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3.2 Simulation de la ségrégation sous brassage

4.1.2 Modèles numériques

4.1.2.1 Transferts de chaleur

Le modèle numérique du four de solidification utilisé dans cette étude, est développé au LMPS par Mickael Albaric et David Pelletier [1]. L’objectif de ce modèle est de pouvoir simuler le procédé de solidification dirigée avec des conditions thermiques les plus proches possibles de la configuration réelle. Pour cela, les transferts thermiques entre les différents composants situés à l’intérieur de l’enceinte du four sont calculés. La convection dans le silicium liquide a une influence forte sur la solidification dirigée puisqu’elle modifie les gradients de tempéra-ture à l’interface solide/liquide. Les équations de Navier-Stokes (1.3) sont donc résolues dans le silicium avec une modélisation de la turbulence par un modèle RANS, et la convection na-turelle est prise en compte par l’hypothèse de Boussinesq (voir section 1.1.1.1). En revanche, la convection dans la phase gazeuse (atmosphère d’argon) est négligée devant le rayonnement, comme c’est le cas dans d’autres études de ce type [12]. En effet, comme la majeure partie du cycle thermique se passe à haute température, les transferts thermiques par rayonnement sont prépondérants. L’argon est alors considéré comme immobile et transparent au rayonnement Ar

emis = 0). L’intensité du rayonnement émis et absorbé par les surfaces solides est définie par leur émissivité εemis (voir tableau 4.1). Ces surfaces sont supposées opaques. Le flux incident se divise donc en un flux absorbé et un flux réfléchi (transmission nulle dans les solides). L’équation de la chaleur (1.1) est résolue dans l’ensemble du domaine et le rayonnement est modélisé par l’approche Discret Ordinates proposée par FLUENT [49]. L’équation de transport de l’intensité rayonnée est alors résolue pour un nombre fini d’angles solides (associés à différentes directions de l’espace).

Le modèle numérique s’arrête au niveau des isolants internes du four (voir figure 4.1). La cuve métallique qui sert d’enceinte extérieure n’est pas modélisée. Des conditions aux limites

sont appliquées sur les faces externes des isolants afin de retranscrire les pertes de chaleur vers le milieux ambiant. Le flux de chaleur vers l’extérieur comprend alors un terme lié au flux par convection et un terme lié au flux par rayonnement. Il s’exprime par la relation suivante [49] :

q = hext(Text− Tw) + εemisσ(T4 − T4

w), (4.1)

où hext, Text, T, Tw, εemis et σ représentent respectivement le coefficient d’échange convectif (W·m−2·K−1), la température du milieu ambiant (K), la température de la surface solide sur laquelle rayonne la face (K), la température de la face (K), l’émissivité de la face (-) et la constante de Stefan-Boltzmann (σ ≈ 5.670 × 10−8W·m−2·K−4). On suppose que la température ambiante et la température de la cuve sur laquelle rayonnent les isolants est de 300 K (Text =

T= 300 K). Le coefficient d’échange convectif est fixé à 25 W·m−2·K−1. Cette valeur a été déterminée par des simulations 2D de l’ensemble du four (incluant la cuve extérieure). On suppose également des contacts parfaits entre les différents solides du modèle, ce qui revient à négliger les résistances thermiques de contact.

4.1.2.2 Modèle enthalpique

On a vu dans la section 1.1.4 qu’il existe deux approches pour modéliser la solidification. La première consiste à définir explicitement l’interface solide/liquide et implique un remaillage dynamique pour suivre l’interface au cours du procédé. La seconde, appelée méthode enthal-pique, utilise une description implicite de l’interface. C’est cette méthode qui est proposée dans FLUENT [49]. Le modèle mis en œuvre est celui proposé par Voller and Prakash [91]. L’en-thalpie du matériau, H (en J·kg−1), est alors définie comme la somme de la chaleur cpT et de la chaleur latente ∆H :

H = cpT + ∆H. (4.2)

Afin de décrire le changement de phase solide/liquide, la chaleur latente doit être définie en fonction de la température. On utilise alors la fraction liquide locale fL pour exprimer ∆H(T ) de la manière suivante : ∆H(T ) = L, si T ≥ Tl LfL, si Tl> T ≥ Ts 0, si T < Ts (4.3)

Ts et Tl désignent respectivement les températures du solidus et du liquidus et L représente la chaleur latente de changement de phase, qui vaut 1.79 × 106J·kg−1 pour le silicium [67]. La fraction liquide locale fL varie entre 0 (matériau solide) et 1 (matériau liquide). La zone de changement de phase (0 < fL <1) est appelée zone pâteuse. L’équation de conservation de l’énergie (1.1) s’écrit alors sous la forme :

