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Mesures transverses invariantes par holonomie. Soit (M ,F ) une variété close feuilletée. Lorsque l’on a un bon atlas feuilleté pour F , nous avons naturellement un système dynamique : c’est l’ac- tion du preudogroupe d’holonomieP sur une transversale complète T . Nous disons, en suivant [Pl2], qu’une mesure de Borel finieµ sur T est invariante par un élément τ ∈ P si pour tout Borélien

A ⊂dom(τ), nous avons µ(τA) = µ(A). Une mesure transverse invariante par holonomie est une me-

sure finie surT qui est invariante par l’action de tout élément de P . Comme nous allons le voir dans la suite, l’existence d’une telle mesure est très rare.

Dans [Pl2], Plante donne une condition suffisante pour l’existence d’une mesure transverse inva- riante par holonomie : il suffit que la croissance de l’orbite d’un point par le pseudogroupe, ou c’est équivalent, que la croissance d’une boule dans une feuille, soit sous-exponentielle pour que l’adhé- rence de cette orbite (de cette feuille) supporte une mesure transverse invariante par holonomie.

Dans [BM], afin de prouver l’unique ergodicité des feuilletages stables et instables des flots d’Ano- sov topologiquement mélangeants, Bowen et Marcus introduisent une notion équivalente de mesure transverse qui est plus adaptée à la théorie des systèmes dynamiques. Soit (Ti)i ∈Iun système complet de transversales au feuilletageF , nous rappelons que cela signifie que toute feuille de F rencontre l’union des Ti. Dans ce contexte, une mesure transverse invariante est donnée par une famille (νi)i ∈I de mesures de Borel finies sur les transversales Ti vérifiant :

1. il existe i ∈ I tel que νi(Ti) > 0 ;

2. pour tout couple i , j ∈ I , s’il existe deux Boréliens Ai⊂ Ti et Aj⊂ Tj, ainsi qu’une transforma- tion d’holonomie hTi→ Tj définie entre deux ouverts de Ti, et Tjtels que hTi→ Tj(Ai) = Aj, alors

νi(Ai) = νj(Aj).

Nous aurons dans la suite à jongler entre ces deux différents points de vue. Avant de passer à l’étude des mesures quasi-invariantes, nous aimerions donner, avec preuve, un lemme dû à Bowen et Marcus, que nous généraliserons au paragraphe suivant, qui nous dit qu’à partir d’une famille de me- sures invariantes par holonomie sur un système complet de transversales, il est possible de construire une famille de mesures sur toutes les transversales locales (qu’on supposera ouvertes et relativement compactes), qui soit invariante par holonomie. Il s’agit du lemme 1.4 de [BM].

Lemme 1.3.1. Soit (Ti)i ∈I un système complet de transversales pour le feuilletageF . Alors l’applica-

tion :

est une bijection entre les familles de mesures sur toutes les transversales invariantes par transforma-

tions d’holonomie, et celles qui ne sont définies que sur le système complet (Ti)i ∈I.

Preuve. Il est suffisant de traiter le cas où les transversales Tisont associées à un bon atlas finiA pour F , et où toutes les transversales locales que l’on considère sont incluses dans au moins une carte de cet atlas. Supposons donc que l’on ait une famille de mesures (νi)i ∈I sur ces transversales invariantes par les transformations d’holonomies.

Soit alors T une petite transversale incluse dans une des cartes Ui de l’atlas. Il existe un ouvert

T0⊂ Ti, ainsi qu’un homéomorphisme hTi→ T: T0→ T qui associe à l’intersection d’une plaque T0∩ P

l’intersection T ∩ P. Nous pouvons donc définir la mesure νT = hTi→ T∗ νi sur T . Si S est une autre

transversale deF incluse dans Uitelle qu’il existe S0⊂ Tiet une application d’holonomie hTi→ S, avec

T0∩ S06= ;, il existe alors une application d’holonomie hT →Sdéfinie sur un petit ouvert de T . Nous avons alors par définition, en restriction au domaine de cette transformation, hSi→ S◦ h

−1

Ti→ T= hT →S

et on trouve que pour tout Borélien A inclus dans le domaine de cette transformation,νS(hT →SA) =

νi(hT−1i→ TA) = νT(A).

Il faut à présent prouver que cette définition est compatible avec les changements de carte. Par ce qui précède, nous aurons construit une famille de mesures sur toute transversale invariante par toute transformation d’holonomie. Supposons donc que la transversale T soit incluse dans l’intersection de deux cartes Uiet Uj. Puisque nous avons choisi un bon atlas, la composition h−1T

j→ T◦ hTi→ Test la

restriction à un petit ouvert de Tid’une transformation d’holonomieτi j. Soit A un Borélien apparte- nant à ce petit ouvert, et A0= hTi→ TA. Puisque par définition desνi,νj(τi jA) = νi(A), nous trouvons

νi(hT−1i→ TA0) = νj(hT−1j→ TA0), et la définition deνT que nous avions donnée est cohérente avec les

changements de cartes. ä

Mesures quasi-invariantes, et cocycle de Radon-Nikodym. Il n’existe pas en général de mesure transverse invariante par holonomie d’un feuilletageF . Nous sommes donc amenés à élargir nos études à ces mesures qui sont quasi-invariantes par le pseudogroupe d’holonomie : voir [MS] pour plus de détails sur la théorie des mesures transverses quasi-invariantes pour des actions de grou- poïdes.

Définition 1.3.2. Soit (M ,F ) une variété feuilletée, munie d’un bon atlas localement fini, ainsi que

d’une transversale complèteT . Alors une mesure de probabilité ν sur T est dite quasi-invariante par

holonomie si pour tout élémentτ ∈ P , et tout Borélien A ⊂dom(τ) tel que ν(A) = 0, on a encore ν(τA) =

0.

