduction du poids des diplômes.

L'ORDRE DE L'EFFICACITE: GRANDEUR "INDUSTRIELLE"

Il a été abondamment question de la forme de coordination industrielle dans les paragraphes précédents, de la grandeur d'efficacité qui lui est associée, de l'équivalence sur le futur qu'assurent les objets relevant de cette nature, et de la standardisation qu'ils accomplissent.

Plutôt que de revenir ici sur chacun de ces points, nous nous arrêterons sur le déroulement de l'épreuve de réalité industrielle, de façon à éclaircir une certaine confusion apportée aujourd'hui par la critique courante du taylorisme.

Comme dans chacun des mondes où l'action peut trouver sa justification, l'épreuve de réalité de nature industrielle contribue à réactualiser l'ordre de ce qui importe, et notamment à refaire le partage entre ce qui est objectif dans cette nature et le bruit des contingences. Faute d'une relance de l'épreuve, l'ordre des grandeurs manque de justification.

Le partage entre le bruit et ce qui importe comme objet, c'est-à-dire, dans la nature industrielle, ce qui est doté d'efficace, contribue à étendre progressivement cette nature, par la découverte et le contrôle de ces objets. L'identification d'une cause de dysfonctionnement est typiquement le résultat d'une telle épreuve qui se solde par l'extension de la nature, comme l'illustre le cas G. avec l'élargissement du dispositif industriel au sol et à l'air. La standardisation et la régularisation des matières premières est nécessaire pour qu'un tel dispositif tienne, et, en restant dans cette même nature industrielle, on peut citer l'exemple de la normalisation, du moyennage par mélange, de l'ultrafiltration, de la réfrigération, de la pasteurisation (Boissard et Letablier 1989). L'épreuve industrielle conduisant à cette "hygiène" des produits, au sens propre mais aussi dans une acception élargie, est particulièrement claire lorsque sont mis en place des équipements automatiques qui viennent prolonger la partie purement industrielle du dispositif de production. L'arrivée de machines à commande numérique hautement performantes relance ainsi l'épreuve industrielle dans l'atelier en appelant les ouvriersàse mesurer avec elles (Jeantet et Tiger 1988, p.43), puisque, comme nous l'avons souligné, c'est par un engagement effectif des personnes et des objets que se déterminent les grandeurs. Les attentes non confirmées, dûment "documentées" (Dodier 1988 ; Freyssenet et Thénard 1988), sont imputées à des contingences, ou entraînent la réévaluation à la baisse de la grandeur d'un objet ou d'une personne moins performants que prévu. Visant à la généralité par la définition même de la grandeur, l'issue de l'épreuve ne saurait être un arrangement entre les personnes concernées.

On comprend mieux le succès des méthodes des Cercles de Qualité si on considère qu'une large partie d'entre elles favorisent la relance d'une épreuve de réalité industrielle. Le rôle des méthodes statistiques ou de la recherche systématique de causes est caractéristique de cette épreuve (Cole 1979, chap. V , Dodier 1988, p.3) qui soulève d'ailleurs la question du grandissement des acteurs engagés, acteurs souvent peu qualifiés dans les grilles salariales (Midler, Moire, Sardas, 1984, p.205).

La méthode de Taylor visait indubitablement à étendre le dispositif industriel dans l'entreprise (Thévenot 1986 a, pp.24-25, 31-36) et àouvrir la possibilité d'épreuves de nature industrielle, aux dépens notamment d'épreuves de nature marchande, permettant ainsi d'affirmer la prédominance des fonctions de production aux dépens des fonctions commerciales et financières (Fridenson 1987, p.I 039). Les méthodes mentionnées précédemment contribuent donc, à bien des égards, à prolonger ce mouvement, quoiqu'en dise leur marketing. Comme le montrent des études de terrain, c'est plutôt le défaut d'efficacité et de méthode qui caractérise nombre de petites ou moyennes entreprises que l'excès inverse (Juravitch 1985).

Soulignons enfin que les épreuves de cette nature ne sont nullement limitées à l'industrie, ni même d'ailleurs au cadre de l'entreprise. Wissler a ainsi analysé très précisément le déroulement de ce type d'épreuve dans une banque, lorsqu'une entreprise est évaluée à partir d'une batterie de ratios en vue de décider d'un octroi de crédit (Wissler 1989 a).