∂(ρH)

∂t + ~u.∇(ρH) = ∇.[(λ + λt)∇T ], (4.4) où λt représente la conductivité thermique turbulente. Elle est définie par le nombre de Prandtl turbulent P rt= νt/[λt/(ρcp)] qui est supposé égal à 0.85. La fermeture du problème de solidi-fication nécessite de définir la fraction liquide locale en fonction de la température. Pour une solidification avec zone pâteuse (Tl 6= Ts) on suppose une évolution linéaire de fL, qui s’exprime par la relation suivante :

fL= 1, si T ≥ Tl (T − Ts)/(Tl− Ts), si Tl > T ≥ Ts (4.5)

Cette formulation ne peut être appliquée dans le cas d’une solidification isotherme (Tl= Ts). La fraction liquide est alors calculée à l’aide d’une méthode alternative, proposée par Voller and Swaminathan [92]. Le lecteur peut se référer à la publication originale pour une présentation détaillée du calcul. On notera que cette méthode conduit implicitement à la définition arbitraire d’un intervalle de température, faible mais non nul, pour le changement de phase. En effet, elle fait intervenir un terme en dfL/dT dont la valeur en T = TS est définie arbitrairement grande (on ne connait pas la valeur imposée dans FLUENT).

Dans la zone pâteuse, le matériau est traité comme un milieu poreux. Cette modélisation vise à décrire les caractéristiques de l’écoulement au niveau d’un front dendritique. Dans ce cas, les espaces entre les dendrites peuvent être vus comme des porosités qui rétrécissent à mesure que l’on se rapproche de la zone entièrement solide. La vitesse du fluide est alors amortie et tend vers 0 lorsque la fraction liquide locale diminue. Cet amortissement est décrit par un terme source de quantité de mouvement qui s’exprime de la manière suivante [49] :

Sui = (1 − fL)2

(fL+ )3Amushyui, (4.6)

où  est une constante égale à 10−3 et Amushy est le coefficient d’amortissement de la zone pâteuse (en kg·m−3·s−1). Pour les configurations turbulentes, un terme source de la même forme est appliqué pour l’énergie cinétique turbulente k et le taux de dissipation ε (dans le cas où un modèle k − ε est utilisé).

On s’intéresse ici à la solidification d’un corps pur, avec un front lisse. Les températures du solidus et du liquidus sont donc égales (Ts = Tl) et la transition solide/liquide s’effectue de manière brutale, ce qui est équivalent à une zone pâteuse d’épaisseur nulle. On définit donc un coefficient d’amortissement élevé, Amushy = 106kg·m−3·s−1, afin d’imposer des vitesses nulles dès que la fraction liquide devient inférieure à 1 et de conserver une zone pâteuse "numérique" la plus fine possible. La figure 4.3 présente l’évolution du terme source de quantité de mouvement en fonction de la fraction liquide pour différentes valeurs du facteur d’amortissement Amushy. Ces courbes montrent bien qu’en imposant un facteur d’amortissement élevé le terme source de quantité de mouvement conserve une valeur forte pour une fraction liquide locale comprise entre 0 et 0.9.

Figure 4.3 – Terme source de quantité de mouvement dans la zone pâteuse en fonction de la fraction liquide locale fL, pour différents facteurs d’amortissement Amushy.

4.1.2.3 Discrétisation spatiale et temporelle

Concernant la discrétisation spatiale, les mailles ont des dimensions de 4×4×4mm3 dans le volume de silicium. Un raffinement est appliqué aux parois afin d’améliorer le calcul des couches limites hydrodynamiques. Les mailles adjacentes aux parois ont une hauteur de 0.4 mm et un taux de croissance de 1.3 est imposé pour les mailles suivantes. Dans les autres parties du four les mailles ont des dimensions caractéristiques comprises entre 5 et 15 mm. Le maillage complet comprend 1.6 million d’éléments. La figure 4.4 présente une vue en coupe du maillage utilisé.

Pour la simulation du procédé de cristallisation, l’amplitude des pas de temps est fixée à 1 minute. Cette discrétisation temporelle semble raisonnable compte tenu de la vitesse de déplacement de l’interface (de l’ordre de quelques micromètres par seconde) et de la durée totale du cycle (une douzaine d’heures). On utilise un solveur ségrégé et des schémas numériques au second ordre pour la discrétisation spatiale et temporelle.

Figure 4.4 – Vue en coupe du maillage du four de solidification dirigée.