Associé à une mesure transverse quasi-invariante, nous pouvons associer un cocycle appelé co-

cycle de Radon-Nikodym, que nous pouvons définir pour un coupleτ ∈ P , et x ∈ but(τ) :

k(τ,x) =d [τ ∗ ν]

(x).

Nous allons citer un lemme que nous attribuons à Ghys, que nous utiliserons dans toute la suite, et qui nous permet d’éviter le problème éventuel de l’holonomie dans les feuilles. Ghys avait prouvé ce théorème dans [Gh], dans le cadres des mesures transverses associées aux mesures harmoniques : il lui servait à étendre les densités locales de ces mesures dans une feuille typique. C’est exactement cet usage que nous voulons généraliser dans cette thèse.

Lemme 1.3.3 (Ghys). Soit (M ,F ) une variété close feuilletée, munie d’un bon atlas localement fini,

Alors il existe un ensemble de BorelX0⊂ T de mesure pleine pour ν, et saturé par l’action du pseudo-

groupe d’holonomieP , tel que pour tout x ∈ X0et toutτ ∈ P fixant x, nous ayons :

d [τ ∗ ν] (x) = 1.

Preuve. Le cocycle de Radon-Nikodym d [τ ∗ ν]/dν, τ ∈ P nous premet de définir pour tout x dans le support deν un morphisme π1(Lx, x) →(0,∞), et nous voulons montrer que ce morphisme est trivial presque partout.

Pour cela, considérons un élémentτ ∈ P . Regardons l’ensemble Borélien des points x ∈ T fixés

parτ vérifiant d[τ∗ν]/dν(x) < 1. Par définition, cet ensemble est fixé par γ, et sa mesure est contrac-

tée parτ : il doit avoir une mesure égale à zéro. En considérant τ−1, nous pouvons prouver de même que l’ensemble des points x fixés parτ vérfiant d[τ ∗ ν]/dν(x) > 1 est de mesure zéro. En particulier, l’ensemble des points x fixés parτ tels que d[τ ∗ ν]/dν(x) 6= 1 est de mesure nulle pour ν.

Le pseudogroupeP est finiment engendré : il est en particulier dénombrable, et par la σ-additivité

deν, nous voyons que l’ensemble des points fixés par un élément du pseudogroupe P avec un Jaco-

bien 6= 1 est de mesure nulle pour ν : nous avons un X0comme dans le lemme : ne reste plus qu’à voir queX0est saturé par l’action du pseudogroupe.

Si x ∈ X0, alors, le groupe des germes des transformations d’holonomie fixant n’importe quel point de Lxest conjugué à celui des germes fixant x. Ainsi nous voyons que pour tout y ∈ Lx, etτ ∈ P fixant y, nous avons également d [τ∗ν]/dν(y) = 1 : X0est en particulier saturé parP et nous pouvons

conclure la preuve du lemme. ä

Une autre façon de comprendre le lemme de Ghys, est la suivante. Pourν-presque tout point

x ∈ T , et pour tout y ∈ P (x), nous avons, si τ1,τ2∈ P ont x dans leurs domaines et satisfont à τ1(x) =

τ2(x), alors : d [τ−1 1 ∗ ν] (x) = d [τ−1 2 ∗ ν] (x).

En d’autre termes, le cocycle de Radon-Nikodym est réellement un cocycle sur l’orbite de presque tout point par le pseudogroupe, et ne dépend pas réellement du chemin suivi reliant les deux points d’une même orbite.

Le problème de Radon-Nikodym consiste, étant donné un cocycle sur une orbite d’un point par le pseudogroupe d’holonomie, à reconnaître s’il s’agit ou non d’un cocycle de Radon-Nikodym : voir [AS, MS,K2, Sc]. Il est au cœur de la théorie des mesures de Gibbs, et des constructions de type Patterson-Sullivan (voir par exemple [Ha2,L1,Pa,PPS,Su1]). Dans cette thèse, une de nos motiva- tions, est de donner quelques cocycles de Radon-Nikodym intéressants, autres que ceux classique- ment donnés par les quotients de fonctions harmoniques.

Nous allons donner une autre façon de poser le problème, analogue à la façon dont Bowen et Marcus posent celui de l’existence, et de l’unicité, des mesures invariantes. SoitR la relation d’équi- valence : “appartenir à la même feuille”. Soit k :R →(0,∞) un cocycle mesurable : c’est-à-dire que l’on a la relation k(x, y)k(y, z) = k(x, z) pour tous x, y, z dans la même orbite de R. Soit (Ti)i ∈I un système complet de transversales àF . La question est alors celle de l’existence d’une famille de mesures de Borel finies (νi)i ∈I sur les transversales telles que pourνj-presque tout x ∈ Tj appartenant au but d’une application d’holonomie hTi→ Tj entre deux petits ouverts relativement compacts de Tiet Tj,

on ait :

d [hTi→ Tj∗ νi]

dνj (x) = k(x,h −1

Nous pouvons également demander d’avoir une famille de mesures définies sur toutes les trans- versales locales. Nous avons alors le lemme suivant qui est une généralisation du lemme1.3.1, et dont nous ferons usage dans la suite.

Lemme 1.3.4. Soit (Ti)i ∈I un système complet de transversales pour le feuilletageF . Alors l’applica-

tion :

(νT)T t r ansver sal e7−→ (νTi)i ∈I

est une bijection entre les familles de mesures sur toutes les transversales quasi-invariantes satisfaisant

la relation de cocycle (1.3.7), et celles qui ne sont définies que sur le système complet (Ti)i ∈I.

Nous ne prouvons pas ce lemme, dont la démonstration est une généralisation immédiate de celle du lemme1.3.1.

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Métriques feuilletées et flot géodésique feuilleté