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2.3 Modèle analytique de ségrégation

3.1.1 Analyse dimensionnelle

3.1.1.1 Paramètres du problème

On s’intéresse ici à l’analyse dimensionnelle du problème de brassage mécanique du silicium dans un creuset de dimension G2. La dimension G2 correspond à la taille du four de purification du LMPS qui est équipé d’un système de brassage. Un creuset G2 a une section carrée de 380 mm de côté et la charge standard est de 60 kg, ce qui correspond à une hauteur de silicium liquide d’environ 16 cm. La figure 3.1 définit les variables du problème hydrodynamique.

Figure 3.1 – Schéma du problème hydrodynamique du brassage lors de la solidification dirigée du silicium.

Propriétés du fluide :

ρ : masse volumique (kg·m−3)

µ : viscosité dynamique (Pa·s)

γ : tension superficielle (N·m−1) Variables hydrodynamiques :

N: vitesse de rotation de l’agitateur (rad·s−1)

g : pesanteur (m·s−2)

h : déformation de la surface libre (m)

P : puissance dissipée par l’agitateur (W)

τ : contrainte de frottement à l’interface solide/liquide (Pa) Paramètres géométriques :

L : largeur du creuset (m)

H: hauteur de liquide (m)

d : diamètre de l’agitateur (m)

c : distance entre l’agitateur et l’interface solide/liquide (m)

R : rayon de courbure du front de solidification (m)

3.1.1.2 Nombres adimensionnels

Afin de réaliser l’analyse dimensionnelle de ce problème il faut définir les échelles caracté-ristiques de longueur, de temps et de masse afin d’adimensionner les différentes variables. Ici on choisit le diamètre de l’agitateur d comme échelle de longueur, l’inverse de la fréquence de rotation 1/N comme échelle de temps et le produit ρd3 comme échelle de masse. Ces grandeurs sont utilisées pour adimensionner les variables et faire apparaître les nombres sans dimension caractéristiques du problème. Le tableau 3.1 donne les nombres sans dimension qui caractérisent le problème hydrodynamique.

Tableau 3.1 – Nombres adimensionnels caractéristiques du système de brassage.

unité unité groupe nombre

variable usuelle fondamentale adimensionnel adimensionnel

µ Pa·s kg·m−1·s−1 µ/(ρd2N) Re= (Nd2)/ν

γ N·m−1 kg·s−2 γ/(ρd3N2) W e= (ρN2d3)/γ

g m·s−2 m·s−2 g/(dN2) F r= (N2d)/g

P W kg·m2·s−3 P/(ρd5N3) N p= P/(ρN3d5)

τ Pa kg·m−1·s−2 τ /(ρd2N2) Cf = τ/[ρ(Nd)2/2] L’analyse dimensionnelle met en avant les nombres sans dimension qui interviennent clas-siquement dans les problèmes de brassage : le nombre de Reynolds, le nombre de Froude, le nombre de Weber et le nombre de puissance (voir partie 1.2). La prise en compte de la contrainte de frottement fait apparaître le coefficient de frottement Cf. On a choisi de faire apparaître cette variable de manière explicite car il s’agit de la grandeur utilisée pour quantifier la convec-tion dans le modèle analytique de ségrégaconvec-tion détaillé dans la secconvec-tion 1.1.2. Pour une vitesse de croissance et une impureté données, c’est cette variable qui fait le lien entre le problème hydrodynamique et le problème de ségrégation.

3.1.1.3 Critères de similitudes

Pour cette étude on souhaite réaliser des mesures de champ de vitesse sur un dispositif en eau. Les propriétés physiques de l’eau étant différentes de celles du silicium liquide, il faut s’assurer que les écoulements mesurés soient représentatifs de ceux qui ont lieu dans le silicium. Pour cela il faut que le dispositif expérimental soit en similitude avec le système réel. L’analyse dimensionnelle a permis de définir les nombres sans dimension qui caractérisent le système. Les similitudes géométriques sont assurées par le respect des proportions (mise à l’échelle du système expérimental). On suppose que les forces de tension superficielle influencent peu l’écou-lement donc on ne cherchera pas conserver le nombre de Weber. Dans la suite on désignera ψsi

les variables qui caractérisent le système de brassage du silicium et ψeau les variables qui inter-viennent dans le dispositif expérimental en eau. La conservation du nombre de Reynolds entre ces deux configurations donne la relation suivante :

Re= Nsidsi2

νsi = Neaudeau2

νeau . (3.1)

De la même manière, la conservation du nombre de Froude donne la relation :

F r = Nsi2dsi

g = Neau2deau

g . (3.2)

On remarque que les équations (3.1) et (3.2) donnent chacune une relation entre le rapport des vitesses Neau/Nsi et le facteur d’échelle deau/dsi. On comprend alors que si l’on souhaite conserver ces deux nombres adimensionnels, l’échelle de notre système et la vitesse de rotation de l’agitateur seront imposées puisque la pesanteur et les viscosités des fluides sont des constantes. En revanche, si on choisit de s’affranchir de l’une de ces deux similitudes, il est possible d’adapter la vitesse de rotation Neau en fonction de l’échelle qui aura été choisie pour le dispositif modèle en eau.

