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Un modèle systémique d’analyse de la performance de l’ombudsman

Chapitre 4 Proposition de modèle d’analyse de la performance des ombudsmans

4.1. Un modèle systémique d’analyse de la performance de l’ombudsman

Comme le présente Talbot (2010), trois mouvements intellectuels se sont intéressés à la performance organisationnelle depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Du milieu des années 1940 jusqu’en 1980 s’est développé aux États-Unis le mouvement dit de l’efficacité organisationnelle (Œ) dont la principale caractéristique fut l’utilisation des données quantitatives pour relier différents facteurs de performance au comportement humain. À partir de 1980, un autre mouvement s’est développé autour des paramètres d’excellence, de qualité et de culture pour améliorer les organisations, rejetant ainsi l’analyse quantitative pour une perspective qualitative comme approche de mesure de la performance. Un troisième mouvement plus pragmatique s’est constitué au milieu des années 90 et s’intéressa plus particulièrement au contexte de fonctionnement des organisations (Talbot, 2010). Son but est l’amélioration systématique de l’efficacité de toute institution de façon à mesurer et à attribuer les variations de performance à des influences spécifiques de causalité (Heinrich, 2007; Pollitt et Bouckaert, 2011; Lynn et Robichau, 2013). Ce dernier mouvement s’insère dans les réformes managériales de l’administration connues sous le vocable de nouvelle gestion publique. D’un point de vue épistémologique, les idées promues par les tenants de la nouvelle gestion publique concernent la gestion professionnelle dans le secteur public et les standards explicites de mesure de la performance (Hood, 1991). En ce qui concerne les résultats de ces réformes, les pays ont connu des trajectoires différentes (Hood, 1991; Pollitt, 2001; Pollitt et Bouckaert, 2011). Ceci est dû en premier lieu, au fait que les idéologies dominantes varient suivant les pays. En Nouvelle-Zélande, les théories du choix

public ont une prédominance dans les réformes tandis qu’en Grande-Bretagne et en Australie, le managérialisme a inspiré davantage les réformes (Aucoin, 1990). La nouvelle gestion publique « a fait évoluer la conduite des affaires de l’État depuis la seule conformité légale vers une perspective managériale de la gestion des biens et des services publics qui valorise l’efficacité, l’efficience et le service au client » (Bourgault, 2004, p. 69). Les préoccupations essentielles du nouveau management public concernent la microgestion, la motivation et la mesure des réalisations (Behn, 1995). Au demeurant, la performance apparait comme la résultante de toutes les initiatives de la nouvelle gestion publique (Pollitt et Bouckaert, 2011; Lynn et Robichau, 2013).

La performance est ultimement la variable dépendante lorsqu’on compare différents types d’organisations (Talbot, 2010). Les réformes managériales ont engendré deux implications en matière d’imputabilité : le changement des structures et l’attention croissante des critères de performance. Habituellement, la mesure de performance concerne le respect des lois, des règles et des régulations reflétant les orientations sur les intrants et les processus alors que les réformes ont engendré des standards de mesure de performance basée sur les extrants et les résultats (Romzek, 2000).

Toutefois, la performance est un concept flou et sa mesure est frustrante à cause de l’imprécision et la confusion qui entoure les notions utilisées pour la définir (Lebas, 1995; Talbot, 2005). « En effet, d’un point de vue conceptuel, il n’existe pas de définition univoque de la performance, ni même d’entente sur les dimensions qui la compose » (Thiebaut, Champagne et Contandriopoulos, 2015, p. 40). Et pourtant, habituellement, elle est simplement définie comme les extrants et les résultats des activités (Van Dooren, Bouckaert et Halligan, 2015, p. 120). Cette façon de définir la performance est restrictive, même si elle a l’avantage de montrer que la performance est un concept qui capte un mouvement au sein d’une organisation (Langdon, 2000, p. 12). De façon plus large, Langdon (2000, p. 13) présente le paradigme de la performance à travers les composantes du système de production intrant, processus, extrant, conséquence, conditions et rétroaction.

