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cognitive et métacognitive

2. La production écrite selon la psychologie cognitive : 1 Approche cognitive

2.1.1. Les composantes de l’activité d’écriture dans les modèles cognitivistes

2.1.1.3. Le Modèle de Hayes (1994)

Malgré la place prépondérante qu’a occupée le modèle de 1980, a fait l'objet de fréquentes critiques puisqu’il a négligé la part du social de l’écriture. Les chercheurs ont mis en valeur l'action du scripteur (ce qu’il fait) et non pas le scripteur lui même (l’agent de l’action).

Le modèle cognitiviste nommé aussi second modèle a été rénové par Hayes en 1994 (figure 2.3) qui a mis les opérations d’écriture sous l’égide d’autres opérations relatives à des catégories plus générales. Le rapport à l’écriture y est envisagé sous l’angle de la gestion des opérations mentales confrontées au traitement de l’information et qui interviennent au cours du processus d’écriture.

Hayes a accordé une grande importance à la mémoire de travail qui est le mécanisme permettant de réaliser diverses activités cognitives complexes (lecture, raisonnement, compréhension de texte, …). Ainsi, la mémoire de travail assure des fonctions de traitements (fonctions exécutives) qui gèrent la mise en œuvre de ces processus en leur donnant des ressources cognitives (de l’attention) et une fonction de stockage temporaire (ou de mémoire à court terme) des représentations transitoires élaborées par les processus cognitifs.

La production d’un texte est une activité qui sollicite constamment la mémoire de travail (M.D.T) et qui est contrainte par les limites de celle-ci.

La Figure 2.3 présente une nouvelle configuration du modèle élaboré en 1980. Le but de ce modèle (1994) traduit par Fortier (1995) est d’apporter plus d’éclaircissements au premier (1980).

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Figure2.3 : Modèle révisé de Hayes et Flower (1994), traduit par Fortier (1995)

Selon l’interprétation de J. Y Boyer et ses collaborateurs(1995), la mémoire a été déplacée pour montrer qu’elle est importante non seulement dans la planification mais aussi dans les trois (03) processus cognitifs d’écriture. Les appellations des processus d’écriture ont été remplacées par des appellations plus couramment employées. Certaines conventions graphiques ont été clarifiées (dimension des boites, flèches indiquant le transfert d’informations…).Les liens entre le processus et les sous-processus sont mis en évidence par l’introduction des sous-processus dans des super-processus. Dans le modèle de 1980,

Le contexte de production

La tâche Le texte en production

Les processus cognitifs Contrôle du processus

Mise en texte

Planification Révision

Les connaissances du scripteur Sujet

Audience Genre

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le moniteur apparaissait dans une boite parallèle aux trois boites du processus d’écriture, Il n’y avait que des lignes non orientées qui représentaient la relation du moniteur à chacune des boites du processus. En 1980, le moniteur était décrit comme processus de contrôle, c'est lui qui contrôlait les sous-processus tels que la planification, la génération de phrases et la révision. Dans la figure 2.3, le moniteur apparaît dans une boite qui identifie les sous-processus d’écriture. En résumé, le second modèle présente les trois composantes suivantes :

- Le contexte de production :

Il comprend tous les facteurs extérieurs au scripteur capable d’influencer l’activité d’écriture tels que les directives reliées à la tâche et le texte que le scripteur a déjà produit.

- Les processus cognitifs :

-la planification qui consiste à décider de ce qui doit être dit et comment il doit être dit. -la mise en texte qui signifie la transformation de la planification en texte écrit.

-la révision ; c’est-à-dire l’amélioration et l’enrichissement du texte existant.

Par rapport à notre recherche, l'analyse de ces processus impliqués dans la production de textes, nous permettra d'évaluer et de vérifier les stratégies rédactionnelles mises en œuvre par les apprenants lors de la réécriture individuelle et collaborative du texte argumentatif. La question que nous nous posons est comment les apprenants procèdent-ils en situation individuelle et collaborative lors de la réécriture de ce type de texte. Nous essayerons d’apporter des éléments de réponse à cette question au cours de notre expérimentation.

-Les connaissances du scripteur : c’est-à dire la connaissance du sujet, de l’audience…

Hayes (1990) identifie un nombre de facteurs importants que le scripteur doit prendre en considération pour concevoir une tâche d’écriture. Il fait état de la définition de la tâche, de l’environnement physique, des contextes culturel et social.

Si certaines caractéristiques de la situation d’écriture sont étudiées, d’autres par contre, sont très peu analysées. Nous pouvons citer à titre d’exemple deux facteurs très important dans la situation d’écriture : Le but fixé et le lecteur éventuel.

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Englert (1990) souligne que le fait de pouvoir anticiper son lecteur éventuel permet dans la composition d’un texte explicatif, de se percevoir comme quelqu’un qui veut informer et engager ce lecteur dans la compréhension de son texte en tentant de susciter sa curiosité.

