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DE MEHUN-SUR-YEVRE LA COLLEGIALE

3. La modernisation du chevet

Bien que les dispositions originelles n’en soient pas connues, le chevet primitif de l’église Notre-Dame s’avéra probablement inadapté aux besoins des chanoines de Mehun et il fut décidé de l’agrandir et de le moderniser (pl. 42). Malgré l’illisibilité d’une quelconque liaison, le nouveau chevet, affectant un plan en fer à cheval et en déviation de l’axe du mur sud de la nef, ne semble pas issu de la même campagne que le vaisseau unique et on ne saurait suivre François Deshoulières en proposant la contemporanéité des deux parties de la construction 682. On en conclura donc que le chevet à déambulatoire et chapelles rayonnantes a été greffé sur une structure préexistante.

Les contraintes du terrain

Au moins deux structures préexistantes ont conditionné le développement du nouveau chevet : la nef, dont la largeur du vaisseau unique a entraîné le plan en fer à cheval de l’abside mais également la tour de défense qui fut intégrée en tant que chapelle rayonnante. Dans les deux cas, on remarque d’importantes conséquences sur le plan de l’édifice, par ailleurs implanté en rupture de pente.

L’extrémité occidentale de l’abside est délimitée par deux piliers cruciformes d’implantation irrégulière. Les pilastres occidentaux sont beaucoup plus développés que sur les autres faces, peut-être en raison de l’adaptation à une nef unique n’assurant aucun contrebutement ou pour soutenir un clocher sur lequel on ne possède pour le moment aucun

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renseignement 683. Quant aux autres dosserets, ils sont plus ou moins déformés afin de s’adapter au développement de l’hémicycle. Le rétrécissement du plan du chevet a d’ailleurs créé une différence de largeur entre les arcades latérales ouvrant vers le déambulatoire et les piles cruciformes qui ont probablement été montées à partir du chevet primitif de l’église. Malheureusement, l’illisibilité de la face occidentale de ces piles et du pignon qui se trouve au-dessus ne permet pas d’obtenir de conclusion assurée sur cette hypothèse 684 (pl. 37, fig. 210).

La contrainte la plus évidente dans l’implantation reste néanmoins la reprise d’une tour de défense dans le nouveau chevet selon un schéma rarement usité : la chapelle nord adopte ainsi un plan singulier avec une absidiole secondaire orientée légèrement plus réduite que les deux autres chapelles rayonnantes, uniquement comparable du point de vue formel à la cathédrale de Norwich 685 (fig. 244). On remarque également la dilatation du déambulatoire du côté nord qui ne laisse guère de doute sur l’antériorité de la tour dont l’intégration a dû provoquer une refonte du système défensif (pl. 42). En outre, la réutilisation d’un espace bâti assurait un soutien puissant au nouveau chevet à l’endroit où le contrebutement faisait défaut. Le fait n’est sans doute pas anodin car on remarque que les absidioles sont toutes dépourvues de contreforts, signe parfois considéré comme une marque d’ancienneté 686 dont les exemples, même pour les plus anciens des chevets à déambulatoire, s’avèrent assez rares : Sainte-Croix de Bray-sur-Seine, la crypte de Notre-Dame de Rouen (pl. 58) ou Saint-Savin-sur-Gartempe (pl. 61), où les absidioles sont décorées d’arcatures plaquées en partie basse (fig. 245, 246, 247) 687.

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On peut en effet émettre l’hypothèse d’un clocher primitif situé au-dessus du chœur liturgique. Mais s’agissait-il d’un simple clocher-peigne aménagé sur le pignon ou au contraire d’une structure imposante reposant sur deux autres piles occidentales ?

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La dernière ferme de la charpente, les restaurations comme les difficultés d’éclairage et d’accès sont autant de freins à l’approche de cette partie de l’édifice.

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FERNIE 1993 : 125. 686

PLAT 1939 : 81. L’absence d’épaulement demeure néanmoins un argument assez fragile : à Saint-Ayoul de Provins, les chapelles rayonnantes ont été reconstruites sans contrefort extérieur au cours du troisième quart du XIIe siècle (information fournie par Claude de Mecquenem).

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Pour des œuvres un peu plus tardives, on citera : Saint-Urcize, Notre-Dame de Beaune, Notre-Dame-du-Pré au Mans, Saint-Michel de Gaillac, Sainte-Croix de Loudun.