La performance serait donc la mise en relation des différentes composantes (figure 6). Il s’agit d’une agrégation de composantes. L’extrant ou l’« output » est le livrable tangible qui peut se présenter sous la forme de services, de produit ou de connaissance. Les conséquences ou résultats viennent à la suite des extrants. Pour produire les extrants et les résultats, l’organisation a besoin d’engager des intrants — qui représentent les raisons d’engager l’action et les ressources matérielles, informationnelles, humaines — sous certaines conditions de règles et de procédures. L’organisation

définie des activités à réaliser pour convertir les intrants en extrants et en résultats. Enfin, la rétroaction permet de confirmer le succès ou d’apporter des ajustements nécessaires à l’organisation. Nous précisons que les conditions ici sont les facteurs qui expliquent l’utilisation des intrants, des activités et la rétroaction qui sont utilisées pour produire l’extrant (Langdon, 2000, p. 14).

Figure 6 : Paradigme de la performance

Source : Extrait et traduit de Langdon (2000, p. 11)

C’est un ensemble de composantes qui concourent à la performance d’une organisation. Mais ce que nous ne savons pas encore, ce sont les critères théoriques qui permettent d’exprimer les relations entre les composantes présentées dans le paradigme de la performance. Comme nous le verrons, le modèle théorique de la performance de Pollitt et Bouckaert (2011) permet d’exprimer cette réalité. Plusieurs raisons dont l’évaluation justifie la mesure de la performance (Behn, 2003, p. 588). Les études sur la mesure de la performance dans les organisations publiques ont démontré trois façons de procéder. La première est l’importation des modèles génériques du secteur privé qui sont adoptés par le secteur public. La deuxième est l’adaptation des modèles importés qui sont modifiés pour tenir compte des réalités du secteur public. La troisième concerne les innovations endogènes au secteur public et qui sont de nouveaux modèles développés pour le secteur public (Talbot, 2010, p. 169-184). Ma démarche vise un cadre d’analyse du secteur public pour traduire les spécificités de l’ombudsman. Dans cette veine, nous partons du cadre d’analyse de la performance qui s’inscrit dans une perspective plus systémique et nous développons un cadre spécifique à l’ombudsman (Pollitt et Bouckaert, 2004, 2011). Ce cadre met en évidence la mesure de la performance et les facteurs qui l’expliquent. Il permet de souligner le contexte socio-économique et politique de la mise en place de l’ombudsman. Il révèle les besoins des citoyens quant à ses fonctions. Il dresse également la chaîne des résultats (la théorie de l’intervention) en fonction des attentes des acteurs clés impliqués dans son fonctionnement. Dans

Conditions Conséquences Extrants Processus Intrants Rétroaction

le même temps, il relève l’environnement institutionnel qui expliquerait la performance de l’ombudsman. Du point de vue théorique, ce cadre d’analyse présente un intérêt central dans ma démarche de recherche, car au mieux de ma connaissance, il n’a jamais été testé sur une organisation comme les surveillants de l’État tel que l’ombudsman. À cet égard, le paradigme de la performance présenté ci-dessus est sous-jacent au cadre d’analyse de Pollitt et Bouckaert (2011).

Figure 7 : Cadre d’analyse de la performance de l’ombudsman

Source : Extrait et adapté de Pollitt et Bouckaert, 2011, p.133

Résultats Environnement Impartialité, Crédibilité, Indépendance, Accessibilité Résultat final Engendrer des réformes administratives Résultat intermédiaire

Améliorer les services publics Organisation : Transactions Objectifs Relever les insuffisances administratives Intrants Ressources humaines (Médiation, Conciliation, Négociation et plaidoirie) Ressources financières Activités

Réception des plaintes Investigation/Enquête Enquête systémique Sensibilisation pour la prévention Formulation des recommandations Suivi des recommandation

Conseil et orientation des plaintes hors juridiction

Extrants Redresseme nt des griefs individuels et collectifs Besoins Protection des droits individuels Défense de la démocratie Efficacité Situation socio- économique Efficience Pertinence Antécédents Prestation

La figure 7 montre que les problèmes socio-économiques (situation socio-économique) induisent les besoins d’intervention des acteurs qui poussent à l’agenda une intervention. Il peut s’agir de la mise en place d’une organisation ou d’un programme. Les priorités identifiées sont traduites en objectifs. Les intrants se présentent sous la forme de ressources humaines et/ou financières qui sont affectées à l’organisation dans le but de mettre en œuvre des activités pour produire des extrants, lesquels extrants engendrent des résultats intermédiaires et finaux qui sont influencés par l’environnement institutionnel (Pollitt et Bouckaert, 2004, p. 134-135; Van Dooren, Bouckaert et al., 2015, p. 21-25). Il y a un parallélisme de forme et de fond entre les composantes de ce modèle et l’évaluation compréhensive dont le modèle le plus illustratif est le « countenance model » de Stake présenté par Vedung (2000, p. 62-66) et Kaufman et Thomas (1980, p. 123-126). Le modèle générique de « countenance » distingue trois phases : les antécédents, les transactions et les résultats (outcomes). La phase des antécédents correspond aux besoins d’implantation de l’ombudsman. La phase de transaction est celle de la conversion des intrants en extrants via les activités, tandis que la phase de résultats correspond aux résultats de l’intervention décrite dans le cadre d’analyse de Pollitt et Bouckaert. Le « countenance model » recommande la description des phases ainsi que le jugement fondé sur des critères de test de performance.

