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6.2 D´eformations thermiques

6.2.1 Mod`ele de Winkler

Ce mod`ele, tir´e de la Ref. [186], permet de comprendre qualitativement le processus physique de la d´eformation thermique des miroirs, tout en donnant un aper¸cu des ph´enom`enes que l’on peut observer lors de nos exp´eriences. On identifie deux d´eformations diff´erentes, suivant que la puissance soit absorb´ee par le revˆetement ou par le substrat.

Expansion thermique

Lorsqu’un faisceau laser est r´efl´echi sur un miroir, une partie de la puissance du faisceau est absorb´ee par le revˆetement. Cette quantit´e d´epend du coefficient d’absorption du revˆetement et de la puissance stock´ee : Pabs = APs. La puissance ainsi absorb´ee est ensuite diffus´ee dans le substrat, dans lequel apparaˆıt un gradient de temp´erature. Le r´esultat est une expansion du substrat vers la surface d’impact, mˆeme pour un miroir convexe.

Le mod`ele de Winkler [186] revient `a consid´erer que la d´eformation du miroir consiste au premier ordre en un changement de profondeur de courbure δse, voir Fig. 6.1. Sur cette figure la profondeur de courbure initiale est d´enot´ee s, le rayon de courbure initiale Ri et le rayon de courbure final Rf. La profondeur de courbure est calcul´ee `a partir d’un cercle dont le rayon correspond au rayon `a 1/e2 du faisceau wm.

Figure 6.1: D´eformation d’un substrat dans le mod`ele de Winkler. La profondeur de courbure initiale s est modifi´ee d’une quantit´e δs, changeant le rayon de courbure de Ri `a Rf.

6.2. D´eformations thermiques

Le mod`ele de Winkler permet de calculer la quantit´e δs et ainsi de remonter au nouveau rayon de courbure du miroir. Il suppose que le gradient de temp´erature dans le substrat s’´etend principalement dans un h´emisph`ere dont le rayon ´equivaut celui du faisceau au niveau du miroir. Si l’on suppose que la d´eformation est directement proportionnelle au gradient de temp´erature, on peut ´evaluer le changement de profondeur de courbure par :

δseαwmδT

2 , (6.1)

o`u α est le coefficient d’expansion thermique du substrat, wm le rayon du faisceau sur le miroir, wm/2 la profondeur de p´en´etration moyenne dans le mod`ele de Winkler, et δT la variation de temp´erature moyenne du substrat. Ce dernier param`etre est ´egalement reli´e `a la puissance absorb´ee par le revˆetement :

Paπw

2 mκδT

wm/2 , (6.2)

o`u Pa = APs est la puissance absorb´ee par le revˆetement, A est le coefficient d’absorption en puissance du revˆetement, Ps la puissance stock´ee dans la cavit´e, πw2

m la surface `a travers laquelle la chaleur est transport´ee, κ la conductivit´e thermique du substrat, et δT /(wm/2) le gradient de temp´erature dans le substrat. Finalement le changement de profondeur de courbure est proportionnel `a la puissance stock´ee dans la cavit´e par la relation :

δseα

4πκAPs. (6.3) L’Eq. 6.3 indique que le facteur d´eterminant pour la d´eformation est le rapport α/κ du substrat. Un faible coefficient d’expansion thermique est donc souhaitable mais une grande conductivit´e thermique est ´egalement importante. Dans l’exp´erience Mightylaser qui a r´ev´el´e de nombreux d’effets thermiques et `a permis de stocker 70 kW au maximum, les substrats ´etaient en silice, dont les propri´et´es sont donn´ees dans la Tab. 6.1. Avec ce mat´eriau, on obtient une d´eformation δse,silice ≈ 16 nm pour une puissance stock´ee de 500 kW et un coefficient d’absorption de 1 ppm. Pour comparaison, dans la Ref. [1], les auteurs ont r´eussi `a stocker 670 kW de puissance laser en utilisant des substrats en ULE (Ultra Low Expansion), un mat´eriau sp´ecialement con¸cu pour avoir un tr`es faible coefficient d’expansion thermique. Nous avons ´egalement fait ce choix pour ThomX en utilisant pour les miroirs M2, M3 et M4 un substrat fait en Corning 7972 Premium Grade ULE dont les caract´eristiques sont donn´ees dans la Tab. 6.1. L’ULE donne une d´eformation δse,U LE ≈ 0.3 nm, environ 50 fois moins importante que pour la silice. Le miroir d’entr´ee de la cavit´e optique n’est pas

Chapitre 6. Effets thermiques et r´esultats `a haute puissance

fait en ULE car c’est un mat´eriau qui ne permet pas de transmettre beaucoup de puissance, comme en atteste son tr`es grand coefficient d’absorption lin´eique Al. Ce miroir d’entr´ee est soumis `a un effet thermique suppl´ementaire `a celui d’expansion thermique, appel´e lentille thermique.

