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Centre de Recherche en Gestion

Rapporteurs : Albert

DAVID,

CGS

Philippe D'IRlBARNE, CEREBE Séance du 18avril 1991

L'étude de l'impact d'une mutation technique particulière: la robotique en tôlerie, nous a permis de mettre en évidence le rôle des unités de production et de leurs acteurs pour construire de nouveaux modèles de fonctionnemenr-? . Or aujourd'hui la compétitivité des constructeurs automobiles est très liée à leur capacité àfaire face rapidement àdes évolutions technologiques et concurrentielles.

Le concept de l'apprentissage organisationnel permet de formaliser deux caractéristiques, qui nous ont paru essentielles dans les dynamiques analysées:

- La logique de construction d'un changement ne comprend pas une longue phase de réflexion suivie d'une implémentation. La réflexion est au contraire assez rapide et très axée sur l'action. C'est la mise en oeuvre, la phase centrale du changement, le stade où l'on peut observer et analyser l'incidence de l'impulsion initiale.

- Il n'y a pas une dissociation claire entre conception d'un modèle organisationnel idéal et mise en oeuvre progressive et planifiée, ces deux phases sont imbriquées suivant le schéma: conception sommaire - mise en oeuvre 1 - amélioration - mise en oeuvre 2. L'objet de cet article est de préciser sur un cas concret la notion d'apprentissage organisationnel et de la mobiliser pour comparer plusieurs dynamiques. Nous chercherons alors à proposer une typologie d'apprentissage.

Nous aborderons d'abord une dynamique particulière: l'apprentissage de la fiabilité dans la tôlerie de Poissy. Nous pourrons affiner notre conception de l'apprentissage. Nous identifierons alors différents critères permettant de caractériser un processus d'apprentissage. Enfin, nous différencierons trois types d'apprentissage à partir de l'analyse de la prise en charge de la fiabilité par les tôleries automobiles françaises.

1. LA TaLERIE DE POISSY

Nous voudrions donc présenter maintenant une dynamique particulière qui nous a amenée à approfondir cette notion d'apprentissage organisationnel, et àpartir de laquelle nous illustrerons notre définition.

L'unité de tôlerie assemble par soudure les différentes pièces de la carrosserie d'une voiture afin d'obtenir en sortie de ligne une "caisse en blanc" prête à être peinte. Depuis le début des années 80 ces unités de production sont passées d'installations manuelles ou faiblement automatisées à des ateliers comprenant une centaine de robots et de très nombreux automatismes (cf schéma en annexe). Nous nous sommes en particulier intéressée à la prise en charge d'un nouvel objectif, qui apparaît avec les évolutions techniques soulignées: la fiabilité. En 88, le taux de disponibilité des tôleries est compris entre 70 et 75%alors que les hypothèses prises comme référence pour dimensionner les installations prévoyaient des taux compris entre 80 et 85 %. Nous nous interrogerons sur les nouveaux rôles définis, les structures dans lesquelles ils s'intègrent, les compétences nécessaires, l'instrumentation mise en place et les résultats obtenus. Avant de détailler ces évolutions nous repositionnerons le contexte organisationnel dans lequel elles se sont développées.

Nous présenterons cette dynamique en nous attachantàun site dont nous connaissons les évolutions de manière très détaillée puisque nous y avons séjourné environ deux ans et avons participéàla mise en oeuvre d'une politique fiabilité.

Nous présenterons d'abord l'organisation mise en place au démarrage de la nouvelle tôlerie robotisée. Nous insisterons sur les changements organisationnels mis en oeuvre pour l'arrivée de la robotique et tenterons de préciser les modes de fonctionnement pour comprendre leurs évolutions. On notera l'ampleur des évolutions induites par une

27 CHARUE F.& MIDLER 1990, "Un processus d'apprentissageà la française: la robotisation des tôleries automobile" Communication au colloque Organization of Work and Technology : Implications for International Competitiveness, Bruxelles.

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mutation technologique comme la robotique. On remarquera que les premieres innovations se comprennent par rapport aux "cibles"28 (organisation idéale vers laquelle tendre) élaborées par les constructeurs et en l'occurrence ici I.S.O.A.R.29 •Nous verrons enfin que les évolutions qui suivent traduisent plus l'adaptation des fonctionnements existants et la construction de nouvelles pratiques pour atteindre une meilleure efficacité que l'application d'une "cible" préexistante.

1.1. LA STRUCTURE ET LES ROLES

Pour chaque équipe, la structure de fabrication affectera une cellule de production à chacun des secteurs-v et un chef d'atelier pour la coordination de ceux-ci sur l'ensemble de la tôlerie.

La nouvelle fonction qui apparaît est celle de conducteur d'installations. Ce sont d'anciens professionnels d'entretien qui se trouvent intégrés à l'équipe d'exploitation. Leur mission est de surveiller et de dépanner au plus vite les installations. Avec ce rôle se crée une maîtrise de l'équipe d'exploitation investie d'un rôle nouveau: l'AM 1. Pour ce dernier, il s'agit à la fois d'encadrer des opérateurs non qualifiés et des dépanneurs dans l'objectif d'assurer la production demandée sur son secteur de responsabilité. Dans l'ensemble de la tôlerie cette vigilance sur le flux de production est assurée par les chefs d'atelier. Cette évolution de la structure et de la mission du service de fabrication qui accompagne la robotique, induit une répartition des activités d'entretien des installations entre deux services: l'entretien et la fabrication. Cette scission entre deux types d'intervention sur les installations: une maintenance de 1er niveau et de 2ème niveau, est nouvelle et va engendrer différentes évolutions.

28 MIDLER 1988,"De l'automatisation à la modernisation: les transformations dans l'industrie automobile", Gérer et comprendre, na 13, dec 88.

29 L S.O.A.R. : Impact social et organisationnel de l'automatisation et de la robotique. Cette réflexion est menée en coopération entre le centre de production Peugeot de Mulhouse, les organisations syndicales et les pouvoirs publics, cf Coffineau A. et Sarraz .LP., 1985, "ISOAR Peugeot Mulhouse", rapport de recherche

30Latôlerie est divisée en cinq secteurs ayant une homogénéité rapport au produit, (cf graphique en annexe).