Le cadre d’analyse définit la performance comme étant l’intégration des relations entre les antécédents, les transactions et les résultats. Ces relations sont mises en évidence à partir des critères de mesure que sont : pertinence, prestation, efficacité et efficience. La pertinence est la relation entre les antécédents et les transactions. Les critères d’efficience et de prestation évaluent les transactions. Le critère d’efficacité mesure la relation entre les transactions et les résultats. L’utilisation de ces critères s’inspire également de l’étude de cas de Fowlie (2008) sur la Société pour l’attribution des noms de domaine et des numéros sur internet qui est un ombudsman organisationnel. Le but de l’étude de Fowlie (2008) est de concevoir et de développer un ensemble d’outils génériques qui pourraient être utilisés pour étudier l’efficacité des opérations de l’ombudsman de la Société pour l’attribution des noms de domaines et des numéros sur internet. En effet, l’étude a permis de mettre en évidence les critères de pertinence, de management, de prestation et de coût-efficacité des interventions de l’ombudsman organisationnel (Fowlie, 2008). Le critère de prestation est emprunté à Fowlie tandis qu’il est exclus du cadre d’analyse de Pollitt et Bouckaert (2011) les critères d’économie et de coût-efficacité en raison du caractère non commercial des services de l’institution dont la finalité n’est pas de dégager des marges bénéficiaires. Le critère d’utilité ou durabilité est également exclus du modèle, étant donné

que l’objet d’analyse est l’ombudsman dont l’utilité institutionnelle est plus théorique qu’empirique comme il a été discuté dans la section introductive. Dans les lignes qui suivent, les principales composantes du cadre d’analyse sont présentées. Les antécédents et les transactions sont déjà traités dans les chapitres 1 et 2 de la thèse. Cependant, un bref rappel permet une meilleure compréhension du modèle proposé.

Les antécédents : La raison d’être de l’ombudsman

L’État-providence a conféré plus de pouvoirs à l’État. Par la même occasion, la bureaucratie a pris des proportions considérables et surtout une importance centrale étant donné son rôle dans la mise en place des programmes de l’État-providence. De plus, la législature traditionnelle qui jouait le rôle de contrepouvoirs a vu ses pouvoirs diminués au profit de l’Exécutif qui occupe désormais une place centrale dans la sphère étatique (Carl, 2012, p. 211). Face à cette superpuissance ou l’imperméabilité de la bureaucratie et la puissance publique de l’Exécutif, il est apparu nécessaire de mettre en place des mécanismes pour garantir les droits légaux de chaque citoyen (Mohammed, 1991; Stieber, 2000; Magnette, 2003; Stuhmcke, 2006; Bousta, 2007; Abedin, 2011; Remac, 2013; Ayeni, 2014). Il se dégage ainsi une double fonction de protection des droits du citoyen et de défense de la démocratie (Carl, 2012, p. 211).

Les transactions : la théorie de l’intervention de l’ombudsman

La phase de transaction correspond à l’implantation de l’ombudsman. Pour situer les véritables objectifs de l’organisation, il faudrait remonter aux origines de l’ombudsman, plus précisément en 1809 après la révolution, sous le roi Gustave IV en Suède (Langrod, 1959; Bousta, 2007). La

JustitieOmbudsman Suédoise fut créé par le roi pour s’assurer que l’administration mette

rigoureusement en œuvre ses lois (Magnette, 2003). Dès lors, l’ombudsman est chargé de relever les insuffisances administratives et d’améliorer les services publics. En effet, « l’ombudsman agit comme un poursuivant public (procecutor) devant les tribunaux, relativement à des illégalités constatées dans le cadre de ses enquêtes, des inspections qu’il effectuait auprès d’agences gouvernementales ou encore de plaintes reçues à leur égard » (Paquette, 2014, p. 6). Quand bien même dans plusieurs

juridictions, l’ombudsman ne peut entreprendre des actions devant la cour, le standard législatif de contrôle est la légalité soit l’État de droit (Remac, 2013).