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L'ORDRE DE LA CONFIANCE : GRANDEUR "DOMESTIQUE"

La coordination gouvernée par la confiance repose sur un ordre de grandeur que nous avons appelé domestique, mais qui ne se limite nullement - comme une certaine acception du terme pourrait le laisser entendre - aux relations familiales puisqu'il vise, au contraire, la possibilité d'une coordination générale des conduites, au même titre que les autres formes de grandeur. Cette grandeur comprendàla fois un ordre temporel (par la fidélité à

la coutume et au précédent), un ordre spatial de familiarité (du proche à l'étranger) et un ordre hiérarchique d'autorité, tous les trois étroitement imbriqués. La confiance qui exprime la généralité domestique suppose une relation d'''engendrement'' àpartir d'une origine antérieure consolidée, une relation de "voisinage" assurant la similarité, et une relation d"'estime" garantissant l'autorité. L'objectivité des choses qui importent, que ce soit une souche bactérienne, un patrimoine, une maison, un terroir, tient à ces qualités (Thévenot 1989 a). La justification par l"'enracinement" fait bien ressortir l'intrication des deux premiers aspects, et les bénéfices d'un "savoir-faire" ou d'un "esprit-maison" ne peuvent être rapportés séparément à l'un ou l'autre de ces trois aspects indissociables. Ce que l'économie de la grandeur domestique fait clairement apparaître, c'est justement la relation entre ces trois aspects, entre une proximité qui spécifie, un précédent qui perdure, et une autorité qui couvre.

La caractérisation précise de cette forme de coordination, la reconnaissance de la généralité qu'elle constitue et de l'épreuve de réalité à laquelle se soumettent les actions qui visent cette généralité, permettent de réélaborer un vaste ensemble d'observations sur la place de relations "sociales" dans des actions économiques. Le traitement systématique de ces relations est souvent gêné par une référence à des liens familiaux qui veut être entendue dans une extension métaphorique floue.

La justification de l'action selon cette grandeur est particulièrement claire dans l'organisation productive artisanale, avec ses corps façonnés par l'habitude et ses corps de métier, ses hiérarchies de l'ancienneté et ses réseaux de confiance (Zarca 1987, 1988). Mais elle est également couramment impliquée dans des entreprises de plus grande taille, aussi bien au niveau de l'atelier, dès lors que l'autorité des anciens importe et que l'aide aux proches est prisée, qu'au niveau de l'entreprise lorsqu'est valorisé l'esprit maison, ou encore dans les relations fidélisées entre entreprises, avec des clients sélectionnés pour concevoir du sur-mesure sur des créneaux particuliers, avec des fournisseurs pour garantir la qualité, avec des sous-traitants ou des institutions locales techniques ou municipales s'engageant dans une relation d'aide. Ces liens de familiarité prennent sens au niveau d'une communauté régionale: "elles sont souvent regroupées avec d'autres petites entreprises aux activités complémentaires, en association, ou de manière informelle, pour pouvoir bénéficier de fonctions communes plus étoffées; elles peuvent ainsi se spécialiser dans des fabrications plus complexes, et confier les travaux hors de leur compétence aux autres membres de l'association" (Gorgeu et Mathieu 1987, p.34). La fidélité

à

une vocation s'ancre localement, par la spécialisation d'un savoir-faire traditionnel que cette forme de lien domestique entretient en retour en "facilitant l'acquisition de savoir- faire localement adaptés" et l'apprentissage des "indices (eues)

pertinents sur l'environnement" (Storper et Scott 1988 a, p.30), l'établissement de liens locaux durables avec les fournisseurs de matière première dont la qualité est ainsi garantie (Boisard et Letablier 1987 a), avec les fabricants et distributeurs d'équipement (Weisz 1987, p.70). On comprend bien également comment une forme de travail à domicile peut s'ajuster à un dispositif de cette nature (Courauit et Rérat 1987, p.97).