La présence d’une crypte

Hormis la présence de structures antérieures, la pente du terrain, encore perceptible par la déclivité de la place du Maréchal Leclerc et de la rue Pasteur, a nécessité des aménagements pour l’installation du nouveau chevet. Trois ouvertures condamnées et uniquement visibles de l’extérieur indiquent, à l’instar de la rue qui bordait la façade primitive à l’ouest (pl. 42) et de l’empattement des fondations des chapelles rayonnantes et du flanc nord de la nef, que l’église a été construite sur un éperon (fig. 229).

On rappellera ici que selon plusieurs auteurs du XIXe siècle, une vaste crypte s’étendait sous l’ensemble du chevet. Par sa présence, le chœur était nettement surélevé et son niveau fut abaissé d’1 m lorsqu’elle fut détruite en 1828. Il reste finalement difficile de se faire une idée précise sur les dispositions de cette crypte et surtout sur les éventuels vestiges qui pourraient en subsister. L’abaissement du niveau de l’abside s’applique-t-il à la totalité de la surface du sanctuaire ou simplement au déambulatoire ? Les aménagements actuels ne permettent pas de trancher et, à l’extérieur, les ouvertures quadrangulaires situées à la base des absidioles d’axe et nord ainsi que la probable baie plein cintre du côté nord du déambulatoire ne fournissent qu’une indication très relative sur cette question. Autant qu’on puisse en juger, toutes ces baies présentent un aspect qu’on rattacherait plus volontiers à la fin du Moyen Age 688. De plus, les enduits modernes masquent complètement les maçonneries, empêchant de savoir s’il s’agit là d’ouvertures directement percées dans le mur ou reprenant des baies plus anciennes (fig. 248, 249). Toutefois, on remarquera qu’en restituant 1 m au niveau actuel du déambulatoire, l’altitude est sensiblement égale à celles de l’abside et des fondations des chapelles rayonnantes. Plus haut, le niveau du sol ne s’accorderait d’ailleurs plus avec l’appui des fenêtres des absidioles.

Dans l’affirmative, les baies devaient donc s’ouvrir dans le rein des

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Les petits claveaux ou les linteaux monolithes échancrés, plutôt caractéristiques du XIe ou du XIIe siècle, sont indécelables. Seule la baie supposée du côté nord du déambulatoire pourrait correspondre à ce second type mais son état ne permet pas de conclure de façon catégorique. Les profils chanfreinés se rencontrent fréquemment au XVe siècle. Peut-être correspondent-ils à

voûtes de la crypte qui s’étendait au moins sous la partie nord-est du chevet, rachetant ainsi la déclivité du terrain. Peut-être était-elle plus vaste : la surélévation actuelle de la partie orientale du sanctuaire est-elle alors liée à l’ancienne salle centrale ? On doit également s’interroger sur le type, l’emplacement et le nombre d’accès : fallait-il emprunter le déambulatoire pour descendre dans la crypte par des escaliers latéraux, comme à Selles-sur-Cher ou à Notre-Dame-de-la-Couture au Mans (fig. 250, 251), ou par des volées distribuant différents paliers, comme à Sant Pere de Rodes (fig. 252) ? L’entrée vers des couloirs se trouvait-elle plus à l’ouest, comme à Saint-Aignan d’Orléans (pl. 57, fig. 9) ? La salle centrale ouvrait-elle vers l’ouest comme à Saint-Savin ou à Saint-Hilaire de Poitiers (fig. 253, 254) ? La topographie du site conduirait à croire qu’on accédait à la crypte du côté nord car la déclivité pouvait plus facilement y être rachetée par une rampe ou un escalier. Toutefois, les systèmes d'accès restent généralement symétriques dans les cryptes. Seule une analyse plus approfondie du soubassement du sanctuaire ou des sondages permettront donc d’apporter quelques éléments de réponse.

Élévations et couvrements : un chevet bâti en deux étapes

L’adaptation à des structures antérieures et l’aménagement d’une crypte sur un accident du terrain n’occultent pas la lecture d’un projet clairement défini et homogène en plan 689. Néanmoins, l’analyse des élévations conduit à distinguer deux étapes dans la construction des parties orientales (pl. 36, 37, 38).

A l’instar du plan, la partie basse du chevet semble assez homogène bien que les rythmes du pourtour et du rond-point soient totalement indépendants 690 : les piles quadrangulaires de l’abside sont en effet implantées sans rapport direct avec les pilastres encadrant les chapelles rayonnantes, comme c’est souvent le cas avant la fin du XIe siècle. Alors que des piliers

une reprise des ouvertures de la crypte afin d’accueillir la sépulture de Charles VII, mort à Mehun-sur-Yèvre en juillet 1461. Voir supra, p. 157 n. 582.