Comme nous le remarquons, on touche également à un autre facteur fondamental : le but visé par le scripteur. Martin (1987) pense que le scripteur doit être souvent conscient du but qu’il se fixe et doit réellement œuvrer pour l’atteindre. Nelson et Hayes (1988) ont identifié plusieurs différences dans la perception qu’avaient les scripteurs des buts d’un travail de recherche. Certains d’entre eux considèrent qu’un tel type de tâche se limite à une simple reproduction des informations à faire évaluer par l’enseignant, et d’autres recherchent une perspective particulière dans l’intention de traiter ou de modifier les informations qu’ils vont insérer dans leur texte.

Dans les modèles cognitifs classiques, la situation de production est prise en compte dans le processus de planification, là où le scripteur déterminera un certain nombre de paramètres dont il devra prendre en considération lors de la mise en texte en fonction des objectifs et du lecteur éventuel. Le processus de gestion assurera aussi l’interaction entre la mise en œuvre des activités de production de texte et les caractéristiques de la situation. 2.1.2. Le rôle de la mémoire de travail dans la production écrite

En langage quotidien, le terme de « mémoire » correspond à une seule fonction ; celle du stockage mental de l’information. Toutefois, en psychologie cognitive, on distingue trois types de mémoire : la mémoire à long terme (MLT),la mémoire à court terme (MCT) et la mémoire de travail (MDT).

Avec le concept de mémoire à long terme, les psychologues font référence à des états mentaux stables concernant de vastes configurations d’informations alors qu’avec celui de mémoire à court terme, ils évoquent les états mentaux concernant le stockage très éphémère de quelques éléments. Avec celui de mémoire de travail, ils rendent compte d’un stockage temporaire mais non passif de l’information. (Piolat, 2004a, pp. 1-2)

Lorsqu’un individu réalise une activité cognitive ou traite une information, il a, en effet, besoin de ressources mentales (appelées aussi ressources attentionnelles). La mémoire de travail est comparée à un système qui assure la fonction de contrôle et de gestion de ces ressources mentales.

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La réalisation d’une activité cognitive complexe, comme celle de la production écrite, est contrainte par l’ensemble des ressources dont dispose le scripteur.

Selon Kellog (1996, cité par Piolat, Olive & Farioli, 1996), le rédacteur, utilise, d’une part, un système de traitement à capacité limitée et, d’autre part, dispose de ressources attentionnelles limitées. Cette limite, qui consiste à l’incapacité de dépasser les ressources disponibles, conduit, par conséquent, à un nombre limité d’opérations cognitives. D’après Flower et Hayes (1980, cité par Piolat et al., 1996), le scripteur est « un penseur en état permanent de surcharge cognitive » obligé qu’il est de « jongler avec les contraintes » et les processus pour produire un texte écrit. Cette surcharge cognitive est particulièrement critique chez les apprenti-scripteurs (Garcia-Debanc, 1986). D’où l’unanimité des chercheurs dans le domaine à attribuer les difficultés des scripteurs en apprentissage à une très forte surcharge cognitive. Le rédacteur doit gérer son effort cognitif (ses capacités attentionnelles), et ce, en contrôlant stratégiquement le temps de réalisation des procédures rédactionnelles, tout en évitant d’activer simultanément les trois processus rédactionnels. Ces processus doivent, ainsi, être activés de façon sérielle (voir Piolat et al., 1996). En outre, il est efficace d’automatiser certains traitements, car un traitement «automatisé » est réalisé sans avoir recours à un contrôle conscient, ni à une attention soutenue (Piolat, 2004a). En revanche, un traitement délibéré voire non automatisé est coûteux en ressources attentionnelles. McCutchen (1996/1998) met l’accent sur le rôle que joue la MDT dans l’apprentissage de la gestion de la production écrite par les scripteurs en apprentissage. Elle précise que la maitrise de la production écrite passe par une gestion coordonnée de traitements automatisés et d’autres délibérés (très demandeurs en ressources mentales), comme ceux de la planification et de la révision. La MDT et ses fonctions de contrôle ont, selon Piolat (2004a), un rôle très important dans le développement même de la production écrite. Cette dernière est une activité cognitive complexe qui met en jeu trois niveaux de traitement, mobilisant, à leur tour, diverses connaissances et plusieurs processus.

Le premier niveau, c’est le niveau sémantique, il renvoie à la construction des représentations préverbales des idées à communiquer. Le deuxième, correspond à la mise en mots de ces représentations préverbales et de ces idées ; c’est le niveau linguistique. Le troisième niveau, enfin, concerne la transcription des représentations

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verbales ; il s’agit du niveau grapho-moteur. C’est la maitrise de chacun de ces niveaux en plus de leur gestion globale qui sont à l’origine de la grande complexité de l’apprentissage de la production écrite.

Les traitements impliqués dans chaque niveau mobilisent d’importantes ressources attentionnelles pour les scripteurs en apprentissage. D’où la nécessité d’entrainer ces derniers à automatiser certains niveaux (en particulier le niveau grapho-moteur) pour qu’ils puissent consacrer plus de ressources aux opérations complexes que sont la planification et la révision. Par ailleurs, un autre aspect doit également faire l’objet d’un apprentissage. Il s’agit de développer chez les apprentis-scripteurs des procédures métacognitives de gestion de l’ensemble de leur activité, ces procédures étant aussi exigeantes en ressources attentionnelles.