Il reste alors à considérer le nombre de puissance Np et le coefficient de frottement Cf. On a vu dans la partie 1.2 que le nombre de puissance d’un agitateur est déterminé par les nombres de Reynolds et de Froude. Le respect des similitudes de Reynolds et de Froude implique

donc la conservation du nombre de puissance entre le système de brassage du silicium et notre dispositif expérimental en eau. Concernant le coefficient de frottement Cf, il est également possible de définir les conditions de similitude de ce paramètre. Si on considère le cas classique du frottement sur une plaque plane, la solution de Blasius permet d’exprimer le coefficient de frottement local uniquement en fonction du nombre de Reynolds local dans le cas d’une couche limite laminaire [4] :

Cf x = 0.664Rex−1/2. (3.3)

Des corrélations similaires ont également été proposées pour les couches limites turbulentes [4, 7]. On peut alors raisonnablement considérer que le respect de la similitude de Reynolds entraîne la conservation du coefficient de frottement.

Les conditions de similitudes à respecter afin d’assurer la conservation des nombres de

Reynolds et Froude ainsi que du nombre de puissance et du coefficient de frottement sont donc

données par les relations (3.1) et (3.2). Ces conditions définissent, pour un fluide donné, les dimensions de notre système expérimental et la vitesse de rotation de l’agitateur. Le tableau 3.2 donne les propriétés de l’eau à 20 ℃ et du silicium liquide à sa température de fusion (1414 ℃).

Tableau 3.2 – Propriétés physiques de l’eau à 20 ℃ et du silicium liquide à 1414 ℃.

eau (à 20 ℃) silicium liquide

ρ (kg·m−3) 1000 2550

µ (Pa·s) 10−3 7.5 × 10−4

ν (m2·s−1) 10−6 2.94 × 10−7

γ (N·m−1) 7.28 × 10−2 7.31 × 10−1

Connaissant ces paramètres et en utilisant les relations (3.1) et (3.2), il est possible de calculer le facteur d’échelle deau/dsi :

deau

dsi =νeau

νsi

2/3

= 2.26, (3.4)

ainsi que le rapport des vitesses de rotation Neau/Nsi :

Neau

Nsi = νsi

νeau

1/3

= 0.66, (3.5)

qu’il faudrait utiliser afin de respecter à la fois les similitudes de Reynolds et de Froude. L’équa-tion (3.4) nous indique que pour respecter simultanément ces deux similitudes, il faut utiliser un dispositif expérimental environ deux fois plus grand que le système réel. Cette contrainte est problématique pour des raisons d’encombrement et de mise en place de la mesure PIV. Pour ces deux raisons, il a été choisi de s’affranchir de la similitude de Froude. Ce paramètre est vraisemblablement moins influent que le nombre de Reynolds dans la mesure où les vitesses de rotation restent limitées et que la forme carrée de la cuve limite la mise en rotation de l’écoule-ment et la formation d’un "vortex" autour de l’arbre de rotation. On peut ainsi travailler avec un système à l’échelle 1 en adaptant la vitesse de rotation du brasseur. En utilisant la relation (3.1) et imposant deau = dsi on obtient :

Neau= Nsi

νeau νsi



= 3.4 ∗ Nsi. (3.6)

Ainsi, la vitesse de rotation dans le système en eau doit être 3.4 fois plus élevée que celle appliquée pour le brassage du silicium. Avec cette configuration le nombre de Reynolds et le

coefficient de frottement sont conservés. En revanche, le nombre de Froude dans l’eau F reau est différent de celui obtenu dans le silicium liquide F rsi. En utilisant l’équation (3.6) on montre que : F reau = F rsi νeau νsi 2 = 11.6 ∗ F rsi. (3.7)

Le nombre de Froude du modèle en eau est supérieur d’un ordre de grandeur à celui du système réel. La déformation de la surface libre est donc plus importante sur le système expérimental que sur le système réel. En revanche, si il n’y a pas formation d’un "vortex" autour de l’arbre de rotation, le nombre de puissance de l’agitateur n’est fonction que du nombre de Reynolds [79]. Le nombre de puissance devrait donc être du même ordre de grandeur sur le dispositif expérimental que sur le système réel.