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L’absence d’articulation entre le déambulatoire et le côté nord de la chapelle d’axe et l’ondulation que forme le mur en cet endroit est une disposition singulière qui reste sans explication.

cruciformes sont employés à l’entrée du chœur, le choix de piles quadrangulaires pour séparer l’abside du déambulatoire n’est guère fréquent (fig. 212) : hormis l’exemple singulier de Saint-Vincent de Chantelle où un unique pilier est implanté dans l’axe de l’absidiole axiale alors que tout le reste de l'hémicycle est constitué de colonnes (fig. 255), on peut simplement faire un rapprochement avec Saint-Etienne de Vignory où, là encore, les supports de l’abside sont alternés entre colonnes et piles (pl. 60, fig. 152). On peut prudemment esquisser une comparaison avec les supports de Sainte-Croix d’Orléans, où on rencontrait des piles quadrangulaires flanquées d’une demi-colonne sur le déambulatoire mais les fouilles du chanoine Chenesseau n’en ont révélé que de maigres vestiges 691 (pl. 57, fig. 256). Le manque d’articulation impliqué par un tel choix 692 rappelle Sant Pere de Rodes où, cette fois, l’éclairage direct et la structure voûtée prévue dès l’origine ont conditionné le dessin d’arcades beaucoup plus trapues 693 (pl. 61, fig. 257).

On a souvent insisté sur le fait que les chapelles rayonnantes de Mehun se développent telles des tourelles autour d’une fortification, comme à Saint-Savin ou àSaint-Pierre d’Uzerche 694 (pl. 61, fig. 247, 258). Leur forme semi-circulaire très prononcée ainsi que leur décalage systématique vers le sud s’explique sans doute par la reprise d’une tour de défense et afin de préserver de bonnes conditions d’éclairage 695. Chaque chapelle comporte en effet une seule baie – exception faite de la chapelle double – et, par leur profondeur et leur faible espacement, apporte un éclairage modeste seulement renforcé par les quatre fenêtres qu’on peut restituer dans le déambulatoire.

La minceur des supports et le surhaussement des arcades de l’abside

690

On rappellera également le décalage qui existe en plan entre l’abside et le pourtour. 691

Voir infra, p. 283-290. 692

On rappellera ici que le dépouillement apparent de l’édifice est une des conséquences de l’incendie de 1910 : le rétrécissement des piles de l’abside dans leur partie supérieure correspond à l’emplacement d’impostes. Il en va de même pour les irrégularités du mur de l’abside puisqu’une corniche séparait les deux niveaux de l’élévation.

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LORÉS I OTZET 2001. 694

BUHOT DE KERSERS 1891 : 290. DESHOULIERES 1931 : 336. CROZET 1932 : 82-84. CAMUS

1999 : 51. 695

Le cas devait être comparable à Saint-Pierre de Dangeau ou Saint-Savin, et peut-être même à Thérouanne. L’irrégularité d’épaisseur des murs et celle des chapelles se rencontrent également sur le flanc sud du chevet de Saint-Gildas-de-Rhuys. C’est peut-être également la recherche d’un éclairage plus abondant qui a conduit à la destruction des chapelles rayonnantes à Saint-Martial de Toulx-Sainte-Croix : MARTIN 2006b.

trouvent alors une justification. Comme pour les parties basses de Saint-Savin (pl. 61), on remarque que l’éclairage fourni par une baie unique dans des absidioles profondes et rapprochées est relativement faible, à l’exception de la chapelle axiale qui est plus développée et possède trois fenêtres. C’est pourquoi on a fait le choix de vastes ouvertures dans les travées du déambulatoire et de colonnes très hautes dans le rond-point. La solution ne dut pourtant pas satisfaire pleinement car dès les années 1060, alors que le chantier était encore en cours, on décida de monter un niveau d’éclairage direct pour l’abside 696 (fig. 155). Un problème du même type s’est posé à Saint-Pierre d’Uzerche où la réponse a été différente (fig. 259) : pour améliorer l’éclairage du chevet dont l’enveloppe avait été construite vers le milieu du XIe siècle, on a choisi peu avant 1100, lors de l’installation d’un rond-point très élancé ne comportant qu’un seul niveau d’élévation, de reprendre les baies du déambulatoire en leur associant un oculus, comme à Saint-Sernin de Toulouse 697.

