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1 Le territoire montagne et le développement

1.2 L'agriculture extensive source d'externalités positives en montagnes

1.2.2 La mention d'origine montagne en France

La Loi Montagne a été publiée le 9 Janvier 1985 en créant la dénomination « produit alimentaire de montagne » qui envisageait le développement des procédures de certification et d‟appellation pour les produits alimentaires issus des zones de montagne. Il faut souligner que le cas français était unique, ce qui signifie que la France était l‟unique pays membre de l‟Union européenne à avoir une telle mention valorisante.

Initialement, la dénomination montagne a été régie par l‟article 34 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne. Cet article précisait les conditions et les modalités selon lesquelles pouvaient être utilisés le terme « de montagne » et les références géographiques spécifiques aux zones de montagne.

Néanmoins, en 1997 la Loi a fait l‟objet d‟un arrêt par la Cour de Justice des Communautés européennes pour non conformité avec le Traité de Rome. « Dans un arrêt du 7 mai 1997, la Cour de Luxembourg a jugé que le dispositif issu de la loi du 9 janvier 1985 était en infraction avec le droit communautaire : elle a en effet considéré que la „dénomination montagne‟ ne pouvait être réservée aux seuls produits fabriqués sur le territoire national et élaborés à partir de matières premières nationales » (Amoudry, 2002, p. 135).

1.2.2.1 La nouvelle base législative

Il en a résulté l‟article 87 de la loi d‟orientation agricole du 9 juillet 1999 prévoyant que le terme « montagne » ne peut être utilisé pour les denrées alimentaires autres que les vins et pour les produits agricoles originaires de France, que s‟il a fait l‟objet d‟une autorisation administrative préalable. Et ces produits doivent avoir été élaborés dans les zones de montagne telles que définies par la réglementation communautaire.

En clair, l‟usage de l‟allégation « montagne » nécessite une instruction documentaire préalable. Les procédures et les conditions de délivrance de cette autorisation font l‟objet du décret du 15 décembre 2000 qui pose d‟importantes contraintes de localisation. Toutes les opérations liées à l'élaboration des produits (production, élevage, engraissement, abattage, fabrication, affinage et conditionnement) doivent être situées en

zone de montagne, de même que le lieu de provenance des matières premières entrant dans l‟alimentation des animaux ou dans la fabrication des denrées alimentaires.

Afin de se conformer à l‟arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes, la provenance des matières premières entrant dans la composition des produits ne peut pas être limitée aux seules zones de montagne françaises. Cette mesure vise à garantir la libre circulation de marchandises au niveau européen Ainsi, la Commission européenne a imposé la possibilité d‟utiliser des matières premières venant de zones de montagne européennes dans l‟élaboration des produits dits de montagne fabriqués en France.

Cependant, le décret stipule que les denrées alimentaires et les produits agricoles non alimentaires et non transformés, originaires d‟un autre Etat membre de l‟Union européenne sont dispensés d‟autorisation administrative pour utiliser le terme « montagne » (Amoudry, 2002).

L‟autorisation de porter le terme « montagne » est délivrée à une personne physique ou morale, ou à un groupement en général, par arrêté du préfet de région, après avoir l‟avis de la Commission régionale des produits alimentaires de qualité (CORPAQ). Le demandeur doit présenter un cahier des charges où il précise les méthodes de production et les moyens mobilisés pour garantir que le produit respecte les conditions ci-dessus mentionnées et qu‟il est bien originaire d‟une zone de montagne.

Cependant, le dispositif ne prévoit pas un contrôle par un organisme tiers, et il n‟y a pas un cahier spécifique par branche de production. Seulement en cas de produits portant également un label ou une certification de conformité, le demandeur devra fournir son cahier de charges homologué en précisant l‟organisme certificateur. L‟autorisation sera délivrée également après consultation de la CORPAQ et du préfet par arrêté préfectoral (ibid.).

En ce qui concerne les produits portant un AOC ou IGP, lorsque le terme montagne figure dans la dénomination enregistrée, les dispositions de la loi montagne modifiée ne s‟appliquent pas. Cela veut dire que pour ces produits, l‟utilisation du terme « montagne » est possible, mais elle s‟obtient dans le cadre des procédures de reconnaissance des AOC et d‟homologation des labels et des certifications de conformité avec IGP ou attestation de spécificité (Amoudry, 2002).

Dans le rapport publié par le Sénat sur la Loi Montagne en 2002, une des solutions envisagées pour maintenir un haut niveau de protection de la dénomination « montagne » consiste à engager une démarche au niveau européen visant à obtenir une protection

communautaire de cette dénomination. On souligne qu‟à l‟heure actuelle, il n‟existe aucune proposition de la part des Etats membres ou de la Commission européenne dans ce domaine (ibid.).

