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2.3 Modèle analytique de ségrégation

2.3.2 Description des ségrégations latérales à l’aide du modèle analytique

On souhaite étudier la capacité du modèle analytique à fournir une bonne estimation des variations locales de la couche limite solutale le long de l’interface solide/liquide. Ces variations sont à l’origine des ségrégations latérales et entraînent des variations de composition dans les lingots de silicium. On cherche alors à exprimer le paramètre convecto-diffusif ∆(x) en fonction du paramètre B(x) défini localement le long de l’interface. Pour calculer B(x) il est nécessaire d’utiliser le profil de contrainte pariétale τ(x). Le paramètre B fait également intervenir la longueur caractéristique de la recirculation dans la cavité. En première approche Garandet et al. [41] assimilent cette longueur caractéristique à la largeur de la cavité L, en négligeant les recirculations secondaires. Cependant, les résultats numériques montrent que les ségrégations latérales sont influencées par ces recirculations secondaires. Il semble donc pertinent d’associer à chaque recirculation une longueur caractéristique Li définie par la distance entre les points caractéristiques encadrant la recirculation. La figure 2.23 illustre le cas d’un écoulement à trois recirculations et défini les longueurs caractéristiques à partir des points d’arrêt, des décollements et des parois latérales de la cavité.

Figure 2.23 – Schéma de la configuration de cavité entraînée avec trois recirculations, définition des différentes longueurs caractéristiques et localisation des points caractéristiques.

La figure 2.24 donne des profils typiques de contrainte pariétale τ (en P a) et de paramètre convecto-diffusif ∆ au niveau de l’interface, pour les configurations ReL= 103, 104 et 105. Ces profils sont pris à une fraction solide de 44% (position du front zf = 8 cm), les résultats obtenus pour d’autres fractions solides étant similaires. Les abscisses des décollements et des points d’arrêt sont notées respectivement xd et xa. Sur les figures 2.24.A2, 2.24.B2 et 2.24.C2, les profils numériques ∆num sont comparés aux profils analytiques ∆th obtenus en considérant une ou plusieurs longueurs caractéristiques de recirculations. Entre les points caractéristiques, les valeurs de ∆th fournies par le modèle analytique sont en bon accord avec les résultats numé-riques pour les régimes turbulents. Il est intéressant de voir que l’analyse en ordres de grandeur, qui utilise une formulation 1D, est capable de fournir une bonne estimation des variations lo-cales de la couche limite solutale. Ceci confirme que la contrainte de frottement à l’interface est un bon indicateur du transport convectif à l’interface solide/liquide. La définition de plusieurs longueurs caractéristiques associées aux différentes recirculations améliore sensiblement les ré-sultats analytiques.

l’ordre de 1. L’influence des points caractéristiques s’étend alors sur une large zone de l’inter-face solide/liquide. Les ségrégations latérales sont très importantes et les flux de soluté dans la phase liquide peuvent être complexes (voir paragraphe 2.2.2). L’analyse en ordres de grandeur n’est pas bien adaptée pour décrire de tels gradients horizontaux de concentration, même si elle permet de reproduire qualitativement certaines variations. On remarque notamment que le modèle analytique ne permet pas de prédire un ∆ localement plus grand que 1, tel qu’on l’observe sur le résultat numérique de la figure 2.24.A2, puisque ∆th tend asymptotiquement vers 1 lorsque B tend vers 0. En toute rigueur, ces configurations nécessiteraient de prendre en compte l’inhomogénéité dans le liquide à l’extérieur de la couche limite solutale. Ces cas laminaires restent néanmoins légèrement en marge de notre étude qui s’intéresse avant tout à des écoulements turbulents générés par des systèmes de brassage.

Remarque sur les points caractéristiques

Le modèle analytique de ségrégation fait l’hypothèse d’un écoulement de couche limite le long de l’interface solide/liquide. Cette description n’est pas valable à proximité des décollements et des points d’arrêt puisque l’écoulement devient complètement bidimensionnel. On observe sur la figure 2.24 un écart significatif entre les profils numériques et analytiques de ∆ au voisinage des points caractéristiques.

Considérons tout d’abord le cas des décollements. Pour les différents régimes, les simulations numériques mettent en évidence un pic de ∆num au niveau des décollements. Cet enrichisse-ment local de l’interface résulte des flux convectifs provenant des recirculations situées de part et d’autre du point caractéristique. La hauteur de ce pic de concentration dépend du régime de convection global dans la cavité. Pour le régime laminaire ReL= 103, on observe que ∆num

est localement supérieur à 1. Le modèle analytique prévoit également un pic de ∆th aux décol-lements puisque ∆th tend vers 1 lorsque τ tend vers 0. Le pic est alors surestimé par le modèle analytique pour les régimes turbulents et sous-estimé pour le régime laminaire.

Au niveau des points d’arrêt, la contrainte s’annule également et le modèle analytique pré-voit aussi un pic de ∆th. Cependant, les résultats numériques montrent que les points d’arrêt correspondent en fait à un minimum de ∆num. En effet, au point d’arrêt l’écoulement est dirigé vers l’interface et apporte du liquide avec une faible concentration d’impureté. Le flux convectif est ensuite dévié par l’interface et s’éloigne du point d’arrêt. Tout se passe donc comme si l’écoulement normal à la paroi écrasait ou au contraire épaississait la couche limite solutale en fonction de sa direction (décollement ou impact). Ces caractéristiques des profils de ségrégation sont en accord avec les résultats numériques présentés par Teng et al. [87].

Les flux convectifs aux points caractéristiques ne peuvent être correctement décrits par une approche 1D. Des critères spécifiques doivent donc être définis pour ces points particuliers, ce qui fera l’objet de la section 2.3.4 où une procédure est proposée pour détecter les points d’arrêt et filtrer les pics de ∆th associés.

A1 : Profil de τ, ReL = 103 A2 : Profil de ∆, ReL= 103

B1 : Profil de τ, ReL= 104 B2 : Profil de ∆, ReL= 104

C1 : Profil de τ, ReL= 105 C2 : Profil de ∆, ReL= 105

Figure 2.24 – Évolution de la contrainte de frottement τ et du paramètre convecto-diffusif ∆ le long de l’interface pour ReL = 103 (A), ReL= 104 (B) et ReL = 105 (C). Les profils sont pris à une fraction solide de 44%.