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1 Le territoire montagne et le développement

1.3 Le développement rural des montagnes : l'apport des sciences de gestion

1.3.1 Mise en valeur de la montagne

Nous allons nous intéresser à la valorisation des produits agroalimentaires de montagne dans le contexte du développement rural des zones de montagne, où la mise en évidence du territoire peut être vue comme une source de stratégie de différenciation. Une telle stratégie passerait par la quête de la singularisation de certaines dimensions appréciées des clients.

Il est clair que la consommation légitime le positionnement de différenciation d‟offre. De telles stratégies ont pour but de mettre en avant certains éléments qui sont chers aux consommateurs. Dans le cas de la perception des produits de montagne une étude qui approfondit leurs intérêts semble du moins nécessaire, puisque les références sur ce sujet sont rares jusqu‟à maintenant.

Nous partons d‟un parallèle entre produits de montagne et produits de terroir, où deux dimensions jouent un rôle majeur dans la perception des consommateurs : une dimension géographique liée aux spécificités plutôt physiques de l‟espace, et une dimension culturelle et historique, qui est en relation avec le développement des savoir-faire locaux (Bérard, Marchenay, 2007). Nous allons aussi nous intéresser au contexte de consommation et aux informations dont les consommateurs disposent à propos des produits de montagne car ce sont des éléments qui peuvent modifier les choix et les comportements d‟achat (Giraud, 2005).

Comme nous l‟avons déjà souligné, les études à propos du regard que portent les consommateurs vers le territoire montagne ne sont pas courants. D‟emblée, on pourrait s‟attendre à une perception plutôt positive, en ayant en tête la conception des produits de terroir. Mais en réalité, on ne connait pas les associations que les consommateurs sont capables de faire à partir de la référence d‟un territoire qu‟on appelle simplement « montagne ».

Nous soulignons qu‟il ne s‟agira pas d‟une étude marketing classique, nous avons l‟intention de connaître les perceptions et les attentes des consommateurs à l‟égard des produits de montagne. Il ne s‟agira pas non plus d‟une étude menée pour satisfaire le besoin d‟une entreprise particulière, mais d‟un ensemble de données qui peuvent servir de réflexion à différents acteurs sociaux et économiques de territoires montagnards.

De même, nous allons vers la recherche des acteurs qui s‟occupent de la production et distribution de certains produits de montagne, en mettant l‟accent sur leur localisation.

Il faut mobiliser un cadre analytique qui nous permet de comprendre les trajectoires, les choix des entreprises, puisqu‟il sera question de différentes structures de production. Nous avons, d‟un côté de petites unités caractérisées par la mise en œuvre d‟avancées technologiques importantes et d‟un autre côté, une transformation artisanale, mise en place par des fermiers qui se consacrent à la production de produits traditionnels dans un département situé en montagne.

Historiquement, les analyses stratégiques des entreprises prennent en compte la perspective de l‟entreprise, et leurs facteurs de succès sont attribués aux choix faits et à la façon dont l‟entreprise s‟organise. Toutefois, il est de plus en plus évident que les relations avec fournisseurs, partenaires, et d‟autres ressources dont disposent les entreprises, et qui peuvent influencer leurs performances, sont liées à la localisation. Or, si l‟évolution des technologies de communication et de transports, et la concurrence ont réduit les effets traditionnels de la géographie, paradoxalement, les avantages concurrentiels « les plus solides dans une économie mondiale, ont souvent un caractère fortement local et tiennent à la concentration des compétences » (Porter, 2004, p. 246).

En outre, alors que pendant longtemps, on a eu tendance à traiter des politiques économiques et politiques sociales en tant que disciplines à part entière, il est désormais évident, surtout quand on envisage le développement des zones défavorisées, qu‟il faut intégrer la dimension politique et la dimension économique dans l‟approche managériale (ibid.).

Bien que la vision classique de la rivalité entre concurrents ne soit pas au cœur de notre étude, nous jugeons que des considérations sur les stratégies de création de la valeur et du positionnement dans le marché sont un instrument pour améliorer les résultats des entreprises basées en montagne.

Selon l‟approche classique de Porter, les stratégies mises en œuvre par les entreprises visent un avantage concurrentiel sur le marché, de telles stratégies peuvent être atteintes par deux voies différentes : la domination ou la différentiation. Néanmoins et différemment du concept de Porter, on ne cherche pas exactement le leadership, mais plutôt à mettre en évidence un signe d‟origine auprès des consommateurs qui y sont sensibles, puisque la stratégie par différenciation « peut viser un large groupe de clients dans un secteur ou seulement un sous-ensemble de clients aux besoins particuliers » (Porter, 1999, p. 153).

Le territoire renvoie ici à l‟environnement au sens large, dans la mesure où l‟espace géographique est aussi un espace stratégique. Il permet de caractériser « certaines formes d‟identité territoriale, des structures institutionnelles, des modes réglementaires et la proximité physique des confrères », mais il « concerne [aussi] les relations stratégiquement fortes pour l‟entreprise sans pour cela être géographiquement proches » (Polge, 2008, p. 129).

Ainsi, le territoire de montagne sera traité dans notre travail en tant qu‟une localisation dont les particularités ont une influence sur les activités de transformation (voire production) alimentaire. Mais aussi, un lieu où les hommes nouent des relations, construisent des liens personnels, professionnels. La rencontre de ces deux proximités peut (ou non) contribuer à l‟amélioration des performances des entreprises.

D‟après cette révision bibliographique à propos des montagnes, de la légitimation de la montagne en tant qu‟unité d‟analyse et d‟action, de l‟importance de l‟activité primaire dans ces territoires et de la valorisation des produits alimentaires comme démarche pour dynamiser les activités économiques, nous pouvons aboutir à une problématique générale de recherche.