Généralement, les intrants sont perçus comme les ressources (dépenses ou temps des employés) qui sont utilisées pour accomplir les activités permettant de produire des extrants et des résultats (Radin, 2006, p. 15; Van Dooren, Bouckaert et al., 2015, p. 21). Ils font référence au personnel de l’ombudsman et aux ressources financières mises à sa disposition par le législatif ou l’exécutif pour son fonctionnement. En lien avec son mandat, l’ombudsman réalise plusieurs activités dont le point de départ est la réception des plaintes. Suite à la réception de la plainte, il analyse sa recevabilité. Il se pourrait que la plainte soit rejetée lorsqu’elle est hors du champ de compétence de l’ombudsman. Lorsqu’elle est recevable, cette plainte peut donner lieu à l’investigation. Sur un autre plan, l’ombudsman, de sa propre initiative, peut réaliser une enquête systémique suite à des signalements ou à la récurrence d’une plainte contre un organisme public. Les activités réalisées par l’ombudsman sont : la sensibilisation pour la prévention des plaintes, la formulation de recommandations, le suivi des recommandations, le conseil et l’orientation des plaintes hors champ de compétence. La réalisation de ces principales activités permet de corriger les griefs individuels et/ou collectifs. Il s’agit du principal extrant de l’ombudsman (Ayeni, 1993). Nous percevons l’extrant comme étant le service fourni (Radin, 2006, p. 15). Même si la veille législative n’est pas un extrant explicite de l’ombudsman dans plusieurs juridictions, il est tout même implicite, car l’ombudsman doit impulser des réformes administratives qu’elles soient substantielles ou procédurales pour attendre son objectif d’améliorer les services publics. Dès lors, il veille à ce que ses recommandations soient mises en œuvre. Lorsque le besoin se présente, il peut faire du lobbying pour mettre à l’agenda législatif des lois afin d’améliorer le service public.

Les résultats de l’ombudsman

Un résultat est un événement, une occurrence qui est en dehors de l’activité ou du service lui-même et qui revêt une importance directe pour les clients du service public. Bien que la définition des résultats puisse émerger des objectifs organisationnels, les organisations peuvent ne pas avoir l’autorité ou les ressources disponibles qui leur permettent d’atteindre réellement les objectifs (Radin, 2006, p. 15). À la suite de Radin (2006, p. 15) et Van Dooren, Bouckaert et al. (2015, p. 24), nous distinguons les

résultats intermédiaires et les résultats finaux. Les résultats intermédiaires peuvent être appréciés dans le court terme et correspondent aux résultats qui devraient conduire à une fin désirée, mais ne sont pas une fin en soi. Le résultat intermédiaire serait d’améliorer les services publics et le résultat final est d’engendrer des réformes administratives (Ayeni, 1993). Le résultat final s’évalue habituellement sur le long terme (Van Dooren, Bouckaert et al., 2015, p. 24). Avec les résultats (outcomes), l’ombudsman peut répondre à la question d’efficacité (a-t-elle atteint les résultats qu’elle a entrepris de produire ?). Elle peut aussi mettre en doute l’efficience (a-t-elle produit ses résultats de manière rentable ?) (Behn, 2003, p. 594).

L’environnement institutionnel

Le concept « institution » est central dans l’analyse politique. Lorsqu’on tente de l’étudier, on se heurte à sa polysémie et à la diversité des méthodes d’étude. Les approches diffèrent quand il faut comprendre la nature des institutions comme des organisations modernes dans lesquelles les acteurs politiques agissent. Elles diffèrent aussi en ce qui concerne la compréhension des processus qui convertissent les structures et les règles en impacts politiques. De même, les différences apparaissent lorsqu’on cherche à expliquer les processus qui transforment les comportements humains en structures et règles pour établir, maintenir, transformer ou éliminer des institutions (March et Olsen, 1983). Depuis les années 1950, on observe un regain d’intérêts pour les études institutionnalistes. Ceci est dû, en particulier, aux nombreuses transformations de la société et aux institutions politiques, économiques et sociales qui sont devenues très larges, très complexes et très budgétivores pour laisser indifférents les politologues (March et Olsen, 1983).