Dans la société américaine, la référence à la "communauté" rend compte d'un tel ajustement de liens personnels et de voisinage (Bellah et alii 1985). Notons que le dispositif de représentation syndicale comporte, aux Etats-Unis, davantage d'éléments de nature domestique, étant donnée l'importance de la représentation locale des salariés, ce qui introduit le risque d'une épreuve dénaturée par la corruption (Bok et Dunlop 1970, p.64).

Plus généralement, Favereau a clairement montré que les règles du marché interne, identifiées par Doeringer et

Piore

(1985), étaient des "substituts au fonctionnement des marchés" (convention 2, dans sa typologie: Favereau 1986, p.25l), des "règles limitatives" qui jouent pour ce marché interne le rôle que les règles constitutives jouent pour le marché externe (Favereau 1989). Les trois sources de ces règles créatrices des marchés internes, la spécificité des qualifications, l'apprentissage sur le poste et la coutume, font clairement voir leur ancrage dans un ordre plus général de nature domestique.

L'orientation domestique de règles mettant en avant l'ancienneté apparaît bien lorsqu'elles rencontrent, dans une situation critique, d'autres règles d'orientation civique (Bessy 1988) ; le travail d"'accommodation" qu'opèrent les inspecteurs du travail (Dodier 1989) a souvent rapport avec cette tension entre une orientation domestique et une orientation civique de la justification. Durant la récession des années 70, de nombreux recrutements (dans le cadre d'une "affirmative action") justi fiés par ce dernier principe ont été remis en cause par les règles d'ancienneté (Ezorsky 1987).

L'ORDRE DU COLLECTIF: GRANDEUR "CIVIQUE"

Comme le montrait la tension critique qui vient d'être mentionnée, l'identification précise de différentes formes de coordination et modalités d'épreuve de l'action conduit à distinguer, à l'intérieur d'un registre d'action communément désigné comme "social", une forme de généralité reposant sur la confiance, d'une forme de généralité reposant sur la solidarité collective. Cest d'ailleurs souvent à cette orientation de l'action que l'on réserve le terme de collectif alors que, comme nous avons cherché à le montrer, chaque forme de généralité et de grandeur est une forme de détour par le collectif. La distinction entre monde civique est donc nécessaire pour analyser les contraintes sociales qui pèsent sur l'action, ce terme pouvant recouvrir aussi bien une orientation et des ressources visant la confiance, qu'une solidarité par rapport à un intérêt général qui exige, à l'inverse, le détachement des liens domestiques.

Dans la grandeur civique, ce qui importe fait l'unité dans un même intérêt général et s'oppose au particulier attaché à des intérêts particuliers. Les formes légales, les droits, les réglements, les mesures, sont les objets de cette nature civique qui contraignent l'action en même temps qu'ils constituent une équivalence générale. La réunion collective, le mouvement, la manifestation, le vote, sont les façons naturelles dont la représentation d'une volonté générale est mise à l'épreuve.

La confusion entre un monde d'action et les agissements d'un acteur collectif, en l'occurrence l'Etat, est souvent dommageable à l'analyse de cette modalité d'action. Une telle confusion empêche notamment de rapprocher des mesures publiques et des actions menées dans une firme selon une justification de même nature (HoIlingsworth 1985). Plutôt que d'en appeler à l'intervention d'un acteur collectif désigné comme l'Etat, dont les "agissements" sont au demeurant fort divers, sans doute est-il préférable, pour la précision de l'analyse, d'examiner les changements de nature des dispositifs que cette "intervention de l'Etat" désigne.

Dunlop, effectuant le bilan de l'évolution des relations industrielles depuis le début du siècle dans cinq pays développés (Allemagne, Grande Bretagne, Etats-Unis, France, Japon) conclut, dans le sens du travail princeps des Webb (1914), "au rôle croissant de l'administration dans la prescription des conditions d'emploi", faisant valoir que des dispositifs réglementaires remplacent de plus en plus souvent des négociations collectives, et citant l'exemple de la France avec la possibilité, si étrangère à la coordination marchande, d'étendre la portée d'une convention collective à un secteur tout entier (Dunlop 1978, p.8). En l'absence d'un Code du Travail américain, l'intervention de chacun des Etats fédérés contribue à le dispositif dans un sens civique. Certains syndicats, note da Costa, considèrent que ces législations réduisent l'importance des négociations collectives et ne les soutiennent pas. D'autres trouvent justifié (en vertu d'un principe civique) un dispositif qui améliore la protection sociale des salariés en faisant une équivalence solidaire entre ceux qui travaillent dans une entreprise pourvue