Comme à Uzerche mais surtout à Saint-Savin (pl. 61), un certain nombre d’indices plaident à Mehun en faveur d’une construction hétérogène. Les fenêtres hautes sont juchées presque directement sur les arcades de l’abside (pl. 38, fig. 210, 212) ; les techniques de construction sont très différentes entre la partie inférieure et supérieure du chevet (pl. 40), comme on pouvait déjà le constater sur les photographies anciennes (fig. 166, 175) ; le déambulatoire est couvert en terrasse (pl. 37, fig. 260). L’accès à la couverture du déambulatoire a permis de confirmer la différence entre l’enveloppe du chevet et l’abside : celle-ci a bénéficié d’un traitement beaucoup plus soigné, pour l’appareillage et pour les articulations, comme les pilastres, les rouleaux des baies ou les cordons d’impostes et les archivoltes. L’unité apparente qui se dégage des corniches soutenues par des modillons à copeaux des niveaux inférieur et supérieur ne doit pas induire en erreur : il semble qu’elles ont été rajoutées en partie basse, comme le laissent penser la différence d’appareillage (fig. 175) et l’irrégularité des modillons à hauteur des cintres des baies du déambulatoire (fig. 217, 222). 696 CAMUS 1992 : 31-32. CAMUS 1999 : 46-55. 697 PROUST 2004 : 330-331.

On est donc en mesure de considérer deux étapes de construction pour le chevet. La première phase a vu la mise en place des arcades de l’abside et de l’enveloppe avec l’intégration d’une tour de défense (pl. 35, 36, 38). Le déambulatoire et les chapelles rayonnantes furent probablement voûtés dès l’origine 698 : non seulement les largeurs restreintes – 2,50 à 3 m – pouvaient facilement être couvertes en pierre même dès le début du XIe siècle 699, mais encore les voûtes du déambulatoire se fondent-elles à la tête des arcades du rond-point 700. Cependant, on ne saurait préciser si l’abside, encore dépourvue d’éclairage direct, a été voûtée 701 ou si elle a simplement reçu une couverture, même provisoire. Son renflement au-dessus des arcades du rond-point pourrait plaider en faveur de la première hypothèse : la corniche, bûchée après l’incendie de 1910, pouvait correspondre à l’arrêt du chantier et au départ du cul-de-four primitif. Mais une nouvelle fois, l’empâtement des maçonneries ne permet pas d’être catégorique.

En acceptant cette hypothèse, l’arc triomphal devait être nettement plus bas mais l’impossibilité d’observer minutieusement les piles qui le soutiennent ne permet pas de certifier son homogénéité sur toute la hauteur de la construction (pl. 38). Comme à la croisée du transept de Saint-Pierre de Meusnes (fig. 261), les piles cruciformes sont dotées de pilastres occidentaux s’amortissant en partie supérieure, créant ainsi une sorte d’écran séparant strictement le sanctuaire de la nef 702. Le pignon devait avoir un profil différent, d’autant plus qu’il était également en relation avec l’ancienne nef. Le chevet devait donc présenter une silhouette beaucoup plus trapue dont les masses devaient être étagées en deux niveaux distincts. Comment les toitures

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L’hypothèse d’un déambulatoire charpenté a déjà été avancée : DESHOULIERES 1931 : 333. Méd. Patrimoine : 0081/018/0164.

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VERGNOLLE 1994 : 72-73. SAPIN 1999a : 103-105. 700

On peut comparer cette disposition avec les chœurs poitevins et auvergnats : Saint-Savin, Notre-Dame-la-Grande et Saint-Hilaire de Poitiers ; Notre-Dame de Châtel-Montagne, Sainte-Croix de Veauce, Julien de Brioude, Notre-Dame-du-Port de Clermont-Ferrand, Martin de Cournon-d’Auvergne, Notre-Dame de Maringues, Notre-Dame d’Orcival, Saint-Médulphe de Saint-Myon et Saint-Nectaire.