Mat´eriau α (10−6/K) κ (W/m/K) β (10−6/K) Al (ppm/cm) δse(nm) δsl (nm)

Silice [187] 0.55 1.38 10 2 16 48 x 10−3

ULE [188] 0.01 1.31 11 5850 0.3 160

Suprasil 0.6 1.38 10 0.5 17 12 x 10−3

Saphir [187] 5 46 13 50 4 46 x 10−3

Table 6.1: Propri´et´es thermiques des mat´eriaux couramment utilis´es comme substrat. α est le coefficient d’expansion thermique, κ la conduction thermique, β le coefficient thermo-optique, et Al le coefficient d’absorption lin´eique. Les valeurs de δse sont calcul´ees pour une puissance stock´ee de 500 kW et un coefficient d’absorption de 1 ppm, celles de δsl pour une puissance incidente de 50 W et une ´epaisseur de substrat de 1/4”.

Lentille thermique

Lors de la transmission d’un faisceau laser `a travers un miroir, une partie de la puissance laser est absorb´ee essentiellement par le substrat, le revˆetement ´etant bien plus fin. Le gradient de temp´erature dans le substrat s’´etend alors sur toute l’´epaisseur du miroir et induit une modification de l’indice de r´efraction du mat´eriau. Le substrat agit alors comme une lentille qui va modifier la courbure du front d’onde du faisceau transmis. Dans le mˆeme temps le substrat se d´eforme d’une quantit´e que l’on peut estimer par la relation [186]

δsl≈ 1.34πκβ AldPin, (6.4) o`u β = ∂n/∂T est l’indice thermo-optique qui caract´erise la d´ependance de l’indice de r´efraction du mat´eriau avec la temp´erature, Al le coefficient d’absorption lin´eique du substrat, d l’´epaisseur du substrat dans la direction de propagation du faisceau et Pin la puissance du faisceau laser incident au miroir. Afin de limiter les effets de lentilles thermiques, on consid`ere trois mat´eriaux pour le miroir d’entr´ee : la silice, le Suprasil et le saphir, l’absorption lin´eique de l’ULE ´etant d´emesur´ee. La d´eformation de chaque substrat, calcul´ee `a partir de l’Eq. 6.4, est donn´ee dans la derni`ere colonne de la Tab. 6.1 pour une puissance incidente de 50 W. On constate dans ce tableau que la d´eformation due `a la lentille thermique est environ trois ordres de grandeur plus faible que celle due `a

6.2. D´eformations thermiques

l’expansion thermique. Cette particularit´e d´epend du syst`eme optique, et dans notre cas du facteur d’accroissement de notre cavit´e qui est tr`es grand. En effet en effectuant le rapport entre les Eqs 6.3 et 6.4 on obtient :

δse

δslα

βG (6.5)

avec G le facteur d’accroissement de la cavit´e, et o`u l’on a suppos´e A ≈ Ald pour des miroirs d’environ 1 cm d’´epaisseur. Sachant que β ≈ 15α en moyenne, on constate que la lentille thermique devient l’effet majeur uniquement pour des faibles valeurs de facteurs d’accroissement. Pour G > 100, c’est l’expansion thermique qui pr´edomine. Dans notre cas, avec G > 104, notre syst`eme est compl`etement domin´e par l’expansion thermique.

On choisit alors pour le miroir d’entr´ee de ThomX le mat´eriau ayant la somme des d´eformations la plus faible possible, c’est-`a-dire le saphir. Par rapport aux autres miroirs en ULE, on s’attend tout de mˆeme `a observer des d´eformations thermiques plus de dix fois sup´erieures sur ce miroir. C’est donc principalement le miroir d’entr´ee le facteur limitant dans notre cas. Pour la cavit´e prototype nous avions choisi du Suprasil 3002 de Heraeus.