d'un syndicat et les autres (da Costa 1986 b, p.160). Apparaît alors clairement cette grandeur qui transcende les intérêts particuliers et qui s'exprime notamment dans les mouvements de défense des Droits Civils (Bellah et alii 1985).

D'autres modifications mentionnés par Dunlop (1978) peuvent être interprétées comme l'adjonction d'éléments civiques aux dispositif, source de tensions critiques avec des éléments d'une nature différente. Ainsi, des principes publics de formation entrent en conflit avec les modalités d'apprentissage traditionnel (principalement de nature

domestique), des civiques, en faveur .des sont

dans un rapport cnuque avec les habitudes ou regles favonsant 1 (et impliquant également une justification d'ordre domestique), ou encore des limitations de hausses de salaires font obstacle à une négociation

marchande du prix du travail.

4.

LE RAPPORT CRITIQUE ENTRE ORDRES DE GRANDEUR

L'ORGANISATION COMME DISPOSITIF DE COMPROMIS

Dans l'évocation qui vient d'être faite de quelques-uns des mondes où l'action se prêteà la coordination on a pu reconnaître de nombreux éléments classiquement repérés dans le fonctionnement d'organisations productives. N'est-il pas superflu d'ajouter une typologie de plus à celles, déjà nombreuses, qui cherchent à appréhender une diversité de "logiques d'action", de "stratégies d' entreprisess", de "cultures d'entreprises", ou de "profils d'entreprises" ?

A la question de la cohérence de chacun de ces types, que ne manque pas de soulever leur différenciation, la réponse est souvent vague ou absente. C'est ce point que nous avons cherché à approfondir dans les "Economies de la grandeur", en nous efforçant d'expliciter les conditions que satisfait chacune des modalités

nous avons identifiées et de montrer qu'on pouvait rapporter ces conditions a un modele commun. Ce faisant, il est apparu que la coordination supposait une forme de généralité ayant les caractéristiques d'un bien commun fondant une équivalence entre les personnes. Ainsi, les modalités d'action justifiables dépassent le cadre de l'entreprise, pour trouver leur cohérence dans une spécification du lien politique et de la détermination du juste. De

la question de la représentation ainsi celle de la

représentation politique, de l'équivalence a1equite, de 1ajustement a lajustice.

Dès lors que l'on met au jour la visée de généralité, d'universalité, de chacune des formes de coordination, on comprend qu'elles soient Plus

avons cherché à montrer que l'ordre de grandeur constitue entre ce qUI Importe, ce qUI vaut en général, et ce qui est insignifiant, portait en lui une réduction des autres formes de généralité possibles, des autres biens communs disponibles (EG, §§ Le rapport entre les différentes modalités d'action justifiables et entre les ressources qUI sont mises en oeuvre est un rapport critique dont il devient possible d'analyser systématiquement les expressions variables suivant les mondes qui entrent en tension (EG, §§421-426).

Le jeu entre plusieurs formes de coordination et le passage d'un mondeàl'autre incitentà rechercher le dépassement de ces tensions critiques. On observe donc fréquemment opération que nous avons nommée avec une acception. du qUI ne recouvre pas son utilisation courante (EG, §§ 515). Ces compromis s éloignent de transactions donnant lieu à des arrangements particuliers, en ce qu'ils visent encore une forme de justification générale et qu'ils participent à

progressive d'une nouvelle grandeur (cf. paragraphe suivant). Faute de

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assise dune telle grandeur, qui se caractérise par la possibilité d'une épreuve de réalité et donc la disponibilité d'un monde d'objets probants, le compromis entre deux grandeurs peut etre brisé par chacune des deux épreuves de réalité qui leur correspondent. Comme

mises en cause critiques, le cadre proposé permet de rendre compte, de . mamere