1.2.2.2 Le positionnement de la mention en tant que signe de qualité

La politique destinée à valoriser la production agroalimentaire de qualité est devenue particulièrement importante en Europe à partir des années 1980-1990. L‟orientation envisageait, d‟une part, d‟apporter aux consommateurs des garanties sur les produits, et, d‟autre part, de permettre le développement d‟une agriculture génératrice de valeur ajoutée, contribuant aussi au maintien des exploitations et de postes de travail. L‟intensification du développement de la politique de qualité a été marqué au niveau européen par la mise en place des règlements visant à mieux articuler les outils communautaires aux dispositifs de signes de qualité préexistants, comme par exemple l‟équivalence entre les notions d‟AOP (Appellation d‟origine protégée, plutôt utilisée en Europe) et AOC (Appellation d‟origine contrôlée, utilisée en France).

Cette politique de qualité a en effet été un des piliers des nouvelles orientations de la politique agricole commune dans le cadre de l‟Agenda 2000. « A partir de 1996, après la mise en place de tous ces instruments, la politique de qualité a connu un véritable essor, en France, et dans l‟Union européenne. Ce développement a concerné en France, tous les secteurs de production, et tous les signes de qualité » (Amoudry, 2002, p. 133).

Elle sert également comme un outil de segmentation de marchés, de valorisation des produits et d‟aménagement de territoire. Cependant, dans ce contexte une « nouvelle signalétique spécifique à la montagne » devrait être analysée avec précaution, car ajouter une catégorie supplémentaire aux signes de qualité déjà existants risque de brouiller le message passé aux consommateurs.

D‟après les spécialistes de la signalétique agricole, le dispositif « montagne » ne présente pas les mêmes caractéristiques que les autres signes officiels de qualité. « L‟encadrement de la dénomination « montagne » vise avant tout à garantir que l‟ensemble des étapes d‟élaboration du produit, y compris les matières premières utilisées et l‟alimentation des animaux sont situées en zone de montagne, ceci afin de favoriser la valorisation de la production agricole dans ces zones, et de lutter contre les utilisations infondées de cette dénomination » (Amoudry, 2002, p. 139).

L‟objectif n‟étant pas de fixer des conditions particulières d‟élevage, d‟alimentation, de choix des races, ou de transformation, le dispositif ne fixe aucune contrainte qualitative prédéterminée sur le produit « montagne ». Une démarcation par la qualité nécessiterait de faire appel à un autre signe spécifique ayant cette finalité. C‟est ce qui explique la raison par laquelle les modalités de contrôle des produits « montagne » soient allégées par rapport à celles d‟autres signes de qualité (ibid.).

Parallèlement à cela, la dénomination « montagne » évoque, pour les consommateurs, non seulement la provenance géographique du produit mais également les spécificités liées à cette même géographie : des composantes du sol, le faible degré d‟utilisation d‟azote dans les massifs, compte tenu du degré de „développement‟ des activités agricoles sur place. Ainsi, « encore faut-il que ce réflexe du consommateur puisse se fonder sur le respect de critères bien définis : la mission commune d‟information estime donc souhaitable de réfléchir à la possibilité de consolider la dénomination montagne par la définition de cahiers des charges fixant des contraintes qualitatives bien délimitées » (ibid., p. 140).

En outre, la loi montagne prévoyait une période de validité provisoire de 20 ans, charge au législateur de proposer un cadre plus définitif au terme de cette période probatoire. Aucun nouveau texte n‟ayant été adopté, ni même discuté, la loi montagne est tombée en désuétude en janvier 2005. Toutefois, on retrouve dans le marché des produits qui font toujours usage de cette mention : du miel, du fromage, des eaux de source en bouteille.

1.2.2.3 Le cas suisse

Par ailleurs la Suisse à légiféré sur la matière. Depuis le 1er janvier 2007, est rentrée en vigueur l‟Ordonnance sur les désignations « montagne » et « alpage » (ODMA) en Suisse. L‟Ordonnance règle l‟utilisation des désignations « montagne » et « alpage » pour les produits agricoles végétaux et animaux, et pour des produits agricoles végétaux et animaux transformés.

Selon le texte, les deux désignations en question ne peuvent être utilisées que si le produit est soumis à une certification, sauf en cas de vente directe des produits issus de l‟exploitation agricole, et également pour les produis transformés dans l‟exploitation.

La dénomination « montagne » peut être utilisée par les produits agricoles issus des zones définies comme étant de montagne par la législation suisse. Pour la transformation, il

y des cas particuliers. Le fromage, par exemple, lorsque qu‟il est seulement affiné hors montagne, lui aussi a également le droit de porter la dénomination.

Les fermes et agro-industries concernées doivent se soumettre à un contrôle, au minimum une fois tous les deux ans, par un organisme de certification. On souligne que cette ordonnance s‟applique uniquement aux produits fabriqués en Suisse7.

Avant de formuler la problématique générale de recherche, nous abordons la discussion de fond qui porte sur la contribution des sciences de gestion au débat sur le développement rural et précisément sur le développement des zones de montagnes.

1.3 Le développement rural des montagnes : l'apport des sciences de