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Pour les absides voûtées dépourvues d’éclairage direct : Eutrope de Saintes ; Étienne de Dun-sur-Auron ; Pierre d’Uzerche ; La Trinité de Brélévenez ; Saint-Barthélémy de Bénévent-l’Abbaye, Sainte-Valérie de Chambon-sur-Voueize et Saint-Martial de Toulx-Sainte-Croix ; Saint-Tudy de Loctudy ; Notre-Dame de Guîtres et Saint-Pierre de Vertheuil ; Notre-Dame de Cunault ; Saint-Révérien ; Saint-Étienne de Vignory ; Saint-Gildas-de-Rhuys ; Saint-Hilaire de Melle et Saint-Sauveur-de-Givre-en-Mai ; Sainte-Croix de Loudun, Notre-Dame-la-Grande et Saint-Hilaire de Poitiers ; Saint-Pierre du Dorat.

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étaient-elles agencées ? La couverture de l’abside pouvait aussi bien être indépendante que commune au déambulatoire. Les chapelles devaient en revanche présenter des toitures indépendantes. La différence de hauteur entre les fenêtres des absidioles et celles du déambulatoire pourraient indiquer que le mur d’enveloppe du chevet était plus haut que celui des chapelles rayonnantes et qu’il a été écrêté. C’est d’ailleurs ce que pourraient confirmer la reprise des corniches (pl. 40) et la mise en place d’un niveau unique de corniche, selon une disposition peu fréquente (fig. 175) 703. Mais quoi qu’il en soit, l’édifice devait donc, à l’origine, être relativement sombre une fois la mi-journée passée.

Ce n’est donc que dans un second temps que l’abside fut surélevée pour l’aménagement d’un éclairage direct (pl. 35, 36, 38). Comme on l’a déjà expliqué à propos de Saint-Savin et de Saint-Pierre d’Uzerche, ce type de transformation semble avoir été relativement fréquent, quelle que soit la période 704. Il faut donc déterminer à quand remonte ce repentir : a-t-il eu lieu en cours de chantier ou a-t-il été réalisé plus tardivement que la partie basse du chevet ? L’absence de sources et d’éléments sculptés ne permet guère de proposer de datation. On insistera cependant une nouvelle fois sur les différentes techniques de construction observables dans ces deux parties de l’édifice : le niveau d’éclairage direct de l’abside est en effet beaucoup plus soigné, tant dans la mise en œuvre que dans la recherche d’articulations (pl. 41). Les assises de petit appareil sont très régulières et les pilastres en moyen appareil, les encadrements de baies à double rouleau, les bandeaux à damiers et les archivoltes à billettes concourent à mettre en valeur l’abside de la même façon qu’à Sainte-Croix de Veauce et Notre-Dame de Châtel-Montagne, dans les parties basses du chevet de Saint-Médulphe de Saint-Myon

l’aménagement d’un clocher. Voir supra, p. 186, n. 684.

703

Ce type de corniche régnant à un niveau constant est peu fréquent dans le cas d’élévations pyramidales. Pour peu qu’on puisse en juger aujourd’hui, on citera les exemples suivants : Sainte-Foy de Conques ; Saint-Étienne de Dun-sur-Auron ; Saint-Apollinaire de Valence ; Pierre de Preuilly-sur-Claise ; Julien de Brioude ; Martin d’Artonne ; Saint-Pierre d’Airvault ; Sainte-Radegonde, Saint-Jean-de-Montierneuf, Saint-Hilaire de Poitiers. 704

Pour les cas d’absides transformées en vue d’aménager un éclairage direct : Sainte-Croix de Gannat ; Saint-Cyr-et-Sainte-Julitte de Sainte-Eulalie-d’Olt ; Notre-Dame de Beaune ; Étienne de Cahors et Sauveur de Figeac ; Martin de La Canourgue ; Saint-Cerneuf de Billom et Notre-Dame de Chamalières ; Saint-Philibert de Tournus ; Notre-Dame-de-la-Couture au Mans ; Saint-Jean-de-Montierneuf à Poitiers et Saint-Savin ; Saint-Michel de Gaillac.

ou dans la nef de Sainte-Valérie de Chambon-sur-Voueize (fig. 262, 263, 264, 265). Cependant, l’absence de décor sculpté sur l’ensemble du chevet diffère nettement des comparaisons qu’on vient d’évoquer et s’applique aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’édifice.

Une telle austérité est-elle la preuve de l’ancienneté de Notre-Dame de Mehun ? Conclure de la sorte serait bien évidemment téméraire. Remarquer que les parties basses de l’édifice renvoient à des comparaisons de la première moitié ou du milieu du XIe siècle est, en revanche, beaucoup plus important. Les techniques de construction observées sur le site comme les anciens détails rapportés par la bibliographie semblent largement confirmer cette hypothèse 705. Cependant, la question de l’homogénéité de la construction