L’institutionnalisme est une approche générale pour étudier les institutions politiques. C’est un ensemble de théories, d’idées ou d’hypothèses concernant les relations entre les caractéristiques institutionnelles et l’action politique, la performance et le changement. L’institutionnalisme prend en compte la nature endogène et la construction sociale des institutions politiques. Ce n’est pas seulement un simple équilibre de contrats entre les attentes personnelles, les calculs individuels des acteurs ou des arènes pour soutenir les forces sociales (March et Olsen, 1983). Ainsi, la conceptualisation de l’institution varie suivant les différents courants de pensée qui prédominent parmi les institutionnalistes.

Pour March et Olsen (1983), la vision contemporaine qui caractérise l’étude des institutions en science politique est d’abord contextuelle puisque les évènements politiques sont des phénomènes qui sont nécessaires à la compréhension de la société. Elle est également réductrice, car les politiques sont des conséquences agrégées des comportements individuels. Elle est utilitariste étant donné que l’action collective est le produit des calculs des intérêts personnels. Elle est aussi fonctionnaliste en percevant l’histoire comme un mécanisme efficace pour atteindre les équilibres ; et, enfin, elle est instrumentale en prenant les décisions et les allocations de ressources pour des préoccupations centrales de la vie politique (March et Olsen, 1983). Plusieurs institutionnalismes cohabitent et se développent parallèlement : l’institutionnalisme historique (Sanders, 2008), l’institutionnalisme du choix rationnel (Shepsle, 2008), sociologique (Di Maggio et Powell, 1997), constructiviste (Hay, 2008), network (Ansell, 2008) et empirique (Rhodes, Binder et Rockman, 2008), etc. Les institutionnalismes historique, choix rationnel et sociologique seront incontestablement ceux qui auront marqué l’étude des institutions depuis le milieu du XXe siècle.

L’institutionnalisme historique perçoit les institutions comme étant des procédures, des protocoles, des normes et autres conventions officielles et même officieuses inhérentes à la structure organisationnelle (Hall et Taylor, 1997). L’institutionnalisme du choix rationnel et l’institutionnalisme historique se rejoignent sur le fait que les contraintes humainement conçues façonnent les interactions humaines. Mais les deux diffèrent sur l’objet et le temps d’analyse. Pour le choix rationnel, c’est un jeu dans un microcosme sur les préférences et l’utilité, alors que pour les institutionnalistes historiques, c’est la naissance, le maintien et l’adaptation des institutions. Ce n’est pas l’intérêt des individus, mais plutôt leur objectif orienté vers le public. L’institutionnalisme historique est moins centré sur l’individu, mais plutôt sur une logique d’action collective. En définitive, l’institutionnalisme historique accorde plus d’attention à la viabilité à long terme des institutions et leurs conséquences (Sanders, 2008). Pour l’institutionnalisme sociologique, les institutions sont non seulement des règles, des procédures ou des normes formelles, mais aussi elles sont des systèmes de symboles, des schémas cognitifs et autres modèles moraux qui orientent l’action humaine (Hall et Taylor, 1997). Les institutionnalistes en sociologie soutiennent que les organisations adoptent souvent une nouvelle pratique institutionnelle, moins parce qu’elle accroit leur efficacité que parce qu’elle renforce leur légitimité sociale ou celle de leurs adhérents. En d’autres termes, il y a des formes ou des pratiques institutionnelles particulières parce que celles-ci ont une valeur reconnue dans un environnement culturel plus large (Hall et Taylor, 1997).

Au total, les institutionnalistes du choix rationnel décrivent les institutions comme des incitations. Ceux historiques les perçoivent comme une continuité tandis que les institutionnalistes sociologiques voient les institutions comme des normes et la culture (Rhodes, Binder et al., 2008). Il n’existe pas de définition univoque de l’institution. Toutefois, Ménard (2003) retient que l’institution est « un ensemble de règles durables, stables, abstraites et impersonnelles, cristallisées dans des lois, des traditions ou des coutumes, et encastrées dans des dispositifs qui implantent et mettent en œuvre, par le consentement et/ou la contrainte, des modes d’organisation des transactions ».

La prémisse du cadre d’analyse est que l’environnement expliquerait la performance de l’ombudsman. L’environnement est défini comme étant l’environnement institutionnel plutôt que les arrangements institutionnels ou plus précisément les structures institutionnelles de la production. Le premier fait référence aux règles du jeu, règles politiques, sociales, légales, alors que les derniers renvoient aux modes d’utilisation de ces règles par les acteurs ou aux modes d’